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09/04/2014 | FRANCE | N°13-10852

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 avril 2014, 13-10852


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et la note ERDF-GRDF -NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008 ;
Attendu que M. X... et cinquante sept salariés des sociétés ERDF et GRDF ont attrait leur employeur devant la juridiction prud'homale afin d'obtenir le rappel pour la période non prescrite de primes de nettoya

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 émanant de la direction du personnel d'Electricité de France et Gaz de France et la note ERDF-GRDF -NOI-RHM 08/23 du 3 novembre 2008 ;
Attendu que M. X... et cinquante sept salariés des sociétés ERDF et GRDF ont attrait leur employeur devant la juridiction prud'homale afin d'obtenir le rappel pour la période non prescrite de primes de nettoyage de leurs vêtements professionnels, outre des dommages-intérêts ;
Attendu que pour dire qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer pour que soit posée à la juridiction administrative la question de la légalité de la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 relative aux dotations vestimentaires et faire droit à la demande principale des salariés, le conseil de prud'hommes a retenu que les salariés ne demandent pas l'application des circulaires litigieuses mais celle des dispositions plus favorables du code du travail, que la question de l'illégalité est soulevée par les sociétés défenderesses à l'appui d'une demande de sursis à statuer et non comme moyen de défense, qu'elle ne présente pas un caractère sérieux, que la question de l'illégalité de la circulaire Pers. 633 et de la note de novembre 2008 dont le caractère administratif ou réglementaire n'est pas, par ailleurs, clairement déterminé, n'a pas d'incidence sur le règlement du litige qui porte sur l'application ou non de l'article L. 4122-2 du code du travail au personnel d'ERDF et de GRDF avant la note du 3 novembre 2008 ;
Qu'en statuant ainsi, par une analyse le conduisant à écarter l'application des dispositions de la circulaire Pers. 633 du 24 juin 1974 pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de la note du 3 novembre 2008, ce qui révélait le caractère sérieux de la difficulté soulevée quant à la légalité de cette circulaire, le conseil de prud'hommes, auquel il revenait d'inviter les parties à saisir la juridiction administrative pour qu'elle se prononce sur la légalité de la circulaire Pers. 633, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 20 novembre 2012, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Montluçon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Moulins ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour la société Electricité réseau distribution France et la société Gaz réseau distribution France.
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir écarté la question préjudicielle soulevée par les sociétés ERDF et GrDF, dit n'y avoir lieu à sursis à statuer et condamné solidairement les sociétés ERDF et GrDF à payer à chacun des salariés demandeurs telle somme au titre de l'indemnité d'entretien et de nettoyage, outre celle de 150 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et au syndicat CGT EDF-GDF de Montluçon-Guerret la somme de 600 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
1°) Aux motifs que sur la demande de sursis à statuer aux termes de l'article 49 du Code de procédure civile, toute juridiction saisie d'une demande de sa compétence connaît, même s'ils exigent l'interprétation d'un contrat, de tous les moyens de défense, à l'exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction, notamment administrative ; qu'il est de jurisprudence constante que la juridiction de l'ordre judiciaire à laquelle est opposée une exception d'illégalité d'un texte règlementaire n'est tenue de surseoir à statuer que si cette exception présente un caractère sérieux et porte sur une question dont la solution est nécessaire au règlement du litige ; qu'en l'espèce les demandeurs ne demandent pas application des circulaires litigieuses mais celles des dispositions plus favorables du code du travail ; que la question de l'illégalité est soulevée par les sociétés défenderesses à l'appui d'une demande de sursis à statuer et non comme moyen de défense ; qu'elle ne présente pas de caractère sérieux ; que la question de la circulaire PERS 633 et de la note de novembre 2008 dont le caractère administratif ou règlementaire n'est