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18/06/2013 | FRANCE | N°12-19505

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 juin 2013, 12-19505


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 février 2012), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, pourvoi n° 09-17.306), que Mme X... a souscrit, les 24 mars et 25 mai 2000, auprès de la société Axa assurance vie (la compagnie d'assurances) et par l'intermédiaire de M. Y... agent général deux contrats d'assurance-vie investis en unités de compte dénommées "Axa France actions" et "Axa international actions", l

e premier sous le n° 8054292104, le second sous le n° 8057024604, sur lesque...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 février 2012), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, pourvoi n° 09-17.306), que Mme X... a souscrit, les 24 mars et 25 mai 2000, auprès de la société Axa assurance vie (la compagnie d'assurances) et par l'intermédiaire de M. Y... agent général deux contrats d'assurance-vie investis en unités de compte dénommées "Axa France actions" et "Axa international actions", le premier sous le n° 8054292104, le second sous le n° 8057024604, sur lesquels ont été versés respectivement 64 462 et 5 376 euros ; que, le 19 mai 2000, Mme X... a souscrit auprès de la société Axa banque (la banque), un prêt relais à taux variable, d'une durée de trois ans, remboursable in fine et garanti par le nantissement du contrat n° 8054292104, prêt dont le montant de 106 714 euros a été directement versé sur le dernier contrat ; que le 30 juin 2003, le prêt n'ayant pas été remboursé, la banque a procédé au rachat du contrat nanti, à concurrence de la somme de 108 465,04 euros ; que, constatant la perte de valeur enregistrée sur chacun des deux contrats d'assurance-vie, Mme X... a recherché la responsabilité de la banque et de M. Y... pour avoir manqué à leurs obligations de conseil et de mise en garde ; que l'arrêt rejetant ses demandes ayant été cassé, Mme X... a saisi la cour d'appel de renvoi ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts contre la banque et M. Y..., alors, selon le moyen :

1° / que le banquier qui propose un placement financier à son client doit l'informer sur les caractéristiques des produits proposés et les aspects moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés, ainsi que sur leur adéquation avec la situation personnelle et les attentes de son client ; que cette information doit porter sur tous les aspects de l'opération ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel qu'Axa banque, par l'intermédiaire de M. Y..., a proposé à Mme X... la souscription d'un emprunt-relais dont le produit devait, aux termes du contrat de prêt, être versé sur un contrat d'assurance-vie ; qu'en estimant qu'Axa banque n'avait aucune information à donner sur le contenu de ce contrat, quand elle était pourtant tenue d'avertir Mme X... des inconvénients de l'opération dans son entier, y compris en ce qui concerne la perte possible du capital versé sur le contrat d'assurance et de ses conséquences sur l'adéquation du projet avec sa situation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

2° / que M. Y..., agent général d'assurances, était lui-même tenu d'un devoir de conseil sur l'opération dans son ensemble, de sorte que la seule remise des conditions générales du contrat d'assurance était en soi insuffisante ; qu'en estimant qu'une telle remise excluait qu'il ait engagé sa responsabilité, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que, lors de la souscription de son contrat d'assurance-vie, ses conditions générales ont été remises à Mme X... par M. Y... et que cette dernière a été ainsi informée des caractéristiques et des risques d'un tel placement, l'arrêt retient que ces conditions décrivent l'évolution de l'épargne en précisant que sa valeur peut varier à la hausse ou à la baisse en fonction de l'évolution des cours des supports ; qu'il retient encore qu'y sont également mentionnés les risques du placement, de sorte que Mme X... n'était pas assurée d'une valeur de rachat égale au montant de son investissement ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations faisant ressortir que l'information sur le produit financier et l'adéquation des risques éventuels résultant du choix de la cliente à sa situation personnelle avaient été fournies à Mme X... par M. Y... pour le compte de la société Axa vie, préalablement à l'octroi du prêt consenti par la banque, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le dernier grief ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Annick X... de sa demande de dommages-intérêts contre la société AXA BANQUE et Monsieur Rémy Y... ;

