La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2010 | FRANCE | N°09DA00168

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 30 juin 2010, 09DA00168


Vu la requête, enregistrée le 5 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société KSB, dont le siège est 4 allée des Barbanniers à Gennevilliers cedex (92635), par Me Laurent ; la société KSB demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304172 du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que la société Electricité de France (EDF) soit condamnée à lui verser la somme de 417 000 euros majorée des intérêts de droit à compter de l'enregistrement de la demande et un

e somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu la requête, enregistrée le 5 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société KSB, dont le siège est 4 allée des Barbanniers à Gennevilliers cedex (92635), par Me Laurent ; la société KSB demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304172 du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à ce que la société Electricité de France (EDF) soit condamnée à lui verser la somme de 417 000 euros majorée des intérêts de droit à compter de l'enregistrement de la demande et une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la société Electricité de France à lui verser la somme de 417 000 euros et de mettre à la charge de cette société la somme de 4 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2003 ;

La société KSB soutient que l'ouvrage constitué par le stade d'eaux vives est impropre à sa destination par suite d'un défaut de conception entièrement imputable à la société Electricité de France car portant sur la conception globale des installations ; que c'est par suite de cette erreur de conception que le lot n° 4 attribué à la société KSB constitué par les pompes est à l'origine de désordres rendant l'ouvrage impropre à sa destination ; que les caractéristiques des pompes mises en oeuvre ont été définies par la société EDF ; que c'est en raison du dimensionnement insuffisant de l'installation de génie civil et notamment de la longueur des pertuis conçus et dessinés par la société EDF que les désordres affectent l'ouvrage ; que c'est en raison d'une mauvaise conception du circuit d'eau conduisant à une alimentation en eau particulièrement perturbée que les pompes sont affectées de dysfonctionnements ; que la société EDF qui est intervenue comme maître d'ouvrage a validé l'offre de la société KSB malgré le fait que les pompes proposées dans cette offre n'étaient pas compatibles avec l'alimentation perturbée ; que contrairement à ce que mentionne le rapport d'expertise, le seul fait pour la société de se rendre sur les lieux ne pouvait lui donner une quelconque indication de l'écoulement futur perturbé de la station ; que le dimensionnement des pompes est correct et qu'il n'y a pas de lien de causalité entre les désordres en cause et la prise en compte d'une hauteur manométrique totale sans marge de sécurité ; que la commune de Saint Laurent Blangy et désormais la société KSB, cessionnaire de la créance de la commune à l'encontre de la société EDF, est fondée à demander la condamnation de cette dernière à supporter le coût de la remise en état de l'installation s'élevant à 359 000 euros auxquels il y a lieu d'ajouter une somme de 15 000 euros correspondant aux charges de personnel et à la perte de chiffre d'affaires entraînées par le mauvais fonctionnement de l'installation ; que la société KSB justifie également un préjudice propre qui s'élève à 28 000 euros correspondant aux dépenses liées à l'installation de chambres d'aspiration ; que la cession de créance intervenue ne peut être qualifiée de paiement et permet expressément à la société KSB le droit de demander des dommages et intérêts liés aux dommages à l'un quelconque des constructeurs et notamment à la société EDF ; que l'acte de cession n'a pas pour effet de faire supporter l'intégralité de la réparation à EDF, celle-ci restant libre d'appeler la société KSB en garantie ; que, toutefois, la société EDF n'est pas fondée à appeler en garantie la société KSB à concurrence de 90 % du montant du préjudice ; que la société EDF n'est pas fondée à soutenir que la garantie décennale ne pourrait être mise en oeuvre en l'absence de réception du lot n° 4 dans la mesure où l'acte de cession prévoit une réception totale à la date du 24 juillet 1998 ; que s'agissant de la société EDF, le point de départ de la responsabilité décennale est celle de la réception des autres lots soit le 20 août 1997 ; que, subsidiairement, la société KSB est fondée à invoquer la responsabilité contractuelle de la société EDF en l'absence d'application de la responsabilité des constructeurs ; que la responsabilité contractuelle de la société EDF peut être mise en oeuvre au-delà de la date de réception dès lors que sa responsabilité