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16/10/2007 | FRANCE | N°06DA01679

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 16 octobre 2007, 06DA01679


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bruno X, demeurant ..., par Me Marini ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504688 en date du 10 novembre 2006 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1999, 2000 et 2001 ainsi que des pénalités, restant en litige, y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Il soutie

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- que les années 1999 et 2000 étaient atteintes par la prescription lorsq...

Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bruno X, demeurant ..., par Me Marini ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504688 en date du 10 novembre 2006 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1999, 2000 et 2001 ainsi que des pénalités, restant en litige, y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Il soutient :

- que les années 1999 et 2000 étaient atteintes par la prescription lorsque l'administration a adressé le 30 mars 2004 une notification de redressement mettant en oeuvre la procédure de répression des abus de droit se substituant aux précédentes ; qu'en effet, les premières notifications étaient irrégulières dès lors qu'elles ne comportaient pas les garanties attachées à la procédure d'abus de droit alors que le redressement envisagé ne pouvait être soutenu que par cette procédure ; qu'elles n'ont pu interrompre la prescription contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif ;

- que la réponse aux observations de M. et Mme X ne comportait pas la mention de la faculté qui leur était offerte de saisir le comité consultatif pour la répression des abus de droit alors que cette procédure était mise en oeuvre ; que la circonstance que cette mention ait figuré sur le document adressé à la société est sans incidence dès lors que les redevables de l'impôt sont les associés et qu'ils ont ainsi été privés de leurs droits ;
- qu'ils ont été privés d'un débat oral et contradictoire sur la procédure d'abus de droit puisqu'elle n'était pas envisagée lorsque la vérification de comptabilité de la SCI des Célestins a été menée et qu'aucune autre entrevue avec l'administration n'a eu lieu avant la seconde notification de redressement ; que la chronologie des faits établit qu'aucun débat n'a eu lieu sur ce point ; que le Tribunal ne pouvait estimer que les redressements n'ont pas été modifiés lorsque la procédure d'abus de droit a été mise en oeuvre compte tenu du changement de support juridique des impositions litigieuses ;

- que l'administration n'a pas satisfait la demande de communication des pièces obtenues du syndic de l'immeuble qui étaient mentionnées dans la notification de redressement alors qu'elle devait le faire avant la mise en recouvrement des impositions ;

- que subsidiairement, les impositions ne sont pas fondées ; qu'en effet, les premiers juges n'ont pas tenu compte de la