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22/11/2011 | FRANCE | N°10-25920

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 novembre 2011, 10-25920


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la BNP Paribas (la banque) a consenti à M. X... un crédit dont Mme X... s'est rendue caution ; qu'elle s'est également rendue caution du compte courant ouvert dans la banque au nom de M.
X...
; que M. X... ayant été mis en liquidation judiciaire le 18 avril 2001, la banque a assigné la caution en exécution de ses engagements ; qu'invoquant des fautes de la banque, Mme X... a demandé reconventionnellement le paiement de dommages-intérêts ;
Sur le deuxième moyen

:
Mais attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admiss...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la BNP Paribas (la banque) a consenti à M. X... un crédit dont Mme X... s'est rendue caution ; qu'elle s'est également rendue caution du compte courant ouvert dans la banque au nom de M.
X...
; que M. X... ayant été mis en liquidation judiciaire le 18 avril 2001, la banque a assigné la caution en exécution de ses engagements ; qu'invoquant des fautes de la banque, Mme X... a demandé reconventionnellement le paiement de dommages-intérêts ;
Sur le deuxième moyen :
Mais attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes tendant à voir condamner la banque au paiement de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que la participation de la caution dépourvue de toute expérience professionnelle dans le secteur d'activité de l'entreprise cautionnée à l'exploitation de celle-ci, en collaboration avec son conjoint dirigeant de ladite entreprise, ne lui confère pas la qualité de caution avertie, de sorte que l'établissement de crédit est tenu à son égard d'un devoir de mise en garde sur les risques de l'endettement nés de l'octroi du prêt garanti ; que, pour rejeter toute responsabilité de la banque au titre d'un manquement à son devoir d'information à l'égard de la caution, l'arrêt attaqué a retenu que cette dernière était une ancienne infirmière surveillant-chef, coacquéreur du fonds de commerce de brasserie-restaurant tabac-loto exploité par son mari, débiteur principal et lui-même ancien chercheur au CNRS, et qu'elle s'était investie physiquement et intellectuellement dans le projet commun ; qu'en se déterminant par de tels motifs, non susceptibles d'établir que l'exposante était une caution avertie, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que Mme X..., dont la profession antérieure lui permettait de comprendre la portée des engagements pris, était co-acquéreur du fonds de commerce et avait mené cette entreprise commune avec M. X..., la cour d'appel, qui a qualifié Mme X... de caution avertie, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 1315 du code civil et 66 du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu que pour condamner Mme X... à payer à la banque la somme de 125 434, 99 euros avec intérêts, l'arrêt retient que celle-ci démontre avoir déclaré ses créances le 18 juillet 2001, que le mandataire liquidateur en a normalement accusé réception, et que la date de publication au BODACC du jugement d'ouverture n'a pas été produite aux débats par Mme X... pour justifier du moyen de forclusion qu'elle oppose à la banque ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient au créancier de justifier que sa déclaration de créance a été adressée dans les deux mois de la publication du jugement d'ouverture au BODACC, en produisant une copie de l'insertion faite dans ce bulletin, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné une caution (Mme X..., l'exposante) à payer au créancier (la société BNP PARIBAS) du débiteur principal en liquidation judiciaire (M. X...) une somme de 125. 434, 99 €, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QUE la société BNP PARIBAS démontrait que, le 18 juillet 2001, elle avait déclaré ses créances entre les mains de Me Y..., sans que l'on pût lui reprocher aujourd'hui un défaut de vérification, le mandataire-liquidateur n'y ayant pas procédé faute de fonds, ou lui opposer une forclusion, le mandataire-liquidateur en ayant normalement accusé réception et la date de publication au Bodacc du jugement d'ouverture n'ayant pas été produite aux débats par Mme X... pour justifier du moyen qu'elle opposait ; que la défaillance de l'emprunteur principal étant avérée et les créances détenues par la banque étant opposables à la caution, il convenait de condamner celle-ci à paiement, en exécution de ses obligations dont le principe était acquis (arrêt attaqué, p. 7, 1er attendu et 2ème attendu, 4ème al.) ;
ALORS QU'il appartient au créancier qui agit en paiement à l'encontre de la caution du débiteur principal soumis à une procédure collective, d'établir avoir effectué en temps utile sa déclaration de créance, notamment en justifiant de la date de publication au Bodacc du jugement d'ouverture ; qu'en l'espèce, en retenant qu'il incombait à la caution poursuivie en paiement par le créancier du débiteur en liquidation judiciaire, de justifier de la date de publication du jugement d'ouverture, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 1315 du code civil et 66 du décret du 27 décembre 1985.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné une caution (Mme X..., l'exposante) à payer au créancier (la société BNP PARIBAS) du débiteur principal en liquidation judiciaire (M. X...) une somme de 125. 434, 99 €, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2009 ;
