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11/06/2015 | FRANCE | N°13VE03879

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 11 juin 2015, 13VE03879


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 27 décembre 2013 et le 29 janvier 2014, présentés pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Reghioui, avocat ; Mme A... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1305515 du 21 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et

a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2° d'annule...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 27 décembre 2013 et le 29 janvier 2014, présentés pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Reghioui, avocat ; Mme A... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1305515 du 21 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'Etat, en faveur de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé au regard des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, notamment en ce qui concerne sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors, d'une part, que sa présence en France depuis plus de cinq ans, son expérience professionnelle et sa promesse d'embauche pour un emploi à temps plein en contrat à durée indéterminée lui permettent de bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariée et, d'autre part, que l'ancienneté de sa présence en France où elle réside depuis plus de dix ans et son intégration justifient une admission exceptionnelle au séjour ;

- eu égard à l'ancienneté de sa présence en France, son dossier aurait dû être soumis à la commission du titre de séjour et à la commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à ses attaches personnelles et familiales en France ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

.................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2015 le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeA..., ressortissante marocaine, née le 2 septembre 1983 à Al Fida, entrée en France en 2003 selon ses déclarations, a sollicité le 9 février 2012 la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salariée sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé que le préfet du Val-d'Oise, qui a également examiné sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a refusée par arrêté du 2 juillet 2013, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 21 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " (...) Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d' un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;

3. Considérant que le préfet du Val-d'Oise, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme A...en qualité de salariée, s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée ne justifiait pas d'un visa de long séjour ainsi que le requièrent les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle ne produisait pas davantage un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail ; que le préfet du Val-d'Oise a également examiné la situation de l'intéressée au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a motivé son refus de l'admettre à titre exceptionnel sur le territoire français sur la circonstance qu'elle ne justifiait pas de façon probante sa présence habituelle en France depuis dix ans, en particulier pour les années 2003, 2004, et 2007 à 2009 ; qu'enfin l'arrêté attaqué précise également que Mme A...ne peut se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où elle est célibataire, sans charge de famille et qu'elle ne justifie pas être démunie d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident notamment son père et sa fratrie ; que cet arrêté, dont la motivation n'est pas stéréotypée, est ainsi suffisamment motivé, contrairement à ce que soutient Mme A...; que, par suite, d'une part, le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de la requérante, d'autre part, les décisions attaquées sont suffisamment motivées en fait et en droit ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord

franco-marocain : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;

5. Considérant, d'une part, que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation au bénéfice d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

6. Considérant qu'en l'espèce, le préfet du Val-d'Oise a examiné la demande de

Mme A...tendant à la délivrance d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'accord franco-marocain, seul applicable à son cas ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'illégalité au motif que le préfet ne s'est pas prononcé sur l'existence de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels tenant à sa situation professionnelle ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort de l'arrêté contesté que la requérante se prévalait devant le préfet de sa présence en France depuis plus de dix ans ; que, par suite, le préfet, qui a vérifié à titre subsidiaire si l'intéressée justifiait de cette présence afin de saisir éventuellement la commission du titre de séjour, comme le prévoient les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas ce faisant entaché d'illégalité son arrêté ;

8. Considérant, enfin, que Mme A...n'établit pas résider en France de manière habituelle depuis 2003 comme elle le soutient, en particulier au titre des années 2003, 2007 et 2009 contestées par le préfet, pour lesquelles ne sont produits, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, que quelques documents épars de nature médicale, quelques factures et des attestations non circonstanciées, qui par leur nature et leur nombre sont insuffisamment probants pour établir le caractère habituel de sa résidence en France durant ces années ; que, dans ces conditions, MmeA..., qui n'établit pas qu'elle résidait depuis plus de dix ans en France de manière habituelle à la date de l'arrêté attaqué, n'est pas fondée à soutenir, alors même qu'elle disposerait d'une promesse d'embauche, que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne régularisant pas sa situation par la délivrance d'un titre portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par ailleurs, Mme A...n'établissant pas résider de manière habituelle en France depuis plus de dix ans, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour, seule consultation prévue par les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;

10. Considérant que, ainsi qu'il a été dit au point 8, Mme A...ne démontre pas avoir établi sa résidence habituelle en France depuis l'année 2003 ; que si elle soutient que sa soeur de nationalité française vit en France de même que des oncles, des tantes et des cousins, il est constant que son père et sa fratrie, ainsi qu'elle l'a déclaré lors du dépôt de sa demande de titre de séjour, demeurent... ; qu'ainsi, MmeA..., qui n'a, en outre, versé au dossier aucun document tendant à établir sa particulière intégration en France, notamment d'un point de vue professionnel, ou tendant à justifier des liens personnels qu'elle aurait noués durant son séjour, n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des éléments de fait précédemment rappelés que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de MmeA..., qui est célibataire et sans charge de famille ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

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N° 13VE03879


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE03879
Date de la décision : 11/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : REGHIOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-06-11;13ve03879 ?
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