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15/01/2015 | FRANCE | N°13-27618

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 janvier 2015, 13-27618


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort par un tribunal d'instance, et les productions, que le Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sangliers du Haut-Rhin (le Fonds) a cité devant un tribunal d'instance M. X..., titulaire d'un droit de chasse, en paiement des cotisations dues en sa qualité de membre du Fonds ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 429-28 du code de l'environnement ;
Attendu que pour accueillir l'exception de nullitÃ

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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort par un tribunal d'instance, et les productions, que le Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sangliers du Haut-Rhin (le Fonds) a cité devant un tribunal d'instance M. X..., titulaire d'un droit de chasse, en paiement des cotisations dues en sa qualité de membre du Fonds ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 429-28 du code de l'environnement ;
Attendu que pour accueillir l'exception de nullité de l'assemblée générale constitutive du Fonds et le débouter de ses demandes, le jugement énonce que l'instance a été introduite le 12 décembre 2011 ; que l'article 15 de la loi n° 2012-325 du 7 mars 2012, qui a validé les délibérations des assemblées générales sous la seule réserve des décisions judiciaires passées en force de chose jugée, est susceptible d'avoir une incidence sur l'instance en cours ; qu'il convient d'examiner s'il y a un impérieux motif d'intérêt général susceptible d'être évoqué ; qu'aucun élément n'est versé par le Fonds sur ce point mettant en exergue les conséquences du non-recouvrement d'une partie des cotisations en cause ; que dès lors, la non-conventionnalité de l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 sera retenue dans la présente instance ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 429-28 du code de l'environnement ne prévoyant pas la convocation d'une assemblée générale du Fonds pour élaborer des statuts types avant leur approbation par le préfet, la validation par l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 de l'assemblée constitutive à raison des conditions d'élaboration des statuts sans assemblée générale préalable était superfétatoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour accueillir l'exception de nullité de l'assemblée générale constitutive du Fonds, le jugement énonce que la cour d'appel de Metz a relevé dans un arrêt du 14 septembre 2011 que le procès-verbal d'adoption des statuts n'était pas régulier en ce qu'il ne mentionnait pas le nombre de voix des membres présents et représentés, ni non plus aucune liste des membres présents ou représentés ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'arrêt du 14 septembre 2011 était intervenu dans un litige distinct relatif à la validité de l'assemblée constitutive du Fonds d'indemnisation des dégâts des sangliers de la Moselle et que, pour motiver sa décision, le juge doit se déterminer d'après les circonstances particulières du procès et non par voie de référence à des causes déjà jugées, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu se statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 septembre 2013, entre les parties, par le tribunal d'instance de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Guebwiller ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer au Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de de sangliers du Haut-Rhin la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour le Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sangliers du Haut-Rhin
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR écarté l'application de l'article 15 de la loi du 7 décembre 2012 pour non-conventionnalité, D'AVOIR fait droit à l'exception de nullité de l'assemblée générale constitutive du Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sanglier du Haut-Rhin du 3 septembre 2005 et D'AVOIR débouté le FDIDS du Haut-Rhin de toutes ses demandes.
