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20/01/2011 | FRANCE | N°08VE04146

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 20 janvier 2011, 08VE04146


Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 2008 au greffe de la Cour administrative de Versailles, sous le n° 08VE04146, et le mémoire complémentaire enregistré le 28 août 2009, présentés pour Mme Régine A, demeurant ..., par la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0510182 du 21 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Tremblay-en-Fra

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Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 2008 au greffe de la Cour administrative de Versailles, sous le n° 08VE04146, et le mémoire complémentaire enregistré le 28 août 2009, présentés pour Mme Régine A, demeurant ..., par la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0510182 du 21 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Tremblay-en-France en date du 19 septembre 2005 supprimant, à compter du 1er décembre 2005, le poste de médecin-directeur du centre municipal de santé Françoise Dolto, à l'annulation des décisions des 26 septembre, 21 octobre 2005 et 8 novembre 2005 du maire de Tremblay-en-France prononçant son licenciement et à la condamnation de la commune de Tremblay-en-France à lui verser une indemnité de 112 149,79 euros, au titre du licenciement, du préavis et des congés payés non pris ainsi qu'une indemnité de 25 870 euros, en réparation du préjudice subi du fait de ce licenciement illégal ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susvisées et de condamner la commune de Tremblay-en-France à lui verser les sommes susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Tremblay-en-France la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué est irrégulier, d'une part, en ce qu'il ne mentionne pas dans les visas le mémoire enregistré au greffe du tribunal le 2 octobre 2008 et, d'autre part, en ce qu'il est insuffisamment motivé ; que la lettre de licenciement est elle aussi insuffisamment motivée, d'une part, en ce qu'elle ne fait pas apparaître les droits à congé restant à courir et, d'autre part, en ce qu'elle ne précise pas le motif pour lequel il est mis fin aux consultations pédiatriques ; que le licenciement est illégal en ce qu'il est intervenu pendant un arrêt de travail causé par un accident de service et qu'il ne respecte pas le délai de préavis de deux mois ; que la réorganisation du service alléguée pour le justifier n'est pas établie ; qu'ayant été pris en considération de sa personne et constituant une sanction déguisée, il est entaché d'un détournement de procédure ; que la commune devait faire application, pour déterminer les droits de préavis et d'indemnité, des stipulations du contrat de travail et non de celles du décret du 15 février 1988 ; qu'elle s'est abstenue d'informer la requérante des dispositions applicables à son contrat, méconnaissant ainsi la directive CEE 91/533 du 14 octobre 1991 ; qu'en tout état de cause, ces stipulations, en tant qu'elles concernaient la durée du préavis, n'étaient pas contraires au décret en question ; que les indemnités de licenciement n'ont pas été calculées conformément aux dispositions de ce décret, à les supposer applicables ; que ce licenciement illégal a causé un préjudice économique, moral et professionnel dont Mme A est fondée à demander réparation ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 91/533/CEE du 14 octobre 1991 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2011 :

- le rapport de M. Demouveaux, président assesseur,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de Mme A et de Me Derridj, substituant Me Péru, pour la commune du Tremblay-en-France ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 janvier 2011, présentée pour Mme A par la SCP Hélène Didier et François Pinet ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que l'article R. 741-2 du code de justice administrative dispose que la décision contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ;

Considérant que les demandes présentées pour Mme A, enregistrées au greffe du tribunal administratif sous les numéros n° 0510182, 0601239, 061740 et 0714133, ont été jointes par le jugement attaqué ; qu'à la suite d'une erreur matérielle, le mémoire présenté par Mme A, à l'appui des demandes n° 0601239 et 061740, n'a pas été mentionné dans les visas de ce jugement ; que cette omission ne constitue toutefois pas, dans les circonstances de l'espèce, une irrégularité substantielle, dès lors que le mémoire en question, qui a été produit, en termes identiques dans les quatre requêtes que le tribunal a jointes pour y statuer par un seul jugement, se borne à ajouter des arguments nouveaux à l'appui des moyens précédemment soulevés, tirés de l'inexécution de l'article 10 du contrat de travail liant Mme A à la commune et du défaut de reclassement de l'intéressée, et que les premiers juges ont analysé ces moyens pour y répondre expressément et précisément dans les motifs de leur jugement ; que les conclusions à fin d'injonction que comportait ce mémoire ont également été visées par les premiers juges ;

Considérant, en second lieu, que, pour écarter le moyen tiré de ce que le licenciement de Mme A n'était pas intervenu pour l'intérêt du service, les premiers juges ont fait valoir que la suppression du poste occupé par celle-ci a été décidée dans le cadre d'un réorganisation du service ; qu'ils n'ont pas procédé par simple affirmation mais ont exposé avec précision les éléments de fait, d'ailleurs contestés point par point par la requérante, qui les ont conduit à cette analyse ; qu'ainsi leur jugement est suffisamment motivé ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

