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10/03/2006 | FRANCE | N°264098

France | France, Conseil d'État, Section du contentieux, 10 mars 2006, 264098


Vu 1°), sous le n° 264098, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE D'HOULGATE, représentée par son maire ; la COMMUNE D'HOULGATE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, faisant droit à la demande de la société anonyme Groupe Emeraude, annulé le jugement du 11 juillet 2001 du tribunal administratif de Caen et la délibération du 18 août 2000 par laquelle le con

seil municipal de la COMMUNE D'HOULGATE a autorisé son maire à signer la c...

Vu 1°), sous le n° 264098, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE D'HOULGATE, représentée par son maire ; la COMMUNE D'HOULGATE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, faisant droit à la demande de la société anonyme Groupe Emeraude, annulé le jugement du 11 juillet 2001 du tribunal administratif de Caen et la délibération du 18 août 2000 par laquelle le conseil municipal de la COMMUNE D'HOULGATE a autorisé son maire à signer la convention d'exploitation du casino municipal avec la Société d'Exploitation du Casino d'Houlgate (S.E.C.H.) et a approuvé le cahier des charges de la délégation ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par la société anonyme Groupe Emeraude devant la cour administrative d'appel de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de la société anonyme Groupe Emeraude la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 264123, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE, dont le siège est ... ; la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, faisant droit à la demande de la société anonyme Groupe Emeraude, annulé le jugement du 11 juillet 2001 du tribunal administratif de Caen et la délibération du 18 août 2000 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Houlgate a autorisé son maire à signer la convention d'exploitation du casino municipal avec la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE (S.E.C.H.) et a approuvé le cahier des charges de la délégation ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par la société anonyme Groupe Emeraude devant la cour administrative d'appel de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de la société anonyme Groupe Emeraude la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………

Vu 3°), sous le n° 268524, la requête, enregistrée le 9 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE D'HOULGATE, représentée par son maire ; la COMMUNE D'HOULGATE demande au Conseil d'Etat d'ordonner le sursis à exécution de l'arrêt du 21 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement du 11 juillet 2001 du tribunal administratif de Caen et la délibération du 18 août 2000 par laquelle le conseil municipal de ladite commune a approuvé le choix de la Société d'Exploitation du Casino d'Houlgate (S.E.C.H.), comme délégataire de l'exploitation du casino municipal ;

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 24 février 2006, présentées par la COMMUNE D'HOULGATE et la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE à la suite de la séance de jugement du même jour ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 15 juin 1907 modifiée ;

Vu la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 ;

Vu le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 modifié ;

Vu l'arrêté du ministre de l'intérieur du 23 décembre 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Jouguelet, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la COMMUNE D'HOULGATE, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE et de la SCP Gatineau, avocat de la société Groupe Emeraude,

- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de la COMMUNE D'HOULGATE et de la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE (S.E.C.H.) sont dirigées contre un même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même décision ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMMUNE D'HOULGATE a confié en 1991 l'exploitation de son casino municipal à la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE (S.E.C.H.) pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 1992 ; qu'après que, par une délibération du 11 février 2000, le conseil municipal a décidé de recourir à la procédure de délégation de service public pour cette exploitation à compter du 1er avril 2001, le délégataire sortant et la société anonyme Groupe Emeraude ont présenté leurs candidatures qui ont été acceptées, puis chacun a présenté une offre ; qu'après l'avis du 9 juin 2000 de la commission de délégation de service public proposant de ne pas retenir l'offre du Groupe Emeraude, le maire a engagé des négociations avec le seul délégataire sortant, et le conseil municipal a, par une délibération du 18 août 2000, autorisé le maire à signer la convention de délégation avec celui-ci et a approuvé le cahier des charges de la délégation ;

Considérant que la demande de la société Groupe Emeraude tendant à l'annulation de cette délibération a été rejetée par un jugement du 11 juillet 2001 du tribunal administratif de Caen ; que la COMMUNE D'HOULGATE et la S.E.C.H. se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 21 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a annulé le jugement et la délibération du 18 août 2000 ;

