AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance critiquée, rendue en matière de référé et en dernier ressort, que selon lettre de voiture internationale du 13 juillet 2000, la société Transports Collomb (le transporteur) a, à la demande de la société Idéal Speed, commissionnaire de transport (l'expéditeur), acheminé des marchandises depuis l'Italie jusqu'en France pour le compte de la société Panini France, destinataire (le destinataire) ;
que, faute d'avoir été payé par l'expéditeur, le transporteur a, le 10 octobre 2001, assigné le destinataire en paiement d'une provision ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que le transporteur reproche à l'ordonnance d'avoir déclaré son action prescrite, alors, selon le moyen, que dans le cadre d'un transport international de marchandises par route entre l'Italie et la France, les dispositions de la CMR, et notamment celles relatives à la prescription, doivent impérativement recevoir application ; qu'en décidant que l'action directe exercée par le transporteur à l'encontre du destinataire était prescrite en application des dispositions du droit interne, alors pourtant qu'elle avait elle-même constaté que le transport relevait de la CMR et que les dispositions du droit interne ne devaient s'appliquer qu'à titre supplétif pour régir ce qui n'avait pas été prévu par la CMR, le juge des référés a violé l'article 32 de la convention CMR ;
Mais attendu que la Convention internationale de transport routier de marchandises par route du 19 mai 1956, dite CMR, qui régit le transport litigieux, étant muette sur l'action directe du transporteur à l'encontre du destinataire, il convient, par application de l'article 4 de la convention de Rome du 19 juin 1980, de la soumettre à la loi avec laquelle le contrat présente les liens les plus étroits ; que, selon le paragraphe 4 de cet article 4, le contrat de transport est présumé avoir les liens les plus étroits avec le pays dans lequel le transporteur a son établissement principal et où est situé le lieu de chargement ou de déchargement ; qu'ayant relevé que le transporteur avait son siège en France et que la livraison avait eu lieu en France, l'ordonnance a fait à bon droit application de l'article L. 132-8 du Code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 32 de la Convention internationale de transport routier de marchandises par route du 19 mai 1956, dite CMR, et l'article L. 132-8 du Code de commerce ;
Attendu que dans le cadre d'un transport soumis à la Convention du 19 mai 1956, la prescription de l'action directe en paiement des prestations du transporteur à l'encontre du destinataire est soumise aux dispositions de l'article 32 de cette Convention ;
Attendu que pour déclarer prescrite cette action, le juge a fait application de l'article L. 133-6 du Code de commerce ;
Attendu qu'en statuant ainsi, le juge a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance de référé rendue le 16 avril 2002, entre les parties, par le président du tribunal de commerce de Nice ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le président du tribunal de commerce de Cannes ;
Condamne la société Panini France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille quatre.