La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/11/2015 | FRANCE | N°14-17676

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 novembre 2015, 14-17676


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui exploitait, dans un immeuble appartenant à Mme Y..., un fonds de commerce de débit de boissons, a cédé, en janvier 2011, sa licence IV, avant d'être mise en liquidation judiciaire le 2 février 2011, la date de cessation de ses paiements étant fixée au 1er juin 2010 ; que le liquidateur a assigné M. Z... et la société civile immobilière
Y...
(la SCI), présentés comme pouvant être les acquéreurs de la licence, en annulation de la cession de celle-c

i ; que tout en s'opposant à cette demande, la SCI, devenue propriétaire de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui exploitait, dans un immeuble appartenant à Mme Y..., un fonds de commerce de débit de boissons, a cédé, en janvier 2011, sa licence IV, avant d'être mise en liquidation judiciaire le 2 février 2011, la date de cessation de ses paiements étant fixée au 1er juin 2010 ; que le liquidateur a assigné M. Z... et la société civile immobilière
Y...
(la SCI), présentés comme pouvant être les acquéreurs de la licence, en annulation de la cession de celle-ci ; que tout en s'opposant à cette demande, la SCI, devenue propriétaire de l'immeuble, a demandé reconventionnellement le paiement d'une somme représentant la valeur de matériels se trouvant sur les lieux qui auraient été restitués à tort au liquidateur ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCI et M. Z... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande relative à la restitution en valeur des matériels alors, selon le moyen, que celui qui acquiert un bien de bonne foi ne peut voir contester sa propriété ; qu'en retenant, pour débouter la SCI de sa demande de condamnation du liquidateur à lui verser une somme de 9 000 euros au titre de la vente du matériel qu'elle avait acquis de Mme Y..., qui n'en aurait pas été le véritable propriétaire, que l'acquéreur ne pouvait pas se prévaloir de sa bonne foi pour conforter son acquisition, la cour d'appel a violé l'article 2276 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir retenu que le fait que Mme Y..., qui soutenait avoir vendu à la SCI les matériels litigieux se trouvant dans les locaux dont elle était auparavant propriétaire bailleresse, se soit elle-même présentée, dans un acte notarié, comme propriétaire également de ces biens mobiliers, ne suffit pas à justifier sa qualité, l'arrêt relève qu'une ordonnance de référé du 8 décembre 2010 a rejeté la demande de séquestration de ces biens formée par Mme Y..., que personne n'invoque qu'un transfert de leur propriété ait pu intervenir postérieurement dans le court laps de temps restant à courir jusqu'à l'ouverture de la liquidation judiciaire, que M. Z..., gérant de la SCI, avait été informé par le notaire, lors de l'acquisition de l'immeuble, que « la détention de ce matériel poserait problème », et que les biens ont été remis au liquidateur sans contrainte ni réserves ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel n'a pas dit que l'acquéreur de ces biens meubles ne pouvait se prévaloir de sa bonne foi, mais a exclu l'existence de celle-ci en l'espèce ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 632-1, I, 2° du code de commerce ;
Attendu que, pour condamner M. Z... à restituer au liquidateur la licence, l'arrêt, après avoir indiqué que cette licence a été cédée pour le prix soit de 2 000 euros, soit de 4 000 euros, selon les pièces contradictoires du dossier, retient que l'huissier de justice a valorisé cette licence à 10 000 euros et que le liquidateur judiciaire justifie d'un prix moyen de cession dans le département du Gard de l'ordre de 20 000 euros ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les références produites par le liquidateur étaient comparables, et notamment, si elles tenaient compte des caractéristiques propres de la licence litigieuse, qui concernait une commune de 2 000 habitants sur le territoire de laquelle n'existait aucun autre débit de boissons, et si elle était transférable hors de la commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. Z... à restituer-en faisant toutes les démarches administratives de mutation-à M. A..., en sa qualité de liquidateur de Mme X..., la licence IV exploitée en son temps par cette dernière-licence de boissons de 4e catégorie-et ordonne cette restitution sous astreinte, l'arrêt rendu le 27 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la société Y... et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. Z... