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04/12/2014 | FRANCE | N°14VE02534

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 04 décembre 2014, 14VE02534


Vu la requête, enregistrée le 12 août 2014, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Abitbol, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402195 du 15 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 27 septembre 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a retiré sa carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
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Vu la requête, enregistrée le 12 août 2014, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Abitbol, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402195 du 15 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 27 septembre 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a retiré sa carte de séjour temporaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant retrait du titre de séjour :

- l'auteur de la décision était incompétent ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas établi l'existence d'une fraude concernant son dossier ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'auteur de la décision était incompétent ;

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2014 le rapport de Mme Vinot, président assesseur ;

1. Considérant que MmeA..., née le 30 avril 1985, de nationalité chinoise, est entrée en France en 2007 et a été titulaire d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiante, qui a été renouvelée la dernière fois le 23 novembre 2012 ; que, par un arrêté en date du 27 septembre 2013 le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a retiré son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que Mme A...fait appel du jugement du 15 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le moyen de cassation soulevé par Mme A...et tiré de ce que les premiers juges auraient dénaturé les pièces du dossier en tenant pour établie l'existence d'une fraude est, en tout état de cause, inopérant en appel ;

Sur la légalité de la décision portant retrait du titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que MmeC..., directrice de l'immigration et de l'intégration, signataire de la décision attaquée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 11 juin 2013, régulièrement publiée au bulletin d'informations administratives le même jour, à l'effet, notamment, de signer les décisions retirant un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision litigieuse manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision portant retrait de titre de séjour précise les considérations de fait et de droit qui la fondent et, notamment, expose qu'il ressort des éléments recueillis lors des investigations de la commission rogatoire du Tribunal de grande instance de Paris que l'intéressée a présenté de faux certificats d'inscription et d'assiduité pour l'année universitaire 2012/2013 ; qu'elle permettait à Mme A...d'en contester utilement les motifs ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite décision manque en fait ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant" " ;

6. Considérant que la décision par laquelle l'autorité administrative accorde un titre de séjour à un étranger est un acte individuel créateur de droits au profit de l'intéressé ; que, toutefois, le préfet peut légalement retirer cette décision après l'expiration du délai de recours contentieux si l'instruction du dossier révèle que des indications données par l'étranger dans sa demande avaient un caractère erroné ou incomplet, ou en se fondant sur la fraude de l'intéressé ou sur l'application des dispositions législatives et réglementaires autorisant un tel retrait ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un rapport établi le 6 août 2013, produit en première instance par le préfet de la Seine-Saint-Denis, l'officier de police judiciaire en fonction à la sous-direction de la lutte contre l'immigration irrégulière et le travail illégal des étrangers de la direction du renseignement de la préfecture de police a informé le préfet que, dans le cadre de la poursuite de l'exécution d'une commission rogatoire délivrée par le vice-président chargé de l'instruction au Tribunal de grande instance de Paris, il était apparu que l'établissement supérieur privé de commerce (ISBCP), où Mme A... était inscrite, délivrait contre des montants d'environ 2 000 euros de faux certificats d'inscription et d'assiduité, et que l'intéressée s'était inscrite dans cette école pour l'année universitaire 2012/2013 dans l'unique but d'obtenir indûment son titre de séjour ;

