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04/11/2005 | FRANCE | N°274333

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 04 novembre 2005, 274333


Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité Z.I. de Pariacabo à Kourou (97310) ; la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 novembre 2004 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 17 mai 2002 par lequel le tribunal admi

nistratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la...

Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité Z.I. de Pariacabo à Kourou (97310) ; la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 novembre 2004 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 17 mai 2002 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Roura à lui verser une somme de 115 251,46 euros en règlement d'un marché ayant pour objet des travaux de remise en état des rues de cette commune ;

2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de sursis à exécution engagée par elle, de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Cayenne en date du 17 mai 2002 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roura la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Boucher, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE et de la SCP Tiffreau, avocat de la commune de Roura,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux que, par un marché du 4 décembre 1992, la commune de Roura (Guyane) a confié à la société Guyasphalt des travaux de remise en état de sa voirie, pour un montant de 756 000 francs (115 251,46 euros), qui a été mandaté au profit de cette société le 23 avril 1993 ; que, faute toutefois d'obtenir le paiement effectif de la somme en cause, cette société a conclu avec la commune de Roura, le 1er mars 1999, une transaction par laquelle celle-ci s'obligeait à la lui verser en neuf mensualités de 84 000 francs (15 805,72 euros), du 30 mars au 30 novembre 1999 ; qu'aucun paiement n'étant davantage intervenu à la suite de cette transaction, la société Guyasphalt a alors saisi le tribunal administratif de Cayenne d'une demande tendant au paiement de la somme de 756 000 francs (115 251,46 euros), assortie d'une demande de provision d'un même montant ; que, par une ordonnance du 19 octobre 1999, le juge des référés du tribunal administratif de Cayenne a condamné la commune de Roura à verser à la société Guyasphalt, à titre provisionnel, une somme de 300 000 francs (45 734,71 euros) ; que, postérieurement à l'intervention de cette ordonnance, la commune a versé à la société l'intégralité des sommes dont celle-ci revendiquait le paiement, soit 756 000 francs (115 251,46 euros) ; que, toutefois, par un jugement du 17 mai 2002, le tribunal administratif de Cayenne, statuant au principal, a rejeté la demande de la société Guyasphalt, au motif que la transaction du 1er mars 1999 était entachée de nullité, faute pour le maire de Roura d'avoir été autorisé par le conseil municipal de cette commune à la conclure ; que la société Guyasphalt, aux droits de laquelle est venue en cours d'instance, par l'effet d'une déclaration de dissolution sans liquidation souscrite le 23 octobre 2003, la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE, a relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Bordeaux et a demandé au juge des référés de la même cour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à son exécution ; que, par une ordonnance du 2 novembre 2004, le juge des référés, après avoir requalifié les conclusions de la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE comme tendant en réalité à l'application des dispositions de l'article R. 811-17 du même code, les a rejetées au motif que celle-ci ne faisait état d'aucun moyen sérieux en l'état de l'instruction ; que la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE se pourvoit en cassation contre cette dernière ordonnance ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative : (...) le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ;

Considérant qu'il ressortait des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Cayenne que la commune de Roura avait versé à la société Guyasphalt, postérieurement à l'introduction de sa demande devant ce tribunal, l'intégralité des sommes dont elle revendiquait le paiement ; qu'ainsi, la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE est fondée à soutenir qu'en s'abstenant de relever d'office le moyen tiré de ce que, compte tenu de ce versement, qui excédait les obligations incombant à la commune pour l'exécution de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cayenne en date du 19 octobre 1999, ce tribunal avait commis une erreur de droit en omettant de prononcer un non-lieu à statuer sur la demande dont il était saisi, l'auteur de l'ordonnance attaquée a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; qu'elle est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de cette ordonnance ;

Considérant qu'il y a lieu, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de régler l'affaire au titre de la procédure de sursis à exécution engagée par la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE ;

Considérant que l'exécution du jugement du tribunal administratif de Cayenne du 17 mai 2002 implique la répétition, au profit de la commune de Roura, des sommes versées par elle à la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE en règlement des travaux de remise en état de sa voirie réalisés par la société Guyasphalt ; que, compte tenu de la situation financière de la commune, notamment de sa situation de trésorerie très dégradée, qui ferait obstacle, en cas d'infirmation par la cour administrative d'appel de Bordeaux de la solution retenue par les premiers juges, à ce que la société requérante obtienne la restitution effective des mêmes sommes dans un délai raisonnable, et eu égard aux montants en cause, cette société est fondée à soutenir que l'exécution du jugement du 17 mai 2002 risquerait d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables ; qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que le moyen tiré, par la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE, de ce que le tribunal administratif de Cayenne a commis une erreur de droit en omettant de prononcer un non-lieu à statuer sur sa demande, compte tenu du versement par la commune de Roura, en cours d'instance, des sommes demandées, est sérieux en l'état de l'instruction ; qu'il suit de là que la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE est fondée à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Cayenne du 17 mai 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Roura demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Roura la somme de 4 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 2 novembre 2004 est annulée.

Article 2 : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête de la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Cayenne du 17 mai 2002, il sera sursis à l'exécution de ce jugement.

Article 3 : La commune de Roura versera à la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE la somme de 4 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Roura tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LA ROUTIERE GUYANAISE et à la commune de Roura.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 nov. 2005, n° 274333
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Julien Boucher
Rapporteur public ?: M. Boulouis
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER ; SCP TIFFREAU

Origine de la décision
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Date de la décision : 04/11/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 274333
Numéro NOR : CETATEXT000008161731 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-11-04;274333 ?
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