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30/04/2014 | FRANCE | N°13VE02028

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 30 avril 2014, 13VE02028


Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2013, présentée pour la COMMUNE DE MONTREUIL, par Me Guillot, avocat ; la COMMUNE DE MONTREUIL demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1206713 en date du 18 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 3 août 2012 par lequel le maire de Montreuil a accordé à la COMMUNE DE MONTREUIL un permis de construire à titre précaire pour une durée de cinq ans ;

2° de rejeter la demande de première instance présentée par Mme C... D...et Mme E... A... ;

3° de mettre à la charge de

Mme C... D...et Mme E... A..., prises solidairement, la somme de 3 000 euros en applica...

Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2013, présentée pour la COMMUNE DE MONTREUIL, par Me Guillot, avocat ; la COMMUNE DE MONTREUIL demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1206713 en date du 18 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 3 août 2012 par lequel le maire de Montreuil a accordé à la COMMUNE DE MONTREUIL un permis de construire à titre précaire pour une durée de cinq ans ;

2° de rejeter la demande de première instance présentée par Mme C... D...et Mme E... A... ;

3° de mettre à la charge de Mme C... D...et Mme E... A..., prises solidairement, la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en considérant que la combinaison des articles L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales et R. 423-1 du code de l'urbanisme imposait au maire d'avoir été expressément autorisé par le conseil municipal pour déposer une demande de permis de construire, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; depuis le 1er octobre 2007, les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire de ce qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme ; la jurisprudence antérieure concernant l'application de l'ancien article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme n'est plus applicable ; en tout état de cause, le conseil municipal a nécessairement autorisé le maire à déposer une demande de permis de construire par la délibération du 28 juin 2012 par laquelle il a approuvé la convention de mise à disposition consentie par l'établissement public foncier d'Ile-de-France à la commune d'un terrain sis 187 bis, rue Edouard Branly, les travaux autorisés par le permis de construire litigieux étant indissociables du projet d'ensemble d'installation du site d'accueil provisoire autorisé par ladite délibération ; enfin, le dossier de demande du permis de construire modificatif délivré le 18 janvier 2013 comportait une délibération du conseil municipal du 25 octobre 2012 portant sur le projet d'aménagement du terrain sis 187 bis, rue Edouard Branly et autorisant le maire à signer les autorisations d'urbanisme nécessaires à la réalisation du projet ; en tout état de cause, quand bien même le maire aurait déposé le permis de construire sans avoir été expressément autorisé par le conseil municipal, ce vice de procédure, dans les circonstances de l'espèce et eu égard à l'accord du conseil municipal quant au projet d'installation d'un site d'accueil provisoire sur le terrain sis 187 bis, rue Edouard Branly, n'a pas privé les conseillers municipaux, ainsi informés, d'une garantie et ne peut ainsi être regardé comme un vice substantiel entachant d'irrégularité la procédure suivie ;

- en estimant que les travaux envisagés devaient faire l'objet d'un permis d'aménager, et non d'un permis de construire précaire, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; l'article L. 444-1 du code de l'urbanisme régissant l'installation de caravanes constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs est inapplicable en l'espèce faute de décret d'application ; les constructions envisagées entrent dans le champ du permis de construire précaire ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2014, présenté pour Mme C... D...et Mme E... A...par Me Ragot, avocat, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé et, en outre, à ce que la COMMUNE DE MONTREUIL verse à Mmes D...et A...la somme de 2 500 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 26 mars 2014, présenté pour la COMMUNE DE MONTREUIL, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens que précédemment ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 7 avril 2014, présenté pour Mme D... et Mme A..., qui concluent aux mêmes fins que leur précédent mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2014 :

- le rapport de M. Luben, président-assesseur,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour la COMMUNE DE MONTREUIL et de Me Ragot pour Mmes D...et A...;

Sur la légalité du permis de construire litigieux :

1. Considérant que, par convention signée le 28 juin 2012, l'Etablissement public foncier d'Ile-de-France a mis à disposition de la COMMUNE DE MONTREUIL un terrain situé 187 bis, rue Edouard Branly à Montreuil, afin d'y installer un site d'accueil provisoire destiné aux populations fragiles ; qu'à cette fin, le maire de la commune a, par arrêté du 3 août 2012, délivré un permis de construire à cette dernière pour une durée de cinq ans, afin d'effectuer des travaux de transformation des bâtiments existants à destination industrielle et d'y créer une cuisine collective, cinq blocs sanitaires préfabriqués comprenant douche et toilettes, un logement de gardien, un local à poubelles, une porte d'accès aux piétons et neuf coffrets électriques de raccordement ; qu'un permis de construire modificatif a été délivré le 18 janvier 2013 ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et les opérations immobilières effectuées par la commune, (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées qu'un maire ne peut solliciter une demande d'autorisation d'urbanisme au nom de sa commune sans y avoir été expressément autorisé par le conseil municipal, par une délibération dont il appartient au juge administratif de vérifier l'existence et de connaître de sa légalité, par la voie de l'exception, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges ;

