LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société Rietumu Banka AS,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 10 mars 2014, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs de fraude fiscale et blanchiment aggravé, a prononcé sur sa demande d'annulation d'un acte de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller SADOT, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON, Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 11 juin 2014, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 511-19 du code monétaire et financier, 80-1, 116, 171, 172, 591, 593, 706-43, et 802 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a dit n'y avoir lieu à annulation d'une pièce de la procédure ouverte à l'encontre de la société Rietumu Banka AS jusqu'à la cote D 1198 ;
" aux motifs que les dispositions de l'article 116, alinéa 2, du code de procédure pénale font obligation au juge d'instruction de vérifier l'identité de la personne qu'il envisage de mettre en examen, que la lecture du procès-verbal de première comparution de la Rietumu Banka (D 627) fait état de cette diligence, que M. X... n'a pas élevé de protestation, pas plus que l'avocat qui l'assistait ; que, comme le fait remarquer à juste titre la partie civile, l'extrait K bis produit par la requérante fait mention de M. Sergueï X..., comme dirigeant à l'étranger d'une personne morale étrangère, que cette mention est opposable aux tiers ; que si les dispositions de l'article L. 511-19 du code monétaire et financier interdisent à un bureau de représentation d'une banque étrangère toute opération à caractère bancaire et si l'agrément du 22 janvier 2009 de l'autorité de tutelle des établissements bancaires fait référence à ce texte, cette limitation d'activité a pour objectif essentiel de protéger toute éventuelle clientèle de la part d'un établissement ne satisfaisant pas aux règles légales bancaires françaises ou européennes, mais cette garantie restrictive n'a pas pour finalité d'exclure les principes de la responsabilité pénale, des personnes physiques ou des personnes morales, étant entendu que les investigations réalisées ont mis en évidence la réalité d'une activité bancaire de fait, légalement interdite, animée et dirigée par le représentant légal du bureau de représentation commerciale ; que la mise en examen de la banque, en présence d'un avocat, via la personne de X... n'a pas porté atteinte aux intérêts de la requérante, en mesure de faire connaître l'identité du réel représentant légal pour organiser une défense utile et adaptée dans la perspective d'un interrogatoire au fond et de tous les autres actes utiles à venir, dans le respect du contradictoire régissant toute procédure d'instruction, contrairement au cas d'espèce cité par la requérante, où s'agissant d'une procédure sur citation directe, la personne morale n'avait pas pu organiser sa défense ; que dès lors ce moyen de nullité est rejeté ;
"1°) alors qu'une personne morale ne peut être mise en examen que par l'intermédiaire de son représentant légal ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque cependant qu'elle constatait elle-même que M. X..., par l'intermédiaire duquel le juge d'instruction avait procédé à la mise en examen de la société Rietumu Banka, n'était pas le représentant légal de cette société, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations et a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que le dirigeant du bureau commercial de représentation français d'une banque étrangère n'a pas de pouvoir de représentation de cette banque ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque étrangère cependant que M. X..., par l'intermédiaire duquel le juge d'instruction avait procédé à la mise en examen de la société Rietumu Banka, simple dirigeant du bureau commercial de représentation de cette banque, n'avait pas le pouvoir de la représenter, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3°) alors que la mise en examen d'une personne morale par l'intermédiaire de son représentant légal est une formalité d'ordre public dont l'inobservation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque aux motifs que « la mise en examen de la banque, en présence d'un conseil, via la personne de S. X... n'a vait pas porté atteinte aux intérêts de la requérante, en mesure de faire connaître l'identité du réel représentant légal pour organiser une défense utile » cependant que la mise en examen de la société Rietumu Banka par l'intermédiaire d'une personne qui n'avait pas qualité pour la représenter avait nécessairement causé un grief à la banque, absente lors de l'interrogatoire de première comparution et de la notification de ses droits, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"4°) alors qu'une personne morale ne peut être mise en examen que par l'intermédiaire de son représentant légal ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque aux motifs que M. X..., par l'intermédiaire duquel le juge d'instruction avait procédé à la mise en examen de la société Rietumu Banka, était désigné comme « dirigeant à l'étranger d'une personne morale étrangère » quand la personne morale ne peut être mise en examen que par l'intermédiaire de son représentant légal et non d'un simple dirigeant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"5°) alors que l'exercice illégal d'une activité bancaire par un bureau de représentation d'une banque étrangère ne confère aucun pouvoir de représentation de l'établissement de crédit à ce bureau ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque aux motifs que les investigations réalisées aurait « mis en évidence la réalité d'une activité bancaire de fait, légalement interdite, animée par le représentant légal du bureau de représentation commercial » quand cette circonstance ¿ à la supposer établie ¿ était sans incidence sur les règles de représentation de la banque étrangère en France, seule mise en examen, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"6°) alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en rejetant le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de la banque aux motifs que, lors de la vérification de l'identité de la personne mise en examen par le magistrat instructeur, « S. X... n'a pas élevé de protestation, pas plus que le conseil qui l'assistait », quand il résulte au contraire du procès-verbal de première comparution (D627) que M. X... et l'avocat qui l'assistait ont indiqué au juge d'instruction que M. X... n'avait aucun pouvoir de représentation en France de la banque lettonne, la cour d'appel s'est contredite et n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la société Rietumu Banka, prise en la personne de M. Sergueï X..., directeur de son bureau de représentation en France, a été mise en examen des chefs de fraude fiscale et blanchiment aggravé ;
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité pris de ce que M. X... ne serait pas le représentant de la société au sens de l'article 706-43 du code de procédure pénale, les juges retiennent, notamment, que le registre du commerce mentionne qu'il est le dirigeant de cette personne morale étrangère et qu'il a confirmé, lors de ses auditions en garde à vue, en être le représentant en France ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, et dès lors que la mention figurant au registre du commerce a été donnée, en application de l'article R. 123-54 du code de commerce, par la société Rietumu Banka, l'arrêt n'encourt pas la censure ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3 000 euros la somme que la société Rietumu Banka AS devra payer au Directeur général des Finances publiques en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre septembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;