repose sur un certain nombre de fautes démontrées ; que la société EDF reste responsable de ses fautes selon les principes de l'article 1147 et suivants du code civil ; que la société EDF n'est pas fondée à soutenir que l'ouvrage ne serait pas impropre à sa destination alors qu'il ressort le contraire du rapport d'expertise dans la mesure où l'ouvrage ne peut être utilisé comme le stade d'eaux vives ; que la société EDF n'est pas fondée à soutenir qu'il aurait été fait application de l'article 41.7 du cahier des clauses administratives générales prévoyant l'acceptation par le maître d'ouvrage de simples imperfections moyennant une réfraction du prix des ouvrages ; que le litige s'appliquant à un dommage de travaux publics, la mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle de la société EDF n'était pas conditionnée par la présentation des conclusions dans le délai de deux mois prévus par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2009, présenté pour la société anonyme Electricité de France (EDF), dont le siège est 22/30 Avenue de Wagram à Paris (75008), par la SCP Dünner, Escallier ; elle conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société KSB à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les motifs que la cession de créance dont se prévaut la société KSB n'est basée sur aucun justificatif probant des dommages pris en compte et ne précise pas les droits à indemnités cédés par la commune à la société ; que le cessionnaire ne peut se prévaloir que de droits déjà établis au titre du cédant alors que le montant de la créance de 389 000 euros correspond à l'hypothèse haute envisagée par l'expert alors que ce dernier avait évoqué une autre solution moins onéreuse s'élevant à 124 311,93 euros ; que la société requérante ne justifie nullement du préjudice de la commune évalué à 15 000 euros ; que la cession de créance n'est en réalité qu'un paiement effectué par la société KSB ; que la cession de créance qui doit intervenir au profit d'un tiers a en l'espèce été opérée par le maître d'ouvrage au profit d'une société liée contractuellement avec lui et n'a donc pu entrer dans le champ des dispositions de l'article 1689 du code civil ; que cette cession de créance qui vise à faire supporter la totalité des dommages par la société Electricité de France alors que la société KSB a été reconnue responsable par l'expert de 90 % de ces derniers est entachée de nullité car intervenue en fraude des droits de la société EDF ; qu'en raison de la part de responsabilité de la société KSB, la société EDF est fondée à lui demander par compensation de la garantir à concurrence de 90 % du montant des sommes demandées soit une somme de 93 545,77 euros ; que le CSCT du lot numéro 4 imposait à la société KSB d'effectuer une étude hydraulique et c'est la défaillance de la société au niveau de cette étude qui est à l'origine d'une erreur dans la conception des pompes ; qu'il ressort du rapport d'expertise que la société KSB a omis de tenir compte de l'arrivée d'un effluent très perturbé et contenait une erreur de calcul dans la détermination de la HTM qui a conduit à l'installation de pompes sous dimensionnées ; que les désordres se sont révélés lors des essais réalisés après le montage des pompes en 1996 et qu'ils étaient donc apparents lors de la réception de l'ouvrage, ce qui exclut le jeu de la garantie décennale des constructeurs ; que cette réception est intervenue selon l'acte de cession de créance du 7 juin 2002 avec effet rétroactif au 24 juillet 1998 ; que c'est à bon droit que le Tribunal a pris cette dernière date pour fixer la réception et pour considérer qu'à cette date les désordres étaient apparents ; qu'il ressort du rapport d'expertise que la société KSB est responsable pour l'essentiel des désordres constatés ; qu'il appartenait à la société de concevoir du matériel capable de supporter toutes les sujétions inhérentes à l'installation ; que la société EDF n'a pas commis de faute en n'identifiant pas les insuffisances de l'offre de la société KSB qui était seule à disposer des documents pertinents relatifs aux pompes ; que les études relatives aux modèles hydrauliques n'incombaient pas à la société EDF mais aux autres maîtres d'oeuvre que sont Voies navigables de France et le Cabinet d'architectes Requier-Deruyck ; que l'expert n'a retenu la responsabilité de la société EDF que de manière symbolique ; que les conclusions fondées sur la responsabilité contractuelle de la société EDF sont irrecevables compte tenu de la réception prononcée sans réserve ; qu'il n'est pas soutenu que la société Electricité de France aurait commis une faute dans son obligation de conseil au moment de la réception de l'ouvrage ; que, de plus, il ressort du rapport d'expertise que la société EDF n'a pas commis de faute dans l'exécution de son contrat au regard de la conception de l'ouvrage ;

