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29/04/2011 | FRANCE | N°348653

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 avril 2011, 348653


Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE VALENCE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE VALENCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1101934 du 14 avril 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, a suspendu la décision du maire de Valence refusant au groupe d'opposition Valence demain l'insertion d'un espace

d'expression dans le document intitulé Valence 21 engagements du man...

Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE VALENCE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE VALENCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1101934 du 14 avril 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, a suspendu la décision du maire de Valence refusant au groupe d'opposition Valence demain l'insertion d'un espace d'expression dans le document intitulé Valence 21 engagements du mandat diffusé le 21 avril 2011 et, d'autre part, a enjoint au maire de Valence de réserver dans le document intitulé Valence 21 engagements du mandat un espace destiné à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A et Mme B ;

3°) de mettre à la charge de M. A et Mme B la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que M. A et Mme B n'ont saisi le juge que tardivement, sans établir l'existence d'une urgence particulière à leur situation ; qu'aucune atteinte grave et manifestement illégale ne peut être retenue, dans la mesure où la liberté d'expression du groupe d'opposition Valence demain est respectée ; qu'en considérant que le document intitulé Valence 21 engagements du mandat constituait un bulletin d'information générale au sens des dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, le juge des référés de première instance a commis une erreur de droit ; que l'illégalité soulevée par le juge des référés de première instance n'est en tout état de cause pas manifeste, la notion de bulletin d'information générale au sens des dispositions de l'article précité posant encore des difficultés non résolues par la jurisprudence ; que le juge des référés de première instance a méconnu son office en prononçant une injonction qui ne présente pas un caractère provisoire ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au secrétariat du contentieux le 22 avril 2011, présenté par M. A et Mme B ; il tend, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à la confirmation de l'ordonnance rendue le 14 avril 2011 par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, à la condamnation de la COMMUNE DE VALENCE, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, à prendre en charge la publication de la tribune d'expression des élus du groupe d'opposition relative au bilan de mi-mandat de la municipalité, sous la forme d'une lettre circulaire adressée à l'ensemble des Valentinois inscrits sur les listes électorales, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE VALENCE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent que l'appel de la COMMUNE DE VALENCE est irrecevable car dépourvu d'objet ; que la condition d'urgence est remplie dès lors que le bulletin Valence 21 engagements du mandat allait être distribué le 21 avril 2011 lors d'une soirée spéciale ayant vocation à recevoir une couverture médiatique ; qu'ils n'ont par ailleurs pas tardé à introduire le recours en référé ; que le refus du maire de Valence d'insérer un espace réservé au groupe d'opposition au sein du document intitulé Valence 21 engagements du mandat porte une atteinte grave et manifestement illégale à leur liberté d'expression ;

Vu le mémoire en réplique , enregistré le 26 avril 2011, présenté pour la COMMUNE DE VALENCE qui reprend les conclusions et les moyens de sa requête ; elle soutient en outre que le fait de se conformer à l'injonction contenue dans l'ordonnance du juge des référés de première instance ne la prive en aucune manière du droit de contester cette décision ; que les moyens invoqués par M. A et Mme B sont insusceptibles de répondre à la requête d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales, notamment l'article L. 2121-27-1 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la COMMUNE DE VALENCE et, d'autre part, M. A et Mme B ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 27 avril 2011 à 11 heures, au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la COMMUNE DE VALENCE ;

- le représentant de la COMMUNE DE VALENCE ;

- Me Meier-Bourdeau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A et Mme B ;

Et à l'issue de laquelle l'instruction a été close ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales : Dans les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale. Les modalités d'application de cette disposition sont définies par le règlement intérieur. ;

Considérant que la requête de la COMMUNE DE VALENCE, qui est dirigée contre une ordonnance par laquelle des injonctions lui ont été adressées par le juge des référés de première instance, a, quelles qu'aient été les mesures prises pour appliquer cette ordonnance, un objet et est donc recevable ;

Considérant que la COMMUNE DE VALENCE publie chaque mois un bulletin d'information municipale, intitulé Vu du Kiosque , dans lequel, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, un espace est réservé aux conseillers municipaux qui n'appartiennent pas à la majorité du conseil ; que la commune ayant décidé de publier en outre, à l'occasion d'une réunion organisée le 21 avril dernier, une brochure intitulée Valence 21 engagements du mandat , qui faisait le point des réalisations de la municipalité à mi-mandat, deux conseillers municipaux d'opposition, M. A et Mme B, ont demandé que leur groupe puisse disposer d'un espace dans cette plaquette ; que le maire leur a opposé un refus en faisant valoir qu'ils disposeraient de la possibilité d'exprimer leur point de vue dans le prochain numéro de la publication mensuelle Vu du Kiosque ; que, compte tenu de la périodicité de cette dernière revue, et alors que la brochure litigieuse était proche, tant par son contenu que sa présentation, du bulletin mensuel d'information, le refus du maire ne caractérisait pas, en l'absence de circonstances particulières, une situation d'urgence impliquant, sous réserve que les autres conditions posées par l'article L. 521-2 du code de justice administrative fussent remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale dût être prise dans les quarante-huit heures ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de l'urgence particulière nécessaire à l'exercice par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a accueilli la requête présentée par M. A et Mme B ; que la COMMUNE DE VALENCE est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée et le rejet de la demande présentée au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE VALENCE, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A et Mme B demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A et Mme B la somme que demande la COMMUNE DE VALENCE au titre des mêmes frais ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'ordonnance en date du 14 avril 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A et Mme B devant le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble et leurs conclusions présentées devant le juge des référés du Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la COMMUNE DE VALENCE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE DE VALENCE, à M. A, à Mme B et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 avr. 2011, n° 348653
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bernard Stirn
Avocat(s) : SCP ANCEL, COUTURIER-HELLER, MEIER-BOURDEAU ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 29/04/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 348653
Numéro NOR : CETATEXT000023958601 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-04-29;348653 ?
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