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07/09/2017 | FRANCE | N°16-14743;16-14745;16-14747;16-14748

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 septembre 2017, 16-14743 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° 16-14.743, 16-14.745, 16-14.747 et 16-14.748 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. D... et trois autres salariés ont été engagés par la société Aviance France en qualité de technicien trafic DDM coefficient 235 quatrième niveau filière exploitation de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 relatif à la classification attaché à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 ; qu'à la suite de la fusion-abs

orption de la société Aviance par la société Alyzia, leurs contrats de travail ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° 16-14.743, 16-14.745, 16-14.747 et 16-14.748 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. D... et trois autres salariés ont été engagés par la société Aviance France en qualité de technicien trafic DDM coefficient 235 quatrième niveau filière exploitation de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 relatif à la classification attaché à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 ; qu'à la suite de la fusion-absorption de la société Aviance par la société Alyzia, leurs contrats de travail ont été transférés à cette société ; que les partenaires sociaux ont conclu un accord collectif le 28 janvier 2008 ; que les salariés se sont vu proposer un avenant à leur contrat de travail le 29 janvier 2008 prévoyant la diminution de leur salaire de base et l'octroi d'une indemnité différentielle ; qu'ils ne l'ont pas signé ; que leur a été notifiée leur nomination au poste de régulateur trafic coefficient 245 catégorie "agent de maîtrise" à compter du 1er février 2009 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale de demande de rappel de salaire concernant la baisse de leur salaire de base et de demande de classification au coefficient 260 avec rappel de sommes afférentes ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1134 du code civil en sa rédaction alors applicable, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur au versement de sommes au titre du rappel de salaires de base et de congés payés afférents, les arrêts, après avoir constaté que l'accord collectif du 28 janvier 2008 avait institué une indemnité différentielle dont le montant devait correspondre à la différence entre les rémunérations globales annuelles antérieurement perçues par les salariés avant leur transfert et la rémunération globale annuelle versée par la société entrante afin de parvenir à l'absence de perte de rémunération, retiennent que le mode de rémunération contractuel constitue un élément du contrat de travail ne pouvant être modifié sans l'accord du salarié, que les parties s'accordent pour convenir que le salaire contractuel de base a été modifié et que les salariés n'ont pas acquiescé à cette modification par la signature d'un avenant au contrat de travail ;

Qu'en statuant ainsi, sans déduire du montant des sommes réclamées à titre de rappel du salaire de base, le montant de l'indemnité différentielle servie en application de l'accord précité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le second moyen :

Vu l'article L. 2253-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'annexe IV (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) relative à la classification attachée à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 et l'accord collectif du 29 janvier 2008 ;

Attendu que, pour dire que les salariés pouvaient prétendre au coefficient 260 et condamner l'employeur au paiement de sommes en conséquence, les arrêts retiennent que l'article L. 2253-3 du code du travail dispose qu'en matière de salaire minima, de classification, une convention ou un accord d'entreprise d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels, que l'employeur a admis qu'à compter du 1er février 2009, les salariés ne devaient plus relever du coefficient 235 correspondant au quatrième niveau de la convention collective et fait écrire que leur nouveau poste emportait plus de charges que le poste de niveau 235, qu'il s'en déduit qu'au regard de la convention collective qui comportait le seul coefficient 235 au quatrième niveau, les salariés accédaient au cinquième niveau comme agent de maîtrise, que selon la fiche de poste interne à l'entreprise, les fonctions de régulateur trafic correspondent à celles qu'énumère la convention collective pour les agents occupant un emploi au coefficient 260, que l'employeur ne pouvait en conséquence, par l'accord d'entreprise dont il se prévaut, contourner les dispositions légales et déroger aux dispositions conventionnelles s'agissant de la classification des salariés qui peuvent prétendre au premier coefficient applicable aux agents de maîtrise du cinquième niveau, soit le coefficient 260 ;