Vu la mise en demeure adressée le 8 mars 2010 à la société Holbat, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu la mise en demeure adressée le 8 mars 2010 à la société Ciema, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire enregistré le 7 avril 2010, présenté par la société Ciema, dont le siège est 178 rue Principale à Forest sur Marque (59510) ; elle conclut à sa mise hors de cause et soutient qu'elle assure l'entretien des équipements depuis treize ans, lesquels fonctionnent avec les pompes d'origine ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juin 2010, présenté pour la société Spie Batignolles Nord venant aux droits de la société Spie Citra Nord, dont le siège social est 250 avenue de la République, BP 106 à La Madeleine cedex (59563), par Me Caille ; la société conclut à sa mise hors de cause par les motifs qu'aucune demande n'était dirigée contre elle en première instance et qu'il en va de même en appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Laurent, pour la société KSB, Me Guillet Lhomat, pour la société EDF et Me Houyez, pour la société Spie Batignolles Nord ;

Considérant que par un marché en date du 22 novembre 1993, la commune de Saint Laurent Blangy a confié à la société Electricité de France une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour la construction d'un stade d'eaux vives et d'une base nautique ; que la société KSB était spécifiquement chargée du lot technique n° 4 fourniture des pompes par un marché en date du 17 mars 1995 ; que lors de la mise en fonctionnement de l'ouvrage, il est apparu que ses performances n'atteignaient pas le niveau requis par le marché ; qu'il ressort du rapport déposé le 24 juin 1998 par M. Flipo en conclusion de l'expertise ordonnée par le président du Tribunal administratif de Lille, que cette insuffisance est imputable à hauteur de 90 % à la société KSB du fait des erreurs commises par elle dans le choix des pompes et à concurrence de 10 % à la société EDF qui n'a pas relevé lesdites erreurs dans l'exécution de sa mission d'assistance au maître d'ouvrage ; que la société KSB relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation d'Electricité de France à lui verser la somme de 417 000 euros correspondant à la réparation des anomalies constatées dans le fonctionnement des pompes du stade d'eaux vives de Saint Laurent Blangy sur le fondement de la cession de créance et de garantie en date du 7 juin 2002 conclue avec la commune de Saint Laurent Blangy et signifiée à la société EDF le 23 septembre 2002 ;

Considérant que par acte intitulé cession de créance et de garanties en date du 7 juin 2002, la commune de Saint Laurent Blangy a cédé pour une somme de 124 311,93 euros TTC en pleine propriété à la société KSB la totalité en principal, intérêts, frais et accessoires, de sa créance de dommages à l'encontre des constructeurs du stade d'eaux vives ayant fait l'objet du marché public conclu le 22 novembre 1993 avec la société EDF et avec le groupement d'entreprises Spie Citra Nord, Holbat, Ciema et KSB (...) ainsi que ses différentes garanties légales et contractuelles à l'encontre des mêmes constructeurs, dans la stricte limite des désordres ayant fait l'objet du rapport d'expertise de M. Flipo ;

Considérant que le cédant d'une créance ne peut transmettre plus de droits qu'il n'en détient ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la commune de Saint Laurent Blangy ne disposait à l'encontre de la société EDF ou des autres constructeurs, à la date de la signature de l'acte de cession, d'aucune créance résultant d'une décision de justice, d'une transaction ou d'un quelconque autre titre et correspondant aux désordres ayant fait l'objet du rapport d'expertise

ci-dessus mentionné relatif aux conditions d'exécution du marché de construction du stade d'eaux vives ; que, dès lors, l'acte de cession susmentionné n'a pu emporter cession à la société KSB d'aucune créance déterminée, ni même déterminable contre la société EDF ; que, par suite, cette dernière est fondée à soutenir que l'acte de cession dont se prévaut la société KSB ne confère à celle-ci aucune créance à l'encontre de la société EDF susceptible de fonder une action en garantie contractuelle ou en garantie décennale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société KSB n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille, qui ne s'est pas prononcé sur la validité de la cession de créance, a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société EDF à lui payer une somme de 417 000 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Electricité de France, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la société KSB demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société KSB une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Electricité de France et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société KSB est rejetée.

Article 2 : La société KSB versera à la société Electricité de France une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société KSB, à la société Electricité de France, à la société Spie Batignolles Nord, à la société Ciema et à la société Holbat.

''

''

''

''

2

N°09DA00168


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00168
Date de la décision : 30/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Kimmerlin
Rapporteur ?: M. Michel Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : ASSOCIATION LAURENT et MOUCHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-06-30;09da00168 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award