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06/04/2012 | FRANCE | N°349776

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 06 avril 2012, 349776


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 16 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Lionel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1103104 du 16 mai 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du président du conseil général du 16 mars 2011 lui refusant le bénéfice du

revenu de solidarité active ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 16 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Lionel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1103104 du 16 mai 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du président du conseil général du 16 mars 2011 lui refusant le bénéfice du revenu de solidarité active ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et de Me Spinosi, avocat du département des Bouches-du-Rhône,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et à Me Spinosi, avocat du département des Bouches-du-Rhône ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 262-7 du code de l'action sociale et des familles, " pour bénéficier du revenu de solidarité active, le travailleur relevant du régime mentionné à l'article L. 611-1 du code de la sécurité sociale doit n'employer, au titre de son activité professionnelle, aucun salarié et réaliser un chiffre d'affaires n'excédant pas un niveau fixé par décret " ; que la production immobilisée ne doit pas être prise en compte pour le calcul du chiffre d'affaires mentionné à ces dispositions ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Marseille qu'afin d'apprécier, en application des dispositions citées ci-dessus, le chiffre d'affaires de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée de M. A, et pour refuser, en raison de ce que ce chiffre d'affaires dépassait le niveau fixé par décret, de lui attribuer le bénéfice du revenu de solidarité active, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a inclus la production immobilisée dans le chiffre d'affaires ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en estimant que le moyen tiré de ce que le président du conseil général des Bouches-du-Rhône ne pouvait légalement inclure la production immobilisée dans le calcul du chiffre d'affaires n'était pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée en l'état de l'instruction, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin de suspension :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 521-1 que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi de conclusions tendant à la suspension d'un acte administratif, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence nécessitant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, le bilan de l'entreprise de M. A au titre de l'année 2009 fait état de difficultés financières ; que, d'autre part, M. A ne bénéficie pas de revenus non professionnels ; que la décision du président du conseil général est, dès lors, de nature à préjudicier de manière suffisamment grave et immédiate aux intérêts du requérant ; que la condition d'urgence est ainsi satisfaite ;

Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que le président du conseil général des Bouches-du-Rhône ne pouvait légalement intégrer la production immobilisée dans le calcul du chiffre d'affaires de l'entreprise de M. A est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du président du conseil général en date du 16 mars 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que la présente décision implique seulement un réexamen du droit de M. A à l'allocation de revenu de solidarité active, dans un délai d'un mois à compter de sa notification ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 3 000 euros à verser à M. A ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 16 mai 2011 du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au président du conseil général des Bouches-du-Rhône de procéder à un réexamen du droit de M. A à l'allocation de revenu de solidarité active dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : Le département des Bouches-du-Rhône versera à M. A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du département des Bouches-du-Rhône au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Lionel A et au département des Bouches-du-Rhône.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 06 avr. 2012, n° 349776
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Christophe Chantepy
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SPINOSI

Origine de la décision
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Date de la décision : 06/04/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 349776
Numéro NOR : CETATEXT000025641722 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2012-04-06;349776 ?
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