pas, par ailleurs, clairement déterminé, n'a pas d'incidence sur le règlement du litige qui porte sur l'application qui porte sur l'application ou non de l'article 4122-2 du code du travail au personnel d'ERDF et GrDF avant la note du 3 novembre 2008 ; qu'il n'y a pas lieu de poser une question préjudicielle au tribunal administratif ni de surseoir à statuer ; que sur les demandes fondées sur l'article L.4122-2 du code du travail les sociétés ERDF et GrDF sont passées depuis 1946 du statut d'entreprise publique à celui de sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance ; que le décret du 22 juin 1946 portant statut du personnel des industries électriques et gazières a été maintes fois modifié ; que de nombreux décrets et circulaires dont celles intitulées PERS 618 du 19 août 1973 puis celles intitulées PERS 633 du 24 juin 1974 sont venues compléter ce statut ; que le corpus originel du code du travail est la codification des lois ouvrières engagée par vagues successives à partir de la loi du 28 décembre 1910 ; qu'une deuxième codification est intervenue le 22 janvier 1973, dans laquelle la loi du 31 décembre 1991 a introduit l'article L.4122-2 dans la troisième codification entrée en vigueur le 1er mai 2008 ; qu'aux termes de l'article L.4122-2 du code du travail qui remplace l'ancien article L.231-11, les mesures prises en matière de santé et de sécurité au travail ne doivent entraîner aucune charge financière pour les travailleurs ; que les salariés sont donc en droit de réclamer l'indemnité d'entretien non versée depuis mai 2006, date avant laquelle la prescription quinquennale est acquise aux employeurs ;
Alors, de première part, que la légalité d'un acte administratif échappe à la compétence des tribunaux judiciaires ; que lorsque sa validité est sérieusement contestée, le juge judiciaire est tenu de surseoir à statuer jusqu'à la décision des juridictions administratives sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; qu'en faisant droit aux demandes des salariés défendeurs en écartant l'application, pour la période antérieure au 1er décembre 2008, des dispositions de la circulaire Pers 633 au profit des dispositions du Code du travail, constatant ainsi le caractère sérieux de la difficulté soulevée quant à la légalité de la circulaire en cause, alors qu'il lui appartenait d'inviter les parties à saisir la juridiction administrative pour qu'elle se prononce sur la légalité de cette circulaire, et en s'abstenant de surseoir à statuer jusqu'à la décision des juridictions administratives sur la question préjudicielle ainsi soulevée, le Conseil des prud'hommes a méconnu l'article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Alors, subsidiairement, de deuxième part, qu'il appartenait en toute hypothèse au Conseil des prud'hommes de rechercher, au terme d'une appréciation globale et concrète de l'ensemble des dispositions régissant les dotations des salariés d'ERDF et GrDF en vêtements professionnels, si les dispositions réglementaires de leur statut ne leur accordaient pas des avantages supérieurs à ceux résultant de l'application du Code du travail ; qu'en s'abstenant de procéder à cette comparaison, le Conseil des prud'hommes a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) Et aux motifs que la société ERDF GrDF sera condamnée à payer à chaque salarié demandeur le coût des frais d'entretien et de nettoyage des tenues de travail à raison de 1,852 euros par jour pour la période de mai 2006 à mai 2007, de 1,896 euros par jour de juin 2007 à décembre 2007 et de 1,927 euros par jours de janvier à décembre 2008 ;
Et alors, enfin, encore plus subsidiairement, que l'employeur n'est tenu de supporter, en application des articles 1135 du Code civil et L.4122-2 du Code du travail, que les frais effectivement exposés par les salariés pour les besoins de leur activité professionnelle ; que, dès lors, le Conseil des prud'hommes ne pouvait faire droit aux demandes des salariés sur une telle base forfaitaire sans s'expliquer sur les frais réellement exposés par ceux-ci dont il leur appartenait de justifier ; qu'en cet état, il a privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-10852
Date de la décision : 09/04/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montluçon, 20 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 avr. 2014, pourvoi n°13-10852


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Delamarre, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10852
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