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11/08/2009 | SéNéGAL | N°26

Sénégal | Arrêt n° 26 du 11 août 2009 (Abdoul GUISSE c/ – Sidy Ben Oumar KANE – Ministre Chargé de l’Intérieur )


Arrêt n° 26 du 11 août 2009



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

SUR LA RECEVABILITÉ DU RECOURS :

Considérant que, dans son mémoire du 22 juillet 2009, Sidy Ben Oumar Kane a soulevé
l’irrecevabilité de la requête motif pris de ce que d’une part , elle n’indique pas le domicile réel mais
plutôt le domicile élu des parties alors qu’il avait bien mentionné l’adresse de son domicile réel dans
sa requête devant la Cour d’Appel et que d’autre part, la requête n’e

st pas signée par Abdoul Guissé
lui-même mais par son conseil en violation de l’article L.254 du code électoral ;

Considé...

Arrêt n° 26 du 11 août 2009



LA COUR SUPRÊME,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

SUR LA RECEVABILITÉ DU RECOURS :

Considérant que, dans son mémoire du 22 juillet 2009, Sidy Ben Oumar Kane a soulevé
l’irrecevabilité de la requête motif pris de ce que d’une part , elle n’indique pas le domicile réel mais
plutôt le domicile élu des parties alors qu’il avait bien mentionné l’adresse de son domicile réel dans
sa requête devant la Cour d’Appel et que d’autre part, la requête n’est pas signée par Abdoul Guissé
lui-même mais par son conseil en violation de l’article L.254 du code électoral ;

Considérant qu’il résulte de l’article 76 de la loi organique n° 2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour
suprême, dérogeant aux dispositions générales des articles 34 et suivants du même texte que le pourvoi
en la matière est formé par une simple requête enregistrée au Greffe de la Cour dont le greffier assure
la notification, dans les deux jours suivant le dépôt, à la partie adverse par lettre recommandée avec
avis de réception ;

Considérant qu’en l’espèce la partie adverse qui a reçu notification du Greffe de la Cour
conformément à l’article 76 précité, a déposé son mémoire en défense dans le délai prévu par la loi ;

Considérant que l’article 76 sus-mentionné n’exige pas que la requête soit signée personnellement
par le requérant qui bien qu’étant dispensé du ministère d’avocat peut constituer conseil ;

Qu’en l’espèce l’avocat constitué a signé et déposé la requête au nom de Abdoul Guissé ;

Qu’il y a lieu de déclarer le recours recevable ;

SUR LE FOND ;

Considérant que la Cour d’Appel a été saisie par Abdoul Guissé, tête de liste majoritaire de
AJ/PADS dans la commune de Thilogne, de réclamations tendant d’une part à l’infirmation de la
décision de la commission départementale de recensement des votes qui a annulé les votes au bureau
n° 1 de la mairie, et d’autre part à l’annulation des opérations électorales aux bureaux n° 1 et n° 2 de la
mosquée ;

Que pour infirmer la décision d’annulation au bureau n° 1 de la mairie, elle a retenu que le fait pour
un seul électeur de voter avec un certificat de perte de sa pièce d’identité n’est pas de nature à entacher
la sincérité du vote et que, pour la demande d’annulation aux bureaux n° 1 et n° 2 de la mosquée, il
n’est pas prouvé qu’il y ait eu poursuite du vote au-delà de l’heure de clôture fixée par le préfet ;

Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article L.254 du code électoral en ce que la Cour
d’Appel a infirmé la décision administrative de la commission départementale de recensement des
votes alors qu’elle devait se limiter exclusivement à l’annulation des opérations électorales elles
mêmes ;


Considérant qu’aux termes de l’article L.237 du code électoral que « par dérogation à l’article L.82,
la commission départementale de recensement des votes procède, le cas échéant à la rectification, à
l’annulation ou aux redressements des procès-verbaux des bureaux de vote » ;