AUX MOTIFS QUE dans la demande de prêt, qu'elle a rédigée et signée le 17 avril 2000 Mme X... a déclaré qu'elle disposait d'un revenu annuel de 238 388,00 francs (36 342 €) et qu'elle était propriétaire d'une maison d'habitation située ... à Lattes, évaluée 449 €) sa demande de prêt, dont elle a précisé qu'il avait pour objet un crédit-relais dans l'attente de la réalisation d'actifs existants, et a offert en garantie son contrat d'assurance-vie « Figures Libres » n° 8054292104 souscrit le 24 mars 2000, sur lequel avait été alors déposée une somme de 165 000,00 francs (25 154 €) ; elle a également fourni à la société Axa Banque le courrier d'une agence immobilière « Loti Immo » du 12 avril 2000, évaluant sa villa 1 275 000,00 francs (194 372 €), et adressé à celle-ci un courrier du 15 mai 2000, dans lequel elle indiquait l'avoir mise en vente au prix de 1 400 000,00 francs (213 428 €). La convention de prêt conclue le 19 mai 2000 l'a été pour un montant de 700 000,00 francs (106 714 €) sur trois ans à taux variable, soit taux d'Eonia (3,649% lors de la conclusion du prêt) majoré de 1,40 % ; il est précisé dans ladite convention que l'opération porte sur un crédit-relais et que les fonds prêtés seront mis à disposition de l'emprunteur par virement au compte de la compagnie d'assurances Axa Assurance Vie ; par avenant du 27 juin 2000 au contrat d'assurance-vie n° 8054292104, elle a affecté à la garantie du prêt ses droits dans ledit contrat, à hauteur de sa valeur de rachat. Mme X... soutient que le fait d'abonder un contrat d'assurance-vie au moyen de fonds prêtés trahit, de la part des divers intervenants ayant des intérêts liés, une stratégie d'ensemble mise au point au sein d'un même groupe ; pour autant, les sociétés Axa Banque et Axa Assurance Vie constituent deux entités juridiques distinctes, qui ont des activités différentes et sont soumises chacune à une réglementation spécifique, l'une étant un établissement de crédit, l'autre une société d'assurance ; de plus, il n'était pas prévu contractuellement que le prêt-relais devait, à l'expiration de la période de trois ans pour laquelle il avait été conclu, être remboursé par le produit de la liquidation du contrat d'assurance-vie, les deux opérations n'étant pas ainsi liées. La société Axa Banque, qui est intervenue comme prêteur de deniers, n'était dès lors tenue d'aucune obligation d'information relativement aux caractéristiques du contrat d'assurance-vie « Figures Libres » et aux risques inhérents à la souscription d'un tel contrat ; cette information, dont il importe peu, en l'espèce, de rechercher si elle a été complète ou pas et adaptée à la situation personnelle de Mme X..., a été fournie par la société Axa Assurance Vie par le biais des conditions générales, valant note d'information, remises à l'intéressée préalablement à la signature du contrat. Lors de la conclusion du prêt, dont l'objet était bien de permettre à Mme X... d'anticiper la vente de sa maison, celle-ci a demandé à la banque de verser les fonds sur le contrat d'assurance-vie «Figures Libres», qu'elle avait souscrit deux mois auparavant ; les versements faits sur ce contrat, investis sur des Sicav du groupe Axa (Axa France actions et Axa International actions) et convertis en unités de compte, lui offraient la possibilité, grâce à une participation annuelle aux bénéfices, de régler, du moins partiellement, les intérêts du prêtrelais, fixés selon un taux variable ; elle pouvait encore, au terme du prêt, rembourser celui-ci au moyen des fonds provenant de la vente de sa maison ou, si celle-ci n'avait pas encore été vendue, en effectuant un rachat partiel du contrat d'assurance, dont il était spécifié aux conditions générales (article 2.2.3) qu'il était sans frais ni pénalités. Le prêt-relais de 700 000,00 francs (106 714 €) sur trois ans, qui lui été accordé par la société Axa Banque, nettement inférieur au montant demandé, était adapté aux capacités financières de Mme X... puisque celle-ci percevait des revenus réguliers, lui permettant de faire face aux intérêts mensuels du prêt, et disposait d'un bien d'une valeur supérieure au montant dudit prêt selon l'estimation, qui en avait alors été faite par une agence immobilière de Lattes -le bien a d'ailleurs et vendu en juillet 2008, soit huit ans plus tard, au prix de 383 150 euros ; il en résulte que nonobstant la stipulation d'un taux d'intérêt variable, la banque n'était pas tenue, en l'absence de risque manifeste de surendettement de l'emprunteur, d'un devoir de mise en garde à l'égard de celui-ci ; N'ayant pas à s'immiscer dans les affaires de sa cliente, la société Axa Banque n'avait pas à juger de l'opportunité du prêt-relais sollicité par Mme X..., mais seulement à proposer à celle-ci une offre adaptée à ses objectifs ; le prêt de 700 000,00 francs, qui lui a été finalement consenti, lui permettait de disposer par anticipation du produit de la vente de sa maison, laquelle devait se réaliser dans un délai de trois ans ; dès avant la conclusion de la convention de prêt, ce projet de vente était bien réel, qui résultait tout à la fois des énonciations de la demande de prêt, de l'initiative prise par Mme X... de faire évaluer son bien et de sa déclaration de mise en vente de celui-ci ; elle ne peut donc sérieusement soutenir que le prêt-relais était inutile et sans réel bénéfice pour elle. L'affectation des fonds prêtés par virement au compte de la société Axa Assurance Vie est celle prévue par la convention de prêt elle-même ; à cet égard, il ne peut être reproché à la société Axa Banque, qui n'était pas tenue d'informer Mme X... des caractéristiques du contrat d'assurance-vie et des risques présentés par un tel produit financier, d'alerter celle-ci sur les inconvénients de son investissement, alors que le versement des fonds sur un contrat d'assurance-vie, ayant comme supports des Sicav d'actions, intervenait à une époque favorable