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10/09/2014 | FRANCE | N°13-21762

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 septembre 2014, 13-21762


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu que l'exigence d'un procès équitable, au regard des principes d'égalité des armes et d'impartialité du juge, impose qu'une juridiction disciplinaire de première instance ne soit pas partie au recours contre ses propres décisions ; que le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (le Conseil) qui pron

once une sanction disciplinaire constitue une telle juridiction ;
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Attendu que l'exigence d'un procès équitable, au regard des principes d'égalité des armes et d'impartialité du juge, impose qu'une juridiction disciplinaire de première instance ne soit pas partie au recours contre ses propres décisions ; que le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (le Conseil) qui prononce une sanction disciplinaire constitue une telle juridiction ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et la Société des ventes volontaires

X...

qu'elle dirige, sanctionnées disciplinairement par une décision du Conseil du 16 mars 2011, ont, après une enquête complémentaire réalisée à la demande du commissaire du gouvernement, fait l'objet de nouvelles poursuites disciplinaires pour avoir, à l'occasion de cette première procédure, produit une facture falsifiée, une fausse attestation d'un imprimeur, ainsi qu'une affiche faussement attribuée à ce dernier, trompant ainsi la religion de l'autorité disciplinaire sur la réalité des mesures de publicité légale ayant précédé une vente aux enchères de tableaux modernes ; que, par une seconde décision du 11 décembre 2011, le Conseil a prononcé un avertissement en sanction de la production d'une attestation de complaisance, relaxant les opérateurs des autres manquements reprochés ;
Attendu que l'arrêt déclarant constitués les faits de production d'une facture falsifiée et d'une fausse affiche, et prononçant une interdiction d'exercer toute activité de ventes volontaires de meubles et de diriger des ventes pour une durée de trois mois, statue au vu des observations écrites déposées le 26 décembre 2012 par le Conseil ;
En quoi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 juin 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et de la Société des ventes volontaires

X...

;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X... et la Société des ventes volontaires

X...

.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR INFIRMÉ la décision déférée dans les limites du recours, en ce qu'elle a déclaré que le manquement de présentation d'un document falsifié et le manquement de présentation d'une affiche faussement attribuée à l'imprimerie Josselin, dans le cadre d'une procédure disciplinaire, ne sont pas caractérisés, DIT que la société SVV X..., prise en la personne de Florence X..., et Madame Florence X..., ont commis ces manquements et PRONONCÉ à leur encontre une interdiction d'exercer toute activité de ventes volontaires de meubles et de diriger des ventes pour une durée de trois mois,
AU VISA DES « observations déposées le 26 décembre 2012, par lesquelles le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques indique s'en remettre à la décision de la Cour » ;
1° ALORS QU'une juridiction disciplinaire de première instance n'est pas une partie et ne peut pas intervenir à l'instance d'appel de sa propre décision ; qu'en statuant, sur le recours formé contre une décision disciplinaire du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, en présence dudit Conseil et au vu des observations écrites qu'il avait déposées, la Cour d'appel a violé l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles L 321-18, L 321-22, L 321-28, R 321-48, R 321-53 du code de commerce ;
2° ALORS QU'aucun texte n'autorise le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, qui a statué comme juridiction disciplinaire de première instance, à présenter ou déposer des observations devant la Cour d'appel ; que la Cour a violé les articles L 321-18, L 321-22, L 321-28, R 321-48, R 321-53 du code de commerce.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR INFIRMÉ la décision déférée dans les limites du recours, en ce qu'elle a déclaré que le manquement de présentation d'un document falsifié et le manquement de présentation d'une affiche faussement attribuée à l'imprimerie Josselin, dans le cadre d'une procédure disciplinaire, ne sont pas caractérisés, DIT que la société SVV X..., prise en la personne de Florence X..., et Madame Florence X..., ont commis ces manquements et PRONONCÉ à leur encontre une interdiction d'exercer toute activité de ventes volontaires de meubles et de diriger des ventes pour une durée de trois mois,
SUR LES CONSTATATIONS QUE « Madame Jocelyne Kan, avocat général, (...) a fait connaître son avis » ET QUE « entendus à l'audience, le Commissaire du Gouvernement près le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, le Procureur Général au soutien des conclusions du Commissaire du Gouvernement » ;
ALORS QUE faute de préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, si la société SVV X... et Mme X... en avaient eu communication afin d'être mis en mesure d'y répondre utilement, ces mentions n'établissent pas que le principe de la contradiction a été respecté et ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle ; que l'arrêt manque ainsi de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR INFIRMÉ la décision déférée dans les limites du recours, en ce qu'elle a déclaré que le manquement de présentation d'un document falsifié et le manquement de présentation d'une affiche faussement attribuée à l'imprimerie JOSSELIN, dans le cadre d'une procédure disciplinaire, ne sont pas caractérisés, DIT que la société SVVV X..., prise en la personne de Florence X..., et Madame Florence X..., ont commis ces manquements et PRONONCÉ à leur encontre une interdiction d'exercer toute activité de ventes volontaires de meubles et de diriger des ventes pour une durée de trois mois,
1° ALORS QUE l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier ; que l'arrêt porte la mention suivante : « entendus à l'audience, le Commissaire du Gouvernement près le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, le Procureur Général au soutien des conclusions du Commissaire du Gouvernement, la société de ventes volontaires

X...

et Madame Florence X..., qui ont eu la parole en dernier » ; que l'ambiguïté de cette mention quant au point de savoir qui a effectivement eu la parole en dernier, ne permet pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, de sorte que l'arrêt attaqué se trouve dépourvu de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

