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04/12/2014 | FRANCE | N°14VE01885

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 04 décembre 2014, 14VE01885


Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 23 juin et 9 juillet 2014, présentés pour M. A... D..., demeurant..., par Me Mileo, avocat ; M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1300081 et 1300505 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 11 octobre 2012 par lequel le préfet de l'Essonne lui a retiré son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l

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Vu la requête introductive et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 23 juin et 9 juillet 2014, présentés pour M. A... D..., demeurant..., par Me Mileo, avocat ; M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1300081 et 1300505 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 11 octobre 2012 par lequel le préfet de l'Essonne lui a retiré son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et, d'autre part, à l'annulation de la décision en date du 27 novembre 2012 par laquelle le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui restituer sa carte de résidence ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Essonne, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;

5°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer l'autorisation de regroupement familial au bénéfice de son épouse, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

en ce qui concerne la décision portant retrait de titre de séjour :

- l'auteur de la décision était incompétent ;

- la décision est entachée d'un défaut de base légale en ce que le préfet de l'Essonne a visé des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que l'accord franco-algérien régit intégralement la situation des ressortissants algériens ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet n'établit pas que le mariage aurait été contracté dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour et que l'accord franco-algérien ne permet pas de retirer la carte de séjour en cas de divorce ou de séparation ;

- le préfet a commis une erreur de fait en considérant qu'il ne justifiait pas d'une communauté de vie avec son épouse à la date du dépôt de sa demande de renouvellement de titre de séjour ;

- la décision méconnaît les stipulations du a) de l'article 7 bis de l'accord

franco-algérien car le 7 novembre 2004 il avait repris sa vie commune avec son épouse ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du retrait de titre de séjour sur sa situation personnelle ;

en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'auteur de la décision était incompétent ;

- l'illégalité de la décision lui retirant son titre de séjour prive de base légale la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

en ce qui concerne la décision portant rejet de la demande de regroupement familial :

- l'auteur de la décision était incompétent ;

- l'illégalité de la décision lui retirant sa carte de résident prive de la base légale la décision de rejet de sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet a visé les dispositions de l'article R. 311-15-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas applicables aux ressortissants algériens ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,

- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public ;

- et les observations de Me Mileo, pour M.D... ;

Et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 20 novembre 2014 à 20 h 59, présentée pour M. D...par Me Mileo ;

1. Considérant que M.D..., né le 31 mars 1969, de nationalité algérienne, a bénéficié d'un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien, puis a obtenu un certificat de résidence valable du 7 novembre 2004 au 6 novembre 2014 sur le fondement des stipulations du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien, en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que M.D..., dont le divorce avec son épouse de nationalité française a été prononcé par un jugement en date du 13 juin 2006, a présenté le 9 juillet 2012 une demande de regroupement familial au bénéfice de sa nouvelle épouse de nationalité algérienne ; que, d'une part, par un arrêté en date du 11 octobre 2012, le préfet de l'Essonne lui a retiré son titre de séjour pour fraude, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que, d'autre part, par une décision en date du 27 novembre 2012, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse ; que M. D... fait appel du jugement du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions préfectorales litigieuses ;

Sur la légalité de la décision portant retrait de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que MmeB..., directrice de l'immigration et de l'intégration de la préfecture de l'Essonne, et signataire de la décision litigieuse du 11 octobre 2012, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet en date du 19 septembre 2012, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de l'Etat dans l'Essonne, à l'effet notamment de signer les décisions portant retrait de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de ladite décision ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2° ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux " ; qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2), et au dernier alinéa de ce même article (...) " ;

