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01/03/2000 | FRANCE | N°140666

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 01 mars 2000, 140666


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 24 décembre 1992 au secrétariat de la Section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par ELECTRICITE DE FRANCE (EDF), dont le siège social est ... ; ELECTRICITE DE FRANCE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 23 juin 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur recours du ministre du budget, d'une part, remis à la charge d'EDF la moitié de la part communale et la totalité des parts départementale et régionale de la taxe professionnelle à laquelle cet établis

sement public a été assujetti au titre des années 1982 à 1984 à c...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 24 décembre 1992 au secrétariat de la Section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par ELECTRICITE DE FRANCE (EDF), dont le siège social est ... ; ELECTRICITE DE FRANCE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 23 juin 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, sur recours du ministre du budget, d'une part, remis à la charge d'EDF la moitié de la part communale et la totalité des parts départementale et régionale de la taxe professionnelle à laquelle cet établissement public a été assujetti au titre des années 1982 à 1984 à concurrence des sommes dégrevées par le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 22 juin 1990, d'autre part, réformé ledit jugement qui avait accordé à EDF la décharge de la totalité des parts régionale et départementale et de la moitié de la part communale de la taxe professionnelle à laquelle EDF a été assujetti au titre des années 1981 à 1984 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mahé, Auditeur,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat d'ELECTRICITE DEFRANCE,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'exonération de taxe professionnelle :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1465 du code général des impôts : "Dans les zones définies par l'autorité compétente où l'aménagement du territoire le rend utile, les collectivités locales ... peuvent, par une délibération de portée générale, exonérer de la taxe professionnelle en totalité ou en partie les entreprises qui procèdent sur leur territoire ... à des extensions ou créations d'activités industrielles ... Cette délibération ne peut avoir pour effet de reporter l'application du régime d'imposition de droit commun au-delà du 1er janvier de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle sont intervenues ... la création, l'extension ... ou la reprise d'établissements" ; qu'il est précisé au deuxième alinéa que "Lorsqu'il s'agit ... (d') extensions ou (de) créations d'établissements industriels ... répondant à des conditions fixées par décret en tenant compte notamment du volume des investissements et du nombre des emplois créés, l'exonération est acquise sans autre formalité ..." ; qu'aux termes du quatrième alinéa, "l'exonération porte sur l'augmentation nette des bases d'imposition résultant des emplois créés et des immobilisations nouvelles appréciée par rapport à la dernière année précédant l'opération ou par rapport à la moyenne des trois dernières années si celle-ci est supérieure ..." ; qu'aux termes du sixième alinéa, "L'entreprise déclare chaque année les éléments entrant dans le champ d'application de l'exonération. Deux périodes d'exonération ne peuvent courir simultanément" ; que, d'après le septième alinéa de l'article 1465 "L'exonération cesse pour la période restant à courir lorsqu'au cours de cette période, l'entreprise ne remplit plus les conditions exigées pour l'obtention de cette exonération ..." ; qu'aux termes de l'articles 322 J de l'annexe III au code général des impôts, la réalisation des conditions prévues pour pouvoir bénéficier de l'exonération temporaire accordée par application des dispositions de l'article 1465 précité "s'apprécie au 31 décembre de la première année au cours de laquelle l'entreprise a procédé à l'une des opérations mentionnées à cet article. Toutefois, lorsque la période de référence servant à la détermination des bases de taxe professionnelle correspondantes ne coïncide pas avec l'année civile, la réalisation de ces conditions s'apprécie, en ce qui concerne les investissements, à la date de clôture de l'exercice retenu comme période de référence" ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que l'exonération de taxe professionnelle qu'elles prévoient ne porte que sur l'augmentation nette des bases d'imposition, résultant des emplois créés et des immobilisations nouvelles, appréciée à la fin de l'année ou de l'exercice retenu comme période de référence, au cours desquels l'entreprise a procédé à l'une des opérations mentionnées à l'article 1465 et a saisi en conséquence l'administration d'une demande tendant au bénéfice de l'exonération ; que si l'entreprise concernée réalise ultérieurement une nouvelle opération de cette nature, celle-ci n'est susceptible de lui ouvrir droit à exonération que si elle répond aux conditions requises pour ladite exonération et si la période d'exonération précédente est achevée ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'ELECTRICITE DE FRANCE ne pouvait voir l'exonération de la totalité des parts régionale et départementale et de la moitié de la part communale de la taxe professionnelle portant sur les bases d'imposition résultant des opérations d'installation des deux premiers groupes à moteur diesel de la centrale thermique du Vazzio, sise sur le territoire de la commune d'Ajaccio, réalisées au 31 décembre 1981, étendue à l'augmentation des bases d'imposition résultant des nouveaux investissements et des emplois créés dans ladite centrale au cours des années 1982 à 1984 et qu'il convenait, par suite, de limiter l'exonération dont le bien-fondé a été reconnu par le tribunal administratif pour les années 1981 à 1984 à la taxe portant sur les bases d'imposition appréciées au 31 décembre 1981 ;
Sur la compensation :
Considérant qu'aux termes de l'article 310 HA de l'annexe II au code général des impôts : "Pour l'application de la taxe professionnelle ... l'établissement s'entend de toute installation utilisée par une entreprise en un lieu déterminé, ou d'une unité de production intégrée dans un ensemble industriel ou commercial lorsqu'elle peut faire l'objet d'une exploitation autonome ..." ; qu'aux termes de l'article 1478 III du code général des impôts : "Pour les établissements produisant de l'énergie électrique, la taxe professionnelle est due à compter du raccordement au réseau. Ces établissements sont imposés au titre de l'année de raccordement au réseau, d'après les salaires et la valeur locative de cette année ..." ;

