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14/03/2005 | FRANCE | N°262130

France | France, Conseil d'État, 4eme et 5eme sous-sections reunies, 14 mars 2005, 262130


Vu 1°), sous le n° 262130, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2003 et 7 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE, dont le siège est 56, Chemin Joseph Aiguier à Marseille (13297 Cedex 9) ; la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 26 septembre 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a, d'une part, pronon

cé à l'encontre de Mme Maryse la sanction de l'interdiction ...

Vu 1°), sous le n° 262130, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2003 et 7 janvier 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE, dont le siège est 56, Chemin Joseph Aiguier à Marseille (13297 Cedex 9) ; la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 26 septembre 2003 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a, d'une part, prononcé à l'encontre de Mme Maryse la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de deux ans, dont un an avec le bénéfice du sursis et publication pendant un mois, d'autre part, estimé qu'il ne lui appartenait pas de statuer sur la demande de reversement d'honoraires par l'intéressée, au titre du préjudice occasionné par la suractivité de Mme ;

Vu 2°), sous le n° 262148, la requête, enregistrée le 26 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Maryse X, demeurant ... ; Mme X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 septembre 2003 de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins visée ci-dessus ;

2°) de mettre à la charge de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 27 mars 1972 modifié relatif à la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux ;

Vu l'arrêté du 31 juillet 1997 portant approbation de la convention nationale des infirmiers ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Gaëlle Dumortier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boutet, avocat de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE et de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de Mme ,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE et de Mme sont dirigées contre la même décision de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;

Sur la compétence de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 145-8 du code de la sécurité sociale, applicable aux infirmiers en vertu de l'article L. 145-4 du même code : Les dispositions sur le contentieux du contrôle technique des médecins, prévues aux articles L. 145-1 à L. 145-3, L. 145-6 à L. 145-8, R. 145-15 à R. 145-27, sont applicables en cas de fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l'exercice de la profession, relevés à l'encontre des auxiliaires médicaux à l'occasion de soins dispensés aux assurés sociaux ; qu'en vertu de l'article L. 145-1 du même code : Les fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l'exercice de la profession... relevés à l'occasion de soins dispensés aux assurés sociaux, sont soumis en première instance à une section du conseil régional de discipline des médecins... et, en appel, à une section distincte de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins... dite section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins... ; que si la rédaction de ces dispositions a été modifiée par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, cette nouvelle rédaction, instituant une section des assurances sociales spécifique aux infirmiers, n'a pu entrer en vigueur, qu'à compter des élections de l'ensemble des chambres disciplinaires conformément aux dispositions de l'article 74 de ladite loi ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins n'était pas compétente pour prendre la décision attaquée ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'eu égard à la nature des contestations portées devant les sections des assurances sociales, aux conditions de désignation des deux catégories d'assesseurs ainsi qu'aux modalités d'exercice de leurs fonctions qui les soustraient à toute subordination hiérarchique, les membres des juridictions en cause bénéficient de garanties leur permettant de porter, en toute indépendance, une appréciation personnelle sur le comportement professionnel des médecins poursuivis devant les sections des assurances sociales ; que, par suite, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la composition de la juridiction de première instance n'avait pas été de nature à porter atteinte à l'exigence d'indépendance et d'impartialité des juridictions rappelée par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que les attributions du membre de la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre des médecins qui exerce les fonctions de rapporteur ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer et ne lui confèrent pas le pouvoir de décider, par lui-même, de modifier le champ de la saisine de la juridiction ; qu'ainsi, la participation du rapporteur au délibéré, alors même qu'il lui incombe de faire à l'audience un exposé des faits consistant en une présentation de l'affaire, ne méconnaît ni le principe d'impartialité, ni les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le texte de l'exposé de l'affaire présenté à l'audience par le rapporteur, qui peut, au demeurant, ne pas être écrit, n'est pas soumis au principe du contradictoire applicable à l'instruction entre les parties ; que, par suite, en jugeant que, ni la participation du rapporteur au délibéré de la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre des médecins, ni l'absence de communication aux parties de son rapport ne méconnaissaient les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant que si Mme X soutient que l'enquête diligentée par les services de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE a également méconnu les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, c'est sans commettre d'erreur de droit que la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins a estimé que les conditions dans lesquelles ce contrôle s'est déroulé, qui n'entrent pas dans le champ d'application de ces stipulations, étaient sans influence sur la procédure suivie devant le juge disciplinaire ;

