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27/11/2007 | FRANCE | N°05BX01882

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 27 novembre 2007, 05BX01882


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 septembre 2005, sous le n° 05BX01882, présentée pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me Lacaze, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0311, en date du 13 juillet 2005, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités de mauvaise foi, qui lui ont été assignées au titre des années 1997 à 1999, ensemble les contributions sociales supplémentaires qui lui ont été assigné

es au titre des années 1997 et 1998 ;

2°) de le décharger des impositions et péna...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 septembre 2005, sous le n° 05BX01882, présentée pour M. Jean-Claude X, demeurant ..., par Me Lacaze, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0311, en date du 13 juillet 2005, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités de mauvaise foi, qui lui ont été assignées au titre des années 1997 à 1999, ensemble les contributions sociales supplémentaires qui lui ont été assignées au titre des années 1997 et 1998 ;

2°) de le décharger des impositions et pénalités en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2007 :

- le rapport de M. Bonnet, président assesseur,

- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Jean-Claude X relève appel d'un jugement du 13 juillet 2005, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, avec pénalités de mauvaise foi afférentes, qui lui ont été assignées au titre des années 1997 à 1999 ainsi que des contributions sociales supplémentaires qui lui ont été assignées au titre des années 1997 et 1998 ; que ces impositions et pénalités procèdent de redressements notifiés le 5 décembre 2000, à la suite d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du requérant et d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1997 et 1998, ainsi que d'un contrôle sur pièces afférent à l'année 1999 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. X soutient que le tribunal administratif de Bordeaux a omis de statuer sur son moyen tiré de l'exigence d'un dialogue contradictoire spécifique, antérieurement à la notification des redressements, entre le contribuable et le vérificateur, portant sur les points demeurant objet de désaccord postérieurement à la date d'envoi des explications faisant suite à une demande de justifications ; qu'il résulte toutefois de l'examen du jugement que les premiers juges ont écarté les prétentions de M. X sur ce point en relevant que ce dernier « n'était pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de la possibilité d'engager un débat contradictoire avant l'envoi de la demande de justifications ou d'éclaircissements le 10 juillet 2000, ni avant l'envoi de la notification de redressements » ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;

Considérant, en revanche, que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré, à l'encontre des pénalités de mauvaise foi infligées à M. X, de ce que l'exigence imposée à ce dernier d'apporter la preuve de l'exagération des impositions, conformément aux dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, était incompatible avec les stipulations de l'article 6-2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il statue sur ces pénalités, et de statuer dans cette mesure par voie d'évocation ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, postérieurement à l'envoi d'un avis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. X, le vérificateur a rencontré ce dernier, sur place, le 18 avril 2000, après lui avoir demandé divers renseignements par lettre du 9 mars précédent ; qu'il l'a rencontré à nouveau dans le cadre de la vérification de comptabilité diligentée parallèlement, en raison du caractère mixte des comptes du requérant, les 26 et 31 mai, 16 et 22 juin, et enfin le 5 juillet 2000, avant que ne soit adressée à l'intéressé, le 10 juillet 2000, une demande de justifications ; qu'ainsi un débat contradictoire a été offert à M. X en ce qui concerne tant les opérations générales de vérification de sa situation fiscale personnelle que les éléments ayant été retenus pour l'envoi de cette demande de justifications ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, et dès lors qu'aucun élément nouveau n'était survenu postérieurement au 10 juillet 2000, le vérificateur n'avait en tout état de cause pas à renouer une nouvelle fois ce dialogue après réception des réponses apportées à la demande de justifications, lesquelles ont été regardées, à raison de leur grave insuffisance, comme inexistantes ;

