La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2014 | FRANCE | N°13-81743

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 octobre 2014, 13-81743


Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société La Romainville, - La société Recherche gestion développement, financement, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-13, en date du 15 février 2013, qui les a déboutées de certaines de leurs demandes après relaxe partielle de Mme Carole X...du chef d'abus de biens sociaux ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Ract-M

adoux, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de cha...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société La Romainville, - La société Recherche gestion développement, financement, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-13, en date du 15 février 2013, qui les a déboutées de certaines de leurs demandes après relaxe partielle de Mme Carole X...du chef d'abus de biens sociaux ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 septembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Ract-Madoux, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller RACT-MADOUX, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, Me RICARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire et 446 du code de procédure pénale, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que le témoin cité à la requête de la prévenue, Mme Véronique Y..., a été entendue par la cour d'appel sans avoir préalablement prêté le serment prévu à l'article 446 du code de procédure pénale, formalité qui est substantielle " ;
Attendu que les demanderesses ne sauraient se faire un grief du défaut de prestation de serment d'un témoin dès lors que les juges n'ont pas fondé leur décision sur les déclarations de ce témoin ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de violation des articles L. 225-47 et L. 242-6 du code de commerce, 2, 3, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme X...des fins de la poursuite du chef d'abus de biens sociaux en ce qui concerne la perception des rémunérations indues en février 2005 et a rejeté la demande de la société Recherche gestion développement financement de ce chef ;
" aux motifs que M. Thierry Z..., directeur financier du GIE RGD, a déclaré aux enquêteurs que l'expert-comptable de la SA RGDF avait constaté lors de la clôture des comptes au 31 mars 2005 que deux virements d'un montant total de 15 982 euros effectués au profit de Mme X...le 7 février 2005 ne correspondaient à aucune fiche de paye ; que suite aux explications de Mme X..., selon lesquelles sa fiche de novembre 2004 n'aurait pas été établie, il a indiqué avoir édité des extraits de compte retraçant l'ensemble des bulletins établis en 2004 et avoir ainsi pu constater que tous les bulletins avaient été émis en 2004 et avaient tous été soldés par plusieurs virements s'échelonnant de janvier 2004 à janvier 2005 en raison de décalages dans les paiements sur les périodes de septembre à décembre 2004 ; que Mme X...a toujours contesté avoir perçu des rémunérations indues pour un montant de 15 982 euros et a produit à cet effet une attestation de Mme Catherine A..., expert comptable, qui confirme l'oubli des rémunérations des mois de septembre et décembre 2004 et la régularisation de celles-ci courant février 2005, le premier versement contesté de 7 991, 44 euros correspondant au mois de décembre 2004 ; qu'au vu des pièces produites par la prévenue et notamment ses relevés bancaires, rien ne permet d'infirmer ses déclarations ;
" 1°) alors qu'aux termes de l'article L. 225-47 du code de commerce, le conseil d'administration fixe la rémunération du président ; que les rémunérations perçues par le dirigeant d'une société anonyme qui n'ont pas fait l'objet d'une autorisation de la part du conseil d'administration sont constitutives d'abus de biens sociaux ; que dans leurs conclusions régulièrement déposées, les sociétés La Romainville et Recherche gestion développement financement (RGDF) faisaient valoir que le conseil d'administration de la société RGDF n'avait fixé la rémunération de Mme X...qu'à compter du 1er septembre 2005 et qu'en omettant de s'expliquer sur ce chef péremptoire de conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors qu'en faisant état d'une prétendue attestation établie par Mme A...sans répondre au chef péremptoire des conclusions parties civiles faisant valoir qu'il s'agissait d'une note dactylographiée mais non signée par elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 242-6 du code de commerce, 121-3, alinéa 1, du code pénal, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Mme X...des fins de la poursuite du chef d'abus de biens sociaux en ce qui concerne les frais de voyage et d'investissements à l'étranger et a, par voie de conséquence, rejeté de ces chefs les demandes des parties civiles ;
" aux motifs qu'il est apparu que Mme X...avait souhaité dès 2004 développer l'activité de la SA La Romainville en Floride ; qu'elle avait alors créé sous son nom, en qualité d'actionnaire principale, une société américaine et deux filiales et avait engagé des frais pour installer une boutique de « salon de thé » à Miami ; que Mme X...fait observer que la somme de 164 002, 69 euros prise en charge par le GIE RGD ne peut entraîner une condamnation du chef d'abus de biens sociaux ; qu'elle précise, en outre, que cette somme ainsi que celle de 135 678, 53 euros prise en charge par la SA La Romainville étaient justifiées par l'intérêt du groupe qui devait développer ses activités à l'étranger ; qu'elle produit, par ailleurs, un certain nombre de factures en lien avec ce projet ainsi que l'analyse effectuée par le cabinet d'avocats Dorleac sur le bien fondé de son projet ; qu'elle affirme avoir agi en parfaite transparence, de bonne foi et sans en retirer le moindre avantage matériel ; qu'elle justifie également l'ensemble de ses déplacements à l'étranger par l'intérêt du groupe expliquant s'être rendue avec certains de ses collaborateurs dans des salons dont le thème correspondait à l'intérêt social du groupe qu'elle dirigeait ; que s'il est exact qu'aucune de ces dépenses n'ont été autorisées par le conseil d'administration et que maître Bleriot a indiqué que ce n'est qu'en mai 2006 que les deux filiales américaines ont été réintégrées dans le périmètre du groupe, malgré l'engagement pris en ce sens pour les trois sociétés américaines par Mme X...lors du conseil d'administration du 6 septembre 2005, il n'en demeure pas moins que l'information judiciaire n'a pas permis d'établir que les dépenses visées à la prévention ont été contraires à l'intérêt social des sociétés concernées ; que la mauvaise foi et l'intérêt personnel de Mme X...ne sont pas davantage démontrés tant sur les dépenses d'investissement que sur les frais de séjour et de transport ;
