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02/06/2003 | FRANCE | N°243215

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 02 juin 2003, 243215


Vu 1°), sous le n° 243215, la requête, enregistrée le 18 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR, dont le siège est ... 05 à Dijon cedex (21068) ; l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2002 en tant qu'il déclare d'utilité publique les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, de création des gare

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Vu 1°), sous le n° 243215, la requête, enregistrée le 18 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR, dont le siège est ... 05 à Dijon cedex (21068) ; l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2002 en tant qu'il déclare d'utilité publique les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, de création des gares nouvelles et d'aménagement des installations terminales de ladite ligne ;

Vu 2°), sous le n° 244359, la requête, enregistrée les 21 et 22 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION CLAPEN 21, dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION CLAPEN 21 demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2000 portant déclaration d'utilité publique et urgents les acquisitions foncières et les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, de création des gares nouvelles et d'aménagement des installations terminales de ladite ligne et portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes concernées ;

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Vu 3°), sous le n° 244427, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars 2002 et 31 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE, dont le siège est Hôtel de Ville, Place de l'Europe à Dole (39100), l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2002 portant déclaration d'utilité publique et urgents les acquisitions foncières et les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, et du raccordement de Perrigny, de création des gares nouvelles et d'aménagement des installations terminales de ladite ligne et portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes concernées, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

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Vu 4°), sous le n° 244456, la requête enregistrée le 25 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MOUVEMENT ECOLOGISTE INDEPENDANT, dont le siège est 77, grande rue à Nancray (25360) ; le MOUVEMENT ECOLOGISTE INDEPENDANT demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2002 portant déclaration d'utilité publique et urgents les acquisitions foncières et les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, de création des gares nouvelles et d'aménagement des installations terminales de ladite ligne et portant mise en compatiblité des plans d'occupation des sols des communes concernées ;

....................................................................................

Vu 5°), sous le n° 244511, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars et 25 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION DES RIVERAINS DE L'OGNON, dont le siège est lieu-dit Banne à Sornay (70150), l'ASSOCIATION RAIL DEMAIN, dont le siège est mairie à Trémoins (70400), la FEDERATION FRANCHE-COMTE NATURE ENVIRONNEMENT ; la FEDERATION HAUTE-SAONE NATURE ENVIRONNEMENT ; l'ASSOCIATION SAONE ET DOUBS VIVANTS -SUNDGAU VIVANT-GESTION, dont le siège est ..., M. Jean-Pierre DE Y..., demeurant... ; les requérants demandent au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 25 janvier 2002 portant déclaration d'utilité publique et urgents les acquisitions foncières et les travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, de création des gares nouvelles et d'aménagement des installations terminales de ladite ligne et portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes concernées ;

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré présentée le 6 mai 2003 par l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR ;

Vu la Constitution ;

Vu la directive 92/43/ CE du Conseil du 21 mai 1992 ;

Vu la directive 85/337/CE du Conseil du 27 juin 1985 modifiée par la directive 97/11/CE du 3 mars 1997 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code rural ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 ;

Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;

Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 ;

Vu la loi n° 95-115 du 4 février 1995 ;

Vu la loi n° 97-135 du 13 février 1997 ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 ;

Vu le décret n° 92-355 du 1er avril 1992 ;

Vu le décret n° 95-631 du 5 mai 1995 ;

Vu le décret n° 97-444 du 5 mai 1997 ;

Vu le décret n° 2001-129 du 8 février 2001 ;

Vu les décisions de la commission du 30 mai 2002 concernant les spécifications techniques d'interopérabilité ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Tabuteau, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Carbonnier, avocat de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE et de Me Luc-Thaler, avocat de l'ASSOCIATION DES RIVERAINS DE L'OGNON et autres,

- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de à l'ASSOCIATION DES RIVERAINS DE L'OGNON, de l'ASSOCIATION RAIL DEMAIN, de la FEDERATION HAUTE-SAONE NATURE ENVIRONNEMENT, de l'ASSOCIATION SAONE ET DOUBS VIVANTS, de M. X... X, du MOUVEMENT ECOLOGISTE INDEPENDANT, de L'ASSOCIATION CLAPEN 21, de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE, et l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par Réseau Ferré de France, la Société Nationale des Chemins de Fer français et le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer :

Sur l'intervention de l'association Côte d'Or Nature Environnement (COPRONAT) :