Que dès lors la Cour d’Appel, saisie en vertu de l’article L.254 du code électoral en tant que juge des
élections locales, dispose des mêmes pouvoirs d’annulation, de rectification et de redressement ; qu’il
s’ensuit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen tiré du défaut de réponse aux conclusions en ce que d’une part, AJ/PADS
avait constitué des conseils dont les noms ne figurent pas dans l’arrêt et d’autre part le mémoire en
défense, par eux déposé, contre décharge du greffier en chef de la Cour d’Appel de Dakar, excipant de
l’incompétence de celle-ci au profit de la Cour d’Appel de Saint-Louis, n’a reçu réponse ni dans les
motifs, ni dans le dispositif de l’arrêt ;

Considérant que l’indication du nom du conseil ne fait pas partie des mentions qui figurent
obligatoirement dans un arrêt ;

Considérant que la Cour d’Appel en statuant au fond nonobstant l’exception d’incompétence
soulevée, a entendu implicitement, mais nécessairement rejeter celle-ci ; qu’au demeurant
conformément à l’article LO.298 du code électoral, la Cour d’Appel de Dakar a une compétence
nationale exclusive en matière électorale ;

Qu’enfin l’arrêt reprend dans ses motifs les éléments de fait et de droit contenus dans les conclusions
du requérant ;

Qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le troisième moyen pris de l’excès de pouvoir en ce que l’appréciation de la validité ou du
caractère fondé ou non de la décision prise par la commission de recensement des votes, véritable
décision administrative, ne relève pas des pouvoirs de la Cour d’Appel ;

Considérant que la décision prise par la commission de recensement des votes a fait naître un
contentieux électoral dont la Cour d’Appel est juge en premier ressort conformément à l’article L.254
du code électoral ;

Qu’il s’ensuit que le moyen manque en fait ;

Sur le quatrième moyen tiré de l’insuffisance de motifs en ce que la Cour d’Appel s’est limitée à
énoncer que « le fait, pour un seul électeur de voter avec un certificat de perte de sa carte d’identité,
n’est pas de nature à entacher la sincérité du vote » alors que cette motivation ne permet aucunement
d’analyser les conséquences entrainées par le vote d’une part, et d’autre part la sincérité d’un scrutin
dépend fondamentalement de l’observation stricte des conditions posées par la loi pour l’accès aux
urnes par les électeurs ;

Considérant que s’agissant de bulletins et enveloppes nuls non annexés au procès-verbal, aux termes
de l’article L.80 du code électoral, cette circonstance n’entraine l’annulation des opérations qu’autant
qu’il est établi qu’elle a eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;

Qu’en l’espèce, s’il est vrai que le fait d’avoir voté avec un certificat de perte de carte d’identité
constitue une irrégularité en vertu de l’article R.60 du code électoral, il n’en demeure pas moins que ce
fait n’a altéré ni la crédibilité, ni la sincérité du vote ;


Qu’en effet même l’attribution de cette voix au requérant ne changerait pas fondamentalement les
résultats du scrutin dans le bureau de vote concerné ;

Qu’ainsi en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a suffisamment motivé sa décision ;

SUR LE POURVOI INCIDENT ;

Considérant que, dans son mémoire en réponse, Sidy Ben Oumar Kane a sollicité l’annulation des
bureaux de vote n° 1 et 2 de la mosquée au motif que le vote a été poursuivi jusqu’à 23 heures alors
que l’arrêté préfectoral prorogeait le scrutin jusqu’à 21 heures ; qu’il ajoute que ledit arrêté étant
uniquement affiché et communiqué au représentant local de la CENA en application des articles R.49
et L.15 du code électoral, il ne saurait apporter la preuve des faits allégués ;

Considérant que la preuve de l’existence de l’arrêté préfectoral est différente de la preuve de la
poursuite du vote au-delà de l’heure légale ;

Que la Cour a très justement relevé qu’aucun élément du dossier ne prouve qu’il y’a eu poursuite du
vote au-delà de l’heure de fermeture fixée par l’arrêté préfectoral ; d’où il suit que le pourvoi incident
n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