" 1°) alors que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, constater que Mme X..., présidente du conseil d'administration de la SA La Romainville et directeur général de la SA Recherche gestion développement financement (RGDF) avait fait régler des frais de voyage et d'investissement aux Etats-Unis par ces sociétés en l'absence de délibération du conseil d'administration et de convention de trésorerie, frais qui lui avaient permis de créer sous son nom, en qualité d'actionnaire principale, une société américaine et deux filiales pour installer un « salon de thé à Miami » et affirmer que l'intérêt personnel de la prévenue n'était pas démontré ;
" 2°) alors que les dépenses engagées par la dirigeante d'une société au profit de sociétés dont elle est l'actionnaire principale n'appartenant pas au périmètre du groupe sont nécessairement contraires à l'intérêt social de la société et que la cour d'appel, qui constatait qu'à l'époque où les dépenses financées par la société La Romainville, ont été engagées, les sociétés bénéficiaires de ces dépenses ayant la prévenue pour actionnaire principale n'appartenaient pas au périmètre du groupe, ne pouvait, sans se contredire, accueillant de façon non pertinente l'exception de groupe invoquée par la prévenue, affirmer que l'information judiciaire n'avait pas permis d'établir que les dépenses visées à la prévention aient été contraires à l'intérêt social des sociétés parties civiles ;
" 3°) alors que, pour échapper aux prévisions de l'article L. 242-6 du code de commerce, le concours financier apporté par les dirigeants d'une société à une autre entreprise du même groupe dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement, doit être dicté par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble de ce groupe, et ne doit ni être dépourvu de contrepartie ni rompre l'équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées et que la cour d'appel, qui n'a pas constaté dans sa décision ces conditions, ne pouvait, sans priver sa décision de base légale, affirmer qu'il n'était pas établi que les importantes dépenses engagées au détriment de la société RGDF et de la société La Romainville au profit de sociétés américaines dont la prévenue était actionnaire principale ait été contraire à l'intérêt social des sociétés parties civiles ;
" 4°) alors qu'en s'abstenant de répondre au moyen par lequel les parties civiles faisaient valoir que les sociétés américaines créées par la prévenue aux Etats-Unis, sociétés dont elle était l'actionnaire principale, n'entraient pas dans l'objet social des sociétés parties civiles, ce qui excluait que les concours financiers apportés aux sociétés américaines puissent entrer dans le cadre d'une politique d'ensemble élaborée par le groupe, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 5°) alors que le délit d'abus de biens sociaux est caractérisé lors de chaque paiement indu et que la cour d'appel, qui constatait expressément que les dépenses prises en charge par les sociétés parties civiles pour permettre la création par la prévenue sous son nom en qualité d'actionnaire principale d'une société américaine et de deux filiales n'avaient pas été autorisées par le conseil d'administration et que les sociétés ainsi créées n'avaient rejoint que tardivement le périmètre du groupe, en dépit des engagements pris par la prévenue, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;
" 6°) alors que dans leurs conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, les sociétés parties civiles faisaient valoir que l'intégration des sociétés américaines dans le groupe n'avait été réalisée en mai 2006 que partiellement, contrairement aux demandes de Me Blériot, puisqu'elle ne concernait que les deux filiales (qui sont vides) et non la société mère (La Romainville INC USA) et que la cour d'appel, qui s'est abstenue de s'expliquer sur ce chef péremptoire de conclusions, a privé sa décision de base légale ;
" 7°) alors qu'il résulte des dispositions de l'article L. 242-6 du code de commerce que la mauvaise foi découle nécessairement de ce que le prévenu a sciemment favorisé une société dans laquelle il avait un intérêt personnel au détriment de la société partie civile dont il est le dirigeant et que la cour d'appel, qui constatait d'une part que les importantes dépenses engagées par la prévenue au détriment des sociétés parties civiles avaient eu pour objet la création de sociétés de droit étranger dont elle était l'actionnaire principale, d'autre part qu'elle n'avait pas sollicité l'autorisation préalable du conseil d'administration pour engager ses dépenses, enfin que nonobstant les engagements qu'elle avait pris postérieurement à ces dépenses d'intégrer lesdites sociétés dans le périmètre du groupe, cette intégration n'avait été faite que tardivement, largement après la consommation du délit, ne pouvait, sans se contredire, affirmer que la mauvaise foi de Mme X...n'était pas démontrée " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour débouter les parties civiles de leurs demandes après avoir relaxé Mme X..., dirigeante des sociétés La Romainville et RGDF, du chef d'abus de biens sociaux en ce qui concerne, d'une part, des rémunérations que celle-ci aurait indûment perçues en février 2005, d'autre part, des frais de voyage et d'investissement à l'étranger quelle n'aurait pas dû mettre à la charge de ces sociétés, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les rémunérations contestées correspondaient à une régularisation et que les frais en vue d'une implantation commerciale aux Etats-Unis n'ont pas été exposés en contrariété avec l'intérêt social, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-deux octobre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-81743
Date de la décision : 22/10/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 oct. 2014, pourvoi n°13-81743


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.81743
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award