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09/12/2014 | FRANCE | N°13-24083

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 décembre 2014, 13-24083


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 9 avril 2013), que la société par actions simplifiée LPA (la société LPA) avait pour associés égalitaires M. X... et Mme Y..., celle-ci ayant été désignée comme présidente ; qu'une clause des statuts prévoyait la possibilité pour les associés de sortir de manière forcée de la société ; que M. X... a notifié par lettre recommandée à Mme Y... son intention de se prévaloir de cette clause, sans que la procédure soit menée à son t

erme ; qu'en raison de leur désaccord, les associés n'ont pu prendre aucune délibérat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 9 avril 2013), que la société par actions simplifiée LPA (la société LPA) avait pour associés égalitaires M. X... et Mme Y..., celle-ci ayant été désignée comme présidente ; qu'une clause des statuts prévoyait la possibilité pour les associés de sortir de manière forcée de la société ; que M. X... a notifié par lettre recommandée à Mme Y... son intention de se prévaloir de cette clause, sans que la procédure soit menée à son terme ; qu'en raison de leur désaccord, les associés n'ont pu prendre aucune délibération sociale lors des assemblées de l'année 2010 ; que M. X... ne s'est pas présenté à l'assemblée pour l'année 2011 ; qu'il a demandé la dissolution judiciaire de la société, en raison de la mésentente entre les associés, et la désignation d'un liquidateur ;
Attendu que Mme Y... et la société LPA font grief à l'arrêt de faire droit à ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le droit d'agir en dissolution judiciaire de la société appartient à tout associé qui se prévaut d'un intérêt légitime, sauf s'il est à l'origine du trouble social ; qu'en retenant, pour prononcer la dissolution judiciaire de la société LPA, qu'il ne pouvait être simplement affirmé que le dysfonctionnement allégué résultait du refus de M. X... de participer à la vie sociale, sans rechercher dans quelle mesure, face à l'impossibilité de délibérer lors de l'assemblée générale du 31 mars 2011, M. X... ne s'y étant pas présenté, Mme Y... n'avait pas été contrainte d'adresser au président du tribunal de commerce de Reims une requête aux fins d'obtenir la prorogation de cette assemblée et si, ce délai obtenu et une nouvelle assemblée ayant été convoquée, M. X... n'avait pas, de nouveau, refusé de se rendre à celle-ci, preuve qu'il était à l'origine du trouble social, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du code civil ;
2°/ que si le droit d'agir en dissolution de la société appartient à l'associé, pour justes motifs, notamment en cas de mésentente entraînant la paralysie du fonctionnement de la société, encore faut-il que cet associé puisse se prévaloir d'un intérêt légitime, et tel n'est pas le cas de l'associé responsable de la mésentente ; que, de même, en ajoutant, pour prononcer la dissolution judiciaire de la société LPA, que les pièces versées aux débats et le nombre de litiges opposant les parties ne permettaient pas d'imputer la situation à l'une ou l'autre des parties, de sorte qu'il n'était pas démontré, comme le soutenait Mme Y..., que M. X... était seul à l'origine du trouble social, sans rechercher si l'intéressé, en sa qualité d'associé des sociétés Etablissements Lallement, Iwh, Alph, n'avait pas, de manière systématique, par des comportements déloyaux et indélicats, privilégié son intérêt personnel au détriment de l'intérêt de la société LPA, en sorte qu'il était effectivement seul à l'origine du trouble social, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du code civil ;
3°/ que si le droit d'agir en dissolution anticipée de la société appartient à tout associé, encore faut-il qu'il se prévale d'un intérêt légitime, inexistant lorsqu'il est l'auteur du trouble social ; qu'en outre, en ajoutant encore, pour prononcer la dissolution judiciaire de la société LPA, que la manifestation écrite, par une lettre du 9 juin 2008, de M. X... de solliciter la mise en oeuvre de la clause de sortie forcée, prévue par l'article 12 des statuts, n'était pas exclusive de sa demande de dissolution judiciaire de la société LPA, sans rechercher dans quelle mesure ce comportement de M. X..., non seulement ayant souhaité mettre en oeuvre ladite clause puis n'ayant pas donné de suite à cette procédure de sortie, mais encore ayant sollicité la dissolution litigieuse, ne le privait pas d'un intérêt légitime à obtenir ladite dissolution, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du code civil ;
4°/ que le juge ne saurait méconnaître la loi du contrat ; qu'en retenant encore, de surcroît, pour prononcer la dissolution judiciaire de la société LPA, que la mésentente durable des parties n'avait pas permis à M. X... de mener à son terme la procédure de sortie prévue par les statuts qui ne pouvait être qualifiée de clause compromissoire, quand cette clause stipulait que « l'associé prenant l'initiative de cette procédure, ci-après désigné « L'offrant » devra notifier par lettre recommandée avec accusé de réception, à l'autre partie, ci-après désignée « Le bénéficiaire », une offre ferme et irrévocable d'achat de la totalité des actions de la société détenues par le bénéficiaire et une offre alternative ferme et irrévocable de vente de la totalité des actions qu'il détient dans la société », et que M. X..., à