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14/10/2015 | FRANCE | N°14-18359

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 octobre 2015, 14-18359


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er juillet 1996 par l'Association départementale du Nord pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADNSEA) en qualité d'accueillant au sein de l'établissement Point jeune, devenu la maison départementale des adolescents (MDA) ; qu'après deux avertissements délivrés les 22 décembre 2008 et 17 juillet 2009, il a été licencié pour faute grave le 18 juin 2010 ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que l'employe

ur fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement du 22 décembre 2008, alors,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er juillet 1996 par l'Association départementale du Nord pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADNSEA) en qualité d'accueillant au sein de l'établissement Point jeune, devenu la maison départementale des adolescents (MDA) ; qu'après deux avertissements délivrés les 22 décembre 2008 et 17 juillet 2009, il a été licencié pour faute grave le 18 juin 2010 ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement du 22 décembre 2008, alors, selon le moyen :
1°/ que la notion de procès équitable requiert que le juge d'appel ait réellement examiné les questions essentielles qui lui ont été soumises et qu'il ne se soit pas contenté d'entériner purement et simplement les conclusions d'une juridiction inférieure ; qu'en l'espèce, l'association ADNSEA critiquait de manière circonstanciée, dans ses conclusions d'appel, les motifs par lesquels le conseil de prud'hommes de Lille, dans son jugement du 14 février 2013, avait conclu à l'annulation de l'avertissement prononcé à l'encontre de M. X... le 22 décembre 2008 ; que, pour confirmer ce jugement, la cour d'appel s'est bornée à faire sienne la motivation des premiers juges ; qu'en statuant ainsi, sans examiner réellement et concrètement le bien-fondé de l'avertissement litigieux, la cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et c'est au vu des éléments fournis par les deux parties que le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en annulant l'avertissement prononcé à l'encontre de M. X..., le 22 décembre 2008, faute d'élément probant versé par l'association ADNSEA, la cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve exclusivement sur l'employeur a violé l'article L. 1333-1 du code du travail ;
3°/ que le juge doit respecter l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, M. X... se bornait, dans ses écritures oralement reprises, à fournir des justifications aux faits qui lui était reprochés au soutien de l'avertissement du 22 décembre 2008 en prétendant n'avoir « fait que rapporter la vérité » sans pour autant remettre en cause le contenu même des propos dénoncés ; qu'en reprochant à l'employeur, pour annuler l'avertissement du 22 décembre 2008, de ne fournir aucun élément probant, sans tenir compte de ce que la teneur des propos reprochés au salarié n'était pas contestée par ce dernier et donc acquise aux débats, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que le salarié ne peut valablement remettre en cause une sanction qu'il s'est gardé de contester pendant des années admettant de la sorte le bien-fondé de celle-ci ; que l'association ADNSEA faisait valoir qu'avant son licenciement et la saisine du conseil de prud'hommes, le 13 octobre 2010, le salarié n'avait jamais contesté l'avertissement prononcé à son encontre, le 22 décembre 2008,, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire s'il lui était apparu injustifié ; qu'en annulant ledit avertissement, sans s'expliquer sur l'absence de contestation de celui-ci, pendant des années, par le salarié de nature à révéler sa reconnaissance de son bien-fondé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1 du code du travail ;
5°/ qu'abuse de sa liberté d'expression, le salarié qui met publiquement en cause, de façon provocatrice et répétée, la crédibilité et l'autorité de sa hiérarchie, ce qui préjudicie à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en l'espèce, M. X... avait fait l'objet, le 22 décembre 2008, d'un avertissement pour avoir « à l'occasion de l'assemblée générale du 24 octobre 2008 à laquelle j'avais convié les salariés de Point jeunes et du service droit des jeunes, assemblée qui se tenait en présence de Mme Y..., administratrice déléguée de l'ADNSEA et de M. Z..., secrétaire général de l'ADNSEA », déclaré que les propos du directeur général, M. A..., « n'étaient pas « crédibles » mettant ainsi en cause sa qualité de représentant de l'employeur », pour avoir ensuite « sans preuve, porté gravement atteinte au professionnalisme de M. B..., mettant ainsi en cause les relations professionnelles qu'il établirait avec les salariés » et pour avoir enfin adopté une « attitude peu respectueuse » notamment à l'égard du « chef de service du service Droit des jeunes » nuisible « à la prise de parole des autres salariés, lors de cette assemblée générale et aux conditions d'un dialogue s'inscrivant dans un cadre de travail » ; qu'en jugeant que ces faits relevaient du droit à la liberté d'expression sur les conditions générales de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail ;
Mais attendu d'abord, que ne méconnaît pas les exigences du procès équitable la juridiction d'appel qui, en rejetant un recours, se borne à faire siens les motifs de la décision qu'elle confirme ;
Attendu ensuite, qu'après avoir relevé que l'avertissement sanctionnait le salarié pour avoir déclaré que les propos du directeur général n'étaient pas crédibles et que la direction avait délibérément écarté les accueillants des Points jeunes de la participation aux journées nationales des MDA, la cour d'appel, qui n'a pas modifié l'objet du litige, a pu retenir que de telles critiques qui se rapportaient aux conditions générales de travail, tenues en des termes qui n'étaient pas injurieux, diffamatoires ou excessifs, ne caractérisaient pas un abus dans la liberté d'expression du salarié ; que le moyen, inopérant en sa troisième branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement du 17 juillet 2009, alors, selon le moyen :