3. Considérant que lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ;

4. Considérant qu'il est constant que la demande de permis initial n'a pas été précédée d'une délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE MONTREUIL en vue d'autoriser son maire à déposer ladite demande, en dépit de la mention, dans la délibération du 28 juin 2012 approuvant la convention de mise à disposition par l'établissement public foncier d'Ile-de-France du terrain d'assiette de l'opération projetée, de l'objet de celle-ci, à savoir l'installation " d'un site d'accueil provisoire pour des populations fragiles " ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal, " considérant que l'aménagement du site d'accueil provisoire pour des populations fragiles nécessite une autorisation relevant du droit des sols ", a autorisé par délibération en date du 25 octobre 2012 le maire à " signer les autorisations administratives nécessaires au projet d'aménagement du terrain " ; que, par cette délibération, le conseil municipal a de manière claire et non équivoque autorisé le maire à déposer la demande de permis de construire nécessaire au projet d'aménagement du terrain ; que le permis de construire modificatif délivré 18 janvier 2013 vise ladite délibération ; qu'il avait ainsi non seulement pour objet d'autoriser les modifications portant sur l'implantation de cinq blocs sanitaires à caractère préfabriqué, la transformation d'un entrepôt en laverie commune et l'aspect extérieur, mais également de régulariser le défaut d'autorisation du conseil municipal qui entachait d'irrégularité le permis de construire initial ; que la légalité du permis de construire délivré à la COMMUNE DE MONTREUIL doit être appréciée en tenant compte des modifications apportées à l'arrêté du 3 août 2012 par cet arrêté du 18 janvier 2013 ; que, par suite, c'est à tort que le jugement attaqué a considéré que les dispositions précitées avaient été méconnues et que le permis de construire était entaché d'un vice d'incompétence ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 444-1 du code de l'urbanisme : " L'aménagement de terrains bâtis ou non bâtis pour permettre l'installation de caravanes constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs est soumis, selon la capacité d'accueil de ces terrains, à permis d'aménager ou à déclaration préalable. Ces terrains doivent être situés dans des secteurs constructibles. " ; qu'aux termes de l'article R. 421-19 du même code : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : (...) c) La création ou l'agrandissement d'un terrain de camping permettant l'accueil de plus de vingt personnes ou de plus de six tentes, caravanes ou résidences mobiles de loisirs ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-23 du même code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants : (...) / c) L'aménagement ou la mise à disposition des campeurs, de façon habituelle, de terrains ne nécessitant pas un permis d'aménager en application de l'article R. 421-19 ; / d) L'installation, pour une durée supérieure à trois mois par an, d'une caravane autre qu'une résidence mobile mentionnée au j ci-dessous : / -sur un terrain situé en dehors d'un parc résidentiel de loisirs, d'un terrain de camping, d'un village de vacances classé en hébergement léger au sens du code du tourisme ou d'une dépendance de maison familiale de vacances agréée au sens du code du tourisme ; (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces jointes à la demande de permis de construire, que l'installation de quarante-huit caravanes est prévue sur le terrain en cause, les caravanes devant être regardées comme constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs, qualifiés de " populations fragiles " dans le projet ; que le nombre de ces caravanes excédant le seuil de six prévu par les dispositions précitées de l'article R. 421-19 du code de l'urbanisme au-delà duquel les travaux effectués sur le terrain d'accueil doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager, la COMMUNE DE MONTREUIL était tenue de solliciter la délivrance d'un tel permis ; que si un permis d'aménager peut comprendre, de façon accessoire comme en l'espèce, des travaux soumis à permis de construire en application de l'article L. 441-2 du code de l'urbanisme aux termes duquel " Lorsque les travaux d'aménagement impliquent, de façon accessoire, la réalisation par l'aménageur de constructions et d'installations diverses sur le terrain aménagé, la demande de permis d'aménager peut porter à la fois sur l'aménagement du terrain et sur le projet de construction. (...) ", aucune disposition du code de l'urbanisme ne permet d'inclure dans un permis de construire des travaux relevant du permis d'aménager ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'en délivrant le permis de construire litigieux, le maire de Montreuil avait commis une erreur de droit ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la COMMUNE DE MONTREUIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 18 avril 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 3 août 2012 par lequel le maire de Montreuil a accordé à la COMMUNE DE MONTREUIL un permis de construire à titre précaire pour une durée de cinq ans ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la COMMUNE DE MONTREUIL le paiement à Mmes D...et A...de la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais que celles-ci ont exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE MONTREUIL est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE MONTREUIL versera à Mmes D...et A...une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE MONTREUIL, à Mme C...D..., à Mme E... A...et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2014, où siégeaient :

M. Demouveaux, président,

M. Luben, président assesseur,

Mlle Rudeaux, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 30 avril 2014.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J.-P. DEMOUVEAUX

Le greffier,

V. RICAUD

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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N° 13VE02028


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE02028
Date de la décision : 30/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : DS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-04-30;13ve02028 ?
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