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18/05/2017 | FRANCE | N°15-18719

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mai 2017, 15-18719


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir bénéficié de plusieurs contrats à durée déterminée à compter du 8 décembre 2003, Mme X... a été engagée le 22 avril 2005 par la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains en qualité d'assistante de direction des soins avec reprise d'ancienneté au premier avril 2004 ; qu'à partir du printemps 2011, cette société a été progressivement intégrée au sein de la Compagnie européenne des Bains, société holding du groupe Valvital ; que, soutenant que ses f

onctions auraient été unilatéralement modifiées, la salariée, élue déléguée du pers...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir bénéficié de plusieurs contrats à durée déterminée à compter du 8 décembre 2003, Mme X... a été engagée le 22 avril 2005 par la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains en qualité d'assistante de direction des soins avec reprise d'ancienneté au premier avril 2004 ; qu'à partir du printemps 2011, cette société a été progressivement intégrée au sein de la Compagnie européenne des Bains, société holding du groupe Valvital ; que, soutenant que ses fonctions auraient été unilatéralement modifiées, la salariée, élue déléguée du personnel suppléante en septembre 2012, a saisi le 18 février 2013 la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas de lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles L. 2411-5 et L. 2314-27 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une indemnité pour violation du statut protecteur de 77 194, 45 euros, l'arrêt, après avoir approuvé la décision du conseil de prud'hommes du 30 juin 2014 qui a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée aux torts de l'employeur et dit qu'elle produira les effets d'un licenciement nul et relevé que le salaire mensuel de la salariée est de 1 816, 32 euros, retient que la salariée peut prétendre à une indemnité d'un montant égal à la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction et la fin de la période de protection, à savoir six mois après la fin de son mandat, soit fin mars 2017 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le délégué du personnel, qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains à payer à Mme X... la somme de 77 194, 45 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, l'arrêt rendu le 26 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant Mme X... à la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains aux torts de cette dernière, d'AVOIR dit que cette résiliation judiciaire produisait les effets d'un licenciement nul, d'AVOIR condamné la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains à verser à Mme X... les sommes de 77 194, 45 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, 3632, 68 euros d'indemnité de préavis, 363, 27 euros de congés payés sur préavis, 3511, 59 euros d'indemnité de licenciement et 11 000 euros de dommages et intérêts et de l'AVOIR condamné à payer des sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

