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02/02/2016 | FRANCE | N°15PA01608

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 02 février 2016, 15PA01608


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1404660/3 du 20 novembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces complémentaires enregi

strées respectivement les 16 avril 2015 et 15 janvier 2016, M. B..., représenté par Me d'Allivy...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2014 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1404660/3 du 20 novembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées respectivement les 16 avril 2015 et 15 janvier 2016, M. B..., représenté par Me d'Allivy Kelly, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404660/3 du 20 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2014 contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, l'autorisant à travailler, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- l'erreur d'adresse de l'avis d'audience commise par le greffe du tribunal administratif a directement fait grief au requérant dès lors que, du fait de cette erreur, il a dû produire une note en délibéré que les premiers juges n'ont pas prise en considération ;

Sur le bien fondé du jugement :

- le préfet a entaché la décision attaquée d'erreur de fait dès lors qu'il a considéré que l'intéressé était entré en France en 2005 et non en 2008 ;

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée méconnaît l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 27 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,

- et les observations de Me D'Allivy Kelly, avocat de M. B....

Une note en délibéré, enregistrée le 25 janvier 2016, a été présentée pour M. B....

1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien, né le 30 juillet 1978 à Sousse, entré en France en 2008 selon ses déclarations, a sollicité son admission au séjour ; que, par un arrêté du 27 janvier 2014, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande et a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination ; que, par une requête enregistrée à la Cour le 16 avril 2015, M. B... relève appel du jugement n° 1404660/3 du 20 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / (...) L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience (...) " ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une erreur d'adresse commise par le tribunal, M. B... n'a reçu l'avis d'audience, daté du 22 septembre 2014, que le 8 octobre 2014, soit sept jours francs avant la tenue de celle-ci le jeudi 16 octobre 2014 ; qu'il soutient que cette erreur lui a porté préjudice dès lors qu'il n'a pu préparer correctement sa défense et que le report d'audience qu'il a sollicité lui a été refusé ; que, néanmoins, en l'espèce, M. B... bénéficiait de la possibilité de présenter des observations orales devant le tribunal administratif ou une note en délibéré qu'il a d'ailleurs produite le 28 octobre 2014 ; qu'en outre, le délai de sept jours francs entre la réception de l'avis d'audience et la tenue de celle-ci le 16 octobre 2014 respecte les prescriptions de l'article R. 711-2 du code de justice administrative précitées ; que, par suite, l'erreur d'adresse commise par le Tribunal administratif de Melun ayant entraîné un retard dans la réception par l'intéressé de l'avis d'audience ne lui a pas porté préjudice et, notamment, n'a pas porté atteinte à ses droits de la défense ;

4. Considérant, d'autre part, que lorsque le juge administratif est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du rapporteur public, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il lui appartient dans tous les cas d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ; que, s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire à peine d'irrégularité de sa décision que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ;

5. Considérant que la note en délibéré que M. B... a produite le 28 octobre 2014, après l'audience mais avant la lecture de la décision, a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Melun et versée au dossier ; que cette note en délibéré, par laquelle le requérant se borne à préciser certains faits allégués dans sa requête et à produire des pièces à l'appui de ces allégations concernant notamment sa situation professionnelle, ne contenait ni l'exposé d'une circonstance de fait dont M. B... n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, ni d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devait relever d'office ; qu'il n'est pas démontré que les juges du tribunal administratif n'auraient pas pris connaissance de cette note, qui est d'ailleurs visée par le jugement attaqué ; que, par suite, le tribunal n'était pas tenu de prendre en considération les observations présentées après la clôture de l'instruction et, en conséquence, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans cette note ; qu'il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier faute pour les premiers juges de ne pas avoir pris sa note en délibéré en considération ;

Sur le bien fondé du jugement :

6. Considérant que M. B... soutient que le préfet a entaché l'arrêté attaqué d'erreur de fait dès lors qu'ayant considéré à tort qu'il était entré en France en 2005 et non en 2008, il a apprécié les preuves de la présence en France à compter de l'année 2005 ; que, toutefois, cette erreur, qui doit être regardée comme une simple erreur de plume, n'a pu porter un quelconque préjudice au requérant pour l'appréciation de la durée de sa présence en France, laquelle était en tout état de cause largement insuffisante pour ouvrir droit à régularisation ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., célibataire et sans charge de famille en France, ne fait pas état d'une intégration particulière sur le territoire français ; qu'il n'a travaillé que de février à décembre 2011 en qualité de plombier depuis son arrivée alléguée en 2008 ; que la circonstance que sa soeur et des cousins résident régulièrement en France, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans, n'est pas de nature à démontrer que ses intérêts privés sont essentiellement en France ; que, dans ces conditions, c'est sans méconnaître les dispositions précitées, ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation, que le préfet du Val-de-Marne a pu refuser de lui délivrer un titre de séjour et l'obliger à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; qu'il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée ; que dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord ; que toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 et alors que la promesse d'embauche dont M. B... se prévaut est, en tout état de cause, postérieure à l'arrêté en litige, que l'intéressé ne justifie ni de considérations humanitaires, ni de motifs exceptionnels qui seraient de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour ; que, par suite, c'est à juste titre que le préfet du Val- de-Marne a refusé de régulariser la situation de M. B... au titre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 2 février 2016.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01608


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : D'ALLIVY KELLY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Date de la décision : 02/02/2016
Date de l'import : 12/02/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15PA01608
Numéro NOR : CETATEXT000031977809 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-02;15pa01608 ?
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