1°/ que la notion de procès équitable requiert que le juge d'appel ait réellement examiné les questions essentielles qui lui ont été soumises et qu'il ne se soit pas contenté d'entériner purement et simplement les conclusions d'une juridiction inférieure ; qu'en l'espèce, l'association ADNSEA critiquait de manière circonstanciée, dans ses conclusions d'appel d'appel les motifs motifs par lesquels le conseil de prud'hommes de Lille, dans son jugement du 14 février 2013, avait conclu à l'annulation de l'avertissement prononcé à l'encontre de M. X... le 17 juillet 2009 ; que, pour confirmer ce jugement, la cour d'appel s'est bornée à faire sienne la motivation des premiers juges ; qu'en statuant ainsi, sans examiner réellement et concrètement le bien le bien-fondé de l'avertissement litigieux, la cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable, en violation de l'article 6 § 1 la Convention européenne sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et c'est au vu des éléments fournis par les deux parties que le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en annulant l'avertissement prononcé à l'encontre de M. X..., le 17 juillet 2009, faute d'élément probant versé par l'association ADNSEA, la cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve exclusivement sur l'employeur a violé l'article L. 1333-1 du code du travail ;
3°/ que le juge doit respecter l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, M. X... se bornait, dans ses écritures oralement reprises, à fournir des justifications aux faits qui lui était reprochés au soutien de l'avertissement du 22 décembre 2008 en prétendant n'avoir fait que rapporter la vérité et n'exprimer qu'un avis et non une critique sans pour autant remettre en cause le contenu même des propos dénoncés ; qu'en reprochant à l'employeur, pour annuler l'avertissement litigieux, de ne fournir aucun élément probant, sans tenir compte de ce que la teneur des propos reprochés au salarié n'était pas contestée par ce dernier et donc acquise aux débats, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que le salarié ne peut valablement remettre en cause une sanction qu'il s'est gardé de contester après qu'il lui a été notifiée admettant de la sorte le bien-fondé de celle-ci ; que l'association ADNSEA faisait valoir qu'avant son licenciement et la saisine du conseil de prud'hommes, le 13 octobre 2010, le salarié n'avait jamais contesté l'avertissement prononcé à son encontre, le 22 décembre 2008, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire s'il lui était apparu injustifié ; qu'en annulant ledit avertissement, sans s'expliquer sur l'absence de contestation de celui-ci par le salarié de nature à révéler sa reconnaissance de son bien-fondé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1 du code du travail ;
5°/ qu'abuse de sa liberté d'expression, le salarié qui met publiquement en cause, de façon provocatrice et répétée, la crédibilité et l'autorité de sa hiérarchie, ce qui préjudicie à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en l'espèce, M. X... avait fait l'objet, le 17 juillet 2009, d'un second avertissement pour avoir mis en cause la crédibilité de l'employeur, au cours d'une réunion à laquelle assistaient notamment et pour la première fois « deux infirmiers du CHRU (futur partenaire) » en accusant ce dernier de « nous mentir depuis cinq ans », et en affirmant, quelques jours plus tard, « de nouveau en réunion, avec nos futurs partenaires du CHRU », « faire l'objet d'une intimidation de la part de sa hiérarchie » ce qui avait été « extrêmement préjudiciable au bon fonctionnement du service et aux relations avec le futur partenaire hospitalier » ; qu'en jugeant que ces faits relevaient du droit à la liberté d'expression sur les conditions générales de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail ;
6°/ qu'un fait fautif peut à lui seul donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; qu'en jugeant, pour annuler l'avertissement prononcé le 17 juillet 2009, que les faits reprochés au salarié étaient datés de plus d'un mois (le plus ancien datant du 12 juin 2009), la cour d'appel qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1332-4 et L. 1333-1 du code du travail ;
Mais attendu d'abord, que ne méconnaît pas les exigences du procès équitable la juridiction d'appel qui, en rejetant un recours, se borne à faire siens les motifs de la décision qu'elle confirme ;
Attendu ensuite, qu'après avoir relevé que l'avertissement sanctionnait le salarié pour avoir déclaré lors d'une réunion que « la direction nous ment depuis cinq ans » et s'être plaint de faire l'objet d'intimidation de la part de sa hiérarchie pour le forcer à retirer ses accusations, la cour d'appel, qui n'a pas modifié l'objet du litige, a pu retenir que de tels propos qui se rapportaient aux conditions générales de travail, tenus en des termes qui n'étaient pas injurieux, diffamatoires ou excessifs, ne caractérisaient pas un abus dans la liberté d'expression du salarié ; que le moyen, inopérant en ses troisième et sixièmes branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur les troisième et quatrième moyens du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas de statuer par décision spécialement motivée sur ces moyens, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié, qui est recevable :
Vu l'article 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 ;
Attendu que selon ce texte intitulé « conditions générales de discipline », sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux sanctions disciplinaires telles qu'une observation, un avertissement ou une mise à pied ;
