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26/06/2014 | FRANCE | N°11VE03062

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 26 juin 2014, 11VE03062


Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour le PORT AUTONOME DE PARIS, dont le siège est 2 quai de Grenelle à Paris (75015), par Me Michel, avocat ;

Le PORT AUTONOME DE PARIS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0805906 du 24 juin 2011 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il l'a condamné à verser à la société OTCI la somme de 58 646,43 euros (cinquante huit mille six cent quarante six euros et quarante trois centimes) assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2008 au titre de l'enrichissement sans cause et

de la responsabilité quasi-délictuelle (article 2 et suivant) ;

2° de rejete...

Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour le PORT AUTONOME DE PARIS, dont le siège est 2 quai de Grenelle à Paris (75015), par Me Michel, avocat ;

Le PORT AUTONOME DE PARIS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0805906 du 24 juin 2011 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il l'a condamné à verser à la société OTCI la somme de 58 646,43 euros (cinquante huit mille six cent quarante six euros et quarante trois centimes) assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2008 au titre de l'enrichissement sans cause et de la responsabilité quasi-délictuelle (article 2 et suivant) ;

2° de rejeter la demande présentée par la société OTCI devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3° de mettre à la charge de la société OTCI LG et de la société OTCI la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la demande de la société OTCI était irrecevable en l'absence de liaison du contentieux ;

- si, en l'absence de prestations exécutées sur commande de la personne publique le tribunal s'est placé à bon droit sur le terrain de l'enrichissement sans cause, il a revanche dénaturé les écritures du PORT AUTONOME DE PARIS à deux reprises et le jugement doit, à ce titre, être annulé ; le tribunal a ainsi intégré à tort des prestations inexistantes parmi les dépenses utiles ; puis, en retenant à tort que le PORT AUTONOME DE PARIS acquiesçait au caractère utile des dépenses réalisées, lequel était au contraire expressément contesté, le tribunal n'a pas répondu à l'argumentation opérante développée en défense ;

- le caractère utile des dépenses de la société OTCI n'est pas, en tout état de cause, établi ; sa présence sur le chantier n'a été qu'épisodique à compter d'août 2005 et son action inutile pour la bonne fin du chantier qui n'a pu être terminée que grâce à l'intervention de la société MT2I ;

- sous couvert de juste appréciation des dépenses utiles, le tribunal a exonéré la société OTCI de son obligation d'établir l'utilité mais aussi le montant des dépenses, n'a pas répondu à l'argumentation en défense, n'a pas motivé les éléments permettant d'atteindre la somme de 56 733,09 euros et a méconnu le principe général de droit selon lequel une personne publique ne saurait être condamnée à verser une somme qu'elle ne doit pas ;

- en tout état de cause, aucune dépense utile ne peut être comptabilisée au titre des mois d'août et octobre 2005, ainsi que d'août à septembre 2006 et de janvier à février 2007 ;

- en outre, s'agissant de l'indemnisation au titre de la perte de marge, le tribunal n'a pas répondu à l'argumentation du PORT AUTONOME DE PARIS qui soutenait et soutient encore que les prestations réalisées par la société OTCI ne correspondent pas à une sollicitation en l'absence de tout contrat mais à l'action attendue de ladite société dans le cadre de sa responsabilité contractuelle ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

Vu le décret n° 93-1268 du 29 Novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2014 :

- le rapport de M. Le Gars, président assesseur,

- les conclusions de Mme Besson-Ledey, rapporteur public,

- et les observations de Me Michel pour le PORT AUTONOME DE PARIS ;

1. Considérant que le PORT AUTONOME DE PARIS, maître d'ouvrage au titre d'un marché ayant pour objet la construction de deux bâtiments C40 et C41 sur le port de Gennevilliers, relève appel du jugement en date du 24 juin 2011 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il l'a condamné à verser à la société OTCI la somme de 58 646,43 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2008 au titre de l'enrichissement sans cause et de la responsabilité quasi-délictuelle ; que par un appel incident, la société OTCI, qui a assuré une mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination (OPC) des travaux de construction, demande non seulement la réformation du jugement en tant qu'il a limité la condamnation du PORT AUTONOME DE PARIS à une partie de ses prétentions indemnitaires mais aussi en tant qu'il a exclu la responsabilité contractuelle au profit des deux terrains sur lesquels il a prononcé la condamnation ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le PORT AUTONOME DE PARIS soutient que c'est à tort et au prix d'une dénaturation des faits de l'espèce que, pour faire droit aux conclusions du demandeur de première instance sur le terrain de l'enrichissement sans cause, le tribunal administratif a, d'une part, écarté comme inopérante son argumentation en défense tirée de ce que le chantier était abandonné à compter du 5 juillet 2005 et, d'autre part, pris acte de ce qu'il ne contestait pas le caractère utile des dépenses engagées ; que, toutefois, une telle argumentation, qui touche au bien-fondé du jugement attaqué, n'est pas de nature à mettre en cause sa régularité ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Considérant que le PORT AUTONOME DE PARIS soutient que c'est à tort que sa fin de non-recevoir de la demande de première instance, en tant qu'elle émane de la société OTCI, n'a pas été accueillie par le tribunal administratif alors que la réclamation préalable n'a été présentée que par la seule société OTCI LG ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la société OTCI, par la voie de son conseil, a adressé une réclamation préalable en date du 13 juin 2007 au PORT AUTONOME DE PARIS, qui l'a reçue le 14 juin 2007 ; que, par suite, cette fin de non recevoir doit être écartée ;

