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22/03/2017 | FRANCE | N°15PA00675

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 22 mars 2017, 15PA00675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société S11Q Industries a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du ministre du budget du 12 juillet 2013 refusant de lui octroyer l'agrément prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts.

Par un jugement n° 1315070/1-3 du 19 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 13 février 2015 et
r>22 juin 2016, la société S11Q Industries, représentée par Me Charpentier-Stoloff, demande à la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société S11Q Industries a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du ministre du budget du 12 juillet 2013 refusant de lui octroyer l'agrément prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts.

Par un jugement n° 1315070/1-3 du 19 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 13 février 2015 et

22 juin 2016, la société S11Q Industries, représentée par Me Charpentier-Stoloff, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1315070/1-3 du 19 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;[Conseil1]

2°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration ne dispose pas de pouvoir discrétionnaire pour refuser l'agrément, mais doit l'accorder dès lors que les conditions requises par l'article 199 undecies B du code général des impôts sont remplies, ce qui était le cas en l'espèce puisque l'intérêt économique de l'investissement, qui doit s'apprécier au niveau du département de la Réunion et non comme l'a fait l'administration, au niveau de l'entreprise, est avéré ;

- la société s'est conformée aux exigences de l'article 217 undecies du code général des impôts puisqu'elle a parfaitement informé les investisseurs et les tiers sur le risque qu'ils encouraient ;

- le refus d'agrément doit donc être annulé et cette annulation aura pour conséquence l'obtention d'un agrément ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2016, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Par ordonnance du 23 septembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au

10 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Appèche, président,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me A... substituant Me Charpentier-Stoloff, avocat de la société S11Q Industries ;

1. Considérant que la société S11Q Industries, qui a procédé à l'acquisition de cinq autobus qu'elle a mis en location auprès d'une société exploitant, avec d'autres opérateurs réunis dans un groupement, le réseau de transports publics de la communauté intercommunale du nord de la Réunion, a demandé en vain au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du

12 juillet 2013 par laquelle le ministre chargé du budget a rejeté sa demande tendant au bénéfice de l'agrément prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, nécessaire pour faire bénéficier ses associés, au titre de cet investissement, de la réduction d'impôt prévue par les mêmes dispositions ; qu'elle relève régulièrement appel du jugement n° 1315070/1-3 du 19 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

2. Considérant que l'article 199 undecies B du code général des impôts dispose : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique, dans les conditions prévues au vingt-sixième alinéa, aux investissements réalisés par une société soumise de plein droit à l'impôt sur les sociétés dont les actions sont détenues intégralement et directement par des contribuables, personnes physiques, domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société. L'application de cette disposition est subordonnée au respect des conditions suivantes : / 1° Les investissements ont reçu un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues au III de l'article 217 undecies (...) " ; qu'aux termes de ce dernier article : " III.-1. Pour ouvrir droit à déduction, les investissements mentionnés au I réalisés dans les secteurs des transports (...) ou qui sont nécessaires à l'exploitation d'une concession de service public local à caractère industriel et commercial doivent avoir reçu l'agrément préalable du ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de l'outre-mer. L'organe exécutif des collectivités d'outre-mer compétentes à titre principal en matière de développement économique est tenu informé des opérations dont la réalisation le concerne. / L'agrément est délivré lorsque l'investissement : / a) Présente un intérêt économique pour le département dans lequel il est réalisé ; il ne doit pas porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou constituer une menace contre l'ordre public ou laisser présumer l'existence de blanchiment d'argent ; / (...) d) Garantit la protection des investisseurs et des tiers " ;

3. Considérant, en premier lieu, et d'une part, que contrairement à ce que soutient la société requérante, le ministre chargé du budget a bien motivé sa décision par l'absence d'intérêt économique de l'investissement de la société S11Q Industries pour le département de la Réunion, et ne s'est pas borné à apprécier l'intérêt que présentait cet investissement pour l'entreprise

exploitante ; qu'en effet, il ressort des termes même de la décision litigieuse, que si son auteur relève l'absence de perspectives de développement économique de la société locataire des autocars en cause dont les comptes prévisionnels pour la période 2013-2018 révélaient une diminution continue du résultat d'exploitation et prévoyaient un déficit d'exploitation pour les années 2017 et 2018, l'investissement envisagé n'apparaissant ainsi pas économiquement justifié au niveau de cette entreprise, il se fonde aussi sur l'absence d'extension et d'amélioration du service de transports publics dans ce département attendues dudit investissement ; qu' à cet égard, le ministre retient, dans sa décision, que cette entreprise n'avait pas de pouvoir décisionnel sur les dessertes de transports publics, déterminées par la collectivité concédante et qu'il n'était allégué ni qu'un accroissement de celles-ci avait été décidé, ni que les autocars, que devaient remplacer ceux acquis par la société S11Q Industries, étaient vétustes et hors d'état de circuler, l'investissement envisagé n'apparaissant dès lors pas davantage économiquement justifié au niveau du service public local de transports en commun ; que la société S11Q Industries n'est pas fondée à soutenir que le motif susanalysé de refus de l'agrément serait entaché d'une erreur de droit ;

