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08/10/2014 | FRANCE | N°13-14177

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 octobre 2014, 13-14177


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Office national de contentieux et de gestion (ONCG) le 25 août 2003 en qualité de chargé de recouvrement, M. X... a été déclaré inapte au poste de chargé de recouvrement et à tous les postes proposés, par un certificat délivré par le médecin du travail le 21 septembre 2009, lequel faisait suite à un premier avis d'inaptitude du 7 septembre 2009 ; que le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par une lettre du 16

octobre 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
A...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Office national de contentieux et de gestion (ONCG) le 25 août 2003 en qualité de chargé de recouvrement, M. X... a été déclaré inapte au poste de chargé de recouvrement et à tous les postes proposés, par un certificat délivré par le médecin du travail le 21 septembre 2009, lequel faisait suite à un premier avis d'inaptitude du 7 septembre 2009 ; que le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par une lettre du 16 octobre 2009 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel énonce que l'examen des faits ne permet pas de conclure à une situation de harcèlement, que le premier courrier a été adressé alors que le salarié se trouvait en arrêt de travail et qu'il n'y a pas eu d'autres cas de telle correspondance pendant une période d'arrêt de travail et les reproches visent le non respect d'objectifs dont le salarié n'a pas soutenu qu'ils étaient irréalisables ; que l'employeur fait ici usage de son pouvoir normal de direction et de contrôle et sauf à déformer les faits, il ne peut être tiré de cette correspondance une quelconque menace de lui appliquer une sanction pécuniaire illicite ; que le second courrier se réfère à l'application d'une note de service, laquelle stipule qu'en cas d'absence prolongée le véhicule professionnel est restituable à la société et aucun abus n'apparaît reprochable à l'entreprise dans l'exercice de cette prérogative applicable à tout salarié absent au moins 72 heures ; que le troisième courrier caractérise certes un manquement de l'employeur dans ses obligations de paiement de la rémunération mais il est notable de constater que la société ONCG a reconnu sans tergiverser son erreur dans la détermination des minima conventionnels et l'a régularisée sans tarder ; qu'au terme de cette analyse et en dépit de certains certificats médicaux faisant état d'une situation psychologique très dégradée, ainsi que de deux attestations d'anciens salariés faisant état de telles pratiques de harcèlement, sous forme d'insultes, d'humiliations, les concernant personnellement au sein de la société, ainsi qu'à l'encontre de M. X... mais uniquement sous forme d'assertions très vagues, qui ne sont ni datées, ni même sommairement détaillées, la cour d'appel considère, tout comme le conseil, que ne sont pas établis des faits répétés ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail de l'intéressé susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Qu'en statuant ainsi, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis, dont les certificats médicaux, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes du salarié en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour licenciement abusif, l'arrêt rendu le 16 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société ONCG aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société ONCG et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que sur le harcèlement, par courrier du 5 février 2009 l'employeur a reproché au salarié de ne pas avoir respecté son contrat de travail courant janvier à défaut d'avoir rempli le quota d'encaissement mensuel de 8 360 €, ce courrier constituant une sommation avant des mesures disciplinaires et un « ultime avertissement sans frais » (...) ; qu'il ressort d'un courrier du 18 juin 2009, que l'employeur a officiellement demandé au salarié la restitution de son véhicule de fonction, en se référant à une note de service du 5 juin 2007 faisant obligation aux chargés de recouvrement de restituer leur véhicule suite à une absence de plus de 72 heures quel qu'en soit le motif ; que l'employeur tout en contestant que le salarié n'ait pas bénéficié du coefficient adequat au regard de ses fonctions d'encaisseur et des dispositions de la convention collective, a reconnu lui devoir un complément de rémunération de 1 489, 89 € au titre de « garantie de rémunération liée aux minima conventionnels » ; que ces faits ne permettent pas de conclure à une situation de harcèlement :- le premier courrier a été adressé au salarié en arrêt de travail, il n'y a pas eu d'autre cas et les reproches visent le non-respect d'objectifs dont le salarié n'a pas soutenu qu'ils étaient irréalisables, dans le cadre du pouvoir de direction et qu'il ne peut être en être déduit une quelconque menace de lui appliquer une sanction pécuniaire illicite-le second courrier se réfère à l'application d'une note de service et aucun abus ne résulte de l'exercice de cette prérogative-le troisième courrier caractérise certes un manquement de l'employeur dans le paiement de la rémunération, mais que la société a reconnu sans tergiverser son erreur et l'a régularisée ; que le salarié s'est vu attribuer un coefficient conforme à ses fonctions ; qu'au terme de cette analyse, en dépit de certains certificats médicaux faisant état d'une situation psychologique très dégradée, et de deux attestations d'anciens salariés faisant état de telles pratiques de harcèlement, sous forme d'insultes, d'humiliations les concernant personnellement au sein de la société ainsi qu'à l'encontre de M. X... mais uniquement sous forme d'assertions très vagues, qui ne sont ni datées ni même sommairement détaillées, la cour considère que ne sont pas établis des faits répétés ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail de l'intéressé susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, l'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'au demeurant, la médecine du travail n'a pas lié l'inaptitude professionnelle à une maladie professionnelle ou à une quelconque situation de harcèlement ; que concernant le respect de l'obligation de reclassement, à l'issue de la première visite de reprise, concluant à l'inaptitude du salarié au poste de chargé de recouvrement, une étude de poste a été réalisée aux fins d'évaluer les possibilités d'aménagement de cette fonction et d'envisager la création d'un poste de téléopérateur de recouvrement à temps complet au siège de l'entreprise ou de gestionnaire de courrier à temps plein au siège aux fins d'éviter conformément aux préconisations du la médecine du travail un emploi « comportant des exigences liées à des objectifs commerciaux lors d'entretiens physiques ou téléphoniques avec la clientèle et/ ou déplacements routiers » ; que dans la mesure où le salarié a été déclaré définitivement inapte à son poste lors de la 2ème visite de reprise du 21 septembre 2009 ainsi qu'à « tous les postes proposés en aménagement ou reclassement pour raison médicale » et où l'employeur a, dès le 22 septembre, indiqué que les solutions envisagées, y compris sous forme d'aménagement, n'apparaissaient pas compatibles avec la situation de M. X..., non plus qu'avec une promotion en qualité de manager d'équipe, d'ailleurs non disponible à l'époque, mais qu'il poursuivait ses recherches, qui se sont avérées vaines par la suite, il s'en suit que l'employeur a parfaitement rempli son obligation ;