2° ALORS QUE l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier ; que l'arrêt mentionne que la société de ventes volontaires

X...

et Mme Florence X... étaient représentées par leur avocat (p. 1), puis qu'elles ont été entendues (p. 2 § 1) ; qu'en l'état de ces mentions contradictoires sur le point de savoir qui était présent, a pu être entendu et à qui devait être donnée la parole en dernier, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer du respect du principe précité et l'arrêt attaqué se trouve dépourvu de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR INFIRMÉ la décision déférée dans les limites du recours, en ce qu'elle a déclaré que le manquement de présentation d'un document falsifié et le manquement de présentation d'une affiche faussement attribuée à l'imprimerie JOSSELIN, dans le cadre d'une procédure disciplinaire, ne sont pas caractérisés, DIT que la société SVVV X..., prise en la personne de Florence X..., et Madame Florence X..., ont commis ces manquements et PRONONCÉ à leur encontre une interdiction d'exercer toute activité de ventes volontaires de meubles et de dirigée des ventes pour une durée de trois mois,
1° ALORS QU'aux termes de l'article 4 du Code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que le juge ne peut dénaturer les conclusions de l'une des parties ; que la Cour d'appel a été saisie d'un « recours partiel » du Commissaire du Gouvernement, limité aux seuls chefs de la décision du 9 décembre 2011 rendue par le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ayant écarté le manquement de présentation d'un document falsifié dans le cadre d'une procédure disciplinaire et le manquement de présentation d'une affiche faussement attribuée à l'imprimerie JOSSELIN ; que dans le dispositif de ses écritures, Mme Florence X... demandait à la Cour, saisie dans les limites du recours du Commissaire du Gouvernement, de « dire et juger que Madame X... et la SVV X..., prise en la personne de Madame Florence X..., n'ont commis aucun des manquements reprochés par le Commissaire du Gouvernement » et « en conséquence, confirmer la décision du 9 décembre 2011 rendue par le Conseil des ventes volontaires » ; que, dans le corps des conclusions, elle faisait valoir que les dénégations de l'imprimeur quant au fait qu'il aurait été l'auteur des affiches litigieuses ne pouvaient être accueillies comme l'expression de la vérité, qu'il avait confirmé dans son attestation que la commande de 20 affiches avait été passée et qu'aucune poursuite n'avait été engagée pour établissement d'une attestation portant mention de faits inexacts, ce qui revenait à contester le caractère complaisant de cette attestation ; qu'en retenant que « par sa demande de confirmation de la décision déférée, Madame X... reconnaît avoir, le 3 mars 2011, soumis au CVV une attestation de complaisance ¿ rédigée sur ses indications, par ¿ son imprimeur le 26 février 2011 confirmant une commande de vingt affiches avant la vente de tableaux du 11 août 2010 » et « qu'elle ne conteste pas la production d'une attestation de complaisance », la Cour a dénaturé ces écritures et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE le faux ou la falsification d'un écrit suppose une altération frauduleuse de la vérité dans cet écrit ; que le seul fait de produire une facture en la désignant comme correspondant à une certaine commande, alors qu'elle correspond en réalité à une autre prestation, ne constitue pas une falsification de ce document ; que les motifs qui constatent « la production, par Madame X... elle-même, d'une facture du 25 octobre 2010 de l'imprimerie JOSSELIN, n° FC 410529 d'un montant de 123, 61 € transmise le 15 novembre 2010 au Commissaire du Gouvernement correspondant à la commande des affiches publicitaires de la vente du 11 août 2010 alors que cette même facture (même date et même montant) correspond, chez l'imprimeur, à une commande du 19 octobre 2010 de cinq affiches plastifiées livrées le 22 octobre 2010, relatives à un changement d'adresse de la SVV X..., ce que Madame X... a reconnu au cours de l'enquête en s'abstenant de fournir des explications à l'enquêteur malgré relance de sa part », ne constatent aucune falsification de et dans la facture elle-même ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi dépourvu de toute base légale au regard des articles L 321-18 et L 321-22 du code de commerce ;
3° ALORS, en toute hypothèse, QUE la faute et la mauvaise foi ne se présument pas ; que faute d'avoir constaté que Mme X... serait personnellement l'auteur de la falsification prétendue de la facture produite ou que, le 15 novembre 2010, elle aurait adressé au Commissaire du Gouvernement une facture qu'elle savait falsifiée, la Cour a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L 321-18 et L 321-22 du code de commerce. r de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-21762
Date de la décision : 10/09/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Vente aux enchères publiques - Vente volontaire de meubles aux enchères publiques - Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques - Procédure disciplinaire - Convention européenne des droits de l'homme - Article 6 § 1 - Compatibilité (non)

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 § 1 - Equité - Egalité des armes - Violation - Cas - Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques - Procédure disciplinaire

L'exigence d'un procès équitable, au regard des principes d'égalité des armes et d'impartialité du juge, impose qu'une juridiction disciplinaire de première instance ne soit pas partie au recours contre ses propres décisions ; le Conseil des ventes volontaires qui prononce une sanction disciplinaire constitue une telle juridiction. Partant, viole l'article 6 de la Convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêt qui, prononçant, sur le recours formé contre une décision disciplinaire de relaxe partielle rendue par le Conseil des ventes volontaires, une interdiction temporaire d'exercer toute activité à l'égard d'opérateurs de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, statue au vu des observations écrites déposées par cette juridiction


Références :

article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 sep. 2014, pourvoi n°13-21762, Bull. civ. 2014, I, n° 147
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, I, n° 147

Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Bernard de La Gatinais (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Verdun
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.21762
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