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17/06/2009 | FRANCE | N°312417

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 17 juin 2009, 312417


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 janvier et 21 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 5 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 27 janvier 2004 en tant qu'il condamnait la société Rinaldi Structal à lui verser la somme

de 489 433,61 euros et a rejeté ses conclusions à fin de condamnation...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 janvier et 21 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 5 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 27 janvier 2004 en tant qu'il condamnait la société Rinaldi Structal à lui verser la somme de 489 433,61 euros et a rejeté ses conclusions à fin de condamnation de cette société à réparer le préjudice subi par lui du fait des malfaçons affectant les nacelles et les ponts roulants nécessaires aux opérations de nettoyage des surfaces vitrées de l'hôtel du département ainsi que les malfaçons affectant les pare-soleil mobiles de ce bâtiment;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Rinaldi Structal, et, subsidiairement, de condamner solidairement les sociétés Iosis Méditerranée, venant aux droits de la société OTH Méditerranée, Alsop et Lyall, Scic développement, G3A et Bureau Veritas à lui verser la somme de 409 397,88 euros au titre des préjudices subis en raison des dysfonctionnements affectant les nacelles et ponts roulants ;

3°) de mettre solidairement à la charge des sociétés Rinaldi Structal, Iosis Méditerranée, venant aux droits de la société OTH Méditerranée, Alsop et Lyall, Scic développement, G3A et Bureau Veritas la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Auditeur,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la société Besam venant aux droits de la société Faiveley, de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la société Rinaldi Structual, de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SCP BTSG- Becheret-Vautier, de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Dalkia et de la société Somesys, de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la société Alsop et Lyall, de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Veritas, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la société Icade G3A et de la SCP Laugier, Caston, avocat de la société Iosis Méditerranée,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la société Besam venant aux droits de la société Faiveley, à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la société Rinaldi Structual, à la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SCP BTSG- Becheret-Vautier, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Dalkia et de la société Somesys, à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la société Alsop et Lyall, à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Veritas, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la société Icade G3A et à la SCP Laugier, Caston, avocat de la société Iosis Méditerranée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE a fait construire à Marseille un nouvel hôtel du département, achevé en 1994 ; que le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE a délégué la maîtrise d'ouvrage de cette réalisation aux sociétés Scic développement et G3A, maintenant dénommée Icade G3A, et a confié la maîtrise d'oeuvre d'exécution aux sociétés OTH Méditerranée et Alsop et Lyall ; que la société Rinaldi Structal était titulaire d'un lot du marché d'exécution des travaux, visant la fourniture et la pose de portes automatiques, de vitrages, de stores, de volets pare-soleil mobile et de matériel pour le nettoyage des façades extérieures consistant en des nacelles et ponts roulants ; que la réception des travaux a été faite, après levée des réserves, le 5 octobre 1994 avec effet au 31 mai 1994 s'agissant des nacelles et ponts roulants et le 30 mai 1995 avec effet au 30 novembre 1994 s'agissant des pare-soleil ; que des désordres concernant les ponts roulants et nacelles, ainsi que les volets pare-soleil étant apparus, le département a recherché devant le tribunal administratif de Marseille la condamnation des participants à la construction ; que par un jugement du 27 janvier 2004, ce tribunal a condamné les maîtres d'ouvrage délégués et les maîtres d'oeuvre d'exécution à verser la somme de 8 200 euros au DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, la société Rinaldi Structal à lui verser la somme de 489 434 euros et a mis les frais d'expertise, s'élevant à une somme de 66 800 euros, solidairement à la charge de la société Rinaldi Structal, des maîtres d'ouvrage délégués et des maîtres d'oeuvre d'exécution ; que la cour administrative d'appel de Marseille, saisie par la société Rinaldi Structal, a annulé, par un arrêt en date du 5 novembre 2007, les articles du jugement condamnant cette société et rejeté les conclusions du département contre elle présentées tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel par la voie de l'appel incident ; que le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant que c'est par une appréciation souveraine que la cour a, sans dénaturer les pièces du dossier, estimé que les vices dont étaient atteints les nacelles et les ponts roulants étaient apparents et connus du maître de l'ouvrage lors de la réception ; qu'elle a sur ce point suffisamment motivé son arrêt en indiquant que le recours par le département à des moyens alternatifs pour assurer le nettoyage des surfaces vitrées de l'hôtel du département, à une date antérieure à celle de la réception des ouvrages révélait que le département avait connaissance des désordres avant cette réception ; qu'elle n'a pas commis d'erreur de droit, ni dénaturé les pièces du dossier, en ne recherchant pas si les vices affectant ces structures, apparents à la date de réception des travaux, étaient connus dans toute leur ampleur, dès lors que le département ne présentait devant elle aucune argumentation relative à cette question ;