Considérant que l'association Côte d'Or Nature Environnement a intérêt à l'annulation du décret attaqué ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur la légalité externe :

Sur le moyen tiré de l'absence de contreseing du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution. ;

Considérant que la déclaration d'utilité publique des travaux de construction de la nouvelle liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, du raccordement de Perrigny, et des gares et installations terminales de ladite ligne comme la mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes concernées n'impliquent l'intervention d'aucun acte que le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement serait compétent pour signer ou contresigner ; qu'ainsi ce ministre ne peut être regardé comme chargé de l'exécution du décret attaqué, et n'avait pas à le contresigner ;

Sur le moyen tiré de l'absence de motivation du décret attaqué :

Considérant que si, à la suite de la modification introduite par l'article 1er, point 11, de la directive du 3 mars 1997, le 1. de l'article 9 de la directive n° 85-337/CE du Conseil, du 27 juin 1985, dispose que : Lorsqu'une décision d'octroi ou de refus d'autorisation a été prise, la ou les autorités compétentes en informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes : (...) - les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision, (...), ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de légalité de cette dernière ; que le moyen tiré de ce que, faute d'avoir été modifié, dans le délai de transposition de la directive qui expirait le 14 mars 1999, pour prévoir une telle obligation de motivation des actes déclaratifs d'utilité publique entrant dans le champ de cette directive, le code de l'expropriation sur le fondement duquel a été pris le décret attaqué serait devenu incompatible avec les objectifs de la directive précitée, ne peut, par suite, être accueilli ;

Sur les moyens relatifs à l'enquête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1° de la loi du 13 février 1997, Réseau Ferré de France a pour objet, conformément aux principes du service public et dans le but de promouvoir le transport ferroviaire en France dans une logique de développement durable, l'aménagement, le développement, la cohérence et la mise en valeur de l'infrastructure du réseau ferré national ; qu'en vertu des dispositions de l'article 5 de la même loi : Les biens constitutifs de l'infrastructure comprennent les voies, y compris les appareillages fixes associés, les ouvrages d'art et les passages à niveau, les quais à voyageurs et à marchandises, les triages et les chantiers de transport combiné, les installations de signalisation, de sécurité, de traction électrique et de télécommunications liées aux infrastructures, les bâtiments affectés au fonctionnement et à l'entretien des infrastructures ; qu'ainsi Réseau Ferré de France était compétent pour présenter une demande tendant à ce que l'utilité publique de la liaison ferroviaire envisagée soit déclarée ; qu'il ressort des pièces du dossier que la S.N.C.F. avait présenté une demande analogue pour la partie du projet relevant de ses compétences ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que Réseau Ferré de France aurait été incompétent pour solliciter l'ouverture de l'enquête publique pour l'ensemble du projet ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 : Les grands projets d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes intégrant les impacts des effets externes des transports relatifs notamment à l'environnement, à la sécurité et à la santé et permettant de procéder à des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport et entre différents modes ou combinaisons de modes. Ces évaluations sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés ; que le document inclus dans le dossier soumis à l'enquête publique et intitulé Evaluation socio-économique contient l'ensemble des éléments qui, en vertu de l'article 4 du décret du 17 juillet 1984, doivent obligatoirement figurer dans l'évaluation prévue par l'article 14 précité de la loi du 30 décembre 1982 ; que s'il résulte des dispositions des articles 2, 3 et 4 de ce décret que l'évaluation d'un grand projet d'infrastructures dont la réalisation est prévue en plusieurs tranches doit porter sur la totalité du projet et doit précéder la première tranche, ces dispositions ne sont pas applicables en l'espèce, dès lors que la liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, dont la réalisation a été déclarée d'utilité publique par le décret attaqué, peut être construite et exploitée indépendamment des deux autres branches envisagées par le schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse approuvé par le décret n° 92-355 du 1° avril 1992 et constitue donc, par elle-même, un grand projet d'infrastructures ayant sa finalité propre ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 : Lorsque la totalité des travaux prévus au programme est réalisée de manière simultanée, l'étude d'impact doit porter sur l'ensemble du programme. Lorsque la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact de chacune des phases de l'opération doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme. ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact a porté sur le projet de liaison ferroviaire entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la réalisation de cette liaison ne pouvait être regardée comme constituant une phase au sens des dispositions susrappelées d'un projet comprenant les deux autres branches envisagées pour le TGV Rhin-Rhône ; que dès lors l'étude d'impact n'était pas tenue de porter sur les deux autres branches susmentionnées ; qu'au demeurant ladite étude comportait une analyse sommaire des impacts qu'aurait sur l'environnement la réalisation éventuelle des trois branches ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 14-1 et 14-2 de la loi du 30 décembre 1982 issues de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 et relatives aux schémas multimodaux de services collectifs ne peut en tout état de cause qu'être écarté dès lors que le décret approuvant les schémas de services collectifs n'était pas intervenu à la date du décret attaqué ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 dans sa rédaction résultant du décret du 25 février 1993 : L'étude d'impact présente successivement : 1°Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire, et si possible compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes (...) ; qu'il ressort de l'examen du dossier que l'étude d'impact comporte une analyse précise de l'état initial de l'environnement comme des impacts du projet sur celui-ci ; que la circonstance que ces analyses soient présentées par section du projet de voie ferroviaire ne peut être regardée comme constituant un obstacle à l' information du public ; qu'il ressort également des pièces du dossier que les nuisances sonores liées au projet ont fait l'objet d'une étude précise et que l'étude d'impact énonce les mesures de protection envisagées pour réduite ces nuisances ; que de même une évaluation des risques hydrauliques liés à la réalisation du projet a été réalisée et que l'étude mentionne des dispositions tendant à prévenir ces risques ; qu'il ne ressort pas de l'examen de ces documents que certains effets du projet auraient été omis ou mentionnés de manière incomplète ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le dossier soumis à enquête a été établi conformément aux dispositions du décret du 12 octobre 1977 modifié dans sa rédaction alors en vigueur, pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;