Attendu cependant, d'une part, qu'en matière de salaires minima et de classification professionnelle, les accords d'entreprise peuvent déroger dans un sens plus favorable aux salariés aux conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels, d'autre part que, selon l'annexe IV (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) relative à la classification attachée à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, le coefficient 260 échelon 5 correspond aux fonctions de technicien supérieur d'opérations qui conçoit des documents de vol et/ou analyse les paramètres de vol et participe à la régulation des vols ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'accord d'entreprise dérogatoire, qui instituait un échelon intermédiaire par rapport aux dispositions de la convention collective, comportait des dispositions moins favorables que celle-ci, ni rechercher si la fonction de régulateur trafic impliquait la conception des documents de vol et/ou l'analyse des paramètres de vol ainsi que la participation à la régulation des vols, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et attendu, que la cassation encourue sur les deux moyens entraîne, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur au versement de dommages-intérêts ainsi qu'une somme au titre du rappel pour 13e mois outre congés payés afférents ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 3 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne MM. D... , Y..., Z... et A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens, communs aux pourvois n° F 16-14.743, G 16-14.745, K 16-14.747 et M 16-14.748, produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Alyzia

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux arrêts confirmatifs attaqués d'AVOIR condamné la société ALYZIA à verser à chacun des salariés (Messieurs D... , Y..., Z... et A...) la somme de 1 280,06 euros à titre de rappel de salaire à compter du mois d'avril 2008 outre les congés payés afférents et la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

AUX MOTIFS QUE « la convention collective des transports aériens-personnels du sol organise le transfert des contrats de travail des salariés affectés aux différents marchés cédés ; qu'outre une procédure particulière préalable à la réalisation des opérations de transfert, l'annexe 6 de la convention collective relative au transfert des contrats de travail fait obligation à l'employeur cessionnaire de garantir au salarié transféré un maintien de l'ensemble des conditions de travail antérieures et notamment une reprise de l'ancienneté ainsi qu'un maintien de la rémunération dans les mêmes conditions que chez l'ancien employeur ; que lors des opérations de transfert, la SAS Alyzia négocie avec les organisations syndicales représentatives des accords dits d'adaptation afin que les droits acquis par les salariés transférés tels que leurs niveaux de rémunération et d'ancienneté soient intégralement maintenus ; que lors du transfert d'activité de la société Sapser vers la société Sapser Handling devenue Alyzia, un accord d'adaptation a été conclu entre le cessionnaire et les organisations syndicales représentatives afin d'aménager le statut collectif des salariés transférés ; que par ailleurs, les salariés transférés ont signé un avenant à leur contrat de travail avec la SAS Alyzia formalisant leur transfert au sein de cette dernière ; que, fin 2007, une transmission universelle des actifs et du passif de la société Aviance à la SAS Alyzia est intervenue ; que les contrats de travail des salariés de la société Aviance ont été transférés en application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que cette opération a entraîné l'ouverture de négociations en vue de conclure un accord d'adaptation devant se substituer à l'ensemble des conventions et accords jusqu'ici applicables aux salariés de la société absorbée ; qu'un tel accord a été signé avec les organisations syndicales, le 28 janvier 2008 ; qu'aux termes de cet accord, a été instituée une indemnité différentielle dont le montant devait correspondre à la différence entre les rémunérations globales annuelles antérieurement perçues par le salarié avant son transfert et la rémunération globale annuelle versée par la société entrante lorsque celle-ci est inférieure et ce, afin de parvenir à l'absence de perte de rémunération pour les salariés transférés ; que la société relève qu'un avenant au contrat de travail, fixant les nouvelles modalités de détermination de la structure de la rémunération a été proposé à chaque salarié, que la plupart des salariés ont effectivement signé ces avenants contractuels, que certains salariés ont refusé de le signer ; que toutefois, la société a mis en place ces nouvelles dispositions même à l'égard des salariés n'ayant pas signé les avenants contractuels qui leur avaient été proposés ; que, dans le présent débat, la SAS Alyzia fait valoir que le salarié n'a subi aucun préjudice financier du fait de la modification de la structure de sa rémunération contractuelle dans la mesure où si le salaire de base a enregistré une diminution de 22,07 euros, une indemnité différentielle de 33,76 euros lui a été versée et a largement compensé cette baisse ; qu'en toute hypothèse, la SAS Alyzia précise que : - les demandes de rappel de salaire formulées ne peuvent être dirigées à son encontre que jusqu'au mois de juillet 2012 date à laquelle (le salarié) est passé au service d'une autre société, - les salariés devraient rembourser les sommes perçues au titre de l'indemnité différentielle ; que c'est à juste titre que le premier juge a rappelé que le mode de rémunération contractuelle constitue un élément du contrat de travail ne pouvant être modifié sans l'accord du salarié peu important que le nouveau mode de rémunération soit plus avantageux ; que les parties s'accordent en réalité pour convenir que le salaire contractuel de base a été modifié, que le salarié n'a pas acquiescé à cette modification par la signature d'un avenant à son contrat de travail ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la SAS Alyzia à procéder au paiement d'un rappel de salaire à compter du mois d'avril 2008 ainsi qu'aux congés payés afférents ; que par ailleurs, le salarié conteste la réalité du transfert de son contrat de travail à une nouvelle entité ; que si, à la suite d'un changement dans le capital de la SAS Alyzia, 8 filiales ont été créées, ainsi que cela ressort des extraits K bis communiqués, la réalité d'un transfert d'une unité économique autonome au sein des filiales créées ayant emporté le transfert du contrat de travail n'est pas établie étant observé qu'il n'est pas utilement contesté que la SAS Alyzia conserve les fonctions commerciales ainsi que la gestion des ressources humaines. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point » ;