Alors 1°) que le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et qu'il appartient alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en ayant décidé que « ne sont pas établis » des faits répétés ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail de l'intéressé susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, l'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Alors 2°) qu'en s'étant fondée sur la circonstance inopérante que la médecine du travail n'avait pas lié l'inaptitude professionnelle à une maladie professionnelle ou à une situation de harcèlement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Alors 3°) que le juge doit s'expliquer sur les circonstances invoquées par le salarié et rechercher si dans leur ensemble, elles ne sont pas de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en s'étant bornée à examiner successivement deux courriers de l'employeur et une reconnaissance de dette salariale, au lieu de rechercher si, pris dans leur ensemble, ces éléments, ajoutés à ceux dont elle constatait l'existence, soit aux certificats médicaux faisant état d'une situation psychologique très dégradée, d'attestations d'anciens salariés faisant état de pratiques de harcèlement, sous forme d'insultes, d'humiliations les concernant ou à l'encontre de M. X..., et à tous ceux invoqués par le salarié, n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Alors 4°) que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celle des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail qu'après avoir réalisé deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés le cas échéant, des examens complémentaires ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'inaptitude du salarié n'est acquise qu'après le second examen médical de reprise et que seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la dernière visite peuvent être prises en considération pour apprécier si l'employeur a respecté l'obligation de reclassement mise à sa charge ; qu'en l'espèce, pour dire que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeter l'ensemble des demandes, l'arrêt retient qu'« à l'issue de la première visite de reprise, concluant à l'inaptitude du salarié au poste de chargé de recouvrement, il a été réalisé une étude de poste » aux fins d'évaluer les possibilités d'aménagement de cette fonction et d'envisager la création d'un poste ; que le salarié a été déclaré définitivement inapte à son poste lors de la 2ème visite de reprise du 21 septembre 2009 ainsi qu'à « tous les postes proposés en aménagement ou reclassement pour raison médicale » et que l'employeur a « dès le 22 septembre » indiqué que les solutions envisagées étaient vaines ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les recherches des possibilités de reclassement du salarié par l'employeur étaient antérieures au second examen médical par le médecin du travail, et que l'employeur avait conclu à l'impossibilité de reclasser le salarié dès le lendemain du second avis constatant l'inaptitude, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et R. 4624-31 du code du travail.
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société ONCG, demanderesse au pourvoi incident.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société ONCG à payer à Monsieur X... la somme de 14. 547, 12 € au titre de la clause de non concurrence, majorée de celle de 1. 454, 71 € au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE : «... il n'est pas contesté que Monsieur X... doit être considéré comme un commis commercial au sens de l'article 74 du code de commerce local, que la clause de non concurrence d'une durée de deux ans figurant à son contrat de travail est nulle faute de contrepartie financière et qu'il est fondé à obtenir en application du texte susvisé une contre partie financière égale à 50 % de ses rémunérations dues en dernier lieu sur une durée de deux ans à compter de son licenciement ; Attendu qu'il résulte des débats et pièces versées au dossier que Monsieur X... n'a pas retrouvé d'emploi avant le 19 avril 2011 ni dans le délai de deux ans suivant son licenciement ; Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu d'infirmer le jugement de ce chef et, en fonction du montant du salaire courant primes incluses, de condamner la société ONCG à lui payer la somme de 606, 13 € x 24 = 14. 547, 12 € majoré de celle de 1. 454, 71 € au titre des congés payés y afférents, avec les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, étant précisé qu'il n'est ni prétendu, ni justifié que Monsieur X... a bénéficié pendant la période concernée de revenus d'activité pouvant entraîner une imputation dans les conditions prévues par l'article 74 du code de commerce local et que la perception d'indemnités chômage n'est pas assimilable à un tel revenu » (arrêt p. 6) ;

ALORS QUE : la partie qui a sollicité la confirmation du jugement est censée s'en approprier les motifs ; que la société ONCG avait sollicité la confirmation du jugement accordant une indemnité de non concurrence calculée sur la base d'un salaire horaire hors primes ; qu'en infirmant le jugement pour accorder au salarié une indemnité de non concurrence calculée sur la base d'un salaire prime comprise, sans réfuter les modalités de calcul adoptées par les premiers juges, la cour d'appel a violé les articles 954 alinéa 4 et 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-14177
Date de la décision : 08/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 16 janvier 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 oct. 2014, pourvoi n°13-14177


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.14177
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