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19/10/2011 | FRANCE | N°335830

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 19 octobre 2011, 335830


Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 22 janvier, 22 avril et 17 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Florence A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA01286 du 15 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0600133 en date du 26 février 2008 par lequel le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la réparation des

préjudices qu'elle a subis du fait des travaux d'extraction de soupe de ...

Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 22 janvier, 22 avril et 17 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Florence A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA01286 du 15 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0600133 en date du 26 février 2008 par lequel le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la réparation des préjudices qu'elle a subis du fait des travaux d'extraction de soupe de corail et de construction de la route de ceinture de l'île de Raiatea, réalisés par le territoire de la Polynésie française et, d'autre part, à la condamnation de la Polynésie française à lui verser une indemnité de 62 100 000 francs CFP soit 512 856 euros, assortie des intérêts légaux, au titre de la dépréciation de son bien immobilier ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler l'article 1er du jugement du tribunal administratif de la Polynésie française en date du 26 février 2008 et de condamner la Polynésie française à lui verser une indemnité de 512 856 euros avec les intérêts et la capitalisation de ceux-ci ;

3°) de mettre à la charge du territoire de la Polynésie française le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la délibération n° 2004-34 du 12 février 2004 de l'Assemblée de la Polynésie française portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de Mme Florence A et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat du président de la Polynésie française,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de Mme Florence A et à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat du président de la Polynésie française ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'une portion de la route de ceinture de la Polynésie française a été édifiée sur une digue construite sur le lagon traversant une anse au droit de la propriété de Mme A ; que celle-ci demande l'indemnisation du préjudice anormal et spécial qu'elle estime avoir subi en raison de la dégradation de ses terrains à la suite de ces travaux en raison en particulier du dimensionnement insuffisant et du défaut d'entretien des ouvrages d'écoulement des eaux sous la digue ; que, par jugement du 26 février 2008, le tribunal administratif de la Polynésie française a partiellement retenu la responsabilité du territoire de la Polynésie française au regard de ces dommages mais a rejeté la demande d'indemnisation en l'absence de preuve de la perte de valeur vénale de la propriété ; que, par l'arrêt attaqué en date du 15 octobre 2009, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ces conclusions indemnitaires pour les motifs qu'en l'absence d'indication sur la destination des terres, d'éléments d'évaluation de la perte de leur valeur vénale, les préjudices invoqués n'étaient pas établis ; qu'elle a en outre écarté l'indemnisation sur le fondement des troubles dans les conditions d'existence dès lors que la requérante ne résidait pas sur la propriété en cause ; que Mme A se pourvoit contre cet arrêt ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport déposé le 14 mars 2007 par l'expert désigné par le tribunal administratif de la Polynésie française que celui-ci, après avoir relevé que, si à l'origine la propriété de Mme A borde un lagon magnifique , à l'heure actuelle les terres sont recouvertes de boue et sont devenues totalement incultes ou marécageuses et inaccessibles , attribue cette dégradation à l'insuffisance et au mauvais entretien des ouvrages d'écoulement des eaux sous la digue, et évalue le coût des travaux permettant la remise en état du site ; que cette évaluation est précisée par un rapport complémentaire établi à la demande de la juridiction ; qu'eu égard aux termes mêmes dans lesquels ces rapports sont rédigés, la cour administrative d'appel de Paris ne pouvait, sans dénaturation, estimer que le préjudice n'était pas établi faute d'indication sur la destination des terres avant la construction de l'ouvrage et d'éléments permettant d'apprécier cette dépréciation en l'absence de transaction ;

Considérant, en second lieu, que s'il est loisible au juge du fond, après avoir retenu l'existence d'un dommage de prévoir si mieux n'aime , que la réparation soit fixée sous la forme de travaux d'aménagement du site, la cour administrative d'appel de Paris ne pouvait, sans entacher sa décision de contradiction de motifs, juger, après avoir écarté l'existence de tout préjudice, que ces préjudices pouvaient être diminués par différents travaux d'aménagement et de réhabilitation du site ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Paris ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du territoire de la Polynésie française en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 15 octobre 2009 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : Le territoire de la Polynésie française versera à Mme A la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Florence A et au territoire de la Polynésie française.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 oct. 2011, n° 335830
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Rémy Schwartz
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Nicolas Boulouis
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON ; SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 19/10/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 335830
Numéro NOR : CETATEXT000024698700 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2011-10-19;335830 ?
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