Considérant, en deuxième lieu, que si le vérificateur a consulté, au cours des opérations de contrôle, les déclarations de M. X afférentes à des années antérieures à celles visées par l'avis de vérification, il est constant qu'aucune imposition n'a été assignée au titre de ces années antérieures, et que le vérificateur s'est simplement borné à recouper avec ces déclarations les indications fournies par le requérant, qui tendaient à justifier la disponibilité d'importantes sommes en espèces au titre des années en litige par des économies réalisées précédemment ; qu'un tel recoupement, qui n'a en rien affecté les constatations opérées dans le cadre du contrôle, ni entraîné en tant que tel un rehaussement des impositions assignées à l'issue, ne saurait par suite révéler une quelconque extension des opérations à des années non visées par l'avis de vérification ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que la circonstance que l'administration ait diligenté un contrôle sur pièces au titre de l'année 1999 n'est pas de nature à établir une extension de la vérification sur cette année, dès lors qu'il n'est nullement établi, ni d'ailleurs véritablement allégué, qu'elle se serait, à l'occasion de ce contrôle, livrée à un examen des comptes bancaires ou des pièces comptables de M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition aurait été irrégulière ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que M. X ayant été imposé sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, il lui appartient d'apporter la preuve de l'exagération des impositions en litige ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les compléments d'imposition en litige procèdent de la découverte, par le vérificateur, d'importants versements en espèces, à hauteur de 825 000 F, opérés sur les comptes bancaires de M. X ; que ce dernier, en dépit de l'envoi d'une demande de justifications en date du 10 juillet 2000, ainsi que mentionné ci-dessus, n'a pu présenter aucune pièce probante quant à l'origine et à la cause juridique de ces versements ; que s'il soutient, devant la cour, que lesdits versements provenaient d'économies, de dons familiaux, ou d'un surplus d'héritage non déclaré provenant de sa mère, il ne verse à l'appui aucun document de nature à étayer ses dires ; que s'il soutient également qu'il aurait été amené à régler une importante soulte à son ancienne épouse, dans le cadre de l'exécution d'un jugement de divorce, et que cette nécessité l'aurait amené à solliciter l'aide de sa famille, il n'apporte pas davantage d'éléments à l'appui de ces allégations ; qu'ainsi il ne peut être regardé comme apportant la preuve de l'exagération des impositions contestées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1997 à 1999, ainsi que des contributions sociales supplémentaires qui lui ont été assignées au titre des années 1997 et 1998 ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729-1 du code général des impôts : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » ; que, pour contester les majorations qui lui ont été infligées sur le fondement de ce texte, M. X fait valoir que le régime même de dévolution de la charge de la preuve, dès lors qu'il a été taxé d'office, est incompatible avec les stipulations de l'article 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux termes duquel « Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie » ;

Considérant cependant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : « En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts ainsi que des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger. L'administration peut demander au contribuable des justifications sur tous les éléments servant de base à la détermination du revenu foncier tels qu'ils sont définis aux articles 28 à 33 quinquies du code général des impôts. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (…) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur » ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : « Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L 16 » ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 193 du même livre : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition » ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que l'administration n'est en droit d'imposer des sommes d'origine non expliquée, et non déclarées par le contribuable, que dans l'hypothèse où ce dernier, sollicité par écrit, après débat contradictoire, n'a été en mesure ni de démontrer le caractère erroné des constatations du service, ni d'apporter quelque justification que ce soit à la perception de ces sommes ; que lorsque tel est le cas, sauf à exiger d'elle une preuve impossible, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence, ainsi que cela lui incombe, de revenus dissimulés, le contribuable pouvant toujours alors contester cette réalité en apportant la preuve contraire, tant en ce qui concerne leur existence même que leur montant ; qu'une fois cette preuve réputée apportée, la mise en oeuvre de l'article 1729 précité du code général des impôts suppose simplement l'appréciation par l'administration du comportement du contribuable au regard notamment d'une volonté délibérée d'éluder l'impôt ; qu'il suit de là que M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, en tant qu'elles autoriseraient le prononcé de pénalités sans preuve préalable de la réalité du fait sanctionné, seraient incompatibles avec les stipulations de l'article 6-2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, d'autre part, que compte tenu de l'importance des versements en espèces non déclarés, de leur intervention en deux fois, et enfin de l'absence totale de justifications par M. X de leur origine, l'administration a pu à bon droit remettre en cause la bonne foi de l'intéressé et estimer que ce dernier avait entendu délibérément éluder l'impôt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. X tendant à la décharge des pénalités qui lui ont été infligées ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'Etat n'étant pas partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit condamné à rembourser à M. X les frais exposés par lui devant la cour et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 13 juillet 2005 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. X tendant à la décharge des pénalités qui lui ont été infligées au titre des années 1997, 1998, et 1999.

Article 2 : La demande de M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'elle tend à la décharge des pénalités visées à l'article 1er, est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

5

N° 05BX01882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 05BX01882
Date de la décision : 27/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. André BONNET
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : ASSOCIATION D'AVOCATS CAMBRAY-DEGLANE et LACAZE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-11-27;05bx01882 ?
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