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04/05/2017 | FRANCE | N°15-28189

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mai 2017, 15-28189


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail,

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé en septembre 1982 par l'association de gestion et de développement du centre de formation d'apprentis de La Noue pour occuper en dernier lieu les fonctions de documentaliste et d'animateur pédagogique ; qu'en décembre 2012, la direction a présenté au comité d'entreprise un projet de réorganisation des emplois entraînant la suppression de sept postes et que le salarié a ét

é licencié pour motif économique par lettre du 7 février 2013 ;

Attendu que pou...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail,

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé en septembre 1982 par l'association de gestion et de développement du centre de formation d'apprentis de La Noue pour occuper en dernier lieu les fonctions de documentaliste et d'animateur pédagogique ; qu'en décembre 2012, la direction a présenté au comité d'entreprise un projet de réorganisation des emplois entraînant la suppression de sept postes et que le salarié a été licencié pour motif économique par lettre du 7 février 2013 ;

Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur ne justifie pas avoir envisagé des mesures de formation ou d'adaptation au profit du salarié afin d'assurer son reclassement interne, alors que, d'une part, la lettre de licenciement ne mentionne que la suppression de la fonction de documentaliste et non celle d'animateur pédagogique, d'autre part qu'il n'apparaît pas qu'une solution alternative au licenciement ait été sérieusement étudiée, qu'il appartenait à l'employeur de proposer au salarié une modification de son contrat de travail évoluant vers un temps partiel correspondant à l'activité d'animation pédagogique dont la suppression n'est nulle part mentionnée et que faute de rapporter la preuve de l'impossibilité absolue de modifier le contrat de travail du salarié pour l'adapter aux fonctions restantes de son poste, l'employeur n'établit pas avoir loyalement rempli son obligation de recherche de reclassement ;

Attendu, cependant, que s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue pour faire face à la situation économique de l'entreprise ;

Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, par un motif inopérant, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'impossibilité de reclasser le salarié en l'absence de postes disponibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse et condamne l'association de gestion et de développement du centre de formation d'apprentis de La Noue à lui payer des dommages-intérêts à ce titre, l'arrêt rendu le 15 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour l'association de gestion et de développement du centre de formation d'apprentis de La Noue.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... est sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné l'AGD du CFA de la Noue à verser à Monsieur X... la somme de 25. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « lors de la réunion du comité d'entreprise du 7 décembre 2012, il a été précisé que selon les préconisations du cabinet Mazars, rédacteur du projet de réorganisation, une salariée déjà en poste à mi-temps au sein du CFA devait être chargée de faciliter l'accès à la documentation en ligne, limitant ainsi l'interaction avec le documentaliste ; qu'a été évoquée la création d'un centre de ressources multimédia intégrant notamment des activités de soutien, espaces informatiques, documentation pédagogique, avec la précision que la documentation telle qu'elle existe devait évoluer très fortement vers un dispositif dématérialisé faisant appel pour sa mise en oeuvre à des compétences de programmation informatique ; que lors qu'une nouvelle réunion extraordinaire du comité d'entreprise le 20 décembre 2012, il a été précisé par la direction que le projet de licenciement collectif pour motif économique ne concernait plus que 7 salariés, qu'ont été rappelés les critères d'ordre des licenciements, le calendrier prévisionnel des départs et qu'il a été annoncé : « concernant le reclassement externe, la direction s'est engagée à prévenir les partenaires tels que les CFA, les chambres consulaires, le Conseil régional de Bourgogne, … » ; qu'est versée aux débats une lettre du 28 janvier 2013 adressée par la direction du CFA de la Noue à M. X... l'informant du recrutement d'un documentaliste au CFA agri-agro de Quétigny-Plombières (21) ; que l'intéressé indique ne pas avoir donné suite à cette possibilité de reclassement externe car il s'agissait d'un contrat à durée déterminée de remplacement sur un temps partiel ; que, contrairement à ce qui est mentionné dans la lettre de licenciement, hormis la proposition susmentionnée, l'employeur ne justifie pas avoir émis d'autres propositions écrites et précises de reclassement au salarié ; que notamment l'AGDCFA de la Noue n'apporte pas la preuve de recherches effectives et loyales de solutions de reclassement dans l'entreprise soit dans un emploi équivalent, soit dans un emploi de catégorie inférieure, et plus précisément ne justifie pas avoir envisagé des mesures de formation ou d'adaptation au profit du salarié afin d'assurer son reclassement interne, alors que, d'une part, la lettre de licenciement ne mentionne que la suppression de la fonction de documentaliste et non celle d'animateur pédagogique, d'autre part qu'il n'apparaît pas qu'une solution alternative au licenciement ait été sérieusement étudiée ; qu'ainsi il appartenait à l'AGD-CFA de la Noue de proposer au salarié une modification de son contrat de travail évoluant vers un temps partiel correspondant à l'activité d'animation pédagogique dont la suppression n'est nulle part mentionnée ; que faute pour l'AGD-CFA de la Noue d'avoir apporté la preuve de l'impossibilité absolue de modifier le contrat de travail de M. X... pour l'adapter aux fonctions restantes de son poste, elle n'établit pas avoir loyalement rempli son obligation de recherche de reclassement, notamment au regard de l'accord d'entreprise relatif à l'emploi des séniors signé le 30 mars 2010 ; qu'il s'ensuit que le licenciement de M. X... doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse » ;

