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28/12/2007 | FRANCE | N°06DA01618

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, Formation plénière, 28 décembre 2007, 06DA01618


Vu l'ordonnance n° 298226 du 27 novembre 2006 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour administrative d'appel de Douai le jugement de la requête, enregistrée le 19 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour LA POSTE, dont le siège est 44 boulevard de Vaugirard à Paris (75757), tendant à l'annulation du jugement n° 0200004 du 13 juillet 2006 du Tribunal administratif de Lille ;

Vu la requête susvisée et le mémoire complémentaire, enregistré le 21 février 2007 au greffe de la C

our administrative d'appel de Douai, présentés pour LA POSTE, par la SCP...

Vu l'ordonnance n° 298226 du 27 novembre 2006 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour administrative d'appel de Douai le jugement de la requête, enregistrée le 19 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour LA POSTE, dont le siège est 44 boulevard de Vaugirard à Paris (75757), tendant à l'annulation du jugement n° 0200004 du 13 juillet 2006 du Tribunal administratif de Lille ;

Vu la requête susvisée et le mémoire complémentaire, enregistré le 21 février 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentés pour LA POSTE, par la SCP Granrut Avocats ; LA POSTE demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0200004 du 13 juillet 2006 en tant que par ce jugement le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite de LA POSTE rejetant la demande de M. Yves X tendant à l'établissement d'une liste d'aptitude pour l'accès au corps des inspecteurs de LA POSTE ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;

3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


LA POSTE soutient que le jugement attaqué est entaché d'insuffisance et de contradiction de motifs ; que les premiers juges ont statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis en annulant la décision de LA POSTE en tant qu'elle aurait refusé l'établissement d'un tableau d'avancement alors qu'ils n'avaient été saisis que de conclusions dirigées contre le refus d'établir une liste d'aptitude ; que la mise en oeuvre du droit pour les agents « reclassés » de bénéficier d'une promotion interne est statutairement liée aux possibilités de recrutement par voie de concours dans les corps de reclassement ; que, dès lors que l'absence de postes vacants dans ces corps empêche l'organisation de concours de recrutement, LA POSTE se trouve dans l'impossibilité d'établir des tableaux d'avancement et des listes d'aptitude ; que l'extinction des corps de reclassement résulte de cette impossibilité et non d'une décision de principe à caractère général et définitif prise par
LA POSTE ; que, dans le cadre du dispositif législatif et réglementaire existant, les agents « reclassés » conservent une voie de promotion interne par le biais de la possibilité qui leur est offerte depuis 2001 d'accéder aux corps de classification ; que la voie de promotion ainsi ouverte aux fonctionnaires des corps de reclassement peut être regardée comme au moins équivalente à celle qu'assurerait pour les contrôleurs divisionnaires une promotion dans les corps des inspecteurs ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 22 février 2007 et régularisé par la production de l'original le 26 février 2007, présenté pour M. Yves X, demeurant ..., par la société d'avocats Blondel, Van den Schrieck, Robilliart, Pambo ; M. X conclut au rejet de la requête et à la condamnation de LA POSTE à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il demande en outre à la Cour, par la voie du recours incident, la condamnation de LA POSTE à lui verser une somme de 12 195,92 euros en réparation du préjudice subi du fait de la stagnation de sa carrière consécutive à l'absence d'établissement de tableaux annuels d'avancement et de listes d'aptitude ; il soutient que le fait que LA POSTE ne procèderait plus à des recrutements dans les corps de reclassement n'a pas pour conséquence l'absence d'emplois vacants dans ces corps ; que, contrairement à ce que prétend LA POSTE, le législateur ne l'a en aucun cas contrainte à positionner l'ensemble des emplois vacants sur des grades de reclassification ; que les fonctionnaires demeurés au sein des corps de reclassement ont droit de bénéficier d'un avancement de carrière par voie de promotion interne tout en demeurant dans les corps de reclassement ; que d'ailleurs, LA POSTE organise des conditions d'évolution de carrière normale pour les membres d'autres corps de reclassement que le sien ; que l'existence d'un processus de promotion par intégration dans les corps de reclassification ne saurait dispenser LA POSTE de mettre en oeuvre un mécanisme de promotion au sein des corps de reclassement ; qu'il a subi du fait de l'absence d'établissement de tableaux d'avancement et de listes d'aptitude un préjudice financier résultant de la perte d'une chance d'obtenir une promotion ainsi qu'un préjudice moral important compte tenu de son âge et de sa situation de carrière ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré par télécopie le 19 septembre 2007 et régularisé par la production de l'original le 20 septembre 2007, présenté pour LA POSTE qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et, en outre, au rejet de l'appel incident de M. X ;LA POSTE soutient que M. X ne pouvant justifier d'un droit à accéder à un corps hiérarchiquement supérieur et bénéficiant de voies de promotion interne par la possibilité qui est offerte aux agents reclassés d'accéder aux corps de reclassification, le préjudice qu'il invoque est purement éventuel ;

