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07/04/2010 | FRANCE | N°310749

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 07 avril 2010, 310749


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2007 et 19 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Claudette A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 943/MTE du 23 juin 2006 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynési

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2007 et 19 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Claudette A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 31 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 943/MTE du 23 juin 2006 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française, en tant qu'il a exclu de sa rémunération le versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures et de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires ;

2°) de faire droit à ses écritures présentées en première instance ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

Vu le décret n° 97-1223 du 26 décembre 1997 ;

Vu le décret n° 2002-63 du 14 janvier 2002 ;

Vu la délibération n° 98-145 du 10 septembre 1998 relative au régime applicable aux fonctionnaires civils et militaires en position de détachement auprès du territoire de la Polynésie française et de ses établissements publics, modifiée par la délibération n° 2004-44 du 26 février 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Carbonnier, avocat de Mme A et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la Polynésie française,

- les conclusions de Mme Julie Burguburu, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Carbonnier, avocat de Mme A et à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la Polynésie française.

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A, attachée de la fonction publique territoriale, a été prise en charge à compter du 1er juillet 2003, date à laquelle le poste qu'elle occupait à la mairie de Ramatuelle a été supprimé, par le Centre national de la fonction publique territoriale en application des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ; qu'elle a été, par arrêté du président du Centre national de la fonction publique territoriale, détachée auprès du ministre de l'outre-mer pour être affectée au haut-commissariat de la République en Polynésie française, du 6 novembre 2003 au 5 janvier 2006 ; qu'elle a été de nouveau détachée par arrêté du président du Centre national de la fonction publique territoriale, à compter du 23 janvier 2006, auprès du gouvernement de la Polynésie française ; que, par un arrêté du 23 juin 2006, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française l'a affectée au service du développement rural et a fixé sa rémunération en fonction des éléments figurant sur la fiche financière établie le 23 mars 2006 par le Centre national de la fonction publique territoriale, à l'exclusion de l'indemnité d'exercice de mission des préfectures et de l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires ; que Mme A a contesté devant le tribunal administratif de la Polynésie française cette décision en tant qu'elle excluait de sa rémunération ces deux indemnités et demandé à ce qu'il soit enjoint au ministre de réintégrer ces indemnités dans la détermination de son traitement ; que, par un jugement du 31 juillet 2007, contre lequel elle se pourvoit en cassation, le tribunal a rejeté ses conclusions ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la délibération n° 98-145 du 10 septembre 1998 modifiée : La rémunération à laquelle peuvent prétendre les fonctionnaires civils et militaires visés à l'article 1er de la délibération n° 98-145 APF du 10 septembre 1998 pendant leur séjour en Polynésie française est déterminée par l'administration d'accueil. / L'administration d'accueil fixe la rémunération servie aux fonctionnaires détachés auprès d'elle d'après les seuls éléments figurant dans la fiche financière fournie par l'administration d'origine retraçant les émoluments de ce fonctionnaire s'il servait en métropole. Ces éléments sont affectés du coefficient de majoration en vigueur pour les fonctionnaires de l'Etat. (...) / Par dérogation à l'alinéa 2 du présent article, le fonctionnaire détaché peut bénéficier des dispositions de la délibération n° 97-153 APF du 17 août 1997 modifiée portant attribution de l'indemnité de sujétions spéciales à certains personnels de l'administration territoriale, et de certaines indemnités prévues par délibération de l'assemblée de la Polynésie française, lorsqu'il relève de l'un des cadres d'emplois de la filière de la santé et de la recherche ; qu'il résulte de ces dispositions, qui fixent la rémunération des fonctionnaires détachés auprès de la Polynésie française et de ses établissements publics au regard des seuls éléments composant leur rémunération dans leur administration d'origine, sans établir aucune distinction entre les différentes indemnités, statutaires ou liées à l'exercice des fonctions, dont ils bénéficiaient alors, que la rémunération de ces fonctionnaires doit être fixée en tenant compte de la totalité des éléments figurant dans la fiche financière fournie par leur administration d'origine, y compris les indemnités qu'ils percevaient en raison de l'exercice de certaines fonctions, sans que la circonstance qu'ils n'auraient pas droit au versement de certaines de ces indemnités dans leur emploi de détachement puisse leur être légalement opposée ; qu'il en résulte qu'en rejetant les conclusions de Mme A en annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française en tant qu'elle excluait de sa rémunération l'indemnité d'exercice de mission des préfectures et l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires qui figuraient dans la fiche financière établie par son administration d'origine au motif qu'elle n'avait pas droit à ces indemnités dans son emploi de détachement, le magistrat désigné du tribunal administratif de la Polynésie française a commis une erreur de droit ; que Mme A est, par suite, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il ressort de la fiche financière transmise par le Centre national de la fonction publique territoriale, qui prenait en charge, en application des dispositions de l'article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, Mme A avant son détachement auprès de la Polynésie française et qui, à ce titre, fixait et versait la rémunération à laquelle elle avait droit, que Mme A bénéficiait de l'indemnité d'exercice de mission des préfectures et l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires ; que le document versé par le Centre national de la fonction publique territoriale est une fiche financière au sens des dispositions précitées de l'article 3 de la délibération du 10 septembre 1998, modifiée ; que, dès lors, il résulte de ce qui vient d'être dit que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française ne pouvait légalement, par la décision contestée, exclure de la détermination de la rémunération de Mme A les indemnités qui figuraient sur la fiche financière transmise par le Centre national de la fonction publique territoriale ; que Mme A est, par suite, fondée à demander l'annulation de cette décision en tant qu'elle a exclu de sa rémunération ces deux indemnités ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que l'annulation de la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française d'exclure de la détermination du traitement de Mme A les indemnités qui figurent sur la fiche financière fournie par le Centre national de la fonction publique territoriale implique nécessairement que ces indemnités, affectées du coefficient de majoration pour les fonctionnaires de l'Etat, soient réintégrées dans la détermination du traitement de Mme A ; que, par suite, il y a lieu de prescrire au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française de déterminer le traitement de Mme A en tenant compte de l'intégralité des éléments figurant sur la fiche financière transmise par le Centre national de la fonction publique territoriale, y compris l'indemnité d'exercice de mission des préfectures et l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires, affectées du coefficient de majoration pour les fonctionnaires de l'Etat, et de lui verser les sommes correspondantes à compter du 23 janvier 2006 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la Polynésie française et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Polynésie française le versement à Mme A de la somme de 4 000 euros au titre de des frais exposés devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du 31 juillet 2007 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française en date du 23 juin 2006 est annulé en tant qu'il exclut de la détermination de la rémunération de Mme A l'indemnité d'exercice de mission de préfecture et l'indemnité pour travaux supplémentaires.

Article 3 : Il est enjoint au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et de la fonction publique de la Polynésie française de réintégrer dans la détermination de la rémunération de Mme A l'indemnité d'exercice de mission de préfecture et l'indemnité pour travaux supplémentaires conformément aux motifs de la présente décision.

Article 4 : La Polynésie française versera à Mme A une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la Polynésie française tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Claudette A, au président de la Polynésie française et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 avr. 2010, n° 310749
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Gilles Pellissier
Rapporteur public ?: Mme Burguburu Julie
Avocat(s) : CARBONNIER ; SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Date de la décision : 07/04/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 310749
Numéro NOR : CETATEXT000022155431 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-04-07;310749 ?
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