Considérant que la cour administrative d'appel a procédé, à la demande du ministre du budget et sur le fondement de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales à la compensation d'une partie des dégrèvements qu'elle a reconnus justifiés par un rehaussement des bases de la taxe professionnelle, afférentes à la centrale thermique du Vazzio, dont elle a admis l'insuffisance ; que cette insuffisance a résulté, selon la cour administrative du fait que les groupes de moteur diesel de cette centrale constituaient chacun une unité de production au sens des dispositions précitées de l'article 310 HA de l'annexe II au code général des impôts et que, par suite, les deux groupes mis en service le 1er janvier 1982 et les deux groupes mis en service le 1er janvier 1984 auraient dû être imposés à la taxe professionnelle respectivement dès les années 1982 et 1984 en application des dispositions précitées de l'article 1478 III du code général des impôts ; qu'il résulte cependant des constatations de fait opérées par la cour administrative que la centrale thermique en cause a été raccordée au réseau à raison de ses deux premiers groupes le 17 août 1981 et que les groupes à moteur diesel qui ont été ultérieurement ajoutés aux deux premiers groupes sont situés dans le même bâtiment que ceux-ci et sont mis en oeuvre par les mêmes personnes ; que, dès lors, ces groupes ne constituaient pas des établissements au sens des dispositions précitées et n'avaient donc pas à être imposés dès l'année de leur mise en service ; que l'établissement public ELECTRICITE DE FRANCE est, par suite, fondé à soutenir que la demande de compensation n'était pas légalement justifiée et à demander l'annulation de la partie de l'arrêt attaqué par laquelle la cour administrative d'appel de Lyon a fait droit à cette demande ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la demande de compensation présentée par l'administration devant la cour administrative d'appel doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à ELECTRICITE DE FRANCE la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par cet établissement public et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 23 juin 1992 est annulé en tant qu'il a accordé à l'administration le bénéfice de la compensation en ce qui concerne la taxe professionnelle due par ELECTRICITE DE FRANCE au titre des années 1982, 1983 et 1984, à raison de la centrale thermique du Vazzio (Corse).
Article 2 : La demande de compensation présentée par le ministre chargé du budget devant la cour administrative d'appel est rejetée.
Article 3 : L'établissement public ELECTRICITE DE FRANCE est déchargé de la totalité des parts régionale et départementale et de la moitié de la part communale de la taxe professionnelle établie au titre des années 1982 à 1984 et afférente aux bases d'imposition correspondant aux opérations d'installation des deux premiers groupes à moteur diesel de la centrale du Vazzio réalisées au 31 décembre 1981.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête d'ELECTRICITE DE FRANCE est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à ELECTRICITE DE FRANCE une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à ELECTRICITE DE FRANCE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Sens de l'arrêt : Annulation partielle rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - EXONERATIONS -CACréation ou extension d'activités industrielles au titre de l'aménagement du territoire - Portée de l'exonération - Augmentation nette des bases d'imposition l'année ou l'exercice au cours desquels l'entreprise procède à l'opération - Opérations mises en oeuvre les années suivantes - Exonération - Conditions - Opérations répondant aux conditions d'emploi et de volume requises et si la période précédente d'exonération est achevée.

19-03-04-03 Il résulte des termes mêmes de l'article 1465 du code général des impôts, qui prévoit un régime d'exonération de taxe professionnelle dans les zones que les nécessités de l'aménagement du territoire justifient pour les entreprises qui créent ou étendent des activités industrielles, et de l'article 322 J de l'annexe III au code que l'exonération de taxe ainsi prévue ne porte que sur l'augmentation nette des bases d'imposition, résultant des emplois créés et des immobilisations nouvelles, appréciée à la fin de l'année ou de l'exercice retenu comme période de référence au cours desquels l'entreprise a procédé à l'opération et saisi en conséquence l'administration d'une demande tendant au bénéfice de l'exonération. Si l'entreprise réalise les années suivantes une nouvelle opération, celle-ci n'est susceptible de lui ouvrir droit à une nouvelle exonération que si elle répond aux conditions requises pour cette exonération (en nombre d'emplois créés et en volume d'investissement) et si la période d'exonération précédente est achevée.


Références :

CGI 1465, 1478
CGI Livre des procédures fiscales L203
CGIAN2 310 HA
CGIAN3 322 J
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 01 mar. 2000, n° 140666
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Mahé
Rapporteur public ?: M. Goulard
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briad, Avocat

Origine de la décision
Formation : 9 / 10 ssr
Date de la décision : 01/03/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 140666
Numéro NOR : CETATEXT000007997086 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-03-01;140666 ?
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