Vu le mémoire de productions, enregistré le 24 septembre 2007, présenté pour M. X ;


Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2007 par télécopie, par lequel LA POSTE demande le renvoi du jugement de l'affaire à une formation plénière ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 septembre 2007 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 1er octobre 2007, présentée pour LA POSTE ;

Vu la lettre du 30 novembre 2007, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision était susceptible d'être fondée sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes à fin d'indemnité de M. X soulevant un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 décembre 2007, présenté pour M. X ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 décembre 2007, présentée pour LA POSTE ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;

Vu le décret n° 58-777 du 25 août 1958 modifié relatif au statut particulier du corps des inspecteurs des postes et télécommunications ;

Vu le décret n° 64-953 du 11 septembre 1964 modifié relatif au statut particulier du corps des contrôleurs divisionnaires des postes et télécommunications ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2007 à laquelle siégeaient M. André Schilte, président de la Cour, Mme Câm Vân Helmholtz, M. Jean-Claude Stortz et M. Marc Estève, présidents de chambre et M. Alain Dupouy, président-assesseur :

- le rapport de M. Alain Dupouy, président-assesseur ;

- les observations de Me Bellanger pour LA POSTE et de Me Bailly pour M. X ;

- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;


Considérant que M. X, fonctionnaire appartenant au corps des contrôleurs divisionnaires de LA POSTE, a demandé, le 4 octobre 2001, au chef du service départemental de La Poste du Pas-de-Calais l'établissement d'une liste d'aptitude pour l'accès aux corps des inspecteurs de LA POSTE ainsi que le versement d'une indemnité de 80 000 francs (12 195,92 euros) en réparation du préjudice qu'il aurait subi du fait de l'absence d'établissement de tableaux d'avancement et de listes d'aptitude dans les corps dits de « reclassement » ; que, par jugement du 13 juillet 2006, le Tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite de LA POSTE refusant à M. X l'établissement d'un tableau d'avancement et d'une liste d'aptitude en vue d'une promotion interne et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. X ; que LA POSTE relève appel du jugement du 13 juillet 2006 en tant qu'il a annulé la décision implicite de refus d'établissement d'un tableau d'avancement et d'une liste d'aptitude ; que, par la voie de l'appel incident, M. X demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;


Sur la recevabilité de l'appel incident de M. X :