Considérant, d'une part, que l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard punit de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende le fait de participer, y compris en tant que banquier, à la tenue d'une maison de jeux de hasard où le public est librement admis ; que l'article 1er de la loi du 15 juin 1907 modifiée dispose toutefois que : par dérogation à l'article 1er de la loi (...) du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard, il pourra être accordé aux casinos des stations balnéaires, thermales ou climatiques (...) l'autorisation temporaire d'ouvrir aux publics des locaux spéciaux, distincts ou séparés où seront pratiqués certains jeux de hasard sous les conditions énoncées dans les articles suivants. Cette autorisation détermine la durée d'exploitation des jeux en fonction de la ou des périodes d'activité de la station ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : Les autorisations sont accordées par le ministre de l'intérieur, après enquête et en considération d'un cahier des charges établi par le conseil municipal./ L'arrêté d'autorisation fixe la durée de la concession ; qu'en vertu de l'article 4 de l'arrêté du 23 décembre 1959 portant réglementation des jeux dans les casinos pris en application du décret du 22 décembre 1959 modifié, la demande d'autorisation doit être adressée par le délégataire retenu par la commune ; que, si les dispositions de la loi du 15 juin 1907 et de ses règlements d'application n'édictent aucune condition dont le respect par le délégataire ouvre droit à l'obtention de l'autorisation d'exploiter des jeux, il appartient au ministre de l'intérieur, dans la mise en oeuvre des pouvoirs qu'il tient de ces dispositions, de veiller à ce que les modalités d'instruction des demandes dont il est saisi n'aient pas pour effet de conduire à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment en limitant de façon excessive l'accès à ce marché ; qu'il en va en particulier ainsi lorsque dans ce secteur des entreprises sont candidates à des délégations de service public ; qu'à ce titre, il incombe au ministre d'opérer une conciliation entre les nécessités de la protection de l'ordre public et les impératifs tenant à la préservation de l'égalité d'accès dans le secteur en cause ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat (...). La commission mentionnée à l'article L. 1411-5 dresse la liste des candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public. La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations (...). Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l'autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire ; qu'il résulte de ces dispositions que la collectivité délégante est tenue d'assurer un traitement égal des candidats qu'elle a retenus au moment de l'examen de leur offre ; que, dans le cas où la délégation de service public porte sur l'exploitation d'un casino et se trouve ainsi soumise également au respect des exigences de la police spéciale des jeux et des conditions posées par la loi du 15 juin 1907 et les textes pris pour son application, l'examen par la commune des offres qui lui sont soumises doit se faire au vu de ces exigences et de ces conditions, ainsi que des modalités d'instruction des demandes d'autorisation d'exploitation définies par le ministre de l'intérieur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à l'époque du renouvellement par la COMMUNE D'HOULGATE de la délégation de l'exploitation du casino municipal, le ministre de l'intérieur, lorsqu'il était saisi d'une demande d'autorisation de jeux par un nouvel exploitant, avait comme pratique constante de lui accorder d'abord une autorisation portant sur les seuls jeux de tables, puis après une année d'exploitation du casino, une autorisation d'exploiter des appareils de jeux automatiques dits machines à sous tandis que l'ancien délégataire du casino qui sollicitait, après avoir été de nouveau choisi par la commune, le renouvellement de son autorisation obtenait, à l'issue du délai d'instruction de sa demande, une autorisation portant sur l'ensemble de ces jeux ; que les services compétents du ministère ont fait savoir à la société Groupe Emeraude, dès le début de la procédure de passation de la délégation de service public, qu'elle serait soumise à cette période « probatoire » d'un an ; que la commune, au vu de cette information reprise par la société dans son offre qui proposait d'indemniser la collectivité de la perte de redevances, a estimé que l'interruption des jeux automatiques serait préjudiciable à l'avenir du service public concédé et a retenu, pour ce motif qui était déterminant, l'offre de la S.E.C.H. délégataire sortant ;