Considérant que la cour a implicitement mais nécessairement rejeté les conclusions fondées sur la garantie décennale des constructeurs, présentées par le département devant le tribunal administratif, en tant que ces conclusions étaient dirigées contre d'autres participants à la construction que la société Rinaldi Structal, dès lors qu'en toute hypothèse elle jugeait que le département ne pouvait se prévaloir de cette garantie au motif qu'il avait connaissance des désordres à la date de réception des ouvrages ;

Considérant que la société Rinaldi Structal a présenté à la cour des conclusions tendant à l'annulation de l'intégralité du jugement en date du 27 janvier 2004 en ce qu'il lui faisait grief ; que par suite la cour n'a pas statué au-delà des conclusions dont la société l'avait saisie en annulant le jugement non seulement en tant qu'il la condamnait à réparer les conséquences des désordres affectant les nacelles et ponts roulants, mais aussi les conséquences de ceux relatifs aux pare-soleil mobiles ; que, cependant, l'arrêt attaqué ne comporte aucun motif au soutien de la partie de son dispositif qui décharge la société de la condamnation mise à sa charge par le tribunal au titre des pare-soleil mobiles ; qu'il est, ainsi, insuffisamment motivé sur ce point, et doit être annulé dans cette mesure seulement ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis par les premiers juges, que l'impossibilité d'orienter les pare-soleil tient à un défaut de conception ; que la réception des travaux est intervenue, après la levée des réserves, le 30 mai 1995 avec effet au 30 novembre 1994 ; que l'évaluation du préjudice par le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE montre que, en raison du vice affectant les pare-soleil, le département a dû recourir à un éclairage supplémentaire des bureaux donnant sur l'atrium 42 mois avant le 31 octobre 1997 soit à partir du 30 avril 1994 ; qu'ainsi les vices affectant les pare-soleil étaient apparents et connus du maître de l'ouvrage lors de la réception ; que dès lors, la société Rinaldi Structal est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que les désordres résultant de ces vices étaient de nature à engager sa responsabilité au titre de la garantie décennale des constructeurs ;

Considérant que si le DEPARTEMENT DES BOUCHES DU RHONE présente, devant le Conseil d'Etat, des conclusions d'appel relatives aux nacelles et ponts roulants dirigées contre les autres intervenants à la construction, ces conclusions, présentées après l'expiration du délai d'appel, constituent des conclusions d'appel provoqué irrecevables car soulevant un litige distinct de celui dont se trouve saisi en appel le Conseil d'Etat par l'effet de la cassation, dès lors que, relatives à la responsabilité de la maîtrise d'ouvrage déléguée et de la maîtrise d'oeuvre au titre de leurs obligations de conseil du maître d'ouvrage à l'occasion de la réception des travaux, elles sont fondées sur une cause juridique différente de celles relatives à la garantie décennale au titre des désordres affectant les pare-soleil ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par la société Rinaldi Structal et non compris dans les dépens ; qu'en revanche ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Rinaldi Structal, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des sociétés Icade G3A, BTSG-Becheret-Vautier, Bureau Veritas, Alsop et Lyall présentées sur le fondement de cet article ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt en date du 5 novembre 2007 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il a statué sur l'indemnisation du DEPARTEMENT DES BOUCHES DU RHONE au titre du préjudice résultant des désordres affectant les pare-soleil mobiles de l'hôtel du département.

Article 2 : Le jugement en date du 27 janvier 2004 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il a condamné la société Rinaldi Structal à verser la somme 80 035,73 euros au DEPARTEMENT DES BOUCHES DU RHONE au titre du préjudice résultant des désordres affectant les pare-soleil mobiles de l'hôtel du département.

Article 3 : La demande du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE tendant à ce que la société Rinaldi Structal soit condamnée à réparer le préjudice résultant des désordres affectant les pare-soleil mobiles de l'hôtel du département ainsi que le surplus de ses conclusions devant la cour administrative d'appel de Marseille et le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 4 : Le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE versera à la société Rinaldi Structal la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions des sociétés Icade G3A, BTSG-Becheret-Vautier, Bureau Veritas, Alsop et Lyall présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 6 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, et aux sociétés Rinaldi Structal, Somesys, Icade G3A, BTSG-Becheret-Vautier, Bureau Veritas et Alsop et Lyall.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 312417
Date de la décision : 17/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2009, n° 312417
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP BARADUC, DUHAMEL ; SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY ; SCP PEIGNOT, GARREAU ; SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE ; SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:312417.20090617
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