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11/07/2007 | FRANCE | N°05PA01576

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - formation a, 11 juillet 2007, 05PA01576


Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2005, présentée pour la société IMPACT dont le siège est 120 boulevard Camelina à Malakoff (92240), par Me Marsaudon ; la société IMPACT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9701907/1 du 26 janvier 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2005, présentée pour la société IMPACT dont le siège est 120 boulevard Camelina à Malakoff (92240), par Me Marsaudon ; la société IMPACT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9701907/1 du 26 janvier 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1990 et 1991 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2007 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- les observations de Me Marsaudon, pour la société IMPACT,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que devant le tribunal, la société requérante avait expressément invoqué le moyen tiré de ce qu'elle avait été surimposée de par l'application, à la fraction de ses bases rehaussées constitutive de revenus réputés distribués, du taux d'imposition supérieur à celui de 42 pour 100 alors prévu lorsque le rehaussement avait été distribué ; que les premiers juges se sont toutefois abstenus de répondre à ce moyen opérant en tant que relatif au bien fondé de l'impôt ; que, dans cette mesure, le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé ; qu'il y a lieu, dès lors, pour la cour, de statuer, en premier lieu, par effet dévolutif sur la demande de la société tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés procédant de l'application à ses bases d'imposition non constitutives de revenus réputés distribués, des taux d'imposition respectifs de 37 et 34 pour 100 en vigueur pour les années en cause, en second lieu, par évocation sur sa demande en décharge de la fraction de ces compléments taxés à un taux excédent le pourcentage susrappelé ;

Sur les conclusions en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés résultant de l'application, aux rehaussements de base, des taux de 37 et 34 pour 100 :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant du destinataire de la réponse aux observations du contribuable et de l'avis de la commission départementale des impôts :

Considérant que, par jugements des 24 mars et 23 juin 1993, le Tribunal de commerce de Nanterre a successivement ouvert, à l'égard de la société IMPACT, la procédure simplifiée de redressement judiciaire prévue par les dispositions du titre II de la loi du 25 janvier 1985 et désigné Me Farnier administrateur, chargé d'assister la débitrice dans tous les actes de gestion et de disposition, puis arrêté le plan de redressement en nommant cette dernière commissaire chargée de l'exécution du plan ;

Considérant, d'une part, que si, après le prononcé des jugements susmentionnés, et en l'absence de désignation expresse d'un liquidateur, la société ne pouvait plus être légalement représentée que par sa gérante, de fait chargée de la liquidation, il résulte de l'instruction que Me Farnier, s'est, tout au long de la procédure de contrôle et de redressement, comportée comme l'interlocuteur unique de l'administration ; que, compte tenu des apparences ainsi créées par la contribuable, le service a régulièrement pu adresser la réponse à ses observations en date du 21 janvier 1994 sur la notification de redressements simultanément à ce mandataire ainsi qu'à son siège social ; qu'il n'était pas tenu d'envoyer ce document à l'adresse personnelle de la gérante ;

Considérant, d'autre part, que pour le même motif, le service était fondé à faire parvenir ce seul mandataire l'avis émis le 20 mars 1995 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie, d'ailleurs, sur la propre demande de Me Farnier ;

S'agissant du non respect de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes dudit article : « A l'issue … d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les redressements … , le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements … » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si le principal des droits mis en recouvrement à l'issue de la vérification de comptabilité de la société IMPACT excède celui indiqué dans la notification de redressements du 20 octobre 1993, le total des droits et pénalités mis à la charge de l'intéressée est inférieur à celui résultant des mentions de cette notification ; qu'ainsi les indications du service n'ont pas été de nature à induire la contribuable en erreur et à l'inciter à renoncer à une des garanties de la procédure contradictoire ; que les dispositions précitées n'ont pas été méconnues ;

S'agissant de l'usage fait par le service de son droit de communication :