AUX MOTIFS QUE « conformément à l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement, la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté ayant le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts ; Attendu que si la salariée, même si elle est protégée, peut intenter une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail, il lui appartient cependant de démontrer que les manquements allégués sont suffisamment graves pour justifier cette résiliation et empêchent la poursuite de son contrat de travail ; Attendu qu'en l'espèce il est constant que ni le contrat de travail de Mme Véronique X..., ni aucune fiche de poste postérieure n'a défini les missions confiées à la salariée ; que, si l'absence de précision des tâches qui lui étaient dévolues n'a posé aucun problème jusqu'à la réorganisation de l'entreprise consécutive à son intégration au sein de la CEB, il ressort des pièces du dossier, et il n'est au demeurant pas contesté, que l'intéressée s'est plainte à compter de juin 2012 de ce que ses fonctions auraient été transférées à Mme Nathalie Y..., dont le poste d'assistante de direction auprès du PDG avait été supprimé, et de ce qu'elle ne se verrait plus confier que des tâches annexes ; que, face aux interrogations de la salariée, la SA TNAB n'a apporté aucune réponse claire, laissant ainsi le climat relationnel se détériorer ; que c'est ainsi que, ni le mail du 20 juin 2012 préconisant que Mme Nathalie Y...doit'centraliser tout ce qui concerne les RH', ni la note interne en date du 24 janvier 2013 pourtant destinée à résoudre les difficultés rencontrées, n'ont déterminé précisément les fonctions de chacun des trois salariés principaux affectés à la direction administrative de l'entreprise, à savoir Mme Véronique X..., Mme Nathalie Y...et M. Gérald Z...; que, si cette dernière note laissait entendre que les tensions proviendraient de Mme Véronique X..., elle était particulièrement absconse dans la mesure où elle identifiait des tâches non réalisées, sans dire par qui, avant de les attribuer au service support de la direction des soins, sans dire de qui il s'agissait ; que par ailleurs, interpellée le 30 janvier 2013 par l'inspecteur du travail sur la nécessité de définir précisément le champ d'intervention et les tâches de chacun des intervenants afin d'éviter tout malentendu, tout doublon ou toute tâche non effectuée, et également enjointe de communiquer une fiche descriptive des fonctions dévolues à Mme Véronique X... au sein de la nouvelle organisation, la société n'a apporté aucune réponse ni fourni aucun document ; Attendu que, si la cour ne peut apprécier au vu des seuls documents produits la nature exacte et l'étendue des missions confiées à Mme Véronique X... avant et après l'intégration de la SA TNAB au sein de la CEB-les courriels fournis par Mme Véronique X... et les attestations versées par la société (pour les unes émanant de personnes directement impliquées dans la direction de l'entreprise et pour les autres rédigées en des termes totalement similaires et dactylographiés) étant à cet égard insuffisants, il résulte des éléments susvisés que l'attitude adoptée par la société à compter de juin 2012 a été ouvertement critique envers Mme Véronique X... et totalement ambigue au regard des aspirations légitimes de la salariée, alors même que le poste d'assistante de direction auprès du PDG occupé par Mme Nathalie Y...avait été supprimé et que les fonctions RH étaient désormais occupées par deux personnes (M. Gérald Z...et Mme Nathalie Y...) au lieu d'une seule (M. Gérad Z...) ; que ce comportement inadapté a constitué un manquement grave de l'entreprise à ses obligations, et notamment à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail, et a gravement perturbé la salariée, qui a à plusieurs reprises, y compris par l'intermédiaire de l'inspection du travail, interpellé son employeur sur les difficultés rencontrées et qui a été placée en arrêt maladie pour état dépressif ; qu'il a ainsi empêché la poursuite du contrat de travail ; que, par suite, la demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur est fondée ; que, compte tenu du statut de salariée protégée de Mme Véronique X..., la résiliation produit les effets d'un licenciement nul ; Attendu que Mme Véronique X... a droit à une indemnité de préavis de 3 632, 68 euros correspondant à deux mois de salaire, outre 363, 27 euros de congés payés, ainsi qu'à une indemnité de licenciement de 3 511, 59 euros ; Qu'elle peut également prétendre, au titre de la violation de son statut protecteur, à une indemnité d'un montant égal à la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction et la fin de la période de protection, à savoir six mois après la fin de son mandat (soit fin mars 2017) ; qu'il lui revient à ce titre la somme de 77 194, 45 euros ; Que Mme Véronique X... a enfin droit à une indemnisation réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et qui, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, ne peut être inférieure à six mois de salaire ; que, compte tenu de son ancienneté, l'indemnisation du préjudice subi par l'intéressée a été justement évaluée à la somme de 11 000 euros par le conseil de prud'hommes ; Attendu qu'il convient pour des raisons tenant à l'équité de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et que les frais non compris dans les dépens exposés par Mme Véronique X... en cause d'appel sont évalués à la somme de 1 500 euros, les dispositions relatives aux frais engagés en première instance étant quant à elles maintenues »

