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04/03/2009 | FRANCE | N°296069

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 04 mars 2009, 296069


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août 2006 et 1er décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'établissement public de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, dont le siège est 30 avenue Corentin Cariou à Paris (75019) ; la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 1er juin 2006 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a réformé le jugement en fixant les indemnités dues par la société Spie Batignolles TPCI en réparation des

désordres affectant le bâtiment Descartes et l'aquarium, à leur montant...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août 2006 et 1er décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'établissement public de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, dont le siège est 30 avenue Corentin Cariou à Paris (75019) ; la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 1er juin 2006 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a réformé le jugement en fixant les indemnités dues par la société Spie Batignolles TPCI en réparation des désordres affectant le bâtiment Descartes et l'aquarium, à leur montant hors taxe ;

2°) réglant l'affaire au fond, de condamner la société Spie Batignolles TPCI à lui payer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la condamnation mise à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de la société Spie Batignolles TPCI la somme de 3 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts, notamment son article 256 B ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Fontana, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Bouthors, avocat de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, de la SCP Boutet, avocat de la société Sica SA et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Spie Batignolles TPCI venant aux droits de spie citra,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE a conclu des marchés publics en vue de la réalisation d'un bâtiment dénommé « Descartes » d'une part, de trois aquariums d'autre part ; que pour ces deux opérations, la société Spie Citra a été investie d'une mission d'entreprise générale ; que les ouvrages ont été réceptionnés respectivement les 15 janvier 1988 et 27 août 1990 ; que le maître d'ouvrage a constaté, postérieurement à cette réception, l'apparition de désordres rendant les ouvrages impropres à leur destination ; que l'existence de ces désordres a été établie par une expertise ; que le maître d'ouvrage a dès lors recherché la responsabilité des constructeurs devant le tribunal administratif ; que par un jugement du 17 juin 2003, le tribunal administratif de Paris a condamné la société Spie Citra a verser à l'établissement public deux indemnités de 55 580,17, et de 56 764,50 euros toutes taxes comprises, au titre des réparations rendues nécessaires par les malfaçons affectant respectivement le bâtiment « Descartes » et les aquariums ; que la société Spie Batignolles TPCI, venant aux droits de la société Spie Citra, a interjeté appel de ce jugement ; que par un arrêt du 1er juin 2006, la cour administrative d'appel de Paris a réformé ledit jugement en fixant les indemnités dues par l'entreprise générale à leurs montants hors taxes ; que la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre cet arrêt uniquement en tant qu'il procède à cette réformation ;

Sur le pourvoi de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE :

Considérant que le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ses propres opérations ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 256B du code général des impôts : « Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence » ; qu'en l'absence de tout débat entre les parties au cours de l'instruction sur ce point, une personne morale de droit public doit être réputée ne pas être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'activité des services énumérés à cet article ; que par suite, en jugeant que la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE n'établissait pas que les travaux en cause se rapportaient à des opérations pour lesquelles elle ne relèverait pas d'un régime fiscal lui permettant de récupérer cette taxe, et en ne lui accordant en conséquence qu'une indemnité calculée hors taxes, alors que la société Spie Batignolles TPCI ne soutenait pas devant elle que la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE était assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, mais se bornait à relever qu'elle n'apportait pas la preuve de ce qu'elle n'y était pas assujettie, la cour a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'arrêt du 1er juin 2006 en tant qu'il soustrait du montant des indemnités dues par la société Spie Batignoles TPCI à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, le montant de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond dans la mesure de l'annulation prononcée ;

Considérant en premier lieu qu'ainsi qu'il a été dit, le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander la réparation aux constructeurs en raison des désordres affectant l'immeuble qu'ils ont réalisé correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection ; que ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, à moins que le maître de l'ouvrage ne relève d'un régime fiscal qui lui permet normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle dont il est redevable à raison de ces propres opérations ; qu'il résulte des termes de l'article 256B du code général des impôts précité que les personnes morales de droit public ne sont en général pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs ; qu'en l'absence de tout débat entre les parties sur le régime fiscal de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, cet établissement public n'a pas à apporter la preuve de son absence d'assujettissement ; qu'il y a lieu par suite de calculer les indemnités dues à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE toutes taxes comprises ;

Considérant en second lieu que pour le calcul des indemnités dues, il y a lieu de prendre en compte la taxe sur la valeur ajoutée au taux en vigueur à la date à laquelle les travaux ont été payés, ou au taux en vigueur à la date de la décision dans l'hypothèse où ils n'auraient pas encore été réalisés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Spie Batignoles TPCI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE des indemnités taxe sur la valeur ajoutée comprise, au taux de 18,6 % pour les travaux déjà effectués pour un montant de 45 720 euros, au taux de 20,6 % pour les travaux en cours à la date de la décision représentant un montant de 9 860 euros et au taux de 19,6 % pour les travaux de l'aquarium non encore réalisés pour un montant de 56 764 euros ; que les conclusions subsidiaires de la société tendant à ce qu'il soit fait application d'un taux de taxe sur la valeur ajoutée uniforme de 19,6 % doivent par conséquent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que la somme que la société Sica demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante ; qu'il y a lieu en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la société Spie Batignoles TPCI la somme de 3 000 euros que la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 1er juin 2006 est annulé en tant que, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris, il établit hors taxes les indemnités dues par la société Spie Batignolles TPCI à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE.

Article 2 : Les conclusions d'appel de la société Spie Batignoles TPCI tendant à ce que le montant de ces indemnités soit établi hors taxes, subsidiairement en faisant application d'un taux de taxe sur la valeur ajouté égal à 19,6 %, sont rejetées.

Article 3 : La société Spie Batignoles TPCI versera à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Sica SA au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE, à la société anonyme Spie Batignolles TPCI venant aux droits de Spie Citra, à Monsieur Adrien A, à la société mutuelle d'assurance du bâtiment travaux publics SMABTP, à Monsieur Daniel B, à la société Socrate, à la société Sica SA et à la société Axa global risks.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 mar. 2009, n° 296069
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: Mme Agnès Fontana
Rapporteur public ?: M. Dacosta Bertrand
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; BOUTHORS ; SCP BOUTET

Origine de la décision
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 04/03/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 296069
Numéro NOR : CETATEXT000020377572 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-03-04;296069 ?
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