Considérant que l'application à la société Groupe Emeraude d'une période « probatoire » d'un an pour obtenir l'autorisation d'exploiter des appareils de jeux automatiques n'était justifiée ni par les conditions d'exploitation du casino d'Houlgate, ni par des considérations propres à cette société, déjà exploitante d'autres casinos ; qu'elle avait ainsi pour effet, sans justifications suffisantes tirées des nécessités de l'ordre public, de porter atteinte de façon excessive à l'égalité des deux candidats dans la présentation de leurs offres ; que, par suite, en jugeant que la commune, en retenant l'offre de la S.E.C.H. en raison de l'avantage illicite que lui procurait cette pratique, avait méconnu le principe d'égal traitement des candidats, la cour administrative d'appel de Nantes n'a ni commis d'erreur de droit, ni dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la commune et de la S.E.C.H. qui tendent à l'annulation de l'arrêt attaqué, lequel est suffisamment motivé, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au sursis à exécution de l'arrêt attaqué :

Considérant que la présente décision rejette les conclusions de la COMMUNE D'HOULGATE et de la S.E.C.H. tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes ; qu'il n'y a plus lieu, dès lors, de statuer sur la requête n° 268524 de la commune tendant à ce qu'il en soit prononcé le sursis à exécution ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mises à la charge de la société groupe Emeraude, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent la COMMUNE D'HOULGATE et la S.E.C.H. au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la COMMUNE D'HOULGATE le paiement à la société Groupe Emeraude de la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes nos 264098 et 264123 de la COMMUNE D'HOULGATE et de la S.E.C.H. sont rejetées.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 268524 de la COMMUNE D'HOULGATE.

Article 3 : La COMMUNE D'HOULGATE versera à la société Groupe Emeraude la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'HOULGATE, à la SOCIETE D'EXPLOITATION DU CASINO D'HOULGATE, à la société Groupe Emeraude et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - DIVERSES SORTES DE CONTRATS - DÉLÉGATIONS DE SERVICE PUBLIC - EXPLOITATION D'UN CASINO - PRATIQUE CONSTANTE DU MINISTRE DE L'INTÉRIEUR CONSISTANT À DÉLIVRER AUX NOUVEAUX EXPLOITANTS DES AUTORISATIONS EXCLUANT TEMPORAIREMENT LES APPAREILS DE JEUX AUTOMATIQUES ET AUX DÉLÉGATAIRES SORTANTS UNE AUTORISATION PORTANT SUR L'ENSEMBLE DES JEUX - PRATIQUE PORTANT UNE ATTEINTE EXCESSIVE À L'ÉGALITÉ D'ACCÈS AU MARCHÉ DE L'EXPLOITATION DES CASINOS - SAUF JUSTIFICATION PAR LES CONDITIONS D'EXPLOITATION DU CASINO EN CAUSE OU PAR DES CONSIDÉRATIONS TENANT AU CANDIDAT [RJ1] - CONSÉQUENCE - MÉCONNAISSANCE DE CETTE ÉGALITÉ DE TRAITEMENT PAR UNE COMMUNE QUI SE FONDE SUR L'AVANTAGE ILLICITE CONFÉRÉ PAR CETTE PRATIQUE POUR CHOISIR SON DÉLÉGATAIRE.

39-01-03-03 Si les dispositions de la loi du 15 juin 1907 et de ses règlements d'application, qui prévoient le régime d'autorisation d'ouverture de salles de jeux, n'édictent aucune condition dont le respect par le délégataire ouvrirait droit à l'obtention de l'autorisation d'exploiter des jeux, il appartient au ministre de l'intérieur, dans la mise en oeuvre des pouvoirs qu'il tient de ces dispositions, de veiller à ce que les modalités d'instruction des demandes dont il est saisi n'aient pas pour effet de conduire à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment en limitant de façon excessive l'accès à ce marché. Il en va en particulier ainsi lorsque, dans ce secteur, des entreprises sont candidates à des délégations de service public. A ce titre, il incombe au ministre d'opérer une conciliation entre les nécessités de la protection de l'ordre public et les impératifs tenant à la préservation de l'égalité d'accès dans le secteur en cause. La pratique constante consistant à accorder aux nouveaux exploitants d'abord une autorisation portant sur les seuls jeux de tables, puis après une année d'exploitation du casino, une autorisation d'exploiter des appareils de jeux automatiques dits machines à sous tandis que les anciens délégataires de casinos sollicitant, après avoir été de nouveau choisis par la commune, le renouvellement de leur autorisation obtenaient, à l'issue du délai d'instruction de leur demande, des autorisations portant sur l'ensemble de ces jeux, avait pour effet, lorsqu'elle n'était justifiée ni par les conditions d'exploitation du casino en cause ni par des considérations propres aux sociétés candidates, de porter atteinte de façon excessive, sans justifications suffisantes tirées des nécessités de l'ordre public, à l'égalité des candidats dans la présentation de leurs offres. Les communes ne pouvaient donc légalement se fonder sur les avantages illicites conférés par cette pratique pour choisir le candidat attributaire de la délégation d'exploiter le casino.