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné, sous astreinte, à restituer à Me A..., ès qualités, la licence IV (n° 07 ; code licence 4006) exploitée en son temps par Mme X... ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que la vente de la licence IV serait intervenue en janvier 2011, concomitamment à l'ouverture de la procédure collective de Mireille X... et à la vente des murs du fonds de commerce, en période suspecte ; que le nom de l'acquéreur, la date, le prix, la réalité du paiement demeurent l'objet de déclarations contradictoires ; qu'en effet Mireille X... a fait une " attestation " de cession à Grégory Z... le 19/ 01/ 2011 pour 4. 000 € et le 23/ 02/ 2011 pour 2. 000 € ; qu'aucun paiement n'est justifié par Grégory Z... ; que dans l'acte de prisée en la procédure collective l'huissier retenait la somme de 10. 000 € pour la licence IV ; qu'en cause d'appel Maître Pierre A... justifie de la valeur d'une licence IV dans les environs proches de NIMES, en différents actes récents, d'une valeur de l'ordre de 20. 000 € dans le département du Gard, y compris en cas de procédure collective : le 16 juin 2010 une licence IV à LANGLADE, le 22 octobre 2010 à NIMES, 14 septembre 2011 à MILHAUD, le 30 octobre 2012 à VAUVERT, le 04 août 2009 une promesse d'achat de licence IV dans la ville de LANGLADE ; que Grégory Z... a produit aux débats un acte de mutation à son profit de la licence IV en date du 10/ 01/ 2011 et une déclaration en date du 18/ 01/ 2011 pour une exploitation dans les locaux de la S. C. I. Y... par lui même de la licence IV ; qu'il a coché et complété en cet acte : " Déclare vouloir exploiter à partir du 18/ 01/ 2011... " ; qu'il ne peut donc prétendre l'avoir acquise pour éviter une exploitation par un tiers en des locaux dont la S. C. I. Y... faisait l'acquisition ; qu'à supposer même que le prix de 4000 € ait été payé - ce qui ne résulte de rien - le prix allégué est au sens de l'article L. 632- I-2 du Code de commerce un contrat commutatif en période suspecte ; que la cession de la licence IV excède donc notablement les obligations de l'autre partie ; que cette cession est en conséquence nulle et Maître Pierre A... est donc en droit d'en demander la restitution, qui sera ordonnée sous astreinte ;
1°) ALORS QUE les contrats commutatifs passés par le débiteur pendant la période suspecte ne sont nuls qu'autant que les obligations de ce dernier excèderaient notablement celles de l'autre partie ; qu'en se bornant à relever, pour dire que la cession par Mme X..., pendant la période suspecte, de la licence IV qu'elle détenait excédait notablement l'obligation de M. Z..., acquéreur, au paiement d'un prix de 4. 000 euros, et ainsi condamner celui-ci à la restituer, que le liquidateur justifiait, par la production d'actes de vente récents, de la valeur d'une licence IV dans les environs proches de Nîmes d'une valeur de l'ordre de 20. 000 euros, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les différentes références produites par le liquidateur ne concernaient pas toutes des villes plus densément peuplées que Bezouce et comptant de nombreux bars, contrairement à Bezouce qui n'en comportait aucun, et si plusieurs de ces références n'étaient pas relatives à des licences transférables, ce qui n'était pas le cas de celle de Mme X..., la cour d'appel, qui ne s'est pas attachée à comparer les caractéristiques des différentes références avec celles de la licence litigieuse, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-2 du code de commerce ;
2°) ALORS QU'en se bornant encore à relever, pour statuer comme elle l'a fait, qu'à raison de la déclaration de mutation dans laquelle il avait coché la case « déclare vouloir exploiter » le débit de boissons, M. Z... ne pouvait prétendre avoir acquis la licence à la seule fin d'éviter une exploitation par un tiers dans les locaux dont la Sci Y... venait de faire l'acquisition, sans rechercher, comme elle y était invitée, si depuis l'acquisition de la licence au début de l'année 2011, M. Z... ne s'était pas abstenu de toute exploitation de celle-ci, ce qui était de nature à établir qu'il ne l'avait acquise que pour se prémunir de son exploitation par un tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-2 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

