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07/09/2017 | FRANCE | N°16-14744;16-14746

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 septembre 2017, 16-14744 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la connexité, joint les pourvois n° H 16-14.744 et J 16-14.746 ;

Vu l'article L. 2253-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'annexe IV (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) relative à la classification attachée à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 et l'accord collectif du 29 janvier 2008 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X... et un autre salarié ont été engagés

par la société Aviance France en qualité d'agent de passage coefficient 185 pour le p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la connexité, joint les pourvois n° H 16-14.744 et J 16-14.746 ;

Vu l'article L. 2253-3 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, ensemble l'annexe IV (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) relative à la classification attachée à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 et l'accord collectif du 29 janvier 2008 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X... et un autre salarié ont été engagés par la société Aviance France en qualité d'agent de passage coefficient 185 pour le premier, et de technicien trafic DDM coefficient 235 pour le second, de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 relatif à la classification attaché à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 ; qu'à la suite de la fusion-absorption de la société Aviance par la société Alyzia, leurs contrats de travail ont été transférés à cette société ; que les partenaires sociaux ont conclu un accord collectif le 28 janvier 2008 ; qu'a été notifiée aux salariés leur nomination au poste de régulateur trafic coefficient 245 catégorie "agent de maîtrise" à compter du 1er février 2009 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale de demande de classification au coefficient 260 avec rappel de sommes afférentes ;

Attendu que, pour dire que les salariés pouvaient prétendre au coefficient 260 et condamner l'employeur au paiement de sommes en conséquence, les arrêts retiennent que l'article L. 2253-3 du code du travail dispose qu'en matière de salaire minima, de classification, une convention ou un accord d'entreprise d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels, que l'employeur a admis qu'à compter du 1er février 2009, les salariés ne devaient plus relever du coefficient 235 correspondant au quatrième niveau de la convention collective et fait écrire que leur nouveau poste emportait plus de charges que le poste de niveau 235, qu'il s'en déduit qu'au regard de la convention collective qui comportait le seul coefficient 235 au quatrième niveau, les salariés accédaient au cinquième niveau comme agent de maîtrise, que selon la fiche de poste interne à l'entreprise, les fonctions de régulateur trafic correspondent à celles qu'énumère la convention collective pour les agents occupant un emploi au coefficient 260 ; que l'employeur ne pouvait en conséquence, par l'accord d'entreprise dont il se prévaut, contourner les dispositions légales et déroger aux dispositions conventionnelles s'agissant de la classification des salariés qui peuvent prétendre au premier coefficient applicable aux agents de maîtrise du cinquième niveau, soit le coefficient 260 ;

Attendu cependant, d'une part, qu'en matière de salaires minima et de classification professionnelle, les accords d'entreprise peuvent déroger dans un sens plus favorable aux salariés aux conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels, d'autre part que, selon l'annexe IV (avenant n° 55 du 18 novembre 1996) relative à la classification attachée à la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, le coefficient 260 échelon 5 correspond aux fonctions de technicien supérieur d'opérations qui conçoit des documents de vol et/ou analyse les paramètres de vol et participe à la régulation des vols ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'accord d'entreprise dérogatoire, qui instituait un échelon intermédiaire par rapport aux dispositions de la convention collective, comportait des dispositions moins favorables que celle-ci, ni rechercher si la fonction de régulateur trafic impliquait la conception des documents de vol et/ou l'analyse des paramètres de vol ainsi que la participation à la régulation des vols, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et attendu que la cassation entraîne, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur au versement de dommages-intérêts ainsi qu'une somme au titre du rappel pour 13e mois outre congés payés afférents ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 3 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen, commun aux pourvois n° H 16-14.744 et J 16-14.746, produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Alyzia

