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27/02/2006 | FRANCE | N°284349

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 27 février 2006, 284349


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 août et 6 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI LA TILLEULIERE, dont le siège est au Mottier (38260) ; la SCI LA TILLEULIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 août 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, à la demande de la SCI Salzard-Barbier, a suspendu l'exécution de la décision du 23 mai 2005 du maire de la commune de la Côte Saint-André lui accordant un permis de construire ;

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°) statuant comme juge des référés, de rejeter la demande présentée par la SCI...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 août et 6 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI LA TILLEULIERE, dont le siège est au Mottier (38260) ; la SCI LA TILLEULIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 août 2005 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, à la demande de la SCI Salzard-Barbier, a suspendu l'exécution de la décision du 23 mai 2005 du maire de la commune de la Côte Saint-André lui accordant un permis de construire ;

2°) statuant comme juge des référés, de rejeter la demande présentée par la SCI Salzard-Barbier devant le tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de mettre à la charge de la SCI Salzard-Barbier la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Henri Savoie, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SCI LA TILLEULIERE, de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la SCI Salzard-Barbier et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la commune de la Côte-Saint-André,

- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de la commune de la Côte Saint-André :

Considérant que la commune de la Côte Saint-André a intérêt à à l'annulation de l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur les conclusions de la SCI La Tilleulière :

Considérant que le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a, par l'ordonnance attaquée du 2 août 2005, suspendu, à la demande de la SCI Salzard-Barbier, la décision du 23 mai 2005 accordant un permis de construire à la SCI La Tilleulière ; que l'ordonnance attaquée a retenu, en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'en l'état de l'instruction, étaient de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée les moyens tirés de ce que ni le conseil général ni le conseil municipal n'ont donné leur avis sur le projet et de ce que le permis de construire attaqué méconnaît les dispositions des articles UA6, UA10 et UA 11 du plan d'occupation des sols de la commune de la Côte Saint-André ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle se prononce sur l'intérêt pour agir de la SCI Salzard-Barbier :

Considérant que si la SCI La Tilleulière et la commune de la Côte Saint-André soutiennent que la SCI Salzard-Barbier, propriétaire d'une pharmacie, ne justifie d'aucun autre intérêt que celui tiré de la concurrence commerciale que pourrait causer le centre de parapharmacie que doit abriter le bâtiment projeté, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'immeuble appartenant à la SCI Salzard-Barbier, bien que n'ayant pas de vue directe sur le bâtiment projeté, est situé à 60 mètres de ce bâtiment ; qu'ainsi, compte tenu de la proximité des bâtiments en cause, l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée, a pu, sans dénaturer les pièces du dossier et sans commettre d'erreur de droit, regarder la SCI Salzard-Barbier comme justifiant d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation et la suspension du permis de construire attaqué ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle se prononce sur le moyen tiré de ce que ni le conseil général, ni le conseil municipal n'ont donné leur avis sur le projet :

Considérant qu'aux termes du 4ème alinéa de l'article R.421-15 du code de l'urbanisme : « Lorsque la délivrance du permis de construire aurait pour effet la création ou la modification d'un accès d'une voie publique, l'autorité ou le service chargé de l'instruction de la demande consulte l'autorité ou le service gestionnaire de cette voie, sauf lorsque le plan local d'urbanisme ou le document d'urbanisme en tenant lieu réglemente de façon spécifique les conditions d'accès à ladite voirie » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la direction départementale de l'équipement et les services municipaux ont été consultés sur l'aménagement des accès à la voirie départementale et communale ; qu'ainsi le juge des référés a entaché son ordonnance de dénaturation en estimant, qu'en l'état de l'instruction, était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que ni les autorités ni les services gestionnaires des voiries municipales et départementales n'ont donné leur avis sur le projet ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle se prononce sur le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaît l'article UA6 du plan d'occupation des sols :

Considérant qu'aux termes de l'article UA6 du plan d'occupation des sols de la commune de la Côte Saint André : « Dans les séquences urbaines aux façades organisées en ordre continu, les ouvrages ou constructions seront dans tous les cas disposés de manière à assurer la continuité du front de rue … » ;

