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07/06/2016 | FRANCE | N°14-22744

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 juin 2016, 14-22744


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2014) et les productions, que la société Ami de la 2 CV, qui exerce, sur son site internet « www.ami-2cv.com », une activité de vente en ligne de pièces détachées destinées à l'entretien et la restauration de véhicules de collection Citroën 2 CV, a constaté que la saisie sur le moteur de recherche Google des mots clés « Ami de la 2 CV » ou de toute autre combinaison associant les termes « Ami » et « 2 CV » déclenchait l'a

pplication du système de référencement « adwords » et faisait apparaître un lien...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2014) et les productions, que la société Ami de la 2 CV, qui exerce, sur son site internet « www.ami-2cv.com », une activité de vente en ligne de pièces détachées destinées à l'entretien et la restauration de véhicules de collection Citroën 2 CV, a constaté que la saisie sur le moteur de recherche Google des mots clés « Ami de la 2 CV » ou de toute autre combinaison associant les termes « Ami » et « 2 CV » déclenchait l'application du système de référencement « adwords » et faisait apparaître un lien publicitaire vers le site « www.cipere.fr » de la société allemande Der Franzose Automobiltechnik GmbH (la société Der Franzose) ayant pour activité la vente de pièces détachées de véhicules anciens et de collection, notamment de la marque Citroën ; que reprochant à cette dernière d'avoir volontairement créé une confusion dans l'esprit de la clientèle afin de détourner celle-ci vers son propre site, la société Ami de la 2 CV l'a assignée en concurrence déloyale ;
Attendu que la société Ami de la 2 CV fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que si le seul fait de démarcher, par l'utilisation d'un service offert par un moteur de recherche internet, la clientèle d'autrui n'est pas en soi constitutif d'un acte de concurrence déloyale, tel n'est pas le cas lorsque ce démarchage s'accompagne de circonstances particulières de nature à créer un risque de confusion entre les sites internet ; que constituent de telles circonstances particulières propres à créer une confusion entre les sites internet de deux entreprises concurrentes, le fait pour l'une d'entre elles de choisir, au titre des mots clés destinés à son référencement sur un moteur de recherche internet, le nom commercial de son principal concurrent, et d'apparaître sous une bannière qui fait également mention de ce nom commercial, à la fois sur la colonne réservée aux annonces commerciales et sur celle réservée aux résultats naturels de la recherche ; qu'en écartant toute concurrence déloyale après avoir pourtant constaté que les mots clés « Ami de la 2 CV » faisaient apparaître, sur le moteur de recherche « Google », le site internet de la société Der Franzose, sous une bannière qui comportait en première ligne la mention « Ami de la 2 CV » et ce, non seulement sur la colonne de droite réservée aux annonces commerciales, mais également, sur la liste des résultats naturels de la recherche, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ que doivent être sanctionnés au titre de la concurrence déloyale, les faits de parasitisme consistant pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise par celle-ci et ce, sans qu'il soit en outre besoin qu'il en résulte une confusion dans l'esprit du public ; qu'en déboutant la société « Ami de la 2 CV » de son action en concurrence déloyale quand les constatations précitées de l'arrêt attaqué établissaient au moins que la société Der Franzose s'était inscrite dans le sillage de la société « Ami de la 2 CV » afin de profiter indûment de sa notoriété et de dérouter ainsi, à son profit, les internautes souhaitant accéder à son site internet, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382 du code civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir constaté que la recherche par le mot clef « Ami de la 2 CV » ou par d'autres combinaisons de ces termes, faisait apparaître, outre les résultats naturels de cette opération, parmi lesquels un lien vers le site « www.ami-2cv.com », un lien vers le site « www.cipere.com », l'arrêt relève que la mention « Annonces » est apposée à côté de ce lien publicitaire qui figure dans un encadré coloré, propre à le distinguer des liens affichés en tant que résultats de recherche ; qu'il relève encore que ce lien renvoie au site « www.cipere.com » dont l'intitulé n'est ni identique, ni similaire à celui du site « www.ami-2CV.com » ; qu'il retient qu'il importe peu que ce lien ait quelquefois figuré dans la colonne des résultats naturels de la recherche et non dans une colonne séparée et que la mention « pièces de rechange pour la 2 CV/cipere », qu'il comporte en première ligne, ait été précédée du mot clef « Ami 2 cv » ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit l'absence de risque de confusion entre les deux sites, la cour d'appel a pu, sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations, écarter la concurrence déloyale invoquée ;