AUX MOTIFS QUE « sur la non-conventionnalité de l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 au regard l'article 6 § 1 de la Convention, que la Cour Européenne des Droits de l'Homme pose : - que le pouvoir législatif n'est pas empêché de réglementer en matière civile, par de nouvelles dispositions à portée rétroactive, des droits découlant de lois en vigueur - que le principe de la prééminence du droit et la notion de procès équitable s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire du litige (arrêt produit par M. Jean X... du 25 novembre 2010, § 46) ; qu'elle précise, concernant l'espèce qui lui est soumise, qu'elle "est amenée à se prononcer sur la question de savoir si la loi du décembre 2003 a porté atteinte au caractère équitable de la procédure, et à l'égalité des armes, en modifiant, en cours d'instance, l'issue de celle-ci" (ibid. § 47) ; qu'en l'espèce, l'instance a été introduite le 12 décembre 2011, soit antérieurement à la loi en cause ; que celle-ci a validé les délibérations des assemblées générales sous la seule réserve des décisions judiciaires passées en force de chose jugée ; que tel n'est pas le présent cas, puisque ladite loi était susceptible d'avoir une incidence sur une instance en cours non jugée ; que dès lors, il convient d'examiner s'il y a un impérieux motif d'intérêt général susceptible d'être invoqué ; qu'en l'occurrence, si le principe de l'indemnisation des dégâts de sangliers est clairement un objectif d'intérêt général, visant à concilier les intérêts divergents des agriculteurs et des chasseurs, le caractère impérieux du motif, quand il a une dimension financière, doit pouvoir être jaugé, tant au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qu'au regard de celle de la Cour européenne, plus exigeante encore ; qu'aucun élément n'est versé par le Fonds départemental d'indemnisation des dégâts du sanglier du Haut-Rhin sur ce point, mettant en exergue les conséquences du non-recouvrement d'une partie des cotisations en cause -s'agissant ici d'un montant relevant du dernier ressort du Tribunal d'instance - ; que, dès lors, la non-conventionnalité de l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 sera retenue dans la présente instance ».
1°/ ALORS QUE l'article 15 de la loi n° 2012-325 du 7 mars 2012, en tant qu'il garantit l'indemnisation des victimes de dommages causés par les sangliers, poursuit un impérieux motif d'intérêt général distinct d'un simple motif financier ; que, à l'occasion des travaux préparatoires de la loi, il a été relevé que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Metz faisait obstacle au paiement par le FDIDS « des indemnisations dues aux exploitants agricoles à raison des dégâts causés par les sangliers » (Jérôme Y..., Rapport Ass. Nat., 8 février 2012) ; qu'ainsi, en jugeant qu'était contraire à l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme la disposition précitée, alors que l'existence d'un motif impérieux d'intérêt général s'évinçait de son objet même, consistant à garantir au FDIDS du Haut-Rhin les ressources nécessaires à l'indemnisation des victimes de dommages causés par les sangliers, le tribunal d'instance a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales par fausse application et l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 par refus d'application.
2°/ ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces versées au débat que le recouvrement des cotisations dues par les titulaires d'un droit de chasse en vertu des dispositions législatives contestées faisait l'objet de nombreuses contestations en justice (Prod. 6) ; qu'ainsi, en jugeant qu'aucun élément n'est versé par le FDIDS du Haut-Rhin qui mettrait en exergue les conséquences du non-recouvrement d'une partie des cotisations en cause, sans analyser les pièces versées au débat qui, à travers les multiples instances judiciaires qu'elles relataient, témoignaient de l'ampleur du mouvement de non-paiement des cotisations et de ses répercussions sur l'indemnisation des victimes de dégâts causés par les sangliers, le tribunal d'instance a méconnu l'article 455 du Code de procédure civile pris ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.
3°/ ALORS QUE, en tout état de cause, l'article L. 429-28 du code de l'environnement ne prévoit pas la convocation d'une assemblée générale du Fonds Départemental d'Indemnisation des Dégâts de Sangliers pour élaborer les statuts types avant leur approbation par le préfet ; que, par conséquent, la loi de « validation » du 7 mars 2012 n'a pas validé un acte « nul » mais a simplement anticipé de façon superfétatoire et en réalité inutile l'interprétation retenue par la Cour de cassation de l'article L. 429-28 du code de l'environnement ; que cette interprétation a vidé de leur objet les critiques vainement formulées à l'encontre de l'assemblée générale constitutive du FDIDS du Haut-Rhin ; qu'ainsi, en retenant que l'article 15 de la loi du 7 mars 2012, en tant qu'il constituait une loi de validation, était contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme, le tribunal d'instance de Colmar a violé par fausse application l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme et l'article 15 de la loi du 7 mars 2012 par refus d'application.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR fait droit à l'exception de nullité de l'assemblée générale constitutive du Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sanglier du Haut-Rhin du 3 septembre 2005 et D'AVOIR débouté le FDIDS du Haut-Rhin de toutes ses demandes.
