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03/02/2012 | FRANCE | N°342248

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 03 février 2012, 342248


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 5 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, venant aux droits de la société Axa-assurances-Iard-mutuelle, dont le siège est 26 rue Drouot à Paris (75009) ; la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07DA00653 du 3 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, rejeté ses conclusions tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 fév

rier 2007 ayant condamné Mme A, la société Boulevard architecture Le Ha...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 5 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, venant aux droits de la société Axa-assurances-Iard-mutuelle, dont le siège est 26 rue Drouot à Paris (75009) ; la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07DA00653 du 3 juin 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, rejeté ses conclusions tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 février 2007 ayant condamné Mme A, la société Boulevard architecture Le Havre, la société Beguin et Macchini et la société Supae à lui verser conjointement et solidairement une somme de 457 672,17 euros au titre de la réparation des désordres survenus dans la réalisation des travaux de construction du lycée de Saint-Valery-en-Caux et ayant mis à leur charge la moitié des frais d'expertise et, d'autre part, faisant partiellement droit aux conclusions des sociétés Beguin et Macchini et Supae et de Mme A, ramené la somme à laquelle elles ont été condamnées à 214 672,17 euros ;

2°) de mettre à la charge de Mme A et des sociétés Beguin et Macchini et Supae le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Nuttens, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, de la SCP Boulloche, avocat de Mme A et autres et de la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société Supae,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, à la SCP Boulloche, avocat de Mme A et autres et à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société Supae ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la région Haute-Normandie a passé, le 10 juillet 1991, un marché tous corps d'état avec la société Supae pour la construction d'un lycée sur le territoire de la commune de Saint-Valery-en-Caux ; que la maîtrise d'oeuvre du marché a été confiée à un groupement, représenté par Mme A, architecte du cabinet BLD Architecture , et composé en outre de la société Béguin et Macchini, du bureau d'études Auxiba, du bureau d'études Projétud et de la société Economie 80 ; que la région Haute-Normandie a souscrit auprès de la société

Axa-Assurances-Iard-Mutuelle un contrat d'assurance ayant pour objet cette construction ; que par jugement du 23 juillet 2003, confirmé par arrêt du 16 février 2006 de la cour d'appel de Rouen, le tribunal de grande instance de Rouen a condamné la société Axa-Assurance-Iard-Mutuelle au versement à la région d'une indemnisation de désordres apparus sur le lycée à la suite d'infiltrations d'eau ; que la société Axa-Assurances-Iard-Mutuelle, aux droits de laquelle est venue la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, subrogée dans les droits de la région

Haute-Normandie, a saisi le tribunal administratif de Rouen d'une demande tendant à la condamnation conjointe et solidaire de la société Supae, de Mme A, de la société BLD Architecture et de la société Béguin et Macchini à lui verser une somme de 977 458,25 euros avec intérêts au taux légal, correspondant aux sommes mises à sa charge par le tribunal de grande instance de Rouen ; que par jugement du 22 février 2007, le tribunal administratif de Rouen a condamné conjointement et solidairement les constructeurs au versement à la société Axa-Assurances-Iard-Mutuelle de la somme de 457 672,17 euros ; que par l'arrêt attaqué du 3 juin 2010, la cour administrative d'appel de Douai a ramené le montant de cette indemnité à la somme de 214 672,17 euros ;

Sur le pourvoi principal de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD :

Considérant, en premier lieu, que les conclusions d'appel présentées par un intimé doivent être regardées comme constitutives d'un appel principal si elles sont présentées dans le délai d'appel ou, sauf lorsqu'il s'agit d'un appel provoqué, comme constitutives d'un appel incident lorsqu'elles sont présentées hors délai ; que si le respect des délais de recours contentieux est une considération d'ordre public, il n'appartient au juge de relever la méconnaissance de ces délais que lorsqu'elle ressort manifestement des pièces du dossier ; que, dès lors, en l'absence au dossier des accusés de réception de la notification du jugement de première instance à Mme A et à la société Béguin et Macchini, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit, regarder leurs conclusions comme ayant été présentées dans le délai d'appel et les qualifier d'appels principaux ;

Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il procède à une telle qualification, des conclusions dont il est saisi d'appels principaux, incidents ou provoqués, le juge ne peut être regardé comme relevant d'office un moyen d'ordre public mais interprète, conformément à son office, la portée des conclusions dont il est saisi; que, par suite, la cour n'a pas méconnu le caractère contradictoire de la procédure, ni violé le principe d'égalité des armes, en s'abstenant de communiquer préalablement aux parties la qualification d'appel principal des conclusions de Mme A et de la société Béguin et Macchini ;

