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29/05/2000 | FRANCE | N°204239

France | France, Conseil d'État, 7 / 5 ssr, 29 mai 2000, 204239


Vu la requête, enregistrée le 4 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE, dont le siège est ... ; la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 18 janvier 1999 par laquelle le président du tribunal administratif de Melun, statuant en application de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Fontainebleau de suspendre la passation du marché envisag

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Vu la requête, enregistrée le 4 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE, dont le siège est ... ; la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 18 janvier 1999 par laquelle le président du tribunal administratif de Melun, statuant en application de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Fontainebleau de suspendre la passation du marché envisagé avec "l'équipe SODEARIF" pour l'aménagement du quartier "Boufflers" et, d'autre part, à ce qu'il soit procédé à une nouvelle consultation architecturale et urbaine ;
2°) de condamner la commune de Fontainebleau à lui verser la somme de 48 240 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Thouin-Palat, avocat de la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de l'agence foncière et technique de la région parisienne et de la SCP Delaporte, Briard, avocat de la SODEARIF,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Fontainebleau a signé avec l'agence foncière et technique de la région parisienne (AFTRP), établissement public à caractère industriel et commercial, un protocole d'accord par lequel la première confiait à la seconde une mission destinée à déterminer les modalités selon lesquelles l'aménagement du secteur "quartier Boufflers" pourrait être réalisé ; que cette mission comportait une première phase à l'issue de laquelle l'agence devait établir un rapport de synthèse permettant à la commune d'apprécier les enjeux notamment financiers de l'opération avant de décider le lancement de la deuxième phase susceptible d'aboutir à la signature d'une concession d'aménagement entre la commune et l'agence ou un autre aménageur ; que la mission confiée à l'agence comportait, dans sa première phase, la préparation d'un protocole foncier, le lancement des procédures administratives préalables à la création d'une zone d'aménagement concerté et l'organisation d'une consultation architecturale et urbaine ; que cette consultation, à laquelle étaient invitées à participer des "équipes d'ensembliers concepteurs-investisseurs", composées au moins d'un investisseur, d'un architecte, d'un programmeur et d'un paysagiste, avait pour objet de désigner une "équipe" dont l'investisseur qui en faisait partie aurait vocation à acquérir les terrains ou les droits à construire de l'îlot Forum ; que le projet architectural et urbain de "l'équipe" retenue devait permettre d'apprécier la validité économique et financière de l'opération ;
Considérant que la commune de Fontainebleau a estimé que le prix proposé pour l'acquisition des droits fonciers de l'îlot Forum par l'investisseur de "l'équipe SEDAF", classée en premier par le jury de la consultation, était insuffisant ; qu'elle a, en revanche, jugé satisfaisante l'offre foncière supérieure faite par l'investisseur de "l'équipe SODEARIF", classée deuxième ; que la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE, membre de "l'équipe SEDAF", a alors saisi le président du tribunal administratif de Melun d'une demande fondée sur l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de suspendre la passation du "marché", consistant en la signature d'une promesse de vente, entre la ville ou son aménageur substitué et l'investisseur de "l'équipe SODEARIF", qui portait sur les droits fonciers de l'îlot Forum, et, d'autre part, à ce qu'il soit procédé à une nouvelle consultation architecturale et urbaine ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif ou son délégué peut être saisi en cas de manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et des conventions de délégation de service public. Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le marché et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement ( ...). Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du marché ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations ( ...). Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés" ;
Considérant qu'en application de ces dispositions le président du tribunal administratif de Melun statuant en référé, a, par une ordonnance du 18 janvier 1999, rejeté la demande de la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE ;
Considérant que la procédure instituée par les dispositions précitées de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel n'est applicable qu'à la passation des marchés publics et des délégations de service public ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la procédure dont la commune de Fontainebleau a confié l'organisation à l'agence foncière et technique de la région parisienne avait pour objet non pas de conclure un marché entre la commune et les concepteurs membres de "l'équipe" sélectionnée mais seulement de déterminer "l'équipe" dont l'investisseur qui en faisait partie aurait vocation à conclure avec l'aménageur, ultérieurement retenu par la commune et substitué à celle-ci, un contrat portant sur la cession des terrains de l'îlot Forum ou des droits à construire sur ces terrains ; que la consultation ainsi engagée par la commune de Fontainebleau n'avait pas pour objet la passation d'une convention de délégation de service public ; que n'étant pas non plus destinée à être suivie d'un marché passé entre la commune et "l'équipe" sélectionnée, elle n'entrait dès lors pas dans le champ d'application de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que ce motif de pur droit doit être substitué au motif retenu par l'ordonnance attaquée du président du tribunal administratif de Melun, dont il justifie légalement le dispositif ; que, dès lors, la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE n'est pas fondée à se plaindre de ce que le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Fontainebleau et l'agence foncière et technique de la région parisienne qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées à payer à la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE à payer à la commune de Fontainebleau et l'agence foncière et technique de la région parisienne la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Fontainebleau et de l'agence foncière et technique de la région parisienne tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCP D'ARCHITECTES LEGLEYE, à la commune de Fontainebleau, à l'agence foncière et technique de la région parisienne et au ministre de l'intérieur.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - PROCEDURES D'URGENCE - Article L - 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel - Champ d'application - Exclusion - Procédure destinée à sélectionner une "équipe" dont l'investisseur aurait vocation à acquérir des droits à construire.

39-08-015, 54-03-05 La procédure instituée par les dispositions de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel n'est applicable qu'à la passation des marchés publics et des délégations de service public. Une procédure, dont l'organisation est confiée par une commune à un établissement public industriel et commercial, destinée à déterminer les modalités selon lesquelles l'aménagement d'un quartier pourrait être organisé et comportant notamment le lancement d'une consultation architecturale et urbaine, à laquelle sont invitées à participer des "équipes" composées d'un investisseur, d'un architecte, d'un programmeur et d'un paysagiste, et dont l'objectif est de désigner une "équipe" dont l'investisseur en faisant partie aurait vocation à acquérir les terrains ou les droits à construire d'une partie du quartier en cause, n'a pas pour objet la passation d'une convention de délégation de service public. Cette procédure n'est pas non plus destinée à être suivie d'un marché passé entre la commune et "l'équipe" sélectionnée. Elle n'entre dès lors pas dans le champ d'application de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - PROCEDURE PROPRE A LA PASSATION DES CONTRATS ET MARCHES - Article L - 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel - Champ d'application - Exclusion - Procédure destinée à sélectionner une "équipe" dont l'investisseur aurait vocation à acquérir des droits à construire.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L22
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 29 mai. 2000, n° 204239
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Fouquet
Rapporteur ?: M. Edouard Philippe
Rapporteur public ?: Mme Bergeal
Avocat(s) : Me Thouin-Palat, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Delaporte, Briard, Avocat

Origine de la décision
Formation : 7 / 5 ssr
Date de la décision : 29/05/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 204239
Numéro NOR : CETATEXT000008081985 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-05-29;204239 ?
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