1. ALORS QU'il n'appartient pas au juge de contrôler le choix effectué par l'employeur entre plusieurs solutions possibles afin de remédier aux difficultés économiques ; qu'en conséquence, le juge ne peut retenir que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement préalable au licenciement pour motif économique, faute d'avoir envisagé, en lieu et place de la suppression de l'emploi du salarié, une modification de son contrat permettant d'éviter son licenciement ; qu'en retenant, en l'espèce, que l'AGD du CFA de la Noue a manqué à son obligation de reclassement, dès lors qu'elle n'apportait pas la preuve de l'impossibilité absolue de maintenir l'emploi du salarié, en l'affectant sur un poste à temps partiel ne comportant plus que des tâches subsistantes d'animation pédagogique, la cour d'appel a violé le principe fondamental de la liberté d'entreprendre ;

2. ALORS, AU SURPLUS, QUE l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement pour motif économique est tenu de rechercher et de proposer au salarié les postes en rapport avec ses compétences qui sont disponibles dans l'entreprise et, le cas échéant, dans le groupe auquel l'entreprise appartient ; que l'employeur n'est tenu ni d'envisager la transformation d'un poste dont il a décidé la suppression, ni la création d'un nouveau poste ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt que la suppression de l'emploi de documentaliste du salarié résultait de la mise en place d'un accès à la documentation en ligne et de la création d'un centre de ressources multimédia ; que l'AGD du CFA de la Noue exposait que le poste de documentaliste animateur ne comportait pas de fonctions propres d'animation pédagogique, l'animation constituant seulement un aspect du travail de documentaliste, et que Monsieur X... n'a jamais occupé un emploi d'enseignement ; que, par ailleurs, elle soutenait qu'aucun poste en rapport avec les compétences du salarié n'était disponible dans l'entreprise à la date du licenciement et produisait le registre du personnel pour le démontrer ; qu'en retenant que l'AGD du CFA de la Noue a manqué à son obligation de reclassement, dès lors qu'elle ne démontre pas l'impossibilité absolue de modifier le contrat de travail du salarié pour l'adapter aux fonctions restantes d'animation son poste, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-4 du Code du travail ;

3. ALORS QUE l'employeur n'est tenu d'envisager des mesures de formation ou d'adaptation que lorsque la mise en oeuvre de telles mesures est nécessaire pour permettre le reclassement du salarié sur un poste disponible en rapport avec ses compétences ; qu'en l'espèce, l'AGD du CFA de la Noue soutenait qu'aucun poste en rapport avec les compétences de Monsieur X... n'était disponible dans l'entreprise et produisait, pour le démontrer, le registre du personnel de l'entreprise ;

qu'en conséquence, en reprochant à l'AGD du CFA de la Noue de ne pas justifier avoir envisagé des mesures de formation ou d'adaptation au profit du salarié afin de favoriser son reclassement, sans relever l'existence de postes disponibles sur lesquels le reclassement du salarié aurait pu être effectué moyennant une formation d'adaptation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;

4. ALORS QU'il n'y a pas de manquement de l'employeur à son obligation de reclassement lorsqu'aucun poste en rapport avec les compétences du salarié n'est disponible dans l'entreprise à la date du licenciement ; qu'en reprochant encore à l'AGD du CFA de la Noue de ne pas apporter la preuve de recherches effectives et loyales de solutions de reclassement dans l'entreprise, sans rechercher comme elle y était invitée si le reclassement de Monsieur X... n'était pas impossible en l'absence de tout poste disponible adapté à ses compétences, et notamment de poste d'animation pédagogique, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;

5. ALORS QUE l'accord du 30 mars 2010 se borne à fixer un objectif de maintien dans l'emploi des salariés seniors au 31 décembre 2012 « sous réserve de l'incertitude de l'environnement économique » et à définir différentes actions visant à atteindre cet objectif ; qu'il n'interdit pas à l'employeur en cas de difficultés économiques de supprimer le poste d'un salarié senior, ni ne prévoit que l'employeur devrait, sauf impossibilité absolue, assurer le reclassement d'un salarié senior en faisant évoluer son poste vers un temps partiel ; qu'en retenant que l'AGD du CFA de la Noue a méconnu son obligation de reclassement au regard de l'accord du 30 mars 2010, dès lors qu'elle ne justifie pas de l'impossibilité absolue de modifier le contrat de travail du salarié pour l'adapter aux fonctions restantes de son poste, la cour d'appel a violé cet accord collectif


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-28189
Date de la décision : 04/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 15 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mai. 2017, pourvoi n°15-28189


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.28189
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