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30/01/2012 | FRANCE | N°338239

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 30 janvier 2012, 338239


Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er avril et 30 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09/01249 du 4 février 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Pau a confirmé le jugement du 2 mars 2009 du tribunal départemental des pensions des Hautes-Pyrénées accordant à M. Jean-Claude A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée

de terre, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent de maîtr...

Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er avril et 30 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09/01249 du 4 février 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Pau a confirmé le jugement du 2 mars 2009 du tribunal départemental des pensions des Hautes-Pyrénées accordant à M. Jean-Claude A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée de terre, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent de maître principal de la marine nationale ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ;

Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A,

Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet :

Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 15 avril 2006 au MINISTRE DE LA DEFENSE de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par arrêté du 27 juin 1995 en fonction de l'indice, plus favorable, afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; que, par lettre du 10 mai 2006, le ministre lui a répondu que l'administration recherchait les moyens de donner une suite à sa demande et qu'il en serait tenu informé dès que possible ; qu'en l'absence d'autre réponse, M. A a présenté un recours contre ce qu'il a estimé être un rejet implicite de sa demande, devant le tribunal départemental des pensions des Hautes-Pyrénées qui, par jugement du 2 mars 2009, a fait droit à cette demande ; que, sur appel formé au nom de l'Etat, la cour régionale des pensions de Pau a écarté la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A, et a accordé la revalorisation sollicitée par l'intéressé avec effet au 1er janvier 2003 ;

Considérant que la lettre d'attente adressée par l'administration à M. A le 10 mai 2006 n'a pas été de nature à interrompre ou suspendre le délai au terme duquel, en vertu de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, est née une décision implicite de rejet de sa demande de revalorisation formée le 15 avril 2006, laquelle devait être regardée comme constituant un recours gracieux contre l'arrêté du 27 juin 1995 portant concession de sa pension militaire d'invalidité ; que, par suite, en estimant que M. A était recevable à contester cette décision tacite, de nature à lier le contentieux devant le tribunal départemental des pensions, la cour régionale des pensions de Pau n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que l'administration ne justifiait pas que la notification de l'arrêté du 27 juin 1995 comportât la mention des voies et délais de recours, la cour régionale des pensions en a légalement déduit qu'en l'absence de déclenchement du délai de recours contentieux, M. A restait recevable à demander la réformation de la décision lui ayant concédé sa pension, aux fins d'alignement de son indice sur celui appliqué, à grade équivalent, aux pensionnés de la marine nationale ; qu'un tel motif justifiant légalement la décision de la cour en ce qu'elle écarte la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de M. A, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement contester, comme entaché d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit, le motif surabondant, tenant à ce que la discrimination invoquée par M. A étant de nature à lui causer un préjudice permanent et continu, aucun délai de forclusion ne pouvait, en tout état de cause, être opposé à sa demande de revalorisation ;

Considérant que le moyen, tiré de ce que le principe d'égalité ne ferait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine, n'a pas été invoqué devant la cour régionale des pensions de Pau ; qu'un tel moyen, qui en tout état de cause n'est pas fondé, n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement le soulever au soutien de son pourvoi contre l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE doit être rejeté ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Jean-Claude A.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 338239
Date de la décision : 30/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2012, n° 338239
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: M. Olivier Talabardon
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP CAPRON, CAPRON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:338239.20120130
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