Il est fait grief aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR condamné la société ALYZIA à verser à Messieurs X... et Y... respectivement les sommes de 6.760,11 euros et de 8.934,26 euros au titre du rappel de salaire et à la qualification outre les congés payés afférents, les sommes de 563,34 euros et de 744,52 euros au titre du rappel de salaire sur le 13ème mois outre les congés payés afférents, la somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « d'après l'annexe IV de la convention collective applicable, relative aux classifications, les emplois ont été regroupés en six filières dont l'exploitation ; qu'au sein de chaque filière, les emplois repères sont classés en cinq niveaux, les trois premiers niveaux concernent les ouvriers et les employés et les deux derniers niveaux concernent les techniciens et les agents d'encadrement ; que le quatrième niveau concerne les techniciens et agents de coordination et comprend le seul coefficient 235 ; que le cinquième niveau concerne les techniciens supérieurs et agents d'encadrement et comprend les coefficients 260 et 290 ; que selon l'employeur, un protocole d'accord de classification a été conclu le 21 novembre 2006 et visait à adapter la classification de branche prévue par l'avenant n° 55 de la convention collective nationale du transport aérien-personnel au sol modifié par l'avenant du 10 janvier 2001 et étendu par l'arrêté du 29 avril 2002 ; que l'accord de classification du 21 novembre 2006 avait pour objet d'établir une grille de correspondances entre les fonctions exercées au sein de la société et les emplois repères prévus au niveau de la branche ; que cette grille de correspondances a été modifiée dans le cadre de l'accord d'adaptation du 29 janvier 2008 consécutivement à la confusion des patrimoines entre la société Aviance et la SAS Alyzia ; que dans cet accord d'adaptation, ont été ajoutés divers coefficients hiérarchiques pour tenir compte de la réalité des fonctions exercées dans le secteur d'activité ; que dans le cas d'espèce, il est avéré que le salarié exerçait la fonction de « technicien trafic », relevait de la filière exploitation et était positionné au coefficient 235, ce qui correspond donc au quatrième niveau de la filière exploitation « technicien et agent de coordination » ; que par une lettre du 19 janvier 2009, la SAS Alyzia lui a notifié sa nomination en qualité de régulateur trafic au coefficient 245, catégorie « technicien agent de maîtrise » à compter du 1er février 2009 ; que ce coefficient n'apparaît pas dans la classification de la convention collective ; que l'article L. 2253-3 du code du travail dispose qu'en matière de salaire minima, de classification, [...] une convention ou un accord d'entreprise d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels ; que l'employeur a admis qu'à compter du 1 février 2009, le salarié ne devait plus relever du coefficient 235 correspondant au quatrième niveau de la convention collective et fait écrire que son nouveau poste emportait plus de charges que le poste de niveau 235 ; qu'il s'en déduit qu'au regard de la convention collective qui comportait le seul coefficient 235 au 4ème niveau, le salarié accédait au cinquième niveau comme « agent de maîtrise » ; qu'il sera relevé au surplus que selon la fiche de poste interne à l'entreprise, un régulateur trafic doit gérer les plannings en temps réel en tenant compte des problèmes d'effectifs, des retards, des annulations et des déroutements de vol, attribuer les vols aux techniciens et agents trafic, gérer les alertes, répondre par VHF appelant en fréquence, leur transmettre les informations en temps réel, répondre en temps réel aux questions posées par les différents intervenants. Ces fonctions correspondent en réalité à celles qu'énumère la convention collective pour les agents occupant un emploi au coefficient 260. Un tel agent doit en effet « concevoir les documents de vol et/ou analyser les paramètres de vol, participer à la régulation des vols, assurer la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs tout en assumant les tâches du technicien trafic » ; que l'employeur ne pouvait en conséquence, par l'accord d'entreprise dont il se prévaut, contourner les dispositions légales et déroger aux dispositions conventionnelles s'agissant de la classification du salarié qui peut légitimement prétendre au premier coefficient applicable aux agents de maîtrise du cinquième niveau, soit le coefficient 260 ; que le jugement déféré sera infirmé ; qu'il sera fait droit à la demande de rappel de salaire pour la période du 1er février 2009 au 31 décembre 2015 selon les modalités fixées dans le dispositif de la présente décision, étant rappelé que la SAS Alyzia n'établit pas la réalité d'un transfert d'une entité autonome ayant emporté transfert du contrat de travail du salarié vers une autre entité » ;

QUE « l'article 36 de la convention collective applicable a institué une gratification annuelle dont les modalités sont déterminées au sein de chaque établissement ; qu' elle est, au minimum, égale à 100 % du salaire forfaitaire mensuel de l'intéressé ; que l'accord d'entreprise remis à jour le 1er octobre 2011 précise que la gratification annuelle comprend le salaire de base du mois de versement, la prime d'ancienneté, 1/12 du total des majorations payées au titre des heures majorées pour travail de nuit, de dimanche, jours fériés, heures supplémentaires à 25 % allant de l'année N au 31 octobre de l'année N+1 ; que le salarié est fondé à solliciter un rappel de salaire sur la prime annuelle pour la période du 1er février 2009 au 31 décembre 2015 ; qu'il sera fait droit à sa demande selon les modalités précisées dans le dispositif du présent arrêt » ;