l'initiative de cette procédure, avait été seul à l'origine de son échec pour ne pas avoir respecté ces stipulations, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, qu'il est justifié des très nombreuses procédures judiciaires opposant M. X... et Mme Y... ainsi qu'entre les sociétés qu'ils dirigent respectivement, ensuite, que le refus de M. X... de participer à une assemblée des associés était lié au délai de convocation et aux conditions dans lesquelles lui avaient été transmis les documents préparatoires à celle-ci ; qu'il ajoute que si M. X... a manifesté sa volonté d'user de la faculté de sortie prévue par l'article 12 des statuts, celle-ci ouvrait la possibilité à chacun des associés de présenter une offre ferme, d'achat ou de vente, des titres de l'autre associé, et que ni Mme Y... ni M. X... n'ont présenté une telle offre ; qu'il retient que l'existence d'une mésentente durable installée entre les associés était ainsi démontrée, sans qu'il soit possible de l'imputer à l'un ou à l'autre de ceux-ci, et qu'elle n'a pas permis de mener à terme la procédure de sortie prévue par les statuts, compromettant ainsi le fonctionnement normal de la société ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu la loi du contrat, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... et la société LPA aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la société LPA et autre
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la dissolution judiciaire de la Société LPA ;
AUX MOTIFS QUE l'article 1844-7 5° du Code civil prévoit que la société prend fin par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d'un associé pour justes motifs, notamment en cas d'inexécution de ses obligations par un associé ou mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ; que les justes motifs sont des événements qui rendent impossible la vie sociale et rendent impossible la poursuite de l'activité de la société ; qu'il appartient au demandeur à l'action de rapporter la preuve de leur existence ; que le procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale ordinaire annuelle du 13 avril 2010 établit qu'aucune décision n'a pu être prise dès lors que les deux associés détenant chacun 50 % des actions ont voté en sens contraire sur tous les points, que les comptes n'ont pu être approuvés et que les résultats de la société n'ont pu être affectés ; que lors de l'assemblée générale extraordinaire du même jour, les associés ont voté contre les résolutions proposées ; qu'en ce qui concerne l'année 2011, Monsieur X... a protesté par lettre recommandée du 14 mars 2011 contre sa convocation au conseil de direction quatre jours avant la tenue de celui-ci et l'absence de transmission des documents nécessaires à sa préparation ; qu'il a de même constaté que les documents qui lui avaient été adressés en vue de la tenue de l'assemblée du 31 mars 2011 ne faisaient pas état de l'assignation en dissolution de la société délivrée le 13 décembre 2010 ; qu'aucune rectification n'est intervenue ; qu'il ne peut donc être simplement affirmé que le dysfonctionnement allégué résulte du simple refus de Monsieur X... de participer à la vie sociale ; que l'article 18 des statuts de la société prévoit la mise en place d'un conseil de direction composé des deux associés fondateurs ; qu'il a pour mission d'assurer en collaboration avec le président, l'administration et la direction de la société ; qu'il a le pouvoir de faire toute proposition concernant la gestion de la société et peut être consulté par le président du directeur général sur toute question ; que ce dernier doit obtenir l'accord du conseil de direction préalablement aux décisions suivantes : arrêté des comptes annuels de la société, des comptes consolidés et propositions d'affectation du résultat, établissement et arrêté détaillé des budgets d'exploitation et d'investissement ; que force est de constater qu'au vu de l'animosité permanente durable et généralisée des deux associés, le fonctionnement normal de la société est paralysé ; que les dispositions de l'article L. 227-10 du Code de commerce relative aux conventions intervenues directement entre la société et son président ne sont pas respectées, quand bien même l'exploitation du fonds s'avère bénéficiaire ; que l'article 12 des statuts prévoit une clause de sortie forcée permettant en cas de divergence de vue entre les associés ou de désaccord sur la conduite des affaires ou même pour convenance personnelle, à l'un des associés de mettre fin à l'association au sein de la société, soit en acquérant la totalité des actions détenues par l'autre et met en place une procédure permettant dans un délai de « trois mois après que l'un des associés ait averti l'autre par lettre recommandée, à chacun des deux associés de déclencher la procédure de sortie forcée », en notifiant une offre ferme et irrévocable d'achat, une offre des actions de la société détenues par le bénéficiaire et une offre alternative ferme et irrévocable de vente de la totalité des actions qu'il détient dans la société ; que Monsieur X... a manifesté son désir d'utiliser la « clause de sortie forcée » par lettre recommandée du 9 juin 2008, mais la procédure prévue n'a été appliquée par aucune des parties ; que le recours à l'article 12 des statuts constitue une faculté pour chacun des associés et n'empêche nullement Monsieur X..., qui a averti Madame Y... de son intention de mettre fin à l'association pour des raisons personnelles par lettre