ET QUE « le salarié constate que les heures majorées à partir du salaire de base et la requalification du coefficient engendrent de facto un taux horaire supérieur, base de calcul de ces heures, qu'il serait nécessaire d'établir à nouveau tous les bulletins de salaire depuis le 1er février 2009, ce qui est impossible et demande en contrepartie la réparation du préjudice financier en résultant soit une somme de 1 000 euros ; que le premier juge a exactement évalué le préjudice du salarié en lui allouant la somme de 400 euros ; que le jugement sera confirmé sur ce point » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES QUE « (le salarié) fait valoir qu'à compter du mois d'avril 2008, son salaire brut de base a fait l'objet d'une baisse, sans son consentement ; qu'il demande en conséquence un rappel de salaire ainsi que le paiement des congés payés afférents ; que la société ALYZIA s'oppose à cette demande, en rappelant que le litige est la conséquence du fait qu'elle a bénéficié du transfert des contrats de travail de salariés, dont (le salarié) faisait partie, qui travaillaient précédemment pour la société AVIANCE France ; qu'elle indique que si (le salarié) n'a effectivement pas signé un avenant fixant le nouveau salaire de base contrairement à la plupart des salariés de la société, il n'en demeure pas moins que (le salarié) n'a pas subi de perte de salaire : l'accord d'adaptation conclu le 29 janvier 2008 entre la société ALYZIA et les organisations syndicales prévoit en effet que le salariés dont le contrat de travail a été transféré bénéficient d'une indemnité différentielle destinée à compenser l'éventuelle perte de salaire suite au transfert ; et que grâce à cette indemnité différentielle, (le salarié) perçoit une rémunération globale plus importante, malgré la baisse du salaire de base ; qu'au regard des positions opposées des parties, il sera rappelé, de manière générale, que « le mode de rémunération contractuel d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord, peu important que le nouveau mode soit plus avantageux » (Cass. Soc., 5 mai 2010, n° 07-45409) ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le salaire de base a été modifié et qu'aucun avenant au contrat de travail n'a été conclu ; qu'en conséquence, il sera fait droit aux demandes (du salarié) et la société ; que ALYZIA sera condamnée à lui payer les sommes suivantes : - 1 280,06 euros à titre de rappel de salaire à compter du mois d'avril 2008 ; - 128 euros au titre des congés payés afférents » ;

ET QUE « (le salarié) demande que la société ALYZIA soit condamnée au paiement de la somme de 500 euros en réparation du préjudice financier subi suite à la modification de son salaire de base par l'employeur, sans son consentement ; que la société ALYZIA s'oppose à cette demande ; qu'il sera fait droit à la demande (du salarié), à hauteur de 400 euros ; qu'il apparaît en effet que la société ALYZIA a modifié le salaire de base (du salarié) sans signature d'un avenant au contrat de travail, ce qui constitue une faute ayant nécessairement causé un préjudice (au salarié) » ;