Considérant que les dispositions précitées du plan d'occupation des sols de la commune de la Côte Saint Andrée ne réglementent pas l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques mais imposent une continuité des façades des immeubles limitrophes ; qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge des référés que la façade du bâtiment projeté est en recul de 2,20 mètres par rapport à l'alignement des façades des bâtiments existants ; qu'ainsi le juge des référés, alors même que l'Architecte des Bâtiments de France aurait suggéré cette implantation, n'a ni dénaturé les pièces du dossier ni commis d'erreur de droit en estimant, qu'en l'état de l'instruction, était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaissait les dispositions de l'article UA6 du plan d'occupation des sols ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle se prononce sur le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaît l'article UA10 du plan d'occupation des sols :

Considérant qu'aux termes de l'article UA10 du plan d'occupation des sols de la commune de la Côte Saint André : « Les constructions en ordre continu sur voie ou destinées à s'insérer dans des séquences urbaines aux façades organisées en ordre continu seront respectivement modifiées ou insérées en respectant une hauteur : / - correspondant sensiblement à la hauteur moyenne du front de rue dans lequel elles sont ou seront situées ; / - ou bien composant avec celles de leurs voisins immédiats » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la construction autorisée devait avoir une hauteur très inférieure à celle des immeubles voisins et à la hauteur moyenne des immeubles composant le front de rue ; qu'ainsi le juge des référés n'a ni dénaturé les pièces du dossier ni commis d'erreur de droit en estimant, qu'en l'état de l'instruction, était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaissait les dispositions de l'article UA10 du plan d'occupation des sols ;

Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle se prononce sur le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaît l'article UA11 du plan d'occupation des sols :

Considérant qu'aux termes de l'article UA11 du plan d'occupation des sols de la commune de la Côte Saint André : « Les autorisations et les déclarations d'occupation du sol seront respectivement refusées ou rejetées, ou bien leur délivrance ou leur acceptation sera subordonnée à l'observation de prescriptions spéciales si les travaux à effectuer ou les constructions à édifier ou modifier ne respectent pas les dispositions suivantes : / - hors les extensions et réhabilitations dont les toitures nouvelles devront composer avec les toitures existantes, les toitures présenteront une pente supérieure à 60% (…) » ;

Considérant que pour désigner comme sérieux le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA11 précité par la décision attaquée, le juge des référés a relevé que la pente de la toiture de la construction autorisée n'était pas supérieure à 60% ; qu'en estimant que la pente de la toiture en question était inférieur à ce taux de 60% et que la construction autorisée ne constituait pas une extension dont la toiture nouvelle composerait avec les toitures existantes et en en déduisant qu'en l'état de l'instruction, était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que le permis de construire méconnaissait les dispositions de l'article UA11 du plan d'occupation des sols, le juge des référés n'a ni dénaturé les pièces du dossier ni commis d'erreur de droit ;

Considérant que si seuls les moyens tirés de ce que le permis de construire méconnaît les articles UA 6, UA 10 et UA 11 du plan d'occupation des sols justifient la mesure de suspension décidée par l'ordonnance attaquée, il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation de cette ordonnance doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Salzard-Barbier qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCI La Thilleulière demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de cet article font également obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de la Côte Saint-André, qui n'a que la qualité d'intervenant, tendant à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Salsard-Barbier la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la SCI La Thilleulière une somme de 2000 euros au titre des frais exposés par la SCI Salzard-Barbier et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'intervention de la commune de la Côte Saint-André est admise.

Article 2 : La requête de la SCI La Tilleulière et les conclusions de la commune de la Côte Saint-André tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La SCI La Tilleulière versera à la SCI Salzard-Barbier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SCI La Tilleulière, au maire de la commune de la Côte Saint André, à la SCI Salzard-Barbier et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 284349
Date de la décision : 27/02/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 2006, n° 284349
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Henri Savoie
Rapporteur public ?: Mlle Verot
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP COUTARD, MAYER ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:284349.20060227
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