Considérant que les redressements litigieux procèdent de la réintégration, dans les bases imposables de la société IMPACT au titre des exercices concernés, d'une part, du montant d'honoraires payés à la société Trace, d'autre part, de celui d'avoirs consentis à des tiers ; que la remise en cause de ces déductions résulte des seules constatations du vérificateur en cours de contrôle, dès lors que la société IMPACT avait régulièrement comptabilisé tant les factures d'honoraires que les notes d'avoirs et qu'il lui appartenait d'en justifier la contrepartie ; que le droit de communication antérieurement exercé par le service auprès de la société Eurobail, alors en litige avec la requérante, n'est en conséquence pas à l'origine des redressements, nonobstant l'envoi à l'intéressée, le 23 septembre 1993 soit en cours de vérification, d'une demande de renseignements portant sur la consistance des travaux figurant sur les notes d'avoir ; que la circonstance que la vérification de comptabilité aurait été menée avec le seul administrateur judiciaire est sans incidence ; qu'ainsi l'administration n'était pas tenue de faire état, avant la mise en recouvrement des impositions contestées, des renseignements par elle obtenus dans le cadre de son droit de communication ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, … , notamment : 1°) Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre ... » ;

Considérant que pour l'application de ces dispositions, il appartient toujours au contribuable de justifier tant la réalité et la consistance des charges dont il fait état que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est à dire du principe même de leur déductibilité ;

S'agissant des avoirs :

Considérant que la société IMPACT, dont l'activité consistait en la coordination générale d'installation et d'agencement de magasins, a, au cours des exercices concernés, assuré la maîtrise d'oeuvre de travaux d'installation de nombreux magasins de vente de meubles implantés sur le territoire national par le groupe « Vieux Chêne », gérés en franchise et financés à l'aide de conventions de crédit-bail conclues entre les franchisés du groupe et deux établissements de crédit, les sociétés Eurobail et Pyramides Bail ; qu'après avoir refacturé à ces sociétés de crédit le coût des travaux réalisés par les sous-traitants, puis crédité ses écritures comptables du règlement correspondant, elle émettait, au profit des franchisés bénéficiaires des travaux, des notes d'avoir qu'elle justifiait par l'absence ou le report de réalisation de certains d'entre eux ; qu'enfin il résulte de l'arrêt définitif rendu le 26 mai 2004 par la Cour d'appel de Versailles, statuant en matière correctionnelle, que le montant des travaux figurant sur les factures initiales était évalué en moyenne au double de leur valeur réelle ou était parfois fictif et que ce système de surfacturation systématique permettait à la société IMPACT de rétrocéder aux franchisés par chèques joints aux avoirs une fraction importante de ces sommes, afin de leur permettre de disposer des fonds nécessaires aux formalités d'ouverture des magasins ;

Considérant que la circonstance que le juge pénal ait constaté, au soutien des motifs constituant le support indispensable de sa décision, que pour les années 1989 à 1992 le montant total des avoirs rétrocédés s'était élevé à 207 327 317 F ne dispense pas la société IMPACT, auteur de ces rétrocessions, de justifier que celles-ci ont bien été effectuées dans son intérêt ; que la circonstance, également relevée par le juge pénal, selon laquelle la pratique litigieuse, en fait imposée à la société, « faisait partie intégrante d'un concept unique de surfinancement permettant des redistributions multiples », n'est pas, à elle seule, susceptible d'établir que lesdites rétrocessions ont permis à la contribuable de réaliser le chiffre d'affaires à raison duquel elle a été imposée ; qu'ainsi l'inclusion par le service du montant des avoirs dans ses bases imposables ne constitue pas la taxation d'un bénéfice fictif ;

S'agissant des honoraires versés à la société Trace :