1. ALORS QU'en cas de diminution du salaire de base moyennant le versement d'une indemnité différentielle, le salarié qui n'a pas expressément accepté cette modification de sa rémunération contractuelle n'a droit au paiement d'un rappel de salaire correspondant à la réduction du salaire de base que sous déduction de l'indemnité différentielle qui lui a été versée ; qu'en l'espèce, il est constant qu'à l'occasion de l'absorption de la société AVIANCE par la société ALYZIA, les contrats de travail des salariés de la société AVIANCE ont été transférés à la société ALYZIA ; qu'en raison de l'existence de grilles de rémunération interne différentes au sein des deux sociétés, un accord d'adaptation conclu le 29 janvier 2008 a prévu le maintien de la rémunération globale annuelle antérieurement perçue par chaque salarié de la société ALYZIA, grâce au paiement d'une indemnité différentielle correspondant à la différence entre la rémunération globale antérieure et la nouvelle rémunération globale ; qu'en application de cet accord collectif, la société ALYZIA a proposé aux salariés un avenant à leur contrat fixant leur nouveau salaire de base, inférieur à celui qu'ils percevaient antérieurement, et celui de l'indemnité différentielle qu'ils percevraient en conséquence ; que la société ALYZIA soutenait ainsi que, si les quatre salariés n'avaient pas accepté cette modification de leur rémunération contractuelle, ils n'avaient pour autant subi aucun préjudice, dès lors que le montant de l'indemnité différentielle couvrait plus que largement la diminution de leur salaire de base ; qu'en décidant néanmoins que les salariés étaient fondés à réclamer un rappel de salaire au titre de la réduction de leur salaire de base contractuel, sans déduire de ce rappel de salaire le montant de l'indemnité différentielle perçue, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'accord collectif d'adaptation du 29 janvier 2008 ;

2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'indemnité différentielle, dont le paiement est prévu par un accord collectif pour assurer le maintien de la rémunération globale du salarié à l'occasion de la réduction de son salaire, n'a plus de cause dès lors que le juge accorde au salarié un rappel de salaire à hauteur de son salaire antérieur ; que l'employeur est en droit, en conséquence, de solliciter la restitution de l'indemnité différentielle versée ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la société ALYZIA n'était pas fondée à réclamer la restitution de l'indemnité différentielle versée aux salariés pour assurer le maintien de leur rémunération antérieure à l'occasion du transfert de leur contrat, dès lors que ces derniers obtenaient un rappel de salaire équivalant à la différence entre leur salaire de base antérieur et celui perçu après le transfert, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de l'accord d'entreprise du 29 janvier 2008.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné la société ALYZIA à verser à chacun des salariés (Messieurs D... , Y..., Z... et A...) la somme de 8 934,26 euros au titre du rappel de salaire et à la qualification outre les congés payés afférents, la somme de 744,52 euros au titre du rappel de salaire sur le 13ème mois outre les congés payés afférents, la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « d'après l'annexe IV de la convention collective applicable, relative aux classifications, les emplois ont été regroupés en six filières dont l'exploitation ; qu'au sein de chaque filière, les emplois repères sont classés en cinq niveaux, les trois premiers niveaux concernent les ouvriers et les employés et les deux derniers niveaux concernent les techniciens et les agents d'encadrement ; que le quatrième niveau concerne les techniciens et agents de coordination et comprend le seul coefficient 235 ; que le cinquième niveau concerne les techniciens supérieurs et agents d'encadrement et comprend les coefficients 260 et 290 ; que selon l'employeur, un protocole d'accord de classification a été conclu le 21 novembre 2006 et visait à adapter la classification de branche prévue par l'avenant n° 55 de la convention collective nationale du transport aérien-personnel au sol modifié par l'avenant du 10 janvier 2001 et étendu par l'arrêté du 29 avril 2002 ; que l'accord de classification du 21 novembre 2006 avait pour objet d'établir une grille de correspondances entre les fonctions exercées au sein de la société et les emplois repères prévus au niveau de la branche ; que cette grille de correspondances a été modifiée dans le cadre de l'accord d'adaptation du 29 janvier 2008 consécutivement à la confusion des patrimoines entre la société Aviance et la SAS Alyzia ; que dans cet accord d'adaptation, ont été ajoutés divers coefficients hiérarchiques pour tenir compte de la réalité des fonctions exercées dans le secteur d'activité ; que dans le cas d'espèce, il est avéré que le salarié exerçait la fonction de «technicien trafic », relevait de la filière exploitation et était positionné au coefficient 235, ce qui correspond donc au quatrième niveau de la filière exploitation « technicien et agent de coordination » ; que par une lettre du 19 janvier 2009, la SAS Alyzia lui a notifié sa nomination en qualité de régulateur trafic au coefficient 245, catégorie « technicien agent de maîtrise » à compter du 1er février 2009 ; que ce coefficient n'apparaît pas dans la classification de la convention collective ; que l'article L. 2253-3 du code du travail dispose qu'en matière de salaire minima, de classification, [...] une convention ou un accord d'entreprise d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels ; que l'employeur a admis qu'à compter du 1 février 2009, le salarié ne devait plus relever du coefficient 235 correspondant au quatrième niveau de la convention collective et fait écrire que son nouveau poste emportait plus de charges que le poste de niveau 235 ; qu'il s'en déduit qu'au regard de la convention collective qui comportait le seul coefficient 235 au 4ème niveau, le salarié accédait au cinquième niveau comme « agent de maîtrise » ; qu'il sera relevé au surplus que selon la fiche de poste interne à l'entreprise, un régulateur trafic doit gérer les plannings en temps réel en tenant compte des problèmes d'effectifs, des retards, des annulations et des déroutements de vol, attribuer les vols aux techniciens et agents trafic, gérer les alertes, répondre par VHF appelant en fréquence, leur transmettre les informations en temps réel, répondre en temps réel aux questions posées par les différents intervenants. Ces fonctions correspondent en réalité à celles qu'énumère la convention collective pour les agents occupant un emploi au coefficient 260. Un tel agent doit en effet « concevoir les documents de vol et /ou analyser les paramètres de vol, participer à la régulation des vols, assurer la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs tout en assumant les tâches du technicien trafic » ; que l'employeur ne pouvait en conséquence, par l'accord d'entreprise dont il se prévaut, contourner les dispositions légales et déroger aux dispositions conventionnelles s'agissant de la classification du salarié qui peut légitimement prétendre au premier coefficient applicable aux agents de maîtrise du cinquième niveau, soit le coefficient 260 ; que le jugement déféré sera infirmé ; qu'il sera fait droit à la demande de rappel de salaire pour la période du 1er février 2009 au 31 décembre 2015 selon les modalités fixées dans le dispositif de la présente décision, étant rappelé que la SAS Alyzia n'établit pas la réalité d'un transfert d'une entité autonome ayant emporté transfert du contrat de travail du salarié vers une autre entité » ;