Attendu qu'après avoir annulé les deux avertissements et écarté la faute grave, l'arrêt déclare le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'annulation judiciaire des avertissements rendait sans cause réelle et sérieuse le licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejette les demandes de M. X... de dommages-intérêts au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 28 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne l'association ADNSEA aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association ADNSEA et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné l'employeur à lui verser une somme à titre de dommages et intérêts et d'avoir dit que son licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE « La lettre de licenciement vise la faute grave et précise : « Le mercredi 5 mai 2010, lors d'un point de liaison (...) vous avez exposé (...) la prise en charge d'une adolescente (...) vous avez évoqué la pathologie mentale de type schizophrénique selon l'intéressée. D'après les faits que vous avez rapportés, celte adolescente a réalisé ces dernières semaines au moins 2 tentatives de suicide, a bénéficié d'un séjour de réanimation et d'une hospitalisation à la demande d'un tiers. (...) Vous n'avez pas sollicité l'avis du responsable médical de l'établissement en choisissant de vous emparer vous-même tant du diagnostic médical que de la thérapeutique (...) Par ailleurs (...) vous avez justifié le refus de lui demander son nom en considérant que cette demande était préjudiciable à votre conception du travail (...) Le 6 mai 2010, le docteur Maud C... rapporte dans un point de liaison la situation d'un adolescent (...) Elle (...) se heurte à vos critiques dont les termes mettent en cause son diagnostic ne voyant dans cette situation pour ce qui vous concerne qu'une banale crise d'adolescence avec un gros conflit de génération. (...) Ces agissements outrepassent gravement votre rôle et votre fonction d'éducateur. Ils présentent un réel danger pour les adolescents en situation de fragilité et de vulnérabilité psychique qui nécessitent un appui médical auquel le projet pluridisciplinaire de l'établissement vise à répondre (...) En refusant de tenir compte du diagnostic médical et de recourir à l'avis (...) du médecin de l'établissement, vous remettez en cause son autorité. Vous engagez par ailleurs sa responsabilité, celle du CHRU de Lille partenaire du projet et celle de l'ADNSEA. » A l'appui de ces griefs, l'employeur communique un rapport de Mme le docteur C... qui affirme que, lors de la réunion du 5 mai, M. X... « a fait barrage au soin psychique pour une adolescente dont l'état de santé le nécessitait sérieusement ». Elle relève que l'intéressée est suivie au sein de la MDA depuis un an et demi et que le salarié a déclaré vouloir s'occuper lui-même de la malade. Elle affirme que l'Intéressé refuse de demander le nom de la personne pour préserver l'anonymat indispensable à la rencontre. Le lendemain elle rapporte la situation d'un adolescent pour lequel elle a proposé une prise en charge par la MDA et se heurte à M. X... qui remet en cause son diagnostic de dépression. Elle conclut en posant la question de l'adhésion de M. X... aux principes de fonctionnement de la MDA et s'interroge sur sa fiabilité compte tenu de la rétention d'informations et de l'absence de travail partenariat. L'intimé conteste le fait d'avoir retenu des informations. Il affirme que le nom de la personne venue en consultation, une jeune femme de 22 ans et non une adolescente, était connu de tout le service depuis le 10 octobre 2009, ce que confirment M. D... (accueillant) et Mme E... (éducatrice spécialisée). Il conteste avoir effectué un diagnostic médical ou thérapeutique. Il affirme qu'un point avait été fait sur la situation de l'intéressée avec Mme C... le 20 avril 2010. Mlle F... confirme par attestation avoir rencontré M. X... à plusieurs reprises lors de ses venues à la MDA. Elle rapporte que celui-ci lui a toujours conseillé d'aller voir sa psychologue, son médecin ou de rencontrer les infirmiers du centre. Ces témoignages, s'ils imposent d'écarter les reproches de mise en danger des jeunes venues en consultation, de refus de recourir à un avis médical et de mise en jeu de la responsabilité de l'association, du médecin ou du CHRU, ne contredisent cependant pas le fait qu'au cours de la réunion du 5 mai, M. X... n'a pas donné à Mme C... toutes les informations dont il disposait. M. D... et Mme E... confirment implicitement que le nom de Mlle F... n'a pas été prononcé lors de cette réunion : « Didier X... a présenté au médecin Maud C... la situation d'une jeune femme (...) J'ai pu entendre (...) des propos connus depuis longtemps (...) » Les témoignages de M. H... (documentaliste) et Mme I... (accueillante) sont également communiqués par l'employeur. Ils déclarent avoir rencontré Mlle F... le 6 mai 2010 et, alarmés par son état de santé, l'avoir orientée vers l'espace santé de la MDA où elle a rencontré un infirmier. Es ajoutent qu'au cours du « point de transmission » avec l'équipe de l'après-midi M. X... a critiqué assez violemment la décision de l'équipe du matin qu'il a considéré comme une trahison, l'équipe éducative ayant la capacité de gérer ce type de problème. Cet épisode ne constitue pas un grief car il n'est pas évoqué dans la lettre de licenciement, mais il permet de comprendre l'état d'esprit du salarié quand il évoquait, avec le médecin responsable, le cas d'une personne déjà connue du service, sans prononcer son nom. Ces témoins, dont rien ne permet douter de la sincérité malgré les dénégations de M. X..., replacent le conflit dans le contexte du passage de l'ancien dispositif « point jeunes » à celui de la MDA depuis janvier 2010 dont le protocole de fonctionnement prévoit la réunion des dispositifs sanitaires, sociaux, éducatifs et juridiques dont les jeunes peuvent avoir besoin, sous l'égide, pour tout ce qui concerne la santé, d'un pédopsychiatre. Il met en perspective l'opinion émise par le salarié le 6 mai contestant le diagnostic posé par Mme C.... Cette attitude d'opposition voire de défiance, stigmatisée dans la lettre de licenciement, caractérise une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais ne constitue toutefois pas une faute grave » ;