du 9 juin 2008, de solliciter la dissolution de la société alors qu'aucun associé n'a pris l'initiative de déclencher la procédure de sortie forcée dans le délai de trois mois suivant l'envoi de cette lettre ; qu'il est donc établi que la mésentente durable des parties, qui génère un grand nombre de procédures, compromet le fonctionnement normal de la société dans la mesure où cette dernière est dans l'impossibilité de consulter le comité de direction et d'adopter une décision, et n'a pas permis de mener à son terme la procédure de sortie prévue par les statuts qui ne peut être qualifiée de clause compromissoire ; que les pièces versées aux débats, le nombre de litiges opposant les parties ne permettent pas d'imputer la situation à l'une ou l'autre des parties, et il n'est pas démontré tel que le soutien Madame Y... que Monsieur X... est seul à l'origine du trouble social ; que la demande tendant à la dissolution de la Société LPA est fondée ; qu'il convient d'y faire droit ; que le jugement déféré sera donc infirmé en toutes ses dispositions (arrêt, p. 2 à 4) ;
1°) ALORS QUE le droit d'agir en dissolution judiciaire de la société appartient à tout associé qui se prévaut d'un intérêt légitime, sauf s'il est à l'origine du trouble social ; qu'en retenant, pour prononcer la dissolution judiciaire de la Société LPA, qu'il ne pouvait être simplement affirmé que le dysfonctionnement allégué résultait du refus de Monsieur X... de participer à la vie sociale, sans rechercher dans quelle mesure, face à l'impossibilité de délibérer lors de l'assemblée générale du 31 mars 2011, Monsieur X... ne s'y étant pas présenté, Madame Y... n'avait pas été contrainte d'adresser au Président du Tribunal de commerce de REIMS une requête aux fins d'obtenir la prorogation de cette assemblée et si, ce délai obtenu et une nouvelle assemblée ayant été convoquée, Monsieur X... n'avait pas, de nouveau, refusé de se rendre à celle-ci, preuve qu'il était à l'origine du trouble social, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du Code civil ;
2°) ALORS QUE si le droit d'agir en dissolution de la société appartient à l'associé, pour justes motifs, notamment en cas de mésentente entraînant la paralysie du fonctionnement de la société, encore faut-il que cet associé puisse se prévaloir d'un intérêt légitime, et tel n'est pas le cas de l'associé responsable de la mésentente ; que, de même, en ajoutant, pour prononcer la dissolution judiciaire de la Société LPA, que les pièces versées aux débats et le nombre de litiges opposant les parties ne permettaient pas d'imputer la situation à l'une ou l'autre des parties, de sorte qu'il n'était pas démontré, comme le soutenait Madame Y..., que Monsieur X... était seul à l'origine du trouble social, sans rechercher si l'intéressé, en sa qualité d'associé des Sociétés ETABLISSEMENTS LALLEMENT, IWH et ALPH, n'avait pas, de manière systématique, par des comportements déloyaux et indélicats, privilégié son intérêt personnel au détriment de l'intérêt de la Société LPA, en sorte qu'il était effectivement seul à l'origine du trouble social, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du Code civil ;
3°) ALORS QUE si le droit d'agir en dissolution anticipée de la société appartient à tout associé, encore faut-il qu'il se prévale d'un intérêt légitime, inexistant lorsqu'il est l'auteur du trouble social ; qu'en outre, en ajoutant encore, pour prononcer la dissolution judiciaire de la Société LPA, que la manifestation écrite, par une lettre du 9 juin 2008, de Monsieur X... de solliciter la mise en oeuvre de la clause de sortie forcée, prévue par l'article 12 des statuts, n'était pas exclusive de sa demande de dissolution judiciaire de la Société LPA, sans rechercher dans quelle mesure ce comportement de Monsieur X..., non seulement ayant souhaité mettre en oeuvre ladite clause puis n'ayant pas donné de suite à cette procédure de sortie, mais encore ayant sollicité la dissolution litigieuse, ne le privait pas d'un intérêt légitime à obtenir ladite dissolution, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1844-7 5° du Code civil ;
4°) ALORS QUE le juge ne saurait méconnaître la loi du contrat ; qu'en retenant encore, de surcroît, pour prononcer la dissolution judiciaire de la Société LPA, que la mésentente durable des parties n'avait pas permis à Monsieur X... de mener à son terme la procédure de sortie prévue par les statuts qui ne pouvait être qualifiée de clause compromissoire, quand cette clause stipulait que « l'associé prenant l'initiative de cette procédure, ci-après désigné «L'offrant» devra notifier par lettre recommandée avec accusé de réception, à l'autre partie, ci-après désignée «Le bénéficiaire», une offre ferme et irrévocable d'achat de la totalité des actions de la société détenues par le bénéficiaire et une offre alternative ferme et irrévocable de vente de la totalité des actions qu'il détient dans la société », et que Monsieur X..., à l'initiative de cette procédure, avait été seul à l'origine de son échec pour ne pas avoir respecté ces stipulations, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-24083
Date de la décision : 09/12/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 09 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 déc. 2014, pourvoi n°13-24083


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Jean-Philippe Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.24083
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