QUE « l'article 36 de la convention collective applicable a institué une gratification annuelle dont les modalités sont déterminées au sein de chaque établissement ; qu'elle est, au minimum, égale à 100 % du salaire forfaitaire mensuel de l'intéressé ; que l'accord d'entreprise remis à jour le 1er octobre 2011 précise que la gratification annuelle comprend le salaire de base du mois de versement, la prime d'ancienneté, 1/12 du total des majorations payées au titre des heures majorées pour travail de nuit, de dimanche, jours fériés, heures supplémentaires à 25 % allant de l'année N au 31 octobre de l'année N+1 ; que le salarié est fondé à solliciter un rappel de salaire sur la prime annuelle pour la période du 1er février 2009 au 31 décembre 2015 ; qu'il sera fait droit à sa demande selon les modalités précisées dans le dispositif de l'arrêt » ;

ET QUE « le salarié constate que les heures majorées à partir du salaire de base et la requalification du coefficient engendrent de facto un taux horaire supérieur, base de calcul de ces heures, qu'il serait nécessaire d'établir à nouveau tous les bulletins de salaire depuis le 1er février 2009, ce qui est impossible et demande en contrepartie la réparation du préjudice financier en résultant soit une somme de 1 000 euros ; que le premier juge a exactement évalué le préjudice du salarié en lui allouant la somme de 400 euros ; que le jugement sera confirmé sur ce point » ;