ALORS QU'il résulte de l'article 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 que, sauf faute grave, il ne peut y avoir de licenciement pour faute d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux sanctions disciplinaires ; qu'il se déduit de ces stipulations, d'une part, que l'annulation judiciaire de sanctions disciplinaires prononcées préalablement au licenciement a pour effet de priver celui-ci de cause réelle et sérieuse et, d'autre part, que, si le juge peut requalifier un licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, c'est à la condition qu'il constate que ledit licenciement a été précédé d'au moins deux sanctions disciplinaires ; qu'en l'espèce, en retenant, après avoir annulé les deux avertissements notifiés à Monsieur X... préalablement à son licenciement, que, si les faits reprochés au salarié ne constituaient pas un faute grave, ils caractérisaient néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement, la Cour d'appel a violé les stipulations conventionnelles susvisées. Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'association ADNSEA, demanderesse au pourvoi incident éventuel.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que l'avertissement du 22 décembre 2008 était infondé et l'a annulé ;
AUX MOTIFS QUE « Sur les avertissements : L'avertissement du 22 décembre 2008 sanctionne les affirmations de M. X... au cours d'une assemblée générale du 24 octobre, suivant lesquelles les propos du directeur n'étaient pas crédibles et que la direction aurait délibérément écarté les accueillants des journées nationales des MDA. Celui du 17 juillet 2009 sanctionne les propos tenus au cours d'une réunion du 9 juin 2009 au cours de laquelle M. X... aurait déclaré : « La direction nous ment depuis 5 ans ». A l'appui des mesures prises, l'employeur invoque un abus dans la liberté d'expression. C'est à juste titre que le jugement déféré a considéré que l'abus n'était pas caractérisé et a annulé ces sanctions » ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur l'avertissement du 22 décembre 2008 Attendu que M. X... demande au Conseil de céans d'annuler l'avertissement notifié le 22 décembre 2008. Vu les articles L 1332-1 et L 1332-2 du code du travail qui disposent que les griefs portés à l'encontre doivent être écrits, motivés et notifiés à l'intéressé ; Sur ce point, la lettre du 22 décembre 2008 répond à l'ensemble de ces dispositions. Vu l'article L 1333-1 du code du travail sur le contrôle du juge sur la régularité de la procédure et du bien-fondé du ou des motifs qui ont conduit l'employeur à user de son pouvoir disciplinaire ; Attendu que le même article dispose que l'employeur doit fournir au juge prud'homal les éléments qu'il a retenus pour prendre sa décision. Qu'au vu de ces éléments, le Conseil forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utile. Si un doute subsiste, il profite au salarié. L'article L 1333-2 du même code dispose que le juge prud'homal peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. Ainsi, il incombe à l'employeur de fournir au Conseil de Prud'hommes des éléments objectifs, observables et vérifiables pour permettre à la juridiction de vérifier le bien-fondé de la mesure prise à l'encontre du salarié le 22 décembre 2008. L'avertissement du 22 décembre 2008 fait état de deux griefs : 1°- Lors de l'assemblée générale du 24 octobre 2008 et en présence de certains responsables et salariés de l'association, M. X... aurait rétorqué à M. G... Directeur Général que son propos n'était pas crédible. 2°- M. X... aurait affirmé que M. B... aurait délibérément écarté les accueillants des Points Jeunes pour la participation aux 3ème journées nationales des MDA. « Cette information aurait été donnée par M. B... à un autre salarié dont vous n'avez pas voulu décliner l'identité de peur qu'il subisse des représailles de la part de sa hiérarchie. Ainsi, vos propos mettent en cause les relations professionnelles entre les salariés et votre comportement les empêche de s'exprimer librement et votre attitude est irrespectueuse à l'égard de M. L... chef du service des Droits des Jeunes ». C'est donc au regard des griefs Invoqués dans Je courrier d'avertissement et des pièces relatives à ces derniers que le contrôle juridictionnel peut et doit s'opérer. En premier lieu, il est à observer que les reproches invoqués à l'encontre de. M. X... relèvent plus du droit d'expression des salariés dans le cadre strict du travail que du dénigrement infondé à l'encontre de l'employeur ou de l'entreprise. En effet, les propos qu'aurait tenus M. X... sont certes des critiques, mais en lien direct avec les tâches à accomplir. Attendu que le droit à l'expression sur les conditions générales de travail est un droit fondamental. En conséquence, il faudrait démontrer que lesdits propos seraient contraires à l'ordre moral et auraient pour objet ou pour effet de remettre sérieusement en cause :- L'autorité hiérarchique,- L'organisation du travail décidée par l'employeur,- L'exécution générale du travail. Outre le fait que les griefs contenus dans la lettre de sanction n'apportent en rien une quelconque atteinte aux règles susvisées mais force est de constater qu'aucune pièce probante n'est versée au dossier par l'ADNSEA, aussi et au vu de ce qui précède, le Conseil dit et juge que l'avertissement du 22 décembre 2008 n'est fondé sur aucun élément sérieux et contraire à une exécution normale des fonctions de M. X... et annule ladite sanction en vertu de l'article L 1333-1 du code du travail. »
1°) ALORS QUE la notion de procès équitable requiert que le juge d'appel ait réellement examiné les questions essentielles qui lui ont été soumises et qu'il ne se soit pas contenté d'entériner purement et simplement les conclusions d'une juridiction inférieure ; qu'en l'espèce, l'association ADNSEA critiquait de manière circonstanciée, dans ses conclusions d'appel (cf. p. 7, 10 à 12, p. 18 et 25), les motifs par lesquels le Conseil de prud'hommes de LILLE, dans son jugement du 14 février 2013, avait conclu à l'annulation de l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur X... le 22 décembre 2008 ; que, pour confirmer ce jugement, la Cour d'appel s'est bornée à faire sienne la motivation des premiers juges ; qu'en statuant ainsi, sans examiner réellement et concrètement le bien-fondé de l'avertissement litigieux, la Cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ;
