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19/02/2008 | FRANCE | N°06BX00742

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 19 février 2008, 06BX00742


Vu I°) sous le n° 06BX00742, la requête, enregistrée le 6 avril 2006, présentée pour M. Antonio X, demeurant ..., par Me Alloiteau ;
M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405063 du 9 février 2006 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Bordeaux a limité à 1 925,73 euros la somme que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser en réparation du préjudice subi à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée dans cet établissement le 18 février 1998 ;

2°) de porter à 62 934,

60 euros l'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné...

Vu I°) sous le n° 06BX00742, la requête, enregistrée le 6 avril 2006, présentée pour M. Antonio X, demeurant ..., par Me Alloiteau ;
M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405063 du 9 février 2006 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Bordeaux a limité à 1 925,73 euros la somme que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser en réparation du préjudice subi à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée dans cet établissement le 18 février 1998 ;

2°) de porter à 62 934,60 euros l'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Bordeaux a été condamné à lui verser déduction faite de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde et de la provision de 25 000 euros ;

3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Bordeaux à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à payer les dépens ;
……………………………………………………………………………………………

Vu II°) sous le n° 06BX00752, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril 2006 et 24 juillet 2006, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX, dont le siège est 12 rue Dubernat à Talence (33400), par Me Didier le Prado ;
Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter la demande de M. X et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde présentées devant le tribunal administratif ;
……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2008 :
- le rapport de Mme Jayat, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 18 février 1998, M. X, alors âgé de 36 ans, a subi au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX une intervention chirurgicale en vue de traiter une ischémie musculaire du mollet gauche ; qu'à la suite de cette intervention, il souffre d'une atteinte du nerf saphène externe responsable de troubles sensitifs ; que, par le jugement attaqué du 9 février 2006, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX à verser à M. X une indemnité de 1 925,73 euros en réparation du préjudice subi et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde la somme de 33 374,56 euros ; que la requête n° 06BX00742 de M. X et la requête n° 06BX00752 du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX tendent l'une à la réformation du jugement du 9 février 2006 et l'autre à son annulation ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise ordonnée en première instance que le diagnostic pré-opératoire de la pathologie dont souffrait M. X était celui d'une artère poplitée « piégée » et que ce diagnostic n'a pas été confirmé par les constatations faites au cours de l'opération du 18 février 1998, laquelle a, en revanche, révélé l'existence d'un kyste adventiciel qui a fait l'objet d'une résection accompagnée d'une greffe en matériau artificiel, la qualité du greffon prélevé sur la veine saphène n'étant pas suffisante ; que, s'il résulte de l'instruction et notamment des constatations de l'expert, que l'atteinte du nerf saphène externe dont souffre M. X est la conséquence de l'intervention chirurgicale du 18 février 1998, aucun élément de l'instruction, et notamment pas le rapport d'expertise, qui ne relève aucun manquement aux règles de l'art dans le déroulement de l'intervention, ne permet de regarder cette atteinte comme la conséquence d'une faute médicale ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les symptômes présentés par le patient avant l'intervention aient été de nature à faire évoquer l'hypothèse d'un kyste adventiciel ni que les troubles dont souffre M. X puissent être imputés à un diagnostic tardif ; que, dans ces conditions, le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour le condamner à réparer le préjudice dont M. X reste atteint après l'intervention chirurgicale du 18 février 1998, les premiers juges ont estimé qu'une faute médicale était à l'origine de l'atteinte du nerf saphène externe dont souffre la victime ;
Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif ;

Considérant, d'une part, que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de son état et présentant un caractère d'exceptionnelle gravité ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise ordonnée en première instance, qu'à la suite de la lésion du nerf saphène externe, M. X reste atteint de troubles de la sensibilité et notamment de douleurs dans la partie postéro-inférieure de la jambe et le bord externe du pied, justifiant un taux d'incapacité permanente partielle qui ne saurait excéder 20 % ; que, si ces séquelles présentent un caractère invalidant, elles ne peuvent toutefois être regardées comme constituant des troubles d'une exceptionnelle gravité de nature à engager la responsabilité sans faute du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX ;
Considérant, d'autre part, que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé, alors même que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ; que, toutefois, cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la constatation de l'existence d'un kyste ayant rendu nécessaire l'opération qui a été l'origine pour le patient d'une lésion du nerf saphène, n'a pu être faite qu'au cours de l'intervention chirurgicale ; que, dans ces conditions, l'information préalable de M. X sur les risques que comportait l'opération était impossible ; que, par suite, le défaut d'information du patient n'est pas en l'espèce de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamné à réparer les conséquences dommageables de l'opération du 18 février 1998 ; que, dès lors, la requête de M. X et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde doivent être rejetées ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'eu égard aux circonstances particulières de l'espèce et notamment au fait que M. X bénéficie de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de l'instance n° 06BX00742, il y a lieu de mettre les frais de l'expertise ordonnée en première instance à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde les sommes que ceux-ci demandent au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 9 février 2006 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La requête de M. Antonio X ainsi que sa demande présentée devant le tribunal administratif sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions d'appel de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde et ses conclusions présentées devant le tribunal administratif sont rejetées.
Article 4 : Les frais de l'expertise ordonnée en première instance sont mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BORDEAUX.
Article 5 : Les conclusions de M. X et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Nos 06BX00742 / 06BX00752
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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 06BX00742
Date de la décision : 19/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : ALLOITEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-02-19;06bx00742 ?
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