AUX MOTIFS QUE « sur l'exception de nullité de l'assemblée générale constitutive du Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sanglier du Haut-Rhin, et des assemblées subséquentes, que la Cour d'appel de Metz du 14 septembre 2011 a relevé dans son arrêt que le procès-verbal d'adoption des statuts n'était pas régulier en ce qu'il ne mentionnait pas le nombre de voix des membres présents et représentés (alors que le nombre de voix dépend du nombre d'hectares boisés et d'hectares non boisés, dans les limites de 1 à 10 voix par membre) ni non plus aucune liste des membres présents ou représentés ; que de tels manquements dans une procédure de vote ne peut que conduire à déclarer nulle la délibération concernée ; que c'est donc à juste titre que M. Jean X... entend tirer argument de l'exception de nullité perpétuelle de ladite assemblée constitutive et des appels de fonds qui en découlent ; qu'il sera toutefois observé que l'exception de nullité ne se confond pas avec une annulation ; qu'en conséquence, le Fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sanglier du Haut-Rhin sera débouté de toutes ses demandes ».
1°/ ALORS QU'il est interdit au juge de se prononcer par voie de disposition réglementaire et générale sur les causes qui lui sont soumises et que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; que, par un arrêt du 14 septembre 2011, la cour d'appel de Metz a prononcé la nullité de l'assemblée générale constitutive du FDIDS de Moselle ; que, en l'espèce, Monsieur Jean X... excipait de la nullité de l'assemblée générale constitutive du FDIDS du Haut-Rhin, qui ne saurait être confondu avec le FDIDS de Moselle ; qu'ainsi, en prononçant la nullité de l'assemblée générale du FDIDS du Haut-Rhin du 3 septembre 2005 en se fondant exclusivement sur les éléments relevés par la cour d'appel de Metz dans une toute autre affaire, sans même rechercher si ces prétendues irrégularités frappaient effectivement, dans l'espèce qui lui était soumise, l'assemblée constitutive du FDIDS du Haut-Rhin, la cour d'appel a violé les articles 5 et 1351 du code civil, pris ensemble l'article 455 du code de procédure civile.
2°/ ALORS QUE, devant le tribunal d'instance, l'exposant faisait valoir, dans une note en délibéré du 1er juillet 2013 autorisée par la Cour d'appel que, « contrairement à ce qui s'est produit lors de l'Assemblée Générale Constitutive du FDIDS de la Moselle, l'Assemblée Générale Constitutive du FDIDS du Haut-Rhin du 3 septembre 2005 a, quant à elle, statué dans les conditions de majorité prévues à l'article L. 429-28, 2e alinéa, du Code de l'environnement » (p. 9 § 2) ; que l'exposant offrait de prouver que l'assemblée générale constitutive du FDIDS du Haut-Rhin du 3 septembre 2005 dont la validité était querellée n'était pas exposée aux griefs retenus par la cour d'appel de Metz dans son arrêt du septembre 2011 en produisant, outre le procès-verbal de ladite assemblée, la liste des membres présent et des votants, laquelle était prétendument manquante (Prod. 9) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces éléments, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
3°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, l'article L. 429-28 du code de l'environnement ne prévoit pas la convocation d'une assemblée générale du fonds départemental d'indemnisation des dégâts de sanglier pour élaborer les statuts types avant leur approbation par le préfet ; que l'éventuelle irrégularité affectant la décision de l'assemblée générale du FDIS adoptant les statuts du fonds départemental avant son approbation par le préfet est sans emport sur les décisions d'appel de fonds ultérieurement prises par le fonds départemental ; qu'en décidant du contraire, le tribunal d'instance a violé l'article L. 429-28 du code de l'environnement.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-27618
Date de la décision : 15/01/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Colmar, 18 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 jan. 2015, pourvoi n°13-27618


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.27618
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