2°) ALORS QU'en cas de litige, le Conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et c'est au vu des éléments fournis par les deux parties que le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en annulant l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur X..., le 22 décembre 2008, faute d'élément probant versé par l'association ADNSEA, la Cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve exclusivement sur l'employeur a violé l'article L. 1333-1 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, Monsieur X... se bornait, dans ses écritures oralement reprises, à fournir des justifications aux faits qui lui était reprochés au soutien de l'avertissement du 22 décembre 2008 en prétendant n'avoir « fait que rapporter la vérité » sans pour autant remettre en cause le contenu même des propos dénoncés ; qu'en reprochant à l'employeur, pour annuler l'avertissement du 22 décembre 2008, de ne fournir aucun élément probant, sans tenir compte de ce que la teneur des propos reprochés au salarié n'était pas contestée par ce dernier et donc acquise aux débats, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le salarié ne peut valablement remettre en cause une sanction qu'il s'est gardé de contester pendant des années admettant de la sorte le bien-fondé de celle-ci ; que l'association ADNSEA faisait valoir qu'avant son licenciement et la saisine du Conseil de prud'hommes, le 13 octobre 2010, le salarié n'avait jamais contesté l'avertissement prononcé à son encontre, le 22 décembre 2008, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire s'il lui était apparu injustifié ; qu'en annulant ledit avertissement, sans s'expliquer sur l'absence de contestation de celui-ci, pendant des années, par le salarié de nature à révéler sa reconnaissance de son bien-fondé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1 du Code du travail ;
5°) ALORS QU'abuse de sa liberté d'expression, le salarié qui met publiquement en cause, de façon provocatrice et répétée, la crédibilité et l'autorité de sa hiérarchie, ce qui préjudicie à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en l'espèce, Monsieur X... avait fait l'objet, le 22 décembre 2008, d'un avertissement pour avoir « à l'occasion de l'assemblée générale du 24 octobre 2008 à laquelle j'avais convié les salariés de Point Jeunes et du service droit des jeunes, assemblée qui se tenait en présence de Madame Y..., administratrice déléguée de l'ADNSEA et de Monsieur Z..., secrétaire général de l'ADNSEA », déclaré que les propos du Directeur général, Monsieur A..., « n'étai ent pas « crédible s » mettant ainsi en cause sa qualité de représentant de l'employeur », pour avoir ensuite « sans preuve, port é gravement atteinte au professionnalisme de Monsieur B..., mettant ainsi en cause les relations professionnelles qu'il établirait avec les salariés » et pour avoir enfin adopté une « attitude peu respectueuse » notamment à l'égard du « chef de service du Service Droit des Jeunes » nuisible « à la prise de parole des autres salariés, lors de cette assemblée générale et aux conditions d'un dialogue s'inscrivant dans un cadre de travail » ; qu'en jugeant que ces faits relevaient du droit à la liberté d'expression sur les conditions générales de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 1121-1 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que l'avertissement du 17 juillet 2009 était infondé et l'a annulé ;
AUX MOTIFS QUE « Sur les avertissements : L'avertissement du 22 décembre 2008 sanctionne les affirmations de M. X... au cours d'une assemblée générale du 24 octobre, suivant lesquelles les propos du directeur n'étaient pas crédibles et que la direction aurait délibérément écarté les accueillants des journées nationales des MDA. Celui du 17 juillet 2009 sanctionne les propos tenus au cours d'une réunion du 9 juin 2009 au cours de laquelle M. X... aurait déclaré : « La direction nous ment depuis 5 ans ». A l'appui des mesures prises, l'employeur invoque un abus dans la liberté d'expression. C'est à juste titre que le jugement déféré a considéré que l'abus n'était pas caractérisé et a annulé ces sanctions » ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur l'avertissement du 22 décembre 2008 Attendu que M. X... demande au Conseil de céans d'annuler l'avertissement notifié le 22 décembre 2008. Vu les articles L 1332-1 et L 1332-2 du code du travail qui disposent que les griefs portés à l'encontre doivent être écrits, motivés et notifiés à l'intéressé ; Sur ce point, la lettre du 22 décembre 2008 répond à l'ensemble de ces dispositions. Vu l'article L 1333-1 du code du travail sur le contrôle du juge sur la régularité de la procédure et du bien-fondé du ou des motifs qui ont conduit l'employeur à user de son pouvoir disciplinaire ; Attendu que le même article dispose que l'employeur doit fournir au juge prud'homal les éléments qu'il a retenus pour prendre sa décision. Qu'au vu de ces éléments, le Conseil forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utile. Si un doute subsiste, il profite au salarié. L'article L 1333-2 du même code dispose que le juge prud'homal peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. Ainsi, il incombe à l'employeur de fournir au Conseil de Prud'hommes des éléments objectifs, observables et vérifiables pour permettre à la juridiction de vérifier le bien-fondé de la mesure prise à l'encontre du salarié le 22 décembre 2008. L'avertissement du 22 décembre 2008 fait état de deux griefs : 1°- Lors de l'assemblée générale du 24 octobre 2008 et en présence de certains responsables et salariés de l'association, M. X... aurait rétorqué à M. G... Directeur Général que son propos n'était pas crédible. 