Considérant que, d'une part, si le site de la vallée de la Doller avait été répertorié par les services de l'Etat et proposé à la commission européenne par les autorités françaises au titre de la directive n° 92/43/ CE du 21 mai 1992, il ressort des pièces du dossier que ce site a fait l'objet d'une évaluation approfondie par un cabinet spécialisé dont les analyses et les conclusions ont été reprises dans l'étude d'impact ; que, dès lors, la procédure suivie n'a pas été entachée d'irrégularité au regard des obligations résultant pour l'Etat de l'application de la directive précitée ; que, d'autre part, les dispositions de l'article L. 414-4 introduit dans le code de l'environnement par l'ordonnance du 11 avril 2001 n'étaient pas entrées en vigueur à la date d'ouverture de l'enquête publique le 21 avril 2000 ; que, par suite, le moyen tiré de leur violation ne peut qu'être écarté ;

Considérant que la circonstance que les préfets concernés par le projet se sont exprimés par courrier ou dans un document intitulé La lettre aux riverains pour appeler l'attention de la population sur l'opération soumise à enquête publique en se bornant à inciter le public à participer à l'enquête en consultant le dossier, en consignant leurs remarques, avis et suggestions et en dialoguant avec la commission d'enquête, ne peut être regardée comme une pression entachant d'irrégularité la procédure ; que si certains requérants soutiennent que le président de la commission d'enquête aurait fait preuve de partialité, les faits allégués ne sont pas corroborés par les pièces du dossier ; que la circonstance qu'une association favorable au projet aurait participé aux travaux du comité de pilotage de l'opération ou que la commission d'enquête aurait tenu des réunions de travail dans les locaux de la mission TGV ne sont pas par elles- mêmes de nature à entacher d'irrégularité la procédure ; qu'enfin l'absence de signature du rapport du 14 décembre 2000 par les vice-présidents de la commission, alors que ce document a été signé par les 9 autres membres et que les conclusions et avis motivés du même jour ont été signés par l'un des deux vice-présidents, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure ;

Considérant que si une enquête publique complémentaire a été ordonnée par arrêté interpréfectoral du 20 mars 2001 pour rectifier l'erreur commise dans l'enquête initiale sur le projet de mise en compatibilité des plans d'occupation des sols et résultant de l'omission de trois communes concernées par le projet, il ressort du dossier que cette enquête a été conduite par une commission dont neuf membres avaient fait partie de la commission d'enquête initiale, que le président et les deux vice-présidents étaient les mêmes , que la commission ayant conduit l'enquête complémentaire a émis un avis favorable sur la mise en compatibilité des plans d'occupation des sols et confirmé son avis sur l'utilité publique de l'opération ; que dans ces conditions, la circonstance que l'enquête publique a été réalisée en deux temps n'est pas de nature à vicier la procédure de l'enquête publique, au regard des dispositions de l'article L. 123-8 du code de l'urbanisme reprises à l'article L. 123-16 du même code depuis le 1er avril 2001 ;