ET QUE « le salarié constate que les heures majorées à partir du salaire de base et la requalification du coefficient engendrent de facto un taux horaire supérieur, base de calcul de ces heures, qu'il serait nécessaire d'établir à nouveau tous les bulletins de salaire depuis le 1er février 2009, ce qui est impossible et demande en contrepartie la réparation du préjudice financier en résultant soit une somme de 1 000 euros ; que le préjudice du salarié sera exactement réparé par l'allocation d'une somme de 400 euros » ;

1. ALORS QUE selon l'article L. 2253-1 du Code du travail, un accord d'entreprise peut adapter les dispositions d'un accord de branche aux particularités de l'entreprise et comporter des dispositions plus favorables que celles de l'accord de branche ; qu'en conséquence, si l'article L. 2253-3 du Code du travail, issu de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, prévoit que les accords d'entreprise ne peuvent déroger aux dispositions d'un accord de branche en matière de salaires minima et de classification, il interdit uniquement de déroger in pejus, par accord d'entreprise, aux dispositions d'un accord de branche dans ces matières, mais pas de prévoir par accord d'entreprise une grille de classification plus favorable à celle définie par un accord de branche ; qu'en l'espèce, il est constant qu'un accord d'entreprise du 21 novembre 2006, modifié par un accord d'entreprise du 29 janvier 2008, a complété les grilles de classification résultant de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien, notamment en créant des coefficients intermédiaires entre certains coefficients des grilles de classification de la branche ; que ces accords d'entreprise ont ainsi créé un coefficient 245 situé entre les coefficients 235 et 260 de la grille « exploitation » de la branche, pour accueillir les salariés occupant les fonctions de « régulateur trafic » ; qu'en affirmant que l'article L. 2253-3 du Code du travail interdit de déroger par accord d'entreprise aux accords de branche relatifs à la classification, pour déduire du classement des salariés au coefficient 245, inexistant dans la classification de la convention collective de branche, que leur poste de « régulateur trafic » devait être classé au coefficient supérieur 260 de la branche, la cour d'appel a violé l'article L. 2253-3 du Code du travail, ensemble l'avenant n° 55 de la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien et les accords d'entreprise des 21 novembre 2006 et 29 janvier 2008 ;

2. ALORS QUE la circonstance que les charges d'un poste de travail soient supérieures à celles correspondant à la définition conventionnelle d'un coefficient de classification n'implique pas nécessairement que ce poste de travail relève du coefficient supérieur ; que, pour accéder à ce coefficient supérieur, ce poste de travail doit répondre à la définition conventionnelle de ce coefficient ; qu'en déduisant de la reconnaissance, par la société ALYZIA, de ce que les postes de régulateur trafic comportent plus de charges que les postes de niveau 235, que les salariés qui occupent un poste de régulateur trafic devaient accéder au coefficient supérieur dans la grille de classification de la branche, la cour d'appel a violé l'avenant n° 55 de la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien ;

3. ALORS, ENFIN, QUE selon l'annexe IV relative à la classification, avenant n° 55 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien, le coefficient 260 correspond aux fonctions du « technicien supérieur d'opérations » qui « conçoit les documents de vol et/ou analyse les paramètres de vol. Participe à la régulation des vols » et à celles du « technicien supérieur d'exploitation » qui « outre les tâches du technicien de trafic, assure la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs et concourant » ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que les postes de régulateur trafic occupés par les salariés correspondent à ceux du coefficient 260, que, selon la fiche interne de poste, le régulateur trafic doit gérer les plannings en temps réel en tenant compte des problèmes d'effectifs, des retards, des annulations et des déroutements de vol, attribuer les vols aux techniciens et agents trafic, gérer les alertes, répondre par VHF appelant en fréquence, leur transmettre les informations en temps réel, répondre en temps réel aux questions posées par les différents intervenants, ce qui ne fait ressortir, ni que ces postes impliquent la conception des documents de vol et/ou l'analyse des paramètres de vol, ni la supervision au sol de l'ensemble des relations avec les intervenants extérieurs et concourant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'avenant n° 55 du 18 novembre 1996 à la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien.


Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2016


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 07 sep. 2017, pourvoi n°16-14744;16-14746

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Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 07/09/2017
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16-14744;16-14746
Numéro NOR : JURITEXT000035539313 ?
Numéro d'affaires : 16-14744, 16-14746
Numéro de décision : 51701991
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2017-09-07;16.14744 ?
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