2°- M. X... aurait affirmé que M. B... aurait délibérément écarté les accueillants des Points Jeunes pour la participation aux 3ème journées nationales des MDA. « Cette information aurait été donnée par M. B... à un autre salarié dont vous n'avez pas voulu décliner l'identité de peur qu'il subisse des représailles de la part de sa hiérarchie. Ainsi, vos propos mettent en cause les relations professionnelles entre les salariés et votre comportement les empêche de s'exprimer librement et votre attitude est irrespectueuse à l'égard de M. L... chef du service des Droits des Jeunes ». C'est donc au regard des griefs Invoqués dans Je courrier d'avertissement et des pièces relatives à ces derniers que le contrôle juridictionnel peut et doit s'opérer. En premier lieu, il est à observer que les reproches invoqués à l'encontre de. M. X... relèvent plus du droit d'expression des salariés dans le cadre strict du travail que du dénigrement infondé à l'encontre de l'employeur ou de l'entreprise. En effet, les propos qu'aurait tenus M. X... sont certes des critiques, mais en lien direct avec les tâches à accomplir. Attendu que le droit à l'expression sur les conditions générales de travail est un droit fondamental. En conséquence, il faudrait démontrer que lesdits propos seraient contraires à l'ordre moral et auraient pour objet ou pour effet de remettre sérieusement en cause :- L'autorité hiérarchique,- L'organisation du travail décidée par l'employeur,- L'exécution générale du travail. Outre le fait que les griefs contenus dans la lettre de sanction n'apportent en rien une quelconque atteinte aux règles susvisées mais force est de constater qu'aucune pièce probante n'est versée au dossier par l'ADNSEA, aussi et au vu de ce qui précède, le Conseil dit et juge que l'avertissement du 22 décembre 2008 n'est fondé sur aucun élément sérieux et contraire à une exécution normale des fonctions de M. X... et annule ladite sanction en vertu de l'article L 1333-1 du code du travail. Sur l'avertissement du 17 juillet 2009 Sur cet avertissement, il y a lieu également de se référer aux motifs invoqués dans le courrier de notification de la sanction. A cet effet, les griefs invoqués par l'employeur relèvent de nouveau un comportement et un manquement à ses obligations professionnelles. Ainsi, il est invoqué 3 motifs à l'appui de la sanction à savoir : 1°- Le salarié serait de nouveau intervenu lors d'une réunion de travail du 9 juin 2009 que l'employeur mentait depuis 5 ans occasionnant une gêne parmi les deux infirmiers du CHRU (futurs partenaires) ; 2°- Le 12 juin 2009, à ma demande d'explication et en présence de Mme J... sur vos propos du 9, vous vous êtes contenté de me répondre par une réitération de vos commentaires sans apporter le moindre étayage ; 3°- Le 16 juin 2009 et de nouveau devant les futurs partenaires du CHRU, vous avez déclaré faire l'objet d'une intimidation de la part de votre hiérarchie vous contraignant à retirer vos accusations mensongères. Outre le fait que les faits reprochés sont datés de plus d'un mois avant la décision de l'employeur, outre le fait que lesdits reproches sont de la même teneur de ceux qui ont été relevés par le Conseil en matière du droit fondamental du salarié à s'exprimer sur les conditions de travail et de ce qui s'y rattache, force est de constater à nouveau qu'aucun élément probant n'est versé aux débats pour venir justifier le bien-fondé de la sanction intervenue. En conséquence et au vu de ce qui précède, le Conseil dit et juge que l'avertissement du 17 juillet 2009 n'est fondé sur aucun élément sérieux et contraire à une exécution normale des fonctions de M. X... et annule ladite sanction en vertu de l'article L. 1333-1 du code du travail. »
1°) ALORS QUE la notion de procès équitable requiert que le juge d'appel ait réellement examiné les questions essentielles qui lui ont été soumises et qu'il ne se soit pas contenté d'entériner purement et simplement les conclusions d'une juridiction inférieure ; qu'en l'espèce, l'association ADNSEA critiquait de manière circonstanciée, dans ses conclusions d'appel (cf. p. 7, 10 à 12, p. 18 et 25), les motifs par lesquels le Conseil de prud'hommes de LILLE, dans son jugement du 14 février 2013, avait conclu à l'annulation de l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur X... le 17 juillet 2009 ; que, pour confirmer ce jugement, la Cour d'appel s'est bornée à faire sienne la motivation des premiers juges ; qu'en statuant ainsi, sans examiner réellement et concrètement le bien-fondé de l'avertissement litigieux, la Cour d'appel a méconnu les exigences du procès équitable, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ;
2°) ALORS QU'en cas de litige, le Conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction et c'est au vu des éléments fournis par les deux parties que le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en annulant l'avertissement prononcé à l'encontre de Monsieur X..., le 17 juillet 2009, faute d'élément probant versé par l'association ADNSEA, la Cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve exclusivement sur l'employeur a violé l'article L. 1333-1 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, Monsieur X... se bornait, dans ses écritures oralement reprises, à fournir des justifications aux faits qui lui était reprochés au soutien de l'avertissement du 17 juillet 2009 en prétendant n'avoir fait que rapporter la vérité et n'exprimer qu'un avis et non une critique sans pour autant remettre en cause le contenu même des propos dénoncés ; qu'en reprochant à l'employeur, pour annuler l'avertissement litigieux, de ne fournir aucun élément probant, sans tenir compte de ce que la teneur des propos reprochés au salarié n'était pas contestée par ce dernier et donc acquise aux débats, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le salarié ne peut valablement remettre en cause une sanction qu'il s'est gardé de contester après qu'il lui a été notifiée admettant de la sorte le bien-fondé de celle-ci ; que l'association ADNSEA faisait valoir qu'avant son licenciement et la saisine du Conseil de prud'hommes, le 13 octobre 2010, le salarié n'avait jamais contesté l'avertissement prononcé à son encontre, le 17 juillet 2009, ce qu'il n'aurait pas manqué de faire s'il lui était apparu injustifié ; qu'en annulant ledit avertissement, sans s'expliquer sur l'absence de contestation de celui-ci par le salarié de nature à révéler sa reconnaissance de son bien-fondé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1 du Code du travail ;