Sur la légalité interne :

Considérant que si le décret n° 92-355 du 1er avril 1992 a approuvé le schéma directeur national des liaisons ferroviaires à grande vitesse, le décret attaqué ne peut être regardé comme ayant été pris pour son application ; que, par suite, les requérants ne peuvent utilement invoquer l'illégalité dont serait entaché le premier, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre le second ;

Considérant qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 2001-129 du 8 février 2001 : Lorsqu'un projet de construction d'une ligne nouvelle ou d'aménagement d'une ligne existante du réseau ferré national en vue de la grande vitesse se trouve à un stade avancé, lors de la publication des spécifications techniques d'interopérabilité au Journal officiel des Communautés européennes, Réseau Ferré de France adresse au ministre chargé des transports un dossier décrivant l'état d'avancement du projet et présentant, s'il y a lieu, les spécifications techniques d'interopérabilité ou les parties de spécifications techniques d'interopérabilité que le projet ne respecte pas ou auxquelles Réseau Ferré de France souhaite déroger, les dispositions qu'il compte mettre en ouvre dans la réalisation du projet pour favoriser à terme son interopérabilité et les raisons techniques, administratives ou économiques qui justifient la demande de dérogation ; qu'à la date du décret attaqué aucune spécification technique d'interopérabilité n'avait été publiée au Journal officiel des Communautés européennes ; que dès lors le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du décret du 8 février 2001 ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que des mesures de protection particulières ont été prévues pour préserver le site de la vallée de la Doller qui, comme cela a été dit, avait été proposé à la commission européenne par les autorités françaises au titre de la directive n° 92/ 43/ CE du 21 mai 1992 ; qu'en particulier la construction d'un viaduc d'une longueur d'environ 750 m a été retenue afin de limiter les incidences du projet sur l'environnement, la faune et la flore ; que des mesures ont été définies pour maintenir les conditions hydrauliques du site ; que, par suite, le décret attaqué ne méconnaît pas les objectifs de la directive précitée ; qu'enfin les dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement n'étaient pas applicables au projet litigieux ; que, dès lors, le moyen tiré de leur violation ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'une opération ne peut légalement être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de TGV entre Genlis et Lutterbach, dite branche Est du TGV Rhin-Rhône, qui a pour objet de réaliser une liaison rapide, d'une part entre l'est de la France, l'Allemagne, le nord de la Suisse et la Méditerranée et l'Espagne, d'autre part entre Paris, l'ouest de la France et la Bourgogne, la Franche Comté, le sud de l'Allemagne et la Suisse, s'inscrit dans le cadre plus général visant à favoriser le développement économique des régions traversées, à améliorer l'aménagement du territoire et à développer un réseau européen de TGV ; qu'en particulier il devrait permettre d'accroître le trafic ferroviaire et de faire bénéficier les usagers du réseau de gains de temps, dans des proportions qui n'ont pas été évaluées sur des bases erronées ; qu'ainsi, ce projet revêt un caractère d'utilité publique ; qu'eu égard, tant à l'importance de l'opération qu'aux précautions prises notamment pour préserver les milieux naturels et protéger les réseaux hydrauliques, les inconvénients inhérents à ce type de projet ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt que l'opération présente ; que, dès lors, ni ces inconvénients, ni le coût du projet, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été sous-estimé, ni les atteintes à la propriété privée qu'il entraîne ne sont de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ;

Considérant qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au contentieux d'apprécier l'opportunité du tracé retenu, notamment par rapport à d'autres tracés envisagés ou envisageables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 25 janvier 2002 ;