Et attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni de ses conclusions que la société Ami de la 2 CV ait soutenu devant la cour d'appel l'existence de faits de parasitisme indépendamment de tout risque de confusion ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Ami de la 2 CV aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Der Franzose Automobiltechnik GmbH la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Ami de la 2 CV.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la Société Ami de la 2 CV de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE : « la société DER FRANZOSE AUTOMOBILETECHNIK Gmbh a, dans le courant de l'année 2011 et au début de l'année 2012, recouru au service de référencement publicitaire « AdWords » du moteur de rechercher Google, en « achetant » les mots clefs « Ami » et « 2 CV » ; comme le prévoient les règles de fonctionnement de ce service, la recherche par le mot clef « Ami de la 2 CV » ou par d'autres combinaisons de ces termes, faisait apparaître - outre les résultats « naturels » de cette opération, parmi lesquels un lien vers le site www.ami-2cv.com, un lien vers le site www.cipere.fr, comme en attestent les constats auxquels il a été procédé les 19 juillet 2011, 27 janvier 2012 et 12 et 13 février 2012 par huissier de justice ; il convient, dès lors, de rechercher s'il en est résulté un risque de confusion entre les sites internet des deux entreprises, puisque c'est à cette condition seulement qu'il pourrait être reproché à la société FRANZOSE AUTOMOBILETECHNIK Gmbh une concurrence déloyale au préjudice de la société Ami de la 2 CV, le démarchage de la clientèle d'autrui étant licite s'il n 'est pas accompagné d'un acte déloyal et le simple usage des signes distinctifs d'un concurrent comme mots clefs d'une recherche dans le cadre d'un service de référencement publicitaire n'étant pas en lui-même déloyal ; or, il résulte des constats versés aux débats que, conformément aux caractéristiques du service « AdWords », la mention « Annonces » était apposée à côté du lien publicitaire en cause et que celui-ci figurait dans un encadré coloré, propre à le distinguer des liens affichés en tant que résultats de recherche ; ce lien, par ailleurs, renvoyait au site www.cipere.fr dont l'intitulé n'est ni identique, ni similaire à celui du site www.ami-2cv.com et ne pouvait donc donner lieu à aucune confusion avec lui ; dès lors, force est de constater que l'affichage du lien publicitaire de la société Der FRANZOSE AUTOMOBILETECHNIK Gmbh, que déclenchait une recherche par les mots clefs « Ami » et « 2CV » ou par tout autre mot clef qui leur serait lié, n'entrainait aucun risque de confusion entre les sites www.ami-2cv.com et www.cipere.fr ; il importe peu, à cet égard, que ce lien publicitaire ait quelquefois figuré dans la colonne des résultats naturels de la recherche, et non dans une colonne séparée (constats des 27 janvier 2012 et 13 février 2012 - pièces n° 17 et 21), ni que, comme en atteste le constat effectué le 19 juillet 2011, la mention « pièces de rechange pour la 2 CV/Cipere » qu'il comporte en première ligne ait été précédée du mot clef « Ami 2 cv » ; dès lors, compte tenu des caractéristiques ci-dessus rappelées, tout risque de confusion était écarté ; il s'ensuit que l'internaute, familier par définition des règles de fonctionnement du commerce électronique et des moteurs de recherche, savait nécessairement que les produits offerts sur le site de la société FRANZOSE AUTOMOBILETECHNIK Gmbh ne provenaient pas de la société Ami de la 2 CV, laquelle ne peut donc imputer à un comportement déloyal la baisse de chiffre d'affaires qu'elle dit avoir subie » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si le seul fait de démarcher, par l'utilisation d'un service offert par un moteur de recherche internet, la clientèle d"autrui n'est pas en soi constitutif d'un acte de concurrence déloyale, tel n'est pas le cas lorsque ce démarchage s'accompagne de circonstances particulières de nature à créer un risque de confusion entre les sites internet ; que constituent de telles circonstances particulières propres à créer une confusion entre les sites Internet de deux entreprises concurrentes, le fait pour l'une d'entre elles de choisir, au titre des mots clés destinés à son référencement sur un moteur de recherche Internet, le nom commercial de son principal concurrent, et d'apparaitre sous une bannière qui fait également mention de ce nom commercial, à la fois sur la colonne réservée aux annonces commerciales et sur celle réservée aux résultats naturels de la recherche ; qu'en écartant toute concurrence déloyale après avoir pourtant constaté que les mots clés « Ami de la 2 CV » faisaient apparaitre, sur le moteur de recherche « Google », le site Internet de la Société Der Franzose, sous une bannière qui comportait en première ligne la mention « Ami de la 2 CV », et ce, non seulement sur la colonne de droite réservée aux annonces commerciales, mais également, sur la liste des résultats naturels de la recherche, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE doivent être sanctionnés au titre de la concurrence déloyale, les faits de parasitisme consistant, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise par celle-ci et ce, sans qu'il soit en outre besoin qu'il en résulte une confusion dans l'esprit du public ; qu'en déboutant la société « Ami de la 2 CV » de son action en concurrence déloyale quand les constatations précitées de l'arrêt attaqué établissaient au moins que la Société Der Francoze s'était inscrite dans le sillage de la Société « Ami de la 2 CV » afin de profiter indûment de sa notoriété et de dérouter ainsi, à son profit, les internautes souhaitant accéder à son site Internet, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-22744
Date de la décision : 07/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 jui. 2016, pourvoi n°14-22744


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.22744
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