Sur le fondement de la responsabilité :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'après divers échanges écrits entre les parties, le PORT AUTONOME DE PARIS a confié à la société OTCI la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination (OPC) des travaux de construction des bâtiments C40, tranche ferme réalisée dans un délai de 52 semaines à compter de septembre 2003, et C41, tranche conditionnelle réalisée dans un délai de 48 semaines à compter de mars 2005, pour un montant prévisionnel de travaux de 7,853 millions d'euros HT ; que, pour un prix de prestation initialement fixé à 46 308,60 euros HT, la mission d'OPC des travaux afférents au bâtiment C40 a été confiée par bon de commande du 22 août 2003 à la société OTCI distinctement du marché de maîtrise d'oeuvre confié a un groupement dont était mandataire la SARL JM Ibos - M. A...; que, suite à un accord des parties, ce prix a été augmenté de la somme de 25 620 euros HT, ainsi que l'acte le bon de commande du 15 février 2005, pour une date d'achèvement des prestations reportée au mois de juillet 2005 ; qu'en raison de divers problèmes dans l'exécution du chantier, le PORT AUTONOME DE PARIS a accepté le 3 août 2005 un nouveau planning de la société OTCI pour une réception du bâtiment C40 fixée au mois de janvier 2006, rejetant toutefois sa demande d'honoraires supplémentaires au motif que la rémunération était fixée en fonction de l'avancement des travaux et non du temps passé par l'OPC ; que, par un avenant au marché n° 2003-55 passé avec la maîtrise d'oeuvre prenant effet au 1er novembre 2005, il a été adjoint à cette dernière une assistance à maîtrise d'oeuvre avec la société GPCI ; que, les travaux ayant à nouveau pris du retard, le PORT AUTONOME DE PARIS a mis la société OTCI en demeure le 14 septembre 2006 de reprendre ses prestations " abandonnées " depuis le 20 juillet, faute qu'il qualifie de suspension unilatérale du contrat, et a menacé, à défaut, de résilier ce dernier pour faute, sans préjudice d'éventuels recours en indemnisation du préjudice occasionné du fait de cette carence ; que, se référant à la note méthodologique de la société OTCI remise à l'appui de son offre le 29 juillet 2005 en ce qui concerne la réception et le parfait achèvement, laquelle constitue un document contractuel, le PORT AUTONOME DE PARIS l'a mise en demeure le 10 janvier 2007 d'établir le planning correspondant sous 48 heures à peine de reprise en régie de la prestation ; que, dans ces conditions, le PORT AUTONOME DE PARIS et la société OTCI étaient unis contractuellement dès 2003 en vue de la réalisation de toutes les opérations d'une mission d'OPC, des phases d'élaboration du dossier de consultation des entreprises et d'assistance pour la passation des contrats de travaux jusqu'à celle de parfait achèvement ; qu'il n'est ni allégué, ni établi que cet engagement, résultant des bons de commande des 22 août 2003 et 15 février 2005, serait nul ; que si la société OTCI ne disposait plus d'un engagement contractuel explicite postérieurement au délai fixé par le deuxième bon de commande, du 15 février 2005, elle doit néanmoins être regardée comme ayant poursuivi ses prestations contractuelles dans le cadre du forfait réactualisé en 2005 alors, au surplus et ainsi qu'il a été dit, qu'elle a été sommée d'achever ses prestations ;

5. Considérant toutefois que, pour rejeter la demande d'augmentation de sa rémunération contractuelle présentée par la société OTCI et accueillir néanmoins partiellement sa demande d'indemnité, d'une part, sur le terrain de l'enrichissement sans cause à raison des dépenses utiles réalisées et, d'autre part, sur le terrain quasi-délictuel à raison de la perte de marge, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance que les prestations qui ont été commandées par le maître d'ouvrage pour la période postérieure au délai fixé par le deuxième bon de commande n'ont pas fait l'objet d'un avenant verbal ; que le tribunal ne pouvait cependant pas, pour ce motif, se placer en dehors des relations contractuelles unissant la société OTCI et le PORT AUTONOME DE PARIS (décrites au paragraphe 4) pour régler le différend financier concernant les prestations réalisées à compter du mois d'août 2005 par la société OTCI ;

6. Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société OTCI devant le Tribunal administratif de Versailles ainsi que le surplus de ses conclusions incidentes ;

7. Considérant, en premier lieu, que si la société OTCI se prévaut d'un accord verbal du PORT AUTONOME DE PARIS l'assurant de la prise en charge financière du coût de ses prestations postérieurement au mois d'août 2005 et jusqu'à la réception des ouvrages, son allégation n'est appuyée d'aucun élément et ne saurait par suite être regardée comme établie ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que si les parties, dans le cadre des relations contractuelles décrites ci-dessus au point 4, ne se sont pas explicitement placées dans le champ des dispositions de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique ou du décret du 29 décembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre, il n'en demeure pas moins que la mission de maîtrise d'oeuvre confiée à la société OTCI a été conclue sur la base d'un prix forfaitaire fixé en dernier lieu par le bon de commande du 15 février 2005 ; que, dans ces circonstances, le maître d'oeuvre ne peut prétendre à un supplément de prix que dans le cas où des prestations supplémentaires ont été imposées par le maître d'ouvrage ou par la survenance de sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, ou ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la prolongation de la mission de la société OTCI au-delà du mois de juillet 2005 ait donné lieu à des modifications du programme ou de prestations décidées par le PORT AUTONOME DE PARIS, ni d'ailleurs que le retard d'exécution des prestations serait imputable au maître d'ouvrage alors, en outre, que ce dernier allègue que la société OTCI n'est pas étrangère à l'allongement des délais du chantier, notamment eu égard à son manque de diligence pour appeler l'attention du PORT AUTONOME DE PARIS sur les difficultés rencontrées et pour proposer un planning ajusté ; qu'il n'est pas davantage établi que l'allongement du chantier ait engendré pour la société OTCI l'exécution de prestations différentes de celles initialement prévues ; qu'elle n'établit pas davantage que cet allongement de durée du chantier aurait induit la réalisation de prestations indispensables non prévues contractuellement ou à raison de sujétions imprévues ; que la société OTCI n'est par suite pas fondée à demander à être indemnisée sur le terrain contractuel des prestations qu'elle a poursuivies de juillet 2005 à la réception et à la mise en service des ouvrages ;

9. Considérant, en revanche et en dernier lieu, que le montant des bons de commande émis par le PORT AUTONOME DE PARIS, les 22 août 2003 et 15 février 2005, s'élève respectivement aux sommes de 46 308,60 euros hors taxes et 25 620 euros hors taxes ; que le PORT AUTONOME DE PARIS a réglé à la société OTCI la somme de 71 115,26 euros hors taxes ; qu'il est constant que le PORT AUTONOME DE PARIS n'a pas réglé le solde de 813,34 euros hors taxes ; qu'ainsi, et alors qu'il n'y a pas lieu de distraire des sommes dues le montant du bénéfice escompté, la société OTCI a droit au paiement de la somme de 964,77 euros toutes taxes comprises ; qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les intérêts non demandés sur cette somme ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PORT AUTONOME DE PARIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser à la société OTCI la somme de 58 646,43 euros (cinquante huit mille six cent quarante six euros et quarante trois centimes) assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2008, ladite condamnation devant être ramenée à la somme de 964,77 euros toutes taxes comprises (neuf cent soixante quatre euros soixante dix sept centimes) ; que le surplus des conclusions de la demande de la société OTCI devant le tribunal et les conclusions à titre incident de la société OTCI, y compris celles à fin d'allocation de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, doivent, en tant qu'elles excèdent ce quantum, être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société OTCI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a dans les circonstances de l'espèce, refusé de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du PORT AUTONOME DE PARIS la somme qu'elle demandait au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que ses conclusions tendant aux mêmes fins au titre de l'instance d'appel soient accueillies ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société OTCI le versement de la somme que le PORT AUTONOME DE PARIS demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le PORT AUTONOME DE PARIS a été condamné à verser à la société OTCI par le jugement susvisé du Tribunal administratif de Versailles est ramenée à 964,77 euros toutes taxes comprises (neuf cent soixante quatre euros soixante dix sept centimes).

Article 2 : Le jugement n° 0805906 du 24 juin 2011 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les surplus des conclusions de la requête du PORT AUTONOME DE PARIS et des conclusions incidentes de la société OTCI sont rejetés.

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