– Rejette le pourvoi formé par Abdoul Guissé contre l’arrêt n° 22 rendu le 17 juin 2009 par la Cour
d’Appel de Dakar ;

– Rejette le pourvoi incident de Sidy Ben Oumar Kane ;

– Dit que l’amende consignée est acquise au Trésor public ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre administrative, en son audience publique
tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :

Président : Fatou Habibatou DIALLO ; Conseillers : Mouhamadou NGOM, Mamadou Abdoulaye
DIOUF, Amadou Hamady DIALLO, Abdoulaye NDIAYE ; Avocat général : Ndary TOURE ;
Rapporteur : Abdoulaye NDIAYE ; Avocat : Ciré Clédor LY ; Greffier : Cheikh DIOP.


Synthèse
Formation : chambre administrative
Numéro d'arrêt : 26
Date de la décision : 11/08/2009

Analyses

REQUÊTE – FORME – DISPOSITIONS APPLICABLES – DÉTERMINATION Il résulte de l’article 76 de la loi organique sur la Cour suprême, dérogeant aux dispositions générales des articles 34 et suivants du même texte, que le pourvoi en matière électorale est formé par une simple requête enregistrée au Greffe de la Cour et notifiée par le greffier, dans les deux jours suivant le dépôt, à la partie adverse par lettre recommandée avec avis de réception. La partie adverse, qui a reçu notification du Greffe de la Cour conformément à l’article 76 précité et a déposé son mémoire en défense dans le délai prévu par la loi, est mal fondée à invoquer l’irrecevabilité de la requête aux motifs qu’elle n’est pas signée personnellement par le requérant mais par son conseil et qu’elle mentionne son domicile élu à la place de son domicile réel. ÉLECTIONS – ÉLECTIONS RÉGIONALES, MUNICIPALES ET RURALES – POUVOIRS DU JUGE – RECTIFICATION, ANNULATION OU REDRESSEMENTS DES PROCÈS-VERBAUX DES BUREAUX DE VOTE Dès lors que l’article L.237 du code électoral prévoit que par dérogation à l’article L.82, la commission départementale de recensement des votes procède, le cas échéant, à la rectification, à l’annulation ou aux redressements des procès-verbaux des bureaux de vote, la Cour d’Appel, saisie en vertu de l’article L.254 du même code en tant que juge électoral, dispose des mêmes pouvoirs d’annulation, de rectification et de redressement. PROCÉDURE – EXCEPTION D’INCOMPÉTENCE – EXAMEN DU FOND – EFFET – REJET IMPLICITE Une Cour d’Appel qui statue au fond nonobstant l’exception d’incompétence soulevée, a entendu implicitement, mais nécessairement, rejeter celle-ci. ÉLECTIONS – VOTE AVEC UN CERTIFICAT DE PERTE DE CARTE D’IDENTITÉ – IRRÉGULARITÉ – INDIFFÉRENCE SUR LES RÉSULTATS DU SCRUTIN – ALTÉRATION DE LA SINCÉRITÉ DU VOTE (NON) Le vote avec un certificat de perte de carte d’identité constitue certes une irrégularité en vertu de l’article R 60 du code électoral, mais ce fait n’a altéré ni la crédibilité, ni la sincérité du vote, dès lors que l’attribution de cette voix au requérant ne changerait pas fondamentalement les résultats du scrutin dans le bureau de vote concerné.

ÉLECTIONS – ÉLECTIONS RÉGIONALES, MUNICIPALES ET RURALES – POURVOI – REQUÊTE – FORME – DISPOSITIONS APPLICABLES – DÉTERMINATION


Parties
Demandeurs : Abdoul GUISSE
Défendeurs : – Sidy Ben Oumar KANE – Ministre Chargé de l’Intérieur

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;sn;cour.supreme,.chambre.administrative;arret;2009-08-11;26 ?
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