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « La résiliation judiciaire du contrat de travail d'un salarié trouve son fondement juridique dans le droit commun des contrats qui admet que chaque contractant d'un contrat synallagmatique puisse le rompre en cas d'inexécution par l'autre partie de ses propres obligations. Cela suppose, dans le cadre d'un contrat de travail, que le salarié, à qui est seul ouvert ce mode de rupture, rapporte la preuve, par un ensemble d'éléments graves, précis et concordants, d'agissements imputables à son employeur, suffisamment graves pour rendre impossible le maintien de la relation contractuelle. La charge de la preuve repose à titre principal sur le salarié, qui prétend à se voir décharger de ses obligations contractuelles et indemnisé par son employeur, au même titre qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Néanmoins, cela ne modifie pas la charge de la preuve de l'exécution des obligations respectives des parties et la jurisprudence considère que c'est à l'employeur de démontrer qu'il a bien fourni du travail à son salarié. En l'espèce, il est établi que la SA Thermes Nationaux d'Aix-les-Bains a intégré fin 2011 le groupe Compagnie Européenne des Bains (exerçant sous l'enseigne commerciale Valvital). La note d'information relative aux projets d'intégration des directions commerciale et marketing et administrative et financière au sein de la compagnie européenne des bains (société holding du groupe Valvital) en vue de la mutualisation des fonctions supports et de fusion de certaines directions et de réorganisation géographique de certains services des TNAB énonçait : « Après un temps d'examen et d'analyse des possibilités de mutualiser les ressources des deux entreprises, notamment à la suite d'audit, les constats suivants ont été faits :- Il faut adopter une approche plus ambitieuse d'intégration, qui ne porte plus que sur la seule dimension « ressources humaines » considérée individuellement, Les fonctions supports et commerciales doivent être déployées et fusionnées au niveau du groupe,- La dimension commerciale et marketing ne peut se concevoir au niveau du groupe. Une politique de communication a une efficacité renforcée sur elle n'est pas dispersée ». Au niveau des ressources humaines, un salarié relevant du service ressources humaines des TNAB était concerné par la restructuration, qui devait avoir lieu début mars ou début avril 2012. Aucun élément n'est fourni quant à l'identité du salarié concerné par la restructuration. Selon Les débats à l'audience, il s'agirait de Monsieur Z..., passé des fonctions de responsable ressources humaines des TNAB à responsable des ressources humaines de la Compagnie Européenne des Bains, fonction qualifiée de « support ». Pour autant, l'organigramme versé aux débats est incomplet (ne mentionne pas tous les noms des personnes concernées) et comporte des flèches dans tous les sens. Sa lecture conduirait à en déduire que les responsables ressources humaines des thermes d'Aix-les-Bains, Monsieur Z...et Madame A...seraient devenus, après restructuration, pour le premier, responsable ressources humaines de la CEB et pour la seconde, responsable ressources humaines des TNAB. Or, Madame A...n'est jamais citée dans la répartition des fonctions ressources humaines. C'est Madame Nathalie Y...qui ne figure sur aucun des organigrammes fournis avant/ après restructuration, qui occupe, selon les éléments du débats, le poste de responsable des ressources humaines de la SA TNAB. Madame X... appuie son argumentation sur la suppression d'un partie de son travail sur le courriel suivant, du 20 juin 2012, adressé par Dominique B...à Christian C..., Gérald Z..., Matthieu D..., Nathalie Y..., Véronique X... " Bonjour à tous, Pour fixer les choses suite à notre réunion de ce matin, voici les principes que je souhaiterais voir appliquer :- une répartition des tâches entre CEB (services support) et Aix Exploitation selon les choses précisées par Mathieu-l'interlocuteur RH pour Aix Exploitation est Nathalie Sur ce deuxième point, Nathalie doit centraliser tout ce qui concerne les RH, sur un plan administratif et relation avec les collaborateurs. Ces deux points sont essentiels pour une bonne organisation CEB/ Exploitation et un bon fonctionnement au sein de notre exploitation (...) " La SA Thermes Nationaux d'Aix-les-Bains lie indissociablement ce mail à celui-ci, envoyé quelques minutes plus tard par Mathieu D...aux interlocuteurs du premier mail de Monsieur B..." Ce mail vient en complément de celui de Dominique pour fixer l'intervention de la holding : les collaborateurs de la Holding ne font pour un établissement X que ce qu'ils sont capables de faire pour tout autre établissement du groupe (critère de compétences, disponibilité (charge de travail) et harmonisation des pratiques). un établissement peut servir de " laboratoire " dans le cadre de la politique RH groupe, si validation DRH/ SG groupe (i. e. MC) et Directeur d'établissement.
la holding intervient dans une logique normative et prospective, en général non opérationnelle, ce qui ne veut pas dire qu'elle est détachée de toute logique d'exécution et de réalisation concrète, notamment au titre de la rédaction de document sur-mesure ou de l'harmonisation des pratiques groupes. les salariés protégés et femmes enceintes appellent une saisine systématique du DRH/ SG groupe. La RH groupe est en charge de la rédaction des matrices des documents types (mais non de leur publication) et de la rédaction de chaque document appelant une réponse spécifique. en cas de doute sur un dossier, saisine du DRH/ SG groupe, notamment pour tout ce qui relève d'une question de droit (conditions de renouvellement d'un contrat, modalité d'organisation des élections IRP, ces deux questions appelant presque systématiquement une analyse concrète et personnalisée,... je vous remercie de veiller à la mise en place de cette organisation dès à présent et de votre implication ". Si ce document répartit la fonction RH entre la société holding et la société d'exploitation, rien n'est indiqué sur la répartition éventuelle des tâches ressources humaines au sein de La SA TNAB. Il apparaît en outre clairement qu'à compter de mai 2012, les demandes de Madame X... envers la holding ont eu pour réponse qu'il n'y avait qu'un seul interlocuteur RH sur la SA TNAB, Madame Y.... Les différents courriels échangés entre les deux salariées postérieurement font apparaître que la répartition des tâches n'était pas évidente et que le périmètre d'intervention des deux postes, RH TNAB et RH " direction des soins " n'est pas si clair. Si Madame X... apparaît encore comme gérant des salariés ou des stagiaires, c'est manifestement de façon très résiduelle ou alors à la demande de Madame Y.... Au cours de la réunion du 25 septembre 2012, qui s'est tenue à la suite d'un arrêt de travail de Madame X..., les directives suivantes auraient été posées : " Je vous prie de trouver cijoint le compte rendu de la réunion du 25 septembre 2012 dont l'objet était le suivi de l'articulation pour les sujets RH entre les TNAB et la CEB. et plus précisément les conséquences de cette organisation pour la direction des soins TNAB prise comme direction utilisatrice. Assez rapidement, au cours de cette réunion, il est apparu que des problèmes relationnels ou de compréhension de poste pénalisaient le bon fonctionnement de cette dimension. L ‘ importance des RH tant au niveau du groupe que de la filiale a été rappelée avec comme corollaire l'obligation de veiller ce que le fonctionnement des RH soit toujours optimal. Deux principes de base ont été clairement précisés : 1. Le principe de subordination juridique : La caractéristique d'un contrat de travail est le rapport de subordination qu ‘ il induit. C'est par cet effet qu ‘ un contrat de travail se distingue de tous les autres types de contrat. Les conséquences directes et concrètes sont les suivantes : l'obligation de respecter toutes les directives de l'employeur dès lors que celles-ci sont conformes à la loi et an contrat de travail, l'impossibilité de se considérer comme ‘ propriétaire " de son poste de travail et par là même de refuser par principe de voir celui-ci évoluer pour accompagner les évolutions logiques de la structure ; l'interdiction de définir de sa propre initiative le périmètre de ses interventions. 