Considérant, en premier lieu que, contrairement à ce que soutient Mme A, la décision en date du 26 septembre 2005 lui signifiant son licenciement contenait tous les éléments de droit et de fait qui la motivaient ; qu'elle faisait part notamment à l'intéressée du motif de son licenciement, à savoir la fermeture du centre municipal Françoise Dolto et la suppression du poste de directrice qu'elle y occupait, ainsi que de la date à laquelle, conformément aux dispositions de l'article 42 du décret du 15 février 1988 susvisé, ce licenciement prendrait effet ; qu'il n'avait pas alors été mis fin aux consultations pédiatriques également assurées par la requérante ; que la commune n'avait donc pas à motiver de décision sur ce point ; qu'elle n'avait pas non plus, en l'absence de litige sur ce point, à lui indiquer dans la même lettre le nombre de jours de congé qui lui resterait à courir à l'issue de sa période de préavis ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante a été recrutée par contrat le 24 juin 1988 pour assurer la direction du centre municipal de santé Françoise Dolto à Tremblay-en-France et y assurer des consultations pédiatriques ; qu'en 2005, la commune a décidé de créer un nouvel établissement regroupant l'ensemble de son secteur santé et d'en confier la direction à un médecin-directeur municipal de la santé ; que, dans le cadre de cette réorganisation, le conseil municipal de la commune a, par délibération du 19 septembre 2005, d'une part, décidé la fermeture du centre municipal de santé Françoise Dolto et, d'autre part, supprimé le poste de Mme A ; que, par suite, celle-ci, dont la mission, telle qu'assignée par son contrat de travail, a effectivement pris fin, n'est pas fondée à soutenir que la décision de la licencier n'était pas justifiée par l'intérêt du service ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A a manifesté dès 2001 son opposition à la réorganisation du service de santé de la commune ; qu'à supposer qu'il existe un lien de causalité entre ce comportement et le fait qu'il n'ait pas été proposé à l'intéressée un autre poste au sein de la nouvelle organisation, le maire n'était en tout état de cause pas tenu d'examiner les possibilités de reclassement de Mme A avant de procéder à son licenciement ; qu'il n'a pas, en ne procédant pas à cet examen, donné un caractère disciplinaire au licenciement en question ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aucune disposition de nature législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, n'interdit de licencier, en raison d'une réorganisation du service, un agent public placé en arrêt de travail du fait d'un accident de service ;

Considérant, en cinquième lieu, que l'administration a respecté le préavis de deux mois exigé par la combinaison des articles 38 et 40 du décret susvisé du 15 février 1988, sans qu'importe la circonstance que la date de ce préavis aurait empêché Mme A de prendre l'intégralité des congés payés auxquels elle avait droit ;

Considérant, en sixième lieu, que la circonstance, pour regrettable qu'elle soit, que la commune de Tremblay-en-France n'ait pas respecté les objectifs de la directive susvisée du 4 octobre 1991, en n'informant pas la requérante de ce que les dispositions du décret susvisé du 15 septembre 1988 s'appliquaient normalement à elle ni ne lui ait proposé la modification de son contrat afin de le rendre conforme à ces dispositions, est sans incidence sur la légalité du licenciement litigieux ;

Considérant, en septième lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur les indemnités dues en raison du licenciement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 du décret susvisé du 15 février 1988 : A la fin d'un contrat à durée déterminée ou en cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, l'agent qui, du fait de l'administration, n'a pu bénéficier de tout ou partie de ses congés annuels a droit à une indemnité compensatrice. ; que Mme A a perçu au titre de ces dispositions une indemnité de 132 euros ; que si elle conteste le montant de cette indemnité, elle n'établit pas que 7 jours de congés annuels accordés mais non pris lui seraient restés dus ni que c'est du fait de l'administration qu'elle aurait été empêchée d'en bénéficier ; que, par suite, elle n'est pas fondée à demander la condamnation de la commune à lui verser une somme supplémentaire de 792 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'article 11 du contrat de travail la liant à la commune que Mme A a été recrutée pour effectuer un nombre d'heures équivalant à 75 heures par mois avec un maximum de 110 heures à la demande des deux parties ; qu'il n'est pas établi ni même allégué qu'elle n'aurait effectué à partir de cette durée de base qu'un service à temps partiel ; que par suite la commune a fait une exacte application des dispositions précitées en calculant l'indemnité de licenciement due à la requérante sur la base de la dernière rémunération effectivement perçue par elle ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que les stipulations de l'article 10 du contrat de Mme A, relatives à la durée du préavis, ne sont pas conformes aux dispositions des articles 39 et 40 du décret susvisé du 15 février 1988 ; que par suite, et alors même que Mme A n'avait pas été tenue informée de cette situation, elle ne peut revendiquer l'application d'une clause de son contrat illégale dès l'origine et demander le versement d'une indemnité représentative de la perte de rémunération résultant de ce que la commune lui a imposé, dans le respect des dispositions légales et règlementaires s'appliquant à elle, une durée de préavis égale à deux mois ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la commune de Tremblay-en-France n'a commis envers Mme A aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; que par suite les conclusions de celle-ci tendant à la réparation du préjudice moral et de réputation qu'elle estime avoir subi du fait de son licenciement ne peuvent, à supposer ce préjudice établi, qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se rapporter aux observations en défense présentées par la commune du Tremblay-en France le 31 décembre 2010 et auxquelles Mme A n'a pas pu répondre, que celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à sa charge et au profit de la commune de Tremblay-en-France la somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Mme A versera à la commune de Tremblay-en-France, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros.

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N° 08VE04146 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE04146
Date de la décision : 20/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. HAÏM
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre DEMOUVEAUX
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : SCP HÉLÈNE DIDIER ET FRANCOIS PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-01-20;08ve04146 ?
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