Considérant qu'au titre des exercices 1990 et 1991, la requérante a entendu déduire de ses résultats les sommes respectives de 11 070 000 F et 7 530 000 F facturées par la société Trace avec laquelle elle était liée par un contrat d'assistance commerciale ; que toutefois l'intéressée n'a produit aucun commencement de justification de la consistance des prestations censées avoir été réalisées par cette société ; que la preuve de ces dernières ne saurait résulter des énonciations du jugement pénal, lequel a, au demeurant, estimé que les factures étaient fictives, et que les sommes correspondantes ont été effectivement réglées sur le produit des surfacturations initiales ; que la société n'établit pas que le paiement de ces factures conditionnait la poursuite de son activité et la réalisation de son chiffre d'affaires ; qu'elle ne peut, en conséquence, soutenir qu'elle a été imposée sur un bénéfice fictif ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions susmentionnées ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés résultant de l'application, partielle, aux rehaussements des bases d'imposition, d'un taux supérieur à 42 pour 100 :

Considérant qu'aux termes de l'article 219 du code général des impôts qui fixait notamment à 37 pour 100 le taux de l'impôt sur les sociétés pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1990 et à 34 pour 100 le taux du même impôt pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1991 : « c) Le taux de l'impôt sur les sociétés est porté à 42 pour 100 pour les distributions, au sens du présent code, effectuées par les entreprises au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1989. Pour l'application de l'alinéa précédent, un supplément d'impôt sur les sociétés, égal à 5/58ème du montant net distribué, est dû sur ces distributions à concurrence de la somme algébrique des résultats comptables des mêmes exercices, diminuée des distributions antérieures décidées conformément aux statuts de la société et soumises au supplément d'impôt. Le supplément est également dû sur les sommes réputées distribuées au cours de ces exercices en application des articles 109 à 115 quinquies 1. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1991, le taux du supplément défini à l'alinéa précédent est porté à 8/58ème du montant net distribué, à concurrence de la somme algébrique des résultats comptables de ces mêmes exercices, ainsi que des sommes réputées distribuées… » ; qu'il résulte des dispositions précitées que le législateur a entendu soutenir les entreprises en allégeant l'impôt sur la part des bénéfices qui y demeuraient investis ; qu'en conséquence il a, par principe, maintenu au taux de 42 pour 100 l'imposition du bénéfice distribué sans faire de distinction entre les modalités de distribution de ce bénéfice ; que si, pour le calcul du supplément d'impôt dû à raison des distributions statutaires, il a prévu l'utilisation de coefficients égaux à 5/58ème et 8/58ème du montant net distribué dès lors que la société est en droit de déduire de son résultat comptable pour l'assiette de ce supplément non seulement l'impôt payé au taux normal mais aussi le supplément d'impôt sur les bénéfices distribués, il n'a pas étendu ce mode de calcul aux bénéfices réputés distribués dès lors que l'application de ce taux au montant desdits revenus aboutirait à méconnaître le principe d'imposition de l'ensemble des distributions au taux de 42 pour 100 qu'il a lui-même fixé ; que la société IMPACT, dont il ressort de l'instruction qu'elle a été assujettie aux suppléments d'imposition de 5/58 ème et 8/58 ème, est dès lors fondée à demander à être déchargée de la différence entre les suppléments d'impôt qui lui ont été assignés, au titre des années 1990 et 1991, à raison de la fraction de ses bases correspondant à des revenus réputés distribués, et ceux résultant de l'application aux montants desdits bénéfices du taux d'imposition de 42 pour 100 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à payer à la société IMPACT la somme de 2 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 9701907/1 du 26 janvier 2005 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société IMPACT qui tendaient à la décharge de la surimposition à laquelle elle avait été assujettie, au titre des exercices 1990 et 1991, en conséquence de l'application, à la fraction de ses bases imposables correspondant à des revenus réputés distribués, d'un taux d'imposition excédant le taux de 42 pour 100.

Article 2 : Il est accordé décharge partielle, à la société IMPACT, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices 1990 et 1991, résultant de la surtaxation de la partie de ses bases imposables correspondant à des revenus distribués.

Article 3 : L'Etat paiera à la société IMPACT 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société IMPACT est rejeté.

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N° 05PA00938

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N° 05PA01576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 05PA01576
Date de la décision : 11/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : MARSAUDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-07-11;05pa01576 ?
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