Considérant que les conclusions incidentes de M. X, qui tendent à la condamnation de LA POSTE à l'indemniser du préjudice subi du fait de l'absence de perspectives de promotion au sein des corps de reclassement, soulèvent un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal portant sur la légalité du refus d'établir une liste d'aptitude ; que, dès lors, ces conclusions, présentées postérieurement à l'expiration du délai d'appel, ne sont pas recevables ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, d'une part, que pour annuler la décision implicite de LA POSTE en tant qu'elle a refusé à M. X l'établissement d'une liste d'aptitude, le tribunal administratif a indiqué les motifs de droit pour lesquels il estimait que ce refus méconnaissait l'obligation pour l'administration de garantir pour tous les corps de fonctionnaires des voies de promotion interne, sans que LA POSTE puisse justifier ce refus par l'arrêt des recrutements externes dans les corps de reclassement ; qu'ainsi, LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ; qu'en outre, les premiers juges ont pu, sans entacher leur jugement de contradiction de motifs, décider que l'annulation du refus d'établissement d'une liste d'aptitude n'impliquait pas nécessairement, compte tenu des motifs de cette annulation, l'établissement d'une telle liste et rejeter ainsi les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X ;

Considérant, d'autre part, qu'en annulant la décision implicite de LA POSTE en tant qu'elle aurait refusé à M. X l'établissement d'un tableau d'avancement alors que, dans sa demande du 4 octobre 2001, M. X n'avait sollicité que l'établissement d'une liste d'aptitude en vue d'une promotion dans le corps des inspecteurs de LA POSTE, le tribunal administratif a statué au-delà des conclusions dont il avait été saisi ; que, dès lors, le jugement du 13 juillet 2006 doit, dans cette mesure, être annulé ;

Sur les conclusions de LA POSTE dirigées contre le jugement en tant qu'il a annulé le refus d'établissement d'une liste d'aptitude :

Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : « En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...), mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités
ci-après : 1° Examen professionnel ; 2° Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...) » ; qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 susvisée : « Les personnels de La Poste (...) sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (...) » ; que les dispositions de l'article 2 bis du décret du 25 août 1958 modifié portant statut particulier du corps des inspecteurs des postes et télécommunications ouvrent aux fonctionnaires de LA POSTE appartenant à un corps de niveau équivalent à la catégorie B la possibilité de bénéficier d'une nomination dans le corps des inspecteurs de LA POSTE et de France Télécom, au choix, dans la limite du sixième des titularisations prononcées l'année précédente au titre du recrutement par concours, par voie d'inscription sur une liste d'aptitude dressée après avis de la commission administrative paritaire ;

Considérant que le refus opposé par LA POSTE à la demande de M. X d'établissement d'une liste d'aptitude est fondé sur l'absence de recrutement par concours dans le corps des inspecteurs de LA POSTE rendant impossible, en application des dispositions précitées de l'article 2 bis du décret du 25 août 1958, l'accès à ce corps par voie de promotion ; que, toutefois, si aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à LA POSTE d'organiser des concours pour pourvoir des emplois vacants, il lui appartient, nonobstant les contraintes économiques qu'elle invoque et qui la conduisent à ne plus procéder à des recrutements externes par voie de concours dans les corps de reclassement, d'assurer le maintien des voies de promotion interne prévues par les dispositions susrappelées de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 ; que la possibilité offerte aux agents des corps de reclassement de bénéficier de mesures de promotion dans les corps de reclassification ne saurait dispenser LA POSTE de prévoir des modalités de promotion au sein des corps de reclassement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé sa décision implicite en tant qu'elle refusait à M. X l'établissement d'une liste d'aptitude pour l'accès au corps des inspecteurs de LA POSTE ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n'est pas, dans l'instance présentée par LA POSTE, la partie perdante, la somme que demande l'exploitant public au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;



Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1, de mettre à la charge de LA POSTE le paiement à M. X de la somme de 1 000 euros que demande ce dernier au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0200004 du 13 juillet 2006 du Tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a annulé la décision implicite de LA POSTE en ce qu'elle a refusé à M. X l'établissement d'un tableau d'avancement.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de LA POSTE et l'appel incident de M. X sont rejetés.

Article 3 : LA POSTE versera à M. X une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à LA POSTE et à M. Yves X.

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N°06DA01618


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 06DA01618
Date de la décision : 28/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Stortz
Rapporteur ?: Alain Dupouy
Rapporteur public ?: M. Le Garzic
Avocat(s) : HAAS THOMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-12-28;06da01618 ?
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