2. La justification des fonctions support. Les fonctions et services support n ‘ ont de raison d'être que pour le service rendu aux fonctions opérationnelles (en l'espèce les direction commerciale et des soins). A ce titre, sans pour autant être cantonné dans des tâches simplement subalternes, les services support se doivent de délivrer en temps réel, exhaustivement, une prestation de service fiable. Le suivi exact, en temps réel et en permanence du décompte du temps de travail est, à cet égard, un impératif absolu. Concrètement, il a été observé que : la répartition des responsabilités et taches entre filiale et holding n'avait eu qu ‘ un impact très limité sur le fonctionnement intrinsèque quotidien de la Direction des soins ; la direction médicale, peu importe d'ailleurs son rattachement, continuait de mener des études cliniques ; l'absence actuelle de la coordinatrice des soins génère un surcroît de travail ; la fréquentation en hausse de l'établissement a conduit à une augmentation du volume d'embauche des saisonniers, hormis les consignes de fonctionnement relatives à l'articulation CEB/ TNAB communiquées le 20 juin, aucune autre modification des prérogatives de chacun n ‘ est intervenue. A titre immédiat, les tâches suivantes non réalisées à ce jour en tout ou partie ont été identifiées : suivi des recrutements par rapport à Pôle Emploi et aux missions locales, accueil des nouveaux arrivants, gestion du suivi du badgeage (contrôle en temps réel, suivi exhaustif actions correctives,...) contrôle et suivi de la modulation, gestion de l'agenda du Directeur des soins, Cette liste n ‘ est pas exhaustive. Ces missions identifiées au cours de la réunion sont dès à présent confiées au service support de la direction des soins pour action, qui est le plus en mesure de les prendre en charge. Lors des échanges, il a été constaté qu ‘ en aucun cas la réorganisation ci-dessus évoquée avait conduit à modifier les prérogatives de chacun des intervenants pour les points ci-dessus visés. Chacun a ainsi pu observer que la réorganisation holding/ filiale était, en définitive, un retour à la situation antérieure (avant l'intégration des TNAB au sein du groupe VALVITAL). Par ailleurs, on a également pu se souvenir que chacune des personnes travaillant à ces process collaboraient depuis longtemps ensemble sans que cette coopération ait généré la moindre difficulté. Il a été également clairement rappelé que l'employeur mettrait tout en oeuvre pour préserver la situation personnelle de chaque agent et prévenir tout agissement constitutif d'un fait de harcèlement moral qui pourrait résulter de la persistance de la situation dégradée actuelle. A cet égard, il est expressément précisé qu'il ne sera plus toléré que : il ne soit pas répondu aux appels téléphoniques, les mails échangés ne soient pas emprunts de la plus élémentaire cordialité, et restent sans réponse, certaines tâches soient pas principe transférées sans aucune raison à un autre collaborateur quand bien même cette tâche ne dépend pas de ses prérogatives. L ‘ approche des fonctions de chacun doit se faire positivement, c ‘ est-à-dire qu ‘ une approche restrictive ne peut être tolérée. Il appartient à chacun d'agir conformément à ces principes et de procéder à une analyse critique de ses propres agissements. Les attaques contre la personne ne sont pas acceptables. Un suivi du fonctionnement effectif de l'articulation de la fonction RH pour la direction des soins entre la CEB et les TNAB continuera d'être assuré notamment pour s'assurer d'un retour à un fonctionnement normal. Il est donc primordial que les problèmes relationnels soient dépassés pour que l'on puisse s'assurer de l'effectivité de la nouvelle organisation. Les éventuelles mesures correctives à prendre doivent résoudre des problématiques d'ordre structurel et non d'ordre personnel. " Ce document, intitulé " note interne " est émis par Mathieu D...et a pour " objet : compte rendu de la réunion du 25 septembre 2012 : examen de la fonction RH pour la direction des soins et suivi de l'articulation entre la société filiale et la holding ", n'a été établi que le 24/ 01/ 2013, soit bien postérieurement à la réunion. Son contenu en fait d'ailleurs plus précisément une note interne, qu'un compte-rendu des discussions, en effet, il n'y est fait état d'aucun échange entre les parties, au contraire, l'emploi des termes " il a été constaté " laisserait à penser que tous les participants se sont positionnés de façon uniforme et étaient d'accord avec ce qui est énoncé. Pourtant, ce document renferme de nombreuses contradictions intrinsèques : l'interprétation de la phrase concernant l'articulation des prérogatives de chacun et les consignes de fonctionnement CEB/ TNAB communiquées le 20 juin conduit inévitablement à retenir l'existence d'une modification des prérogatives de chacun. Alors que l'intitulé pourrait laisser penser à une clarification des périmètres d'intervention des fonctions RH pour la direction des soins et suivi de l'articulation entre la société filiale et la holding, rien n'est défini. A l'inverse, la lecture entre les lignes de ce document montre qu'il s'agit d'un courrier de reproches adressé directement à Madame X... puisqu'en réalité, ses tâches, soit-disant antérieurement attribuées, non exécutées, lui sont réattribuées, sans qu'on sache d'ailleurs si cette affectation est définitive ou temporaire. Bien plus, de façon contradictoire, l'employeur énonce que Madame X... se voit désormais interdire de transférer certaines tâches au collaborateur directement concerné, " quand bien même cette tâche ne dépend pas de ses prérogatives (celles de Madame X...) et lui impute directement la responsabilité d'un harcèlement moral. De la même façon, les réponses de l'employeur ont systématiquement été de contester tout changement dans les missions attribuées à Madame X..., en omettant à chaque fois de détailler lesdites missions. Ce n'est qu'en décembre 2013 et dans le cadre de la présente procédure, qu'un semblant de fiche de poste ou descriptif des missions de Madame X... sera fourni. Dans ces conditions et au vu du contexte flagrant de dégradation de l'état de santé de la salariée dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise, il ne peut qu'être retenu que l'employeur a volontairement laissé s'installer une situation de latence dommageable pour Madame X..., étant observé qu'aucun plan de prévention des risques n'a été établi. La relation entre les parties est aujourd'hui définitivement et irrémédiablement distendue, alors que l'employeur ou ses représentants ont clairement manifesté, par le comportement au cours d'un entretien préparatoire à une rupture conventionnelle et par les courriers ou note interne comportant très régulièrement des reproches à la salariée, que sa présence dans l'entreprise n'était plus souhaitée. La résiliation judiciaire du contrat de travail doit donc être prononcée aux torts de la SA Thermes Nationaux d'Aix-les-Bains ».

1) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, Mme X... demandait la résiliation judiciaire de son contrat pour deux manquements de son employeur : l'absence de fourniture de travail et la modification unilatérale de ses fonctions (cf. ses conclusions page 22) ; que les juges du fond n'ont constaté l'existence d'aucun de ces deux manquements ; qu'ils ont seulement retenu que l'employeur n'avait pas apporté de réponse claire aux interrogations de la salariée quant à la définition de ses missions et avait eu une attitude ouvertement critique envers elle et ambigüe au regard de ses aspirations, constituant un comportement inadapté au regard de l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat, ce dont Mme X... ne se prévalait pas pour demander la résiliation de son contrat ; qu'en prononçant néanmoins la résiliation du contrat aux torts de l'employeur pour ces motifs, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.

2) ALORS QUE les juges ne doivent pas dénaturer les documents qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont considéré que la note interne du 24 janvier 2013, ayant pour objet le compte rendu de la réunion du 25 septembre 2012, dont ils ont intégralement cités les termes, était « un courrier de reproches adressé directement à Madame X... » et lui « imputait directement la responsabilité d'un harcèlement moral », alors qu'à aucun moment ce document ne vise Mme X... personnellement, qu'il résulte de ses termes clairs et précis qu'il s'agit d'une note à l'intention de plusieurs salariés du service et qu'il indique seulement que « l'employeur mettrait tout en oeuvre pour préserver la situation personnelle de chaque agent et prévenir tout agissement constitutif d'un fait de harcèlement moral qui pourrait résulter de la persistance de la situation dégradée actuelle » (cf. production n° 4) ; que les juges du fond ont ainsi dénaturé cette pièce, en violation de l'article 1134 du code civil.