Sur la sanction de reversement du trop-remboursé :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'article L. 145-1 du code de la sécurité sociale, rendu applicable aux infirmiers par les articles L. 145-4 et R. 145-8 du même code, donne compétence à la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins pour se prononcer sur les fautes, abus, fraudes et tous faits intéressant l'exercice de la profession relevés à l'occasion des soins dispensés aux assurés sociaux ; qu'aux termes de l'article L. 145-2 du même code, rendu applicable dans les mêmes conditions aux infirmiers : Les sanctions susceptibles d'être prononcées par le conseil régional ou interrégional, par la section spéciale des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins... sont : ... 4°) dans le cas d'abus d'honoraires, ... le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop-remboursé, même s'il n'est prononcé aucune des sanctions prévues ci-dessus ; ... ;

Considérant que si la convention nationale des infirmiers approuvée par arrêté interministériel du 31 juillet 1997 prévoit la définition par les parties signataires d'un seuil annuel d'activité individuelle et le reversement par les professionnels à l'assurance maladie d'une partie du dépassement constaté, les stipulations de cette convention n'ont pas eu pour objet et ne sauraient avoir légalement pour effet de faire obstacle à ce que, dans de telles circonstances, les juridictions du contrôle technique de la sécurité sociale soient saisies et statuent sur les faits susceptibles d'être qualifiés par elles de faute et d'être à ce titre sanctionnés sur le fondement des dispositions des articles L. 145-1 et L. 145-2 du code de la sécurité sociale ;

Considérant toutefois, qu'un tel dépassement d'activité ne saurait, par lui-même, être regardé comme constitutif d'un abus d'honoraires au sens des dispositions du 4° de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale ; que ce motif, qui est d'ordre public, et qui n'implique l'appréciation d'aucun fait, doit être substitué au motif juridiquement erroné retenu par la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins, tiré de son incompétence pour statuer sur la demande de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE tendant, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale, à ce que soit notamment prononcée à l'encontre de Mme , infirmière, la sanction de reversement de la somme de 11 451,65 euros au titre du dépassement d'honoraires, constitué, selon la caisse, par la suractivité de Mme X ;

Sur les autres moyens des requêtes :

Considérant que si Mme affirme que la décision attaquée est entachée d'insuffisance de motivation, d'erreur de qualification juridique et de dénaturation des pièces du dossier soumis aux juges du fond s'agissant des griefs tirés de la suractivité, de la falsification de prescriptions médicale, de la facturation d'actes non réalisés ou non effectués personnellement, de la facturation à tort d'indemnités de déplacement ou de suppléments pour dimanches ou jours fériés, de la facturation d'actes non cotables ainsi que des conditions d'exercices de l'intéressée, ces moyens ne sont pas assortis des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'en estimant que les faits de suractivité et d'irrégularités de facturation reprochés à Mme , dont elle a relevé le caractère massif et répété et qu'elle n'a pas dénaturés, ne pouvaient être amnistiés, la section des assurances sociales, qui a suffisamment motivé sa décision sur ce point, n'a pas inexactement appliqué la loi du 6 août 2002 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme et la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision du 26 septembre 2003 de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE la somme que Mme X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE et de Mme X sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHONE, à Mme Maryse X, au conseil national de l'ordre des médecins et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.


Synthèse
Formation : 4eme et 5eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 262130
Date de la décision : 14/03/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 mar. 2005, n° 262130
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Mme Gaëlle Dumortier
Rapporteur public ?: Mme Roul
Avocat(s) : SCP BOUTET ; SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:262130.20050314
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