1. ALORS QUE selon l'article L. 2253-1 du code du travail, un accord d'entreprise peut adapter les dispositions d'un accord de branche aux particularités de l'entreprise et comporter des dispositions plus favorables que celles de l'accord de branche ; qu'en conséquence, si l'article L. 2253-3 du code du travail, issu de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, prévoit que les accords d'entreprise ne peuvent déroger aux dispositions d'un accord de branche en matière de salaires minima et de classification, il interdit uniquement de déroger in pejus, par accord d'entreprise, aux dispositions d'un accord de branche dans ces matières, mais pas de prévoir par accord d'entreprise une grille de classification plus favorable à celle définie par un accord de branche ; qu'en l'espèce, il est constant qu'un accord d'entreprise du 21 novembre 2006, modifié par un accord d'entreprise du 29 janvier 2008, a complété les grilles de classification résultant de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien, notamment en créant des coefficients intermédiaires entre certains coefficients des grilles de classification de la branche ; que ces accords d'entreprise ont ainsi créé un coefficient 245 situé entre les coefficients 235 et 260 de la grille « exploitation » de la branche, pour accueillir les salariés occupant les fonctions de « régulateur trafic » ; qu'en affirmant que l'article L. 2253-3 du code du travail interdit de déroger par accord d'entreprise aux accords de branche relatifs à la classification, pour déduire du classement des salariés au coefficient 245, inexistant dans la classification de la convention collective de branche, que leur poste de « régulateur trafic » devait être classé au coefficient supérieur 260 de la branche, la cour d'appel a violé l'article L. 2253-3 du code du travail, ensemble l'avenant n° 55 de la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien et les accords d'entreprise des 21 novembre 2006 et 29 janvier 2008 ;

2. ALORS QUE la circonstance que les charges d'un poste de travail soient supérieures à celles correspondant à la définition conventionnelle d'un coefficient de classification n'implique pas nécessairement que ce poste de travail relève du coefficient supérieur ; que, pour accéder à ce coefficient supérieur, ce poste de travail doit répondre à la définition conventionnelle de ce coefficient ; qu'en déduisant de la reconnaissance, par la société ALYZIA, de ce que les postes de régulateur trafic comportent plus de charges que les postes de niveau 235, que les salariés qui occupent un poste de régulateur trafic devaient accéder au coefficient supérieur dans la grille de classification de la branche, la cour d'appel a violé l'avenant n° 55 de la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien ;

3. ALORS, ENFIN, QUE selon l'annexe IV relative à la classification, avenant n° 55 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien, le coefficient 260 correspond aux fonctions du « technicien supérieur d'opérations » qui « conçoit les documents de vol et/ou analyse les paramètres de vol. Participe à la régulation des vols » et à ceux du « technicien supérieur d'exploitation » qui « outre les tâches du technicien de trafic, assure la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs et concourant » ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que les postes de régulateur trafic occupés par les salariés correspondent à celles du coefficient 260, que, selon la fiche interne de poste, le régulateur trafic doit gérer les plannings en temps réel en tenant compte des problèmes d'effectifs, des retards, des annulations et des déroutements de vol, attribuer les vols aux techniciens et agents trafic, gérer les alertes, répondre par VHF appelant en fréquence, leur transmettre les informations en temps réel, répondre en temps réel aux questions posées par les différents intervenants, ce qui ne fait ressortir, ni que ces postes impliquent la conception des documents de vol et/ou l'analyse des paramètres de vol, ni la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs et concourant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 à la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-14743;16-14745;16-14747;16-14748
Date de la décision : 07/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords d'entreprise - Accord en matière de salaires minima et de classification professionnelle - Accord dérogeant à une convention de branche ou à un accord professionnel ou interprofessionnel - Possibilité - Conditions - Accord d'entreprise plus favorable aux salariés - Portée

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords d'entreprise - Accord en matière de salaires minima et de classification professionnelle - Accord dérogeant à une convention de branche ou à un accord professionnel ou interprofessionnel - Principe de faveur - Application - Office du juge - Portée STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Principe de faveur - Dérogation prévue par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 - Exclusion - Cas - Accord d'entreprise en matière de salaires minima et de classification professionnelle - Conditions - Portée

En matière de salaires minima et de classification professionnelle, les accords d'entreprise peuvent déroger dans un sens plus favorable aux salariés aux conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels. Prive sa décision de base légale, la cour d'appel qui fait droit à une demande de classification en considération des seules dispositions de la convention collective sans constater que l'accord d'entreprise dérogatoire, qui instituait un échelon intermédiaire par rapport aux dispositions de la convention collective, comportait des dispositions moins favorables


Références :

article L. 2253-3 du code du travail, dans sa version issue de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004

annexe IV relatif à la classification (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transpo
rt aérien du 22 mai 1959

accord d'entreprise de la société Aviance du 29 janvier 2008

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 sep. 2017, pourvoi n°16-14743;16-14745;16-14747;16-14748, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.14743
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