La Sci Y... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de Me A..., ès qualités, à lui verser une somme de 9. 000 euros au titre de la vente du matériel lui appartenant ;
AUX MOTIFS QUE contrairement à ce qu'a retenu le premier juge le fait que dans un acte notarié l'ex propriétaire des murs et bailleur Janique Y... se soit présentée comme propriétaire des meubles est une justification insuffisante de sa propriété et les intimés ne peuvent se prévaloir de leur bonne foi pour conforter leur acquisition ; qu'il faut relever d'ailleurs de plus que l'huissier a écrit le 26/ 04/ 2011 à Grégory Z..., notamment : " J'ai contacté Maître B... le notaire de la vente des murs qui me confirme vous avoir averti lors de la signature de l'acte de vente que la détention de ce matériel poserait des problèmes " ; que par ailleurs les meubles ont été restitués sans contraintes physiques de l'huissier, après un inventaire effectué le 1/ 03/ 2011 en présence de Mireille X... qui n'a jamais parlé de cession intervenue au profit de quiconque et notamment au profit de l'ex bailleur ; qu'en fait, il résulte encore d'une pièce, produite par les intimés eux-mêmes, que Mireille X... a assigné en décembre 2010 Mireille X... en référé devant le Président du tribunal de grande instance de Nîmes pour faire constater le jeu de la clause résolutoire du bail commercial suite à un retard de loyer et charges de 3. 994 € ; qu'en son ordonnance de référé en date du 8/ 12/ 2010 le Président a aussi refusé la séquestration demandée par le bailleur du mobilier de Mireille X... se trouvant dans les lieux ; que personne n'invoque qu'après cette date et avant la procédure collective (le mois suivant), il ait été opéré un transfert de la propriété du même mobilier en période suspecte, étant surabondamment remarqué la disproportion à nouveau manifeste entre les loyers dus et la valeur des meubles en cause ; qu'il est singulier comme le relève encore Maître Pierre A... que le bailleur Janique Y... n'ait procédé à aucune déclaration de sa créance de loyers en la procédure collective et que les intimés n'aient procédé après la restitution du mobilier à aucune déclaration d'une possible créance contre la procédure collective, ni au titre d'une créance antérieure, ni au titre d'une créance en cours de procédure collective que seule la présente procédure a été à l'origine de leurs prétentions à restitution en valeur de biens qu'ils avaient restitués à l'huissier sans réserves et sans plus se prévaloir désormais de leur acquisition ; que, comme le fait remarquer justement Maître Pierre A..., les intimés ne justifient en définitive d'aucun fondement à leur action contre la procédure collective ; qu'en tout état de cause il y a lieu en conséquence de réformer le jugement entrepris et de débouter les intimés de toutes leurs prétentions ;
ALORS QUE celui qui acquiert un bien de bonne foi ne peut voir contester sa propriété ; qu'en retenant, pour débouter la Sci Y... de sa demande de condamnation de Me A..., ès qualités, à lui verser une somme de 9. 000 euros au titre de la vente du matériel qu'elle avait acquis de Mme Y..., qui n'en aurait pas été le véritable propriétaire, que l'acquéreur ne pouvait pas se prévaloir de sa bonne foi pour conforter son acquisition, la cour d'appel a violé l'article 2276 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-17676
Date de la décision : 17/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 27 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 nov. 2015, pourvoi n°14-17676


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.17676
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award