AUX MOTIFS QUE, en produisant aux débats l'ordonnance du juge-commissaire prise le 14 novembre 2001, autorisant la vente aux enchères publiques du fonds de commerce LE SENO au prix de 500. 000 F et la requête du liquidateur du 10 octobre 2001 s'appuyant sur une expertise de 750. 000 F, Mme X... soutenait que la banque avait négligé son nantissement en laissant partir le fonds directement entre les mains des propriétaires des murs le 29 mai 2009 ; que cependant le propriétaire-bailleur avait sur la chose louée, du fait de sa créance de loyers, laquelle s'élevait à 25. 000 F, un gage général qui l'emportait nécessairement sur le nantissement de la banque limité au matériel et à la licence V, lesquels avaient été évalués dans l'ordonnance du jugecommissaire à 18. 293 € ; qu'en laissant s'effectuer la cession de gré à gré de ces éléments d'actifs entre le preneur et le bailleur, après avoir constaté qu'aucune proposition d'achat aux enchères publiques n'avait eu lieu, la banque avait certes perdu sa sûreté mais sans que cette perte fût la conséquence d'une abstention ou d'une négligence fautive de sa part (arrêt attaqué, p. 8, in fine, et p. 9, 1er attendu) ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, pour écarter toute décharge de la caution en vertu du bénéfice de subrogation, l'arrêt attaqué a retenu que le gage général du bailleur l'emportait nécessairement sur le nantissement de la banque, relevant par là même un moyen d'office sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, le créancier garanti par un cautionnement et par ailleurs bénéficiaire d'une sûreté spéciale qui s'abstient de demander l'attribution judiciaire de son gage à l'occasion de la liquidation judiciaire du débiteur principal prive la caution d'un droit qui pouvait lui profiter au moins pour partie, celle-ci pouvant alors être déchargée de son engagement ; qu'en décidant que la caution ne pouvait être déchargée de son obligation, sans examiner, ainsi qu'elle y était invitée, si la banque créancière avait privé cette dernière d'un droit qui pouvait lui profiter en s'abstenant de demander l'attribution judiciaire du fonds garanti par un nantissement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 2314 du code civil, anciennement article 2037.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté une caution (Mme X..., l'exposante) de sa demande tendant à voir condamner le créancier (la société BNP PARIBAS) du débiteur principal en liquidation judiciaire (M. X...) au paiement de dommages-intérêts, à compenser avec la dette principale ;
AUX MOTIFS propres et éventuellement adoptés QUE Mme X... avait souscrit deux engagements de caution les 30 avril et 22 octobre 1997 après avoir travaillé depuis 1983 comme infirmière et fini sa carrière comme surveillantchef le 21 juin 1997 ; qu'elle avait transmis à son employeur sa lettre de démission dès le 22 avril 1997, de telle sorte qu'au moment où elle avait donné son cautionnement, elle savait ne plus bénéficier d'un salaire que pour quelques mois ; que, le 30 avril 1997, elle ne s'était pas contentée de donner son cautionnement à son mari pour le prêt souscrit auprès de la BNP PARIBAS, elle s'était aussi portée coacquéreur du fonds de commerce ; que ces éléments démontraient qu'elle avait mené le projet de concert avec M. X... et avait mis toutes ses capacités physiques et intellectuelles au service de cette entreprise commune ; que le tribunal avait donc pu tirer des professions exercées par les époux X... et des éléments comptables dont ils avaient disposé pour apprécier la faisabilité de leur projet, l'existence d'une connaissance nécessaire et suffisante pour comprendre la portée des engagements pris en commun et par voie de conséquence l'absence non fautive d'une information supplémentaire en direction de la caution, parfaitement informée du projet et donc non profane (arrêt attaqué, p. 9, 2ème attendu) ; que les professions respectives des acquéreurs (chercheur au CNRS et cadre infirmier) leur permettaient d'appréhender facilement la nature et la portée de leurs engagements, d'autant plus qu'ils avaient eu tous deux communication des documents comptables relatifs au fonds de commerce dont ils faisaient l'acquisition et avaient ainsi pu se convaincre de la pertinence financière de leur projet, de ses résultats prévisibles et de ses chances de succès ; que Mme X..., détenant procuration sur les comptes de son époux, avait en outre la possibilité d'en surveiller l'évolution et montrait ainsi qu'elle souhaitait s'investir dans un projet commun (jugement entrepris, p. 4, 7ème al.) ;
ALORS QUE la participation de la caution dépourvue de toute expérience professionnelle dans le secteur d'activité de l'entreprise cautionnée à l'exploitation de celle-ci, en collaboration avec son conjoint dirigeant de ladite entreprise, ne lui confère pas la qualité de caution avertie, de sorte que l'établissement de crédit est tenu à son égard d'un devoir de mise en garde sur les risques de l'endettement nés de l'octroi du prêt garanti ; que, pour rejeter toute responsabilité de la banque au titre d'un manquement à son devoir d'information à l'égard de la caution, l'arrêt attaqué a retenu que cette dernière était une ancienne infirmière surveillant-chef, coacquéreur du fonds de commerce de brasserie-restaurant-tabac-loto exploité par son mari, débiteur principal et luimême ancien chercheur au CNRS, et qu'elle s'était investie physiquement et intellectuellement dans le projet commun ; qu'en se déterminant par de tels motifs, non susceptibles d'établir que l'exposante était une caution avertie, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 30 juillet 2010


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 22 nov. 2011, pourvoi n°10-25920

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Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 22/11/2011
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10-25920
Numéro NOR : JURITEXT000024860624 ?
Numéro d'affaire : 10-25920
Numéro de décision : 41101163
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2011-11-22;10.25920 ?
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