4. Considérant, d'autre part, qu'en se bornant à faire état de ce que la ville de Saint-Denis avait engagé dès 1996, soit sept ans avant la décision de refus d'agrément en litige, un projet de modernisation de ses transports publics dans le but de désengorger le trafic routier, et à alléguer que ce programme se poursuivrait sans assortir cette allégation de précision et de justificatifs, et sans indiquer comment l'investissement objet de l'agrément s'inscrivait dans ce projet, et quelles en seraient les retombées économiques pour le département de la Réunion, la société S11Q Industries n'invalide pas le motifs susanalysé tiré de l'absence d'intérêt économique avéré pour le département de ce projet de renouvellement d'une flotte constituée de cinq autobus ; qu'en effet, l'investissement en cause ne devait entraîner aucune augmentation du nombre de passagers transportés ni aucune extension du réseau de transports en commun, et il n'est ni démontré ni même allégué que les autobus en cours d'exploitation n'auraient plus été en état d'assurer la desserte de passagers ; que si la société S11Q Industries soutient, en outre, que le recours à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts permettrait de réduire les coûts d'exploitation et de revoir à la baisse des tarif appliqués aux usagers du réseau de transport par la communauté intercommunale du Nord de la Réunion (CINOR), cette circonstance, au demeurant non établie, ne saurait suffire à démontrer l'existence d'un intérêt économique pour le département de la Réunion de nature à justifier l'octroi de l'agrément en cause, pas plus que la circonstance alléguée mais pas davantage étayée, que l'investissement aurait conduit à la création de cinq emplois ou celle que l'aide fiscale aurait pu avoir un effet incitatif sur les investissements réalisés ; que, par suite, le motif tiré de l'absence d'intérêt économique de l'investissement en cause pour le département de la Réunion suffisait, à lui seul, à justifier légalement le refus d'octroi de l'agrément sollicité par la société requérante ;

5. Considérant, en second lieu et au surplus, que la décision attaquée est également motivée par l'absence de garantie de protection des investisseurs et des tiers ; qu'en effet, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la délégation de service public exploitée en groupement par la société locataire et qui constitue l'activité exclusive de celle-ci, expire le 31 mars 2015 et pourra alors, après mise en concurrence, être confiée par l'autorité délégante à un autre concessionnaire ; que compte-tenu des conditions d'exécution et de renouvellement de ce contrat, la société locataire des autobus en cause n'est assurée ni de ce que les autres sociétés du groupement, sans lesquels elle n'allègue pas être en mesure d'exécuter le marché, voudront s'associer avec elle à nouveau, ni de ce qu'elle sera à nouveau choisie par l'autorité concédante ; que si cette dernière est contractuellement tenue, en cas de non-reconduction de la délégation de service public, de reprendre les biens nécessaires à l'exploitation et de se substituer au délégataire dans ses obligations, notamment vis-à-vis des organismes de financement, les associés de la société S11Q Industries n'en verraient pas moins remis en cause la réduction d'impôt en vue de laquelle ils ont réalisé cet investissement, les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts faisant obstacle à ce que le bien productif au titre duquel la réduction d'impôt est pratiquée soit mis à disposition d'une personne publique ; que la circonstance que l'agrément aurait été accordé pour des investissements similaires au titre d'années antérieures n'est, à la supposer établie, pas de nature à établir l'existence de garanties pour les investisseurs ; que si la société requérante soutient avoir informé les " investisseurs fiscaux " du risque que présentait sa situation au regard de l'évolution de son chiffre d'affaires, et indiqué un chiffre d'affaires prévisionnel en baisse et un résultat d'exploitation en diminution sur les années 2013-2018 et déficitaire sur les années 2017-2018, cette seule information ne pouvait suffire à garantir la protection des investisseurs en l'absence, notamment, d'éléments apportés par la société requérante pour étayer ses allégations sur la probabilité de la reconduction du contrat la liant à la communauté intercommunale du nord de la Réunion ; que par suite, le ministre chargé du budget était également fondé à regarder l'investissement envisagé comme ne présentant pas des garanties suffisantes de protection des investisseurs et des tiers ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société S11Q Industries n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions à fin d'annulation présentées devant la Cour par la société S11Q Industries doivent, par suite, être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, de celles présentées par elle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société S11Q Industries est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à la société S11Q Industries et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mars 2017.

Le président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHEL'assesseur le plus ancien,

M. Magnard

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[Conseil1]Il n'y a pas de conclusions d'appel autre que l'annulation du jugement...

2

N° 15PA00675


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00675
Date de la décision : 22/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : CHARPENTIER-STOLOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-22;15pa00675 ?
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