4. Considérant qu'en l'absence de stipulations expresses sur ce point prévues par l'accord franco-algérien précité, le préfet peut légalement faire usage du pouvoir général qu'il détient, même en l'absence de texte, pour retirer une décision individuelle créatrice de droits obtenue par fraude ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve de la fraude commise par le requérant, dont la bonne foi se présume ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, qu'en tout état de cause, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui retirant sa carte de résident algérien serait entachée d'un défaut de base légale en ce que le préfet de l'Essonne a visé le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, d'autre part, que pour prendre la décision attaquée retirant à M. D... son titre de séjour pour fraude, le préfet de l'Essonne s'est fondé sur l'appréciation selon laquelle la déclaration de M. D... jointe à sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de Français, en date du 29 octobre 2004, selon laquelle la communauté de vie n'avait pas cessé dans le couple, présentait un caractère frauduleux dès lors que la convention définitive portant règlement complet des effets de la séparation du requérant et de son épouse, dont le divorce a été prononcé par un jugement en date du 13 juin 2006, précisait que les anciens époux étaient convenus de faire remonter les effets du divorce au 1er août 2003 et qu'ils avaient fait des déclarations séparées au titre de l'impôt sur le revenu à compter du 1er janvier 2004 ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une ordonnance de non-conciliation en date du 18 mai 2004 produite en première instance, le Tribunal de grande instance d'Evry a autorisé Mme D...à assigner son conjoint aux fins de divorce et a autorisé les époux à résider séparément ; que M.D..., en se bornant à produire un courrier en date du 23 août 2004 de son conseil indiquant que le conseil de son épouse l'aurait informé que celle-ci ne souhaiterait plus divorcer, un avenant à un contrat de location en date du 5 juin 2003 concernant un appartement à Leuville sur Orge et mentionnant à la fois " Madame F...E...épouseC... " et " Madame F...E...épouseD... " et un avis d'échéance en date du 30 octobre 2003 concernant le même logement adressé à " M et Mme D...E... ", une attestation imprécise établie à Bretigny sur Orge par un bailleur et des quittances de loyers pour les mois de novembre et décembre 2004 concernant un logement situé dans cette commune, au nom de M. D...seul pour la première, et aux noms de M. et Mme D...pour la seconde, une facture EDF en date du 20 janvier 2005 au nom de Mme D...E..., et quelques attestations établies par des proches, ne démontre pas que la communauté de vie avec son ancienne épouse aurait repris postérieurement à l'ordonnance de non-conciliation du 18 mai 2004, qui est antérieure à la date du dépôt de la demande de renouvellement du certificat de résidence ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de fait en considérant que la communauté de vie avec son épouse de nationalité française avait cessé à la date du dépôt de sa demande de renouvellement de titre de séjour en qualité de conjoint de français ;

8. Considérant que, dans ces conditions, le préfet de l'Essonne était fondé à procéder au retrait de la carte de résident délivrée à M. D...en qualité de conjoint de ressortissante française au motif que cette carte avait été obtenue par fraude ; que par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du a) de l'article 7 bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, que M. D..., qui a obtenu par fraude un certificat de résident en qualité de conjoint de ressortissante française, ne saurait être regardé comme justifiant d'une intégration particulière dans la société française ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant, qui s'est marié en 2008 avec une ressortissante algérienne, n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de M.D..., le moyen tiré de ce que le préfet de l'Essonne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du retrait de titre de séjour sur la situation personnelle du requérant ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse doit être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, que M. D...n'a soulevé en première instance aucun moyen de légalité interne à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, les moyens tirés de l'exception d'illégalité de la décision portant retrait de titre de séjour, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle, qui ne sont pas d'ordre public et procèdent d'une cause juridique nouvelle en appel, sont irrecevables et ne peuvent qu'être écartés ;

Sur la légalité de la décision portant rejet de la demande de regroupement familial :

12. Considérant, en premier lieu, que MmeB..., directrice de l'immigration et de l'intégration de la préfecture de l'Essonne, et signataire de la décision litigieuse du 27 novembre 2012, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet en date du 19 septembre 2012, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de l'Etat dans l'Essonne, à l'effet notamment de signer les décisions relatives au regroupement familial ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M.D..., le préfet de l'Essonne s'est fondé sur la circonstance que le requérant s'était vu retirer son titre de séjour au motif qu'il avait été obtenu frauduleusement ; que l'illégalité du retrait de certificat de résidence opposé à M. D... n'étant pas établie par ce dernier, l'exception d'illégalité dudit retrait, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision rejetant sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse ne peut qu'être écartée ;

14. Considérant, en dernier lieu, que si le préfet de l'Essonne a mentionné que le requérant avait fait l'objet d'une procédure de retrait de titre de séjour pour obtention frauduleuse, sur le fondement des dispositions de l'article R. 311-15-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, cette erreur, aussi regrettable soit-elle, est sans incidence sur la légalité de la décision portant rejet de la demande de regroupement familial ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions litigieuses du préfet de l'Essonne en date du 11 octobre 2012 et du 27 novembre 2012 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

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N° 14VE01885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01885
Date de la décision : 04/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : MILEO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-12-04;14ve01885 ?
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