au vu des plus-values réalisées par ce type de produit en 1999 et que ce versement était conforme aux souhaits de l'intéressée, désireuse de profiter des avantages d'un tel placement et du régime fiscal de l'assurance-vie. La responsabilité de la société Axa banque ne peut donc être recherchée sur le fondement de l'article 1147 du code civil pour manquement à une obligation d'information ou de mise en garde. Au surplus, même si la valeur de rachat du contrat d'assurance-vie avait été in fine profitable pour elle, Mme X... aurait eu, de toute façon, à supporter les frais et intérêts du prêt-relais, dont elle sollicite que le montant, soit la somme de 15 756,53 euros, lui soit alloué à titre de dommages et intérêts. M. Y..., qui est intervenu comme intermédiaire dans la conclusion du prêt-relais et dont la responsabilité n'est recherchée qu'en cette qualité, aux côtés de la société Axa banque, n'a pas commis de faute dans l'exécution de son devoir de conseil vis-à-vis de Mme X... dès lors que le prêt consenti était adapté aux capacités financières de l'intéressée et conforme à ses souhaits et que les fonds ont été versés à sa demande, sur le contrat d'assurance-vie « Figures Libres ». Les conditions générales, valant note d'information, d'un tel contrat d'assurance décrivent d'ailleurs, à l'article 2.1, l'évolution de l'épargne en précisant que celle investie en Sicav ou en Fonds Commun de Placement est convertie en nombre d'unités de compte, dont la valeur liquidative est calculée à l'issue de la cotation de la séance boursière de la date de valeur considérée, laquelle peut varier à la hausse ou à la baisse, en fonction de l'évolution des cours des supports ; il y est également indiqué que le souscripteur supporte intégralement le risque de placement sur les supports d'investissement, ce qui signifie qu'il n'est pas assuré d'une valeur de rachat de son contrat au moins égale au montant de son investissement hors participation aux bénéfices, seul lui étant garanti un nombre minimal d'unités de comptes, dégressif de la 1ère à la 10e année de contrat ; les conditions générales détaillent également les divers supports financiers, applicables au contrat, avec leurs caractéristiques, les types de gestion pouvant être choisis et l'incidence fiscale en découlant, ainsi que les modalités d'utilisation de l'épargne. Lors de la souscription de son contrat d'assurance-vie, d'une durée de dix ans, Mme X... avait choisi, comme supports, la Sicav Axa France Actions et la Sicav Axa International Actions, sur lesquels elle avait prévu d'investir ses versements, à concurrence de 50 % chacun ; elle était en possession des conditions générales du contrat, lui ayant été remises par M. Y..., et était ainsi informée des caractéristiques et des risques d'un tel placement ; elle était alors âgée de 47 ans et pouvait raisonnablement espérer bénéficier des avantages fiscaux de l'assurance-vie, de la perception de bénéfices annuels et de la disponibilité d'une épargne valorisée, à l'échéance de son contrat, sous la forme d'un capital ou d'une rente viagère ; en l'état, il n'apparaît donc pas que M. Y... ait manqué à son devoir de conseil relativement au contrat d'assurance-vie, proposé à sa cliente, dans des conditions de nature à engager à son égard sa responsabilité délictuelle. Le jugement entrepris doit en conséquence être réformé, mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum la société Axa Banque et M. Y... à payer Mme X... la somme de 6000,00 euros à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS, D'UNE PART, QUE le banquier qui propose un placement financier à son client doit l'informer sur les caractéristiques des produits proposés et les aspects moins favorables et les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages énoncés, ainsi que sur leur adéquation avec la situation personnelle et les attentes de son client ; que cette information doit porter sur tous les aspects de l'opération ; qu'il résulte des constatations de la Cour d'Appel que la société AXA BANQUE, par l'intermédiaire de Monsieur Rémy Y..., a proposé à Madame Nicole X... la souscription d'un emprunt-relais dont le produit devait, aux termes du contrat de prêt, être versé sur un contrat d'assurance-vie ; qu'en estimant que la société AXA BANQUE n'avait aucune information à donner sur le contenu de ce contrat, quand elle était pourtant tenue d'avertir Madame Nicole X... des inconvénients de l'opération dans son entier, y compris en ce qui concerne la perte possible du capital versé sur le contrat d'assurance et de ses conséquences sur l'adéquation du projet avec la situation de Madame Nicole X..., la Cour d'Appel a violé l'article 1147 du Code Civil ;

2°) – ALORS, D'AUTRE PART, QUE Monsieur Rémy Y..., agent général d'assurances, était lui-même tenu d'un devoir de conseil sur l'opération dans son ensemble, de sorte que la seule remise des conditions générales du contrat d'assurance était en soi insuffisante ; qu'en estimant qu'une telle remise excluait qu'il ait engagé sa responsabilité, la Cour d'Appel a violé l'article 1382 du Code Civil ;

3°) - ALORS ENFIN QUE le préjudice de l'emprunteur découlant d'un manquement de la banque à son obligation de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter ; que les frais et intérêts inutilement payés sont donc un préjudice indemnisable ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante selon laquelle Madame Nicole X... aurait dû en tout état de cause supporter les frais et intérêts du prêt-relais, la Cour d'Appel a violé l'article 1147 du Code Civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-19505
Date de la décision : 18/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 28 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 jui. 2013, pourvoi n°12-19505


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19505
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