SPECTACLES - SPORTS ET JEUX - CASINOS - DÉLIVRANCE DES AUTORISATIONS D'EXPLOITER PAR LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR - PRATIQUE CONSTANTE CONSISTANT À DÉLIVRER AUX NOUVEAUX EXPLOITANTS DES AUTORISATIONS EXCLUANT TEMPORAIREMENT LES APPAREILS DE JEUX AUTOMATIQUES ET AUX DÉLÉGATAIRES SORTANTS UNE AUTORISATION PORTANT SUR L'ENSEMBLE DES JEUX - PRATIQUE PORTANT UNE ATTEINTE EXCESSIVE À L'ÉGALITÉ D'ACCÈS AU MARCHÉ DE L'EXPLOITATION DES CASINOS - SAUF JUSTIFICATION PAR LES CONDITIONS D'EXPLOITATION DU CASINO EN CAUSE OU PAR DES CONSIDÉRATIONS TENANT AU CANDIDAT [RJ1] - CONSÉQUENCE - MÉCONNAISSANCE DE CETTE ÉGALITÉ DE TRAITEMENT PAR UNE COMMUNE QUI SE FONDE SUR L'AVANTAGE ILLICITE CONFÉRÉ PAR CETTE PRATIQUE POUR CHOISIR SON DÉLÉGATAIRE.

63-02 Si les dispositions de la loi du 15 juin 1907 et de ses règlements d'application, qui prévoient le régime d'autorisation d'ouverture de salles de jeux, n'édictent aucune condition dont le respect par le délégataire ouvrirait droit à l'obtention de l'autorisation d'exploiter des jeux, il appartient au ministre de l'intérieur, dans la mise en oeuvre des pouvoirs qu'il tient de ces dispositions, de veiller à ce que les modalités d'instruction des demandes dont il est saisi n'aient pas pour effet de conduire à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment en limitant de façon excessive l'accès à ce marché. Il en va en particulier ainsi lorsque, dans ce secteur, des entreprises sont candidates à des délégations de service public. A ce titre, il incombe au ministre d'opérer une conciliation entre les nécessités de la protection de l'ordre public et les impératifs tenant à la préservation de l'égalité d'accès dans le secteur en cause. La pratique constante consistant à accorder aux nouveaux exploitants d'abord une autorisation portant sur les seuls jeux de tables, puis après une année d'exploitation du casino, une autorisation d'exploiter des appareils de jeux automatiques dits machines à sous tandis que les anciens délégataires de casinos sollicitant, après avoir été de nouveau choisis par la commune, le renouvellement de leur autorisation obtenaient, à l'issue du délai d'instruction de leur demande, des autorisations portant sur l'ensemble de ces jeux, avait pour effet, lorsqu'elle n'était justifiée ni par les conditions d'exploitation du casino en cause ni par des considérations propres aux sociétés candidates, de porter atteinte de façon excessive, sans justifications suffisantes tirées des nécessités de l'ordre public, à l'égalité des candidats dans la présentation de leurs offres. Les communes ne pouvaient donc légalement se fonder sur les avantages illicites conférés par cette pratique pour choisir le candidat attributaire de la délégation d'exploiter le casino.


Références :

[RJ1]

Rappr. Section, 30 avril 2003, Syndicat professionnel des exploitants indépendants des réseaux d'eau et d'assainisement, p. 189.


Publications
Proposition de citation: CE, 10 mar. 2006, n° 264098
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Jouguelet
Rapporteur public ?: M. Casas
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY ; SCP GATINEAU ; SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Formation : Section du contentieux
Date de la décision : 10/03/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 264098
Numéro NOR : CETATEXT000008242341 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-03-10;264098 ?
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