Considérant, en troisième lieu, que pour juger irrecevable l'appel de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, la cour a fait droit, par des motifs qui ne sont pas contestés en cassation, à une fin de non-recevoir tirée de ce que cette société ne justifiait pas venir régulièrement aux droits de la société Axa-Assurances-Iard-Mutuelle, subrogée dans les droits de la région Haute-Normandie ; que le motif de l'arrêt selon lequel le tribunal administratif de Rouen aurait implicitement fait droit à cette même fin de non-recevoir, en réservant le bénéfice de son dispositif à la société Axa-Assurances-Iard-Mutuelle, est surabondant ; que par suite, les moyens tirés de ce que, par ce dernier motif, la cour aurait commis une erreur de droit et dénaturé le jugement de première instance sont inopérants ;

Considérant, en quatrième lieu, que pour évaluer le quantum du préjudice, la cour s'est prononcée au vu des trois rapports d'expertise soumis aux juges du fond ; que, ce faisant, elle s'est livrée à une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

Considérant, en dernier lieu, que le pourvoi reproche à la cour d'avoir condamné les constructeurs du lycée de Saint-Valery-en-Caux au versement à l'assureur d'une indemnité hors TVA, alors que ce dernier avait indemnisé la région Haute-Normandie d'une somme toutes taxes comprises ; que toutefois la cour n'était saisie d'aucune conclusion tendant à ce que la condamnation de première instance, prononcée hors taxes, soit réformée pour inclure la TVA ; que, par suite, elle n'a pas méconnu le principe de réparation intégrale des préjudices ni les dispositions des articles 256 B et 260 A du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD doit être rejeté ;

Sur le pourvoi incident de la société Boulevard architecture Le Havre :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre a été signé par Mme A, agissant au nom de son cabinet, alors dénommé BLD architecture ; que la société Boulevard architecture Le Havre a été créée postérieurement à la réception des travaux, en vue de reprendre la clientèle et le pas de porte de l'ancien cabinet BLD architecture, et n'a pris aucune part dans l'exécution du marché ; que le dispositif du jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 février 2007 a prononcé la condamnation solidaire des constructeurs, dont BLD architecture, et n'a pas ainsi inclus dans cette condamnation la société Boulevard architecture le Havre, personne morale distincte ; qu'en réformant ce jugement en tant qu'il fixait le montant de la condamnation mise à la charge des constructeurs, l'arrêt contesté n'a pu avoir pour effet d'inclure dans cette condamnation cette société Boulevard architecture Le Havre ;

Considérant, par suite, que la société Boulevard architecture Le Havre n'est pas fondée à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit, d'une part, en ne qualifiant pas d'appel provoqué ses conclusions présentées dans son mémoire en défense après l'expiration du délai d'appel, dès lors que l'arrêt, ainsi qu'il a été dit, ne pouvait avoir pour effet d'aggraver sa situation, et, d'autre part, en ce qu'elle aurait omis de relever que le jugement l'aurait condamnée à tort, lequel ne l'avait pas incluse parmi les constructeurs condamnés à indemniser l'assureur de la région Haute-Normandie ; que son pourvoi incident doit en conséquence être rejeté ;

Considérant qu'il n'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'une part, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés chacune par Mme A et la société Béguin et Macchini, et non compris dans les dépens, et d'autre part, la somme de 2 500 euros au titre des mêmes frais exposés par la société Supae Normandie ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par les sociétés AXA-FRANCE-IARD et Boulevard architecture Le Havre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi principal de la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD et le pourvoi incident de la société Boulevard architecture Le Havre, ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

Article 2 : La SOCIETE AXA-FRANCE-IARD versera les sommes de 1 500 euros à Mme A, de 1 500 euros à la société Béguin et Macchini et de 2 500 euros à la société Supae Normandie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AXA-FRANCE-IARD, à Mme Brigitte A, à la société Béguin et Macchini, à la société Boulevard architecture Le Havre et à la société Supae Normandie


Synthèse
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 342248
Date de la décision : 03/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 fév. 2012, n° 342248
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rémy Schwartz
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Nuttens
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; SCP BOULLOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:342248.20120203
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