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30/09/2005 | FRANCE | N°258873

France | France, Conseil d'État, Section du contentieux, 30 septembre 2005, 258873


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juillet et 24 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BEAUSOLEIL, représentée par son maire ; la COMMUNE DE BEAUSOLEIL demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 mai 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel formé par la société à responsabilité limitée Transimmo, a, d'une part, annulé le jugement du 12 juin 2001 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant à la décharge de

la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement afférente ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juillet et 24 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BEAUSOLEIL, représentée par son maire ; la COMMUNE DE BEAUSOLEIL demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 mai 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel formé par la société à responsabilité limitée Transimmo, a, d'une part, annulé le jugement du 12 juin 2001 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant à la décharge de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement afférente au permis de construire qui lui a été délivré le 15 juin 1992, et, d'autre part, déchargé cette société de l'obligation de payer la somme de 2 635 800 F correspondant à 401 825,12 euros mise à sa charge par l'avis émis le 16 octobre 1995 ;

2°) statuant au fond, de rejeter la demande de la société Transimmo ;

3°) de mettre à la charge de cette société une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, présentée le 7 juin 2005, pour la société Transimmo ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Baptiste Laignelot, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL et de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la société Transimmo,

- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Transimmo a été autorisée par un arrêté du maire de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL (Alpes-Maritimes) en date du 15 juin 1992 à construire sur le territoire de cette commune un immeuble à usage d'habitations, de commerces et de bureaux moyennant, notamment, le paiement d'une participation pour non réalisation d'aires de stationnement d'un montant de 401 825,12 euros (2 635 800 F) ; que cette participation a été mise à la charge de ladite société par un avis des sommes à payer émis et rendu exécutoire par la perception de Beausoleil le 16 octobre 1995 ; que la société a contesté cette participation par une lettre adressée au maire de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL le 17 novembre 1995 ; que celui-ci a rejeté cette réclamation par une décision du 4 mars 1996 ; que le tribunal administratif de Nice, saisi du litige, a rejeté la demande de la société Transimmo pour tardiveté, par un jugement en date du 12 juin 2001 ;

Considérant que, par l'arrêt en date du 7 mai 2003, contre lequel se pourvoit la commune, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et, évoquant l'affaire, a déchargé la société de l'obligation de payer cette participation ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 332-22 du code de l'urbanisme : Le redevable de la participation en obtient, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution :/ (…) b. En cas de retrait ou d'annulation du permis de construire ;

Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour prononcer la décharge de la participation à laquelle a été assujettie la société, la cour administrative d'appel de Marseille a fait application des dispositions précitées en se fondant sur la circonstance que par un jugement en date du 27 mars 1997, confirmé en appel par un arrêt de la même cour en date du 20 janvier 2000, le tribunal administratif de Nice avait annulé le permis de construire sur le fondement duquel avait été exigée la participation litigieuse ;

Mais considérant que par une décision en date du 19 juin 2002 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt précité en date du 20 janvier 2000 de la cour administrative d'appel de Marseille et, réglant l'affaire au fond, a annulé le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 27 mars 1997 et rejeté la demande d'annulation du permis de construire du 15 juin 1992 ;

Considérant que si, en règle générale, les décisions prises par le juge de cassation ne sont revêtues que de l'autorité relative de la chose jugée, il en va autrement lorsque le juge de cassation annule une décision juridictionnelle elle-même revêtue de l'autorité absolue de la chose jugée ou la confirme par d'autres motifs ; que tel est le cas de la décision du 19 juin 2002 par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 20 janvier 2000 de la cour administrative d'appel de Marseille confirmant l'annulation du permis de construire sur la base duquel avait été établie la participation litigieuse ; que, dans ces conditions, et dès lors que l'arrêt attaqué se fonde sur l'arrêt du 20 janvier 2000 pour faire droit à la demande de la société Transimmo, la COMMUNE DE BEAUSOLEIL est fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, pour rejeter la demande de la société Transimmo tendant à la décharge de la participation litigieuse, le tribunal administratif de Nice s'est fondé sur le fait que ladite demande était tardive au motif qu'elle avait été introduite plus de deux mois après le rejet par le maire de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL, le 4 mars 1996, de la réclamation présentée par la société Transimmo ; que, cependant, la lettre du maire de Beausoleil en date du 4 mars 1996 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours ; que le délai du recours contentieux ne pouvait donc utilement être opposé à la société Transimmo ; que le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 12 juin 2001 doit par suite être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par la société Transimmo devant le tribunal administratif de Nice ;

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt en date du 20 janvier 2000 de la cour administrative d'appel de Marseille ainsi que le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 27 mars 1997 annulant le permis de construire du 15 juin 1992 ; que la circonstance qu'à la suite de l'annulation contentieuse de ce permis un nouveau permis de construire a été délivré à la société le 7 avril 1997, correspondant au même projet de construction, est sans incidence sur le fait que, le permis du 15 juin 1992 ayant été rétabli, la participation litigieuse doit être regardée comme légalement fondée ; qu'ainsi, le moyen tiré par la société Transimmo de ce que cette participation est caduque ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société Transimmo soutient que la participation litigieuse ne pouvait lui être réclamée dès lors que le plan d'occupation des sols de la commune avait été annulé par un jugement du tribunal administratif de Nice en date du 8 février 1996, l'annulation en cause n'a pas porté sur la partie du plan dans laquelle est située la construction ayant donné lieu à cette participation ; qu'il suit de là que le moyen est inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen soulevé par la société Transimmo et tiré de ce que les délibérations du conseil municipal de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL ayant instauré la participation pour non réalisation d'aires de stationnement lui seraient inopposables n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée ;

Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que la lettre de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL en date du 18 septembre 1995 réclamant la participation en cause à la société requérante ne se soit pas référée à la délibération du conseil municipal instaurant dans la commune la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement mais à celle qui en fixait le tarif est sans incidence sur la régularité de la procédure et le bien-fondé de la participation réclamée ;

Considérant, enfin, que si la société Transimmo se prévaut de ce que le permis de construire qui lui a été accordé lui laissait la possibilité de s'acquitter de cette participation selon d'autres modalités que celle du versement qui a été exigé d'elle, elle n'apporte aucune justification probante à l'appui de son affirmation selon laquelle elle aurait effectivement rempli ses obligations selon un autre mode que celui qui a été mis en oeuvre à son encontre par la mesure contestée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Transimmo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par sa décision en date du 4 mars 1996, le maire de Beausoleil a rejeté sa réclamation à l'encontre de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement qui a été mise à sa charge au titre de l'autorisation de construire qui lui a été accordée le 15 juin 1992 et à demander, en conséquence, à être déchargée de la somme qui lui a été réclamée par le percepteur de Beausoleil par un avis en date du 16 octobre 1995 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE BEAUSOLEIL, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la société Transimmo au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société Transimmo une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la COMMUNE DE BEAUSOLEIL et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 7 mai 2003 et le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 12 juin 2001 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Transimmo devant le tribunal administratif de Nice sont rejetées.

Article 3 : La participation pour non-réalisation d'aires de stationnement à laquelle la société Transimmo a été assujettie est remise intégralement à sa charge.

Article 4 : Les conclusions de la société Transimmo tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La société Transimmo versera à la COMMUNE DE BEAUSOLEIL une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BEAUSOLEIL, à la société Transimmo et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : Section du contentieux
Numéro d'arrêt : 258873
Date de la décision : 30/09/2005
Sens de l'arrêt : Maintien de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCÉDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGÉE - CHOSE JUGÉE PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE PAR LE JUGE DE CASSATION - RÈGLE GÉNÉRALE - AUTORITÉ RELATIVE - EXCEPTION - ANNULATION D'UNE DÉCISION JURIDICTIONNELLE ELLE-MÊME REVÊTUE DE L'AUTORITÉ ABSOLUE DE LA CHOSE JUGÉE OU CONFIRMATION D'UNE TELLE DÉCISION PAR D'AUTRES MOTIFS.

54-06-06-01 Si, en règle générale, les décisions prises par le juge de cassation ne sont revêtues que de l'autorité relative de la chose jugée, il en va autrement lorsque le juge de cassation annule une décision juridictionnelle elle-même revêtue de l'autorité absolue de la chose jugée ou la confirme par d'autres motifs.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - CONTRIBUTIONS DES CONSTRUCTEURS AUX DÉPENSES D'ÉQUIPEMENT PUBLIC - PARTICIPATION POUR NON-RÉALISATION D'AIRES DE STATIONNEMENT - ARRÊT DE COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL PRONONÇANT LA DÉCHARGE DE CETTE PARTICIPATION AU MOTIF QUE LE PERMIS DE CONSTRUIRE SUR LE FONDEMENT DUQUEL A ÉTÉ ÉTABLIE LA PARTICIPATION A ÉTÉ ANNULÉ PAR UN JUGEMENT CONFIRMÉ EN APPEL - ANNULATION DE CET ARRÊT COMPTE TENU DE L'INTERVENTION D'UNE DÉCISION DE CASSATION ANNULANT L'ARRÊT CONFIRMANT LE JUGEMENT D'ANNULATION DU PERMIS DE CONSTRUIRE.

68-024 Société assujettie à une participation pour non-réalisation d'aires de stationnement. Arrêt de cour administrative d'appel prononçant la décharge de cette participation en se fondant sur les dispositions de l'article R. 332-22 du code de l'urbanisme et sur la circonstance que le permis de construire sur le fondement duquel avait été exigée la participation litigieuse a été annulé par un jugement confirmé en appel. Toutefois, décision du Conseil d'Etat cassant ce dernier arrêt et confirmant au fond le permis de construire. Dès lors, et compte tenu de l'autorité absolue de chose jugée attachée à cette décision de cassation, commune fondée à demander l'annulation de l'arrêt qui se fonde sur l'arrêt annulé en cassation.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - EFFETS DES ANNULATIONS - ARRÊT DE COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL PRONONÇANT LA DÉCHARGE D'UNE PARTICIPATION AU MOTIF QUE LE PERMIS DE CONSTRUIRE SUR LE FONDEMENT DUQUEL ELLE ÉTÉ ÉTABLIE A ÉTÉ ANNULÉ PAR UN JUGEMENT CONFIRMÉ EN APPEL - ANNULATION DE CET ARRÊT COMPTE TENU DE L'INTERVENTION D'UNE DÉCISION DE CASSATION ANNULANT L'ARRÊT CONFIRMANT AU FOND LE PERMIS DE CONSTRUIRE.

68-06-05 Société assujettie à une participation pour non-réalisation d'aires de stationnement. Arrêt de cour administrative d'appel prononçant la décharge de cette participation en se fondant sur les dispositions de l'article R. 332-22 du code de l'urbanisme et sur la circonstance que le permis de construire sur le fondement duquel avait été exigée la participation litigieuse a été annulé par un jugement confirmé en appel. Toutefois, décision du Conseil d'Etat cassant ce dernier arrêt et confirmant au fond le permis de construire. Dès lors, et compte tenu de l'autorité absolue de chose jugée attachée à cette décision de cassation, commune fondée à demander l'annulation de l'arrêt qui se fonde sur l'arrêt annulé en cassation.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 sep. 2005, n° 258873
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste Laignelot
Rapporteur public ?: M. Verclytte
Avocat(s) : BLANC ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE ; SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:258873.20050930
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