3) ALORS QUE le lien de subordination, caractéristique du contrat de travail, donne à l'employeur le pouvoir de donner des ordres et des directives, de contrôler l'exécution du travail et de sanctionner les manquements de son salarié ; que ce pouvoir permet à l'employeur d'adresser des critiques à ses salariés, dès lors qu'elles sont justifiées et formulées en des termes corrects ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu l'existence d'une « attitude ouvertement critique » de la société TNAB envers Mme X..., mais sans rechercher si cette critique était injustifiée ou formulée en des termes abusifs, de sorte que rien ne permettait de montrer que cette critique excédait l'usage normal du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en se fondant néanmoins sur ce motif pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

4) ALORS QUE la résiliation judiciaire ne peut être prononcée qu'en cas de manquement grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; que le simple fait, pour un employeur, d'avoir une attitude critique et ambigüe envers un salarié, en étant imprécis dans la définition de ses missions, n'est pas un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a uniquement relevé que l'employeur n'avait pas apporté de réponse claire aux interrogations de la salariée quant à la définition de ses missions et avait eu une attitude ouvertement critique envers elle et ambigüe au regard de ses aspirations, constituant un comportement inadapté au regard de l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat ; qu'en prononçant la résiliation du contrat aux torts de l'employeur pour ces motifs qui ne caractérisaient pas un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