Sur les conclusions de l'association pour la défense de la desserte de la gare de Dole tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'association pour la défense de la desserte de la gare de Dole la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de l'ASSOCIATION DES RIVERAINS DE L'OGNON, de l'ASSOCIATION RAIL DEMAIN, de la FEDERATION FRANCHE-COMTE NATURE ENVIRONNEMENT, de la FEDERATION HAUTE-SAONE NATURE ENVIRONNEMENT, de l'ASSOCIATION SAONE ET DOUBS VIVANTS - SUNDGAU VIVANT-GESTION, de M. X... X, du MOUVEMENT ECOLOGISTE INDEPENDANT, de l'ASSOCIATION CLAPEN 21, de l'ASSOCIATION POUR LA DÉFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE, de l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DES RIVERAINS DE L'OGNON, à l'ASSOCIATION RAIL DEMAIN, à la FEDERATION FRANCHE-COMTE NATURE ENVIRONNEMENT, à la FEDERATION HAUTE-SAONE NATURE ENVIRONNEMENT, à l'ASSOCIATION SAONE ET DOUBS VIVANTS - SUNDGAU VIVANT-GESTION, à M. X... X, au MOUVEMENT ECOLOGISTE INDEPENDANT, à l'ASSOCIATION CLAPEN 21, à l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE LA DESSERTE DE LA GARE DE DOLE, à l'UNION FEDERALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE COTE D'OR, au premier ministre, au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, à la Société Nationale des Chemins de Fer français et à Réseau Ferré de France (RFF).


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 243215
Date de la décision : 02/06/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES - RÈGLES APPLICABLES - ENVIRONNEMENT - DIRECTIVE 85/337/CE DU 27 JUIN 1985 CONCERNANT L'ÉVALUATION DES INCIDENCES DE CERTAINS PROJETS PUBLICS ET PRIVÉS SUR L' ENVIRONNEMENT - RÉDACTION ISSUE DE LA DIRECTIVE 97/11/CE DU 3 MARS 1997 - PORTÉE - ABSENCE - OBLIGATION DE MOTIVATION EN LA FORME DE L'ACTE DÉCLARATIF D'UTILITÉ PUBLIQUE.

15-05-10 Si, à la suite de la modification introduite par l'article 1er, point 11, de la directive 97/11/CE du 3 mars 1997, le 1. de l'article 9 de la directive 85/337/CE du Conseil, du 27 juin 1985, dispose que : Lorsqu'une décision d'octroi ou de refus d'autorisation a été prise, la ou les autorités compétentes en informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes : (...) - les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision, (...), ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de légalité de cette dernière. Le moyen tiré de ce que, faute d'avoir été modifié, dans le délai de transposition de la directive qui expirait le 14 mars 1999, pour prévoir une telle obligation de motivation des actes déclaratifs d'utilité publique entrant dans le champ de cette directive, le code de l'expropriation sur le fondement duquel a été pris le décret attaqué serait devenu incompatible avec les objectifs de la directive précitée, ne peut, par suite, être accueilli.

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE - RÈGLES GÉNÉRALES DE LA PROCÉDURE NORMALE - ACTE DÉCLARATIF D'UTILITÉ PUBLIQUE - FORMES ET PROCÉDURE - MOTIVATION - OBLIGATION DÉCOULANT DE LA DIRECTIVE 85/337/CE DU 27 JUIN 1985 DANS SA RÉDACTION ISSUE DE LA DIRECTIVE 97/11/CE DU 3 MARS 1997 - ABSENCE - MOTIVATION EN LA FORME DE L'ACTE DÉCLARATIF D'UTILITÉ PUBLIQUE.

34-02-02-02-03 A la suite de la modification introduite par l'article 1er, point 11, de la directive 97/11/CE du 3 mars 1997, le 1. de l'article 9 de la directive 85/337/CE du Conseil, du 27 juin 1985, dispose que : Lorsqu'une décision d'octroi ou de refus d'autorisation a été prise, la ou les autorités compétentes en informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes : (...) - les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision, (...). Ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de légalité de cette dernière. Le moyen tiré de ce que, faute d'avoir été modifié, dans le délai de transposition de la directive qui expirait le 14 mars 1999, pour prévoir une telle obligation de motivation des actes déclaratifs d'utilité publique entrant dans le champ de cette directive, le code de l'expropriation sur le fondement duquel a été pris le décret attaqué serait devenu incompatible avec les objectifs de la directive précitée, ne peut, par suite, être accueilli.


Références :



Publications
Proposition de citation : CE, 02 jui. 2003, n° 243215
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: M. Didier-Roland Tabuteau
Rapporteur public ?: Mme Maugüé
Avocat(s) : CARBONNIER ; LUC-THALER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:243215.20030602
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