8. Considérant que Mme A... soutient qu'elle était inscrite depuis 2009 auprès de l'ISBCP et produit des factures justifiant des règlements des frais de scolarité ainsi que des certificats d'inscription et trois relevés de notes émanant de cet établissement ; que, cependant, les relevés de notes relatifs aux années universitaires 2010-2011 et 2011-2012, qui attestent, pour le premier, que l'intéressée aurait obtenu les résultats qu'il mentionne " pour l'évaluation de sa formation, 2ème année, Commerce extérieur " et, pour le second, qu'elle aurait obtenu les résultats qu'il mentionne " pour l'évaluation de sa formation, 3ème année, Marketing ", mentionnent exclusivement des notes délivrées pour des modules identiques, au titre de l'une et de l'autre année, à savoir " anglais ", " français ", " les entreprises, la concurrence et l'Europe ", " les grands enjeux de l'Europe ", " marketing amont et aval ", " la culture d'entreprise " et " marketing et stratégie " ; qu'en outre, ces relevés ne comportent aucune précision sur la nature des épreuves sur lesquelles ont été attribuées les notes qu'ils mentionnent, lesquelles, d'ailleurs, s'élèvent systématiquement à 10, ou 10,5, ou 11, ou 11,5 pour la quasi-totalité des modules, tant pour l'année 2010-2011 que pour l'année 2011-2012 ; qu'ainsi ces relevés de notes, eu égard à l'absence de vraisemblance de leurs mentions, ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'études que la requérante aurait poursuivies à l'ISBCP au cours des années 2010-2011 et 2011-2012 et, au contraire, tendent à accréditer l'appréciation, portée dans le rapport du 6 août 2013 ci-dessus mentionné, selon laquelle l'ISBCP a délivré à Mme A... de faux certificats d'assiduité et de faux relevés de notes ; que si la requérante soutient, dans un premier temps, qu'elle ne saurait être tenue pour responsable des agissements frauduleux et délictueux de la direction de cet établissement, puis, dans son mémoire enregistré le 26 octobre 2014 , qu'elle n'a jamais été mise en examen ni impliquée dans cette affaire, qu'elle ne pouvait pas être informée de l'existence de fraudes et n'a disposé d'aucun moyen pour se défendre contre les allégations de fraude, que le rapport du 6 août 2013 serait trop succinct et ne saurait en lui-même caractériser une fraude commise par l'établissement, elle n'apporte pas d'éléments probants tendant à établir qu'elle aurait effectivement suivi des cours à l'ISBCP en 2010-2011 et en 2011-2012 ; que, dans ces conditions, et dès lors que la requérante ne pouvait pas ignorer la réalité de sa propre situation, le préfet de la Seine-Saint-Denis doit être regardé comme établissant suffisamment le caractère frauduleux de l'inscription de la requérante pour l'année 2012/2013 ; que, par suite, il a pu légalement retirer à Mme A...la carte de séjour temporaire qui lui avait été délivrée en qualité d'étudiante ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ;

10. Considérant que la requérante ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française ; qu'en outre MmeA..., qui produit d'ailleurs des documents contradictoires sur les conditions de son séjour en France, n'établit pas ni même n'allègue être dépourvue de toutes attaches privées et familiale dans son pays d'origine ; que la seule circonstance qu'elle a, le 3 janvier 2014, postérieurement à la date de la décision litigieuse, donné naissance à un enfant, ne permet pas de considérer que le refus opposé à sa demande de titre de séjour aurait méconnu son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de la décision litigieuse ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché le retrait de titre de séjour en litige d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A... ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

12. Considérant, en premier lieu, que dès lors que les moyens d'illégalité de la décision portant retrait de titre de séjour sont écartés, Mme A... n'est pas fondée à invoquer son illégalité, par voie d'exception, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que MmeC..., directrice de l'immigration et de l'intégration, signataire de la décision attaquée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 11 juin 2013, régulièrement publiée au bulletin d'informations administratives le même jour, à l'effet, notamment, de signer les arrêtés retirant un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision portant obligation de quitter le territoire français manque en fait ;

14. Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soulevé à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, pour les motifs précédemment exposés au point 8 et dès lors, au surplus, que la requérante ne justifie pas d'obstacles à ce qu'elle poursuive sa vie privée et familiale avec son enfant dans son pays d'origine ;

15. Considérant en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision litigieuse portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de la requérante ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 27 septembre 2013 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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N° 14VE02534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE02534
Date de la décision : 04/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Disparition de l'acte - Retrait - Retrait des actes créateurs de droits - Conditions du retrait - Autorité compétente.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : ABITBOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-12-04;14ve02534 ?
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