5) ALORS QUE la résiliation judiciaire ne peut être prononcée qu'en cas de manquement grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'absence de précision des tâches dévolues à Mme X... n'avaient pas posé de problème pendant plus de sept ans ; qu'en affirmant néanmoins que le comportement inadapté de l'employeur, consistant à ne pas apporter de réponse claire aux interrogations de la salariée quant à la définition de ses missions, constituait un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134, 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

6) ALORS QU'en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, il appartient aux juges du fond d'apprécier les manquements imputés à l'employeur au jour de leur décision ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté, par motifs adoptés, qu'une fiche de poste avait été établie en décembre 2013 ; qu'en affirmant néanmoins que le comportement inadapté de l'employeur, consistant à ne pas apporter de réponse claire aux interrogations de la salariée quant à la définition de ses missions, constituait un manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail, alors qu'elle avait relevé que la situation avait été régularisé au jour de sa décision, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1134, 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

7) ALORS QUE la résiliation judiciaire ne peut être prononcée qu'en cas de manquement grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que Mme X... était assistante de la direction des soins et que les tâches liées à la gestion des ressources humaines qu'elle pouvait être amenée à accomplir n'était pas son activité principale, qui consistait à assister le directeur des soins, gérer les plannings des unités de soins, assumer le secrétariat des docteurs, gérer les relations avec les assureurs en cas d'accidents et assurer le suivi du dispositif « bien-être et piscine » conclusions page 5) et que la salariée n'avait jamais assumé la responsabilité de l'ensemble des ressources humaines de la société, de sorte que la nouvelle organisation des ressources humaines n'avait aucun impact sur le fonctionnement de la direction des soins et donc sur le travail de Mme X... (conclusions pages 21 et 22) ; qu'en omettant de rechercher, comme elle y était invitée, si l'activité principale de la salariée, en tant qu'assistante de la direction des soins, n'était pas étrangère aux ressources humaines, de sorte que la réorganisation de ce service dans l'entreprise n'avait pas eu d'impact sur les fonctions réellement exercées par la salariée, et qu'en conséquence aucun manquement grave empêchant la poursuite du contrat de travail ne pouvait être reproché à l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société Thermes nationaux d'Aix-les-Bains à verser à Mme X... la somme de 77 194, 45 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur.

AUX MOTIFS QUE « compte tenu du statut de salariée protégée de Mme Véronique X..., la résiliation produit les effets d'un licenciement nul ; […] Qu'elle peut également prétendre, au titre de la violation de son statut protecteur, à une indemnité d'un montant égal à la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction et la fin de la période de protection, à savoir six mois après la fin de son mandat (soit fin mars 2017) ; qu'il lui revient à ce titre la somme de 77 194, 45 euros »

1) ALORS QUE le délégué du personnel, en cas de rupture du contrat de travail analysée en un licenciement nul, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois ; qu'en accordant à la salariée une indemnité courant jusqu'à la fin de la période de protection, correspondant à 42, 5 mois de salaires, la cour d'appel a violé les articles L. 2411-5 et L. 2314-27 du code du travail.

2) ALORS QUE le délégué du personnel, en cas de rupture du contrat de travail analysée en un licenciement nul, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection, dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois ; qu'en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant ; qu'en accordant néanmoins à la salariée une indemnité correspondant à 42, 5 mois de salaires, pour la période courant depuis le 19 septembre 2013, date de l'audience devant le conseil de prud'hommes, jusqu'à la fin de la période de protection, alors que la date de la rupture du contrat était celle du prononcé du jugement prononçant la résiliation, soit le 30 juin 2014, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil, ensemble les articles L. 2411-5 et L. 2314-27 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-18719
Date de la décision : 18/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 26 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mai. 2017, pourvoi n°15-18719


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.18719
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