5°) ALORS QU'abuse de sa liberté d'expression, le salarié qui met publiquement en cause, de façon provocatrice et répétée, la crédibilité et l'autorité de sa hiérarchie, ce qui préjudicie à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en l'espèce, Monsieur X... avait fait l'objet, le 17 juillet 2009, d'un second avertissement pour avoir mis en cause la crédibilité de l'employeur, au cours d'une réunion à laquelle assistaient notamment et pour la première fois « deux infirmiers du CHRU (futur partenaire) » en accusant ce dernier de « nous ment ir depuis cinq ans », et en affirmant, quelques jours plus tard, « de nouveau en réunion, avec nos futurs partenaires du CHRU », « faire l'objet d'une intimidation de la part de sa hiérarchie » ce qui avait été « extrêmement préjudiciable au bon fonctionnement du service et aux relations avec le futur partenaire hospitalier » ; qu'en jugeant que ces faits relevaient du droit à la liberté d'expression sur les conditions générales de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 1121-1 du Code du travail ;
6°) ALORS QU'un fait fautif peut à lui seul donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires dans le délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; qu'en jugeant, pour annuler l'avertissement prononcé le 17 juillet 2009, que les faits reprochés au salarié étaient datés de plus d'un mois (le plus ancien datant du 12 juin 2009), la Cour d'appel qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1332-4 et L. 1333-1 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... reposait une cause réelle et sérieuse mais pas sur une faute grave, d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a condamné l'association ADNSEA à payer au salarié la somme de 2. 268, 35 ¿ à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, plus 226, 83 ¿ pour les congés, la somme de 6093, 28 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis, plus 609, 32 ¿ pour les congés, la somme de 17 360, 53 ¿ à titre d'indemnité de licenciement outre celle de 2. 000 ¿ du chef de l'article 700 du Code de procédure civile et en ce qu'il a ordonné à l'association ADNSEA de délivrer un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiée en fonction du jugement, ordonné l'exécution provisoire du jugement et fixé la moyenne des salaires à la somme de 3. 046, 61 euros et d'AVOIR condamné l'association ADNSEA à payer au salarié une somme complémentaire de 1. 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel et aux dépens d'appel ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le licenciement : La lettre de licenciement vise la faute grave et précise : « Le mercredi 5 mai 2010, lors d'un point de liaison (¿) vous avez exposé (¿) la prise en charge d'une adolescente (¿) vous avez évoqué la pathologie mentale de type schizophrénique selon l'intéressée. D'après les faits que vous avez rapportés, cette adolescente a réalisé ces dernières semaines au moins 2 tentatives de suicide, a bénéficié d'un séjour de réanimation et d'une hospitalisation à la demande d'un tiers. (¿) Vous n'avez pas sollicité l'avis du responsable médical de l'établissement en choisissant de vous emparer vous-même tant du diagnostic médical que de la thérapeutique (¿) Par ailleurs (¿) vous avez justifié le refus de lui demander son nom en considérant que cette demande était préjudiciable à votre conception du travail (¿) Le 6 mai 2010, le docteur Maud C... rapporte dans un point de liaison la situation d'un adolescent (¿) Elle (¿) se heurte à vos critiques dont les termes mettent en cause son diagnostic ne voyant dans cette situation pour ce qui vous concerne qu'une banale crise d'adolescence avec un gros conflit de génération. (¿) Ces agissements outrepassent gravement votre rôle et votre fonction d'éducateur. Ils présentent un réel danger pour les adolescents en situation de fragilité et de vulnérabilité psychique qui nécessitent un appui médical auquel le projet pluridisciplinaire de l'établissement vise à répondre (¿) En refusant de tenir compte du diagnostic médical et de recourir à l'avis (¿) du médecin de l'établissement, vous remettez en cause son autorité. Vous engagez par ailleurs sa responsabilité, celle du CHRU de Lille partenaire du projet et celle de l'ADNSEA. » A l'appui de ces griefs, l'employeur communique un rapport de Mme le docteur C... qui affirme que, lors de la réunion du 5 mai, M. X... « a fait barrage au soin psychique pour une adolescente dont l'état de santé le nécessitait sérieusement ». Elle relève que l'intéressée est suivie au sein de la MDA depuis un an et demi et que le salarié a déclaré vouloir s'occuper lui-même de la malade. Elle affirme que l'intéressé refuse de demander le nom de la personne pour préserver l'anonymat indispensable à la rencontre. Le lendemain elle rapporte la situation d'un adolescent pour lequel elle a proposé une prise en charge par la MDA et se heurte à M. X... qui remet en cause son diagnostic de dépression. Elle conclut en posant la question de l'adhésion de M. X... aux principes de fonctionnement de la MDA et s'interroge sur sa fiabilité compte tenu de la rétention d'informations et de l'absence de travail partenarial. L'intimé conteste le fait d'avoir retenu des informations. Il affirme que le nom de la personne venue en consultation, une jeune femme de 22 ans et non une adolescente, était connu de tout le service depuis le 10 octobre 2009, ce que confirment M. D... (accueillant) et Mme E... (éducatrice spécialisée) Il conteste avoir effectué un diagnostic médical ou thérapeutique. Il affirme qu'un point avait été fait sur la situation de l'intéressée avec Mme C... le 20 avril 2010. Mlle F... confirme par attestation avoir rencontré M. X... à plusieurs reprises lors de ses venues à la MDA. Elle rapporte que celui-ci lui a toujours conseillé d'aller voir sa psychologue, son médecin ou de rencontrer les infirmiers du centre. Ces témoignages, s'ils imposent d'écarter les reproches de mise en danger des jeunes venues en consultation, de refus de recourir à un avis médical et de mise en jeu de la responsabilité de l'association, du médecin ou du CHRU, ne contredisent cependant pas le fait qu'au cours de la réunion du 5 mai, M. X... n'a pas donné à Mme C... toutes les informations dont il disposait. M. D... et Mme E... confirment implicitement que le nom de Mlle F... n'a pas été prononcé lors de cette réunion : « Didier X... a présenté au médecin Maud C... la situation d'une jeune femme (¿) J'ai pu entendre (¿) des propos connus depuis longtemps (¿) » Les témoignages de M. H... (documentaliste) et Mme I... (accueillante) sont également communiqués par l'employeur. Ils déclarent avoir rencontré Mlle F... le 6 mai 2010 et, alarmés par son état de santé, l'avoir orientée vers l'espace santé de la MDA où elle a rencontré un infirmier. Ils ajoutent qu'au cours du « point de transmission » avec l'équipe de l'après midi M. X... a critiqué assez violemment la décision de l'équipe du matin qu'il a considéré comme une trahison, l'équipe éducative ayant la capacité de gérer ce type de problème. Cet épisode ne constitue pas un grief car il n'est pas évoqué dans la lettre de licenciement, mais il permet de comprendre l'état d'esprit du salarié quand il évoquait, avec le médecin responsable, le cas d'une personne déjà connue du service, sans prononcer son nom. Ces témoins, dont rien ne permet douter de la sincérité malgré les dénégations de M X..., replacent le conflit dans le contexte du passage de l'ancien dispositif « point jeunes » à celui de la MDA depuis janvier 2010 dont le protocole de fonctionnement prévoit la réunion des dispositifs sanitaires, sociaux, éducatifs et juridiques dont les jeunes peuvent avoir besoin, sous l'égide, pour tout ce qui concerne la santé, d'un pédopsychiatre. Il met en perspective l'opinion émise par le salarié le 6 mai contestant le diagnostic posé par Mme C.... Cette attitude d'opposition voire de défiance, stigmatisée dans la lettre de licenciement, caractérise une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais ne constitue toutefois pas une faute grave. Sur ses conséquences : Il convient dès lors d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. X... des dommages et intérêts pour rupture abusive et de le confirmer en ce qu'il lui a alloué des indemnités de rupture qui ne sont contestées qu'en leur principe.
ALORS QUE constitue une faute grave le fait pour un salarié d'adopter une attitude d'opposition, de blocage et même de défiance au mode de fonctionnement de l'entreprise ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'en contradiction avec le protocole de fonctionnement de la MDA prévoyant la réunion des dispositifs sanitaires, sociaux, éducatifs et juridiques dont les jeunes peuvent avoir besoin, sous l'égide, pour tout ce qui concerne la santé, d'un pédopsychiatre, Monsieur X..., éducateur spécialisé, avait d'une part refusé de donner à Mme C..., pédopsychiatre, les informations dont il disposait sur le cas d'une adolescente dont l'état de santé nécessitait une prise en charge psychique, d'autre part critiqué assez violemment la décision prise par l'équipe du matin d'orienter ladite adolescente vers l'espace santé de la MDA considérant qu'il s'agissait d'une trahison puisqu'il s'estimait qualifié pour s'en occuper, et enfin remis en cause le diagnostic médical de la pédopsychiatre sur la situation d'un adolescent pour lequel elle proposait une prise en charge par la MDA ce qui caractérisait une attitude d'opposition et même de défiance ; qu'en jugeant que ces faits, s'ils constituaient une cause réelle et licenciement, ne justifiaient par un licenciement pour faute grave, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association ADNSEA à payer à Monsieur X... la somme de 5. 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le préjudice moral : Alors que la faute grave n'est pas caractérisée et que l'employeur ne l'a invoqué qu'en interprétant la situation de manière manifestement excessive, M. X... a été mis à pied brutalement le 28 mai 2010, le directeur de l'établissement ayant interrompu une réunion afin de signifier la mesure à l'intéressé. Ce comportement constitue une violence anormale et a causé à M. X... un préjudice qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 5000 ¿ »
1°) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le chef de dispositif par lequel la Cour d'appel a dit que le licenciement du salarié ne reposait pas une faute grave emportera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif relatif au supposé préjudice moral du salarié lié au prononcé à tort d'une faute grave et d'une mise à pied conservatoire ;
2°) ALORS QUE si l'employeur peut être condamné à verser des dommages-intérêts au salarié pour procédure vexatoire, c'est à la condition que soit caractérisé un comportement fautif de sa part ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant du licenciement ; que pour attribuer au salarié la somme de 5. 000 ¿ pour le préjudice moral liée à la prétendue violence anormale de sa rupture, la Cour d'appel s'est bornée à relever que l'employeur avait à tort invoqué l'existence d'une faute grave et qu'il avait interrompu une réunion pour notifier au salarié une mise à pied ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une faute dans les circonstances de la rupture de nature à justifier l'allocation de dommages et intérêts distincts, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-18359
Date de la décision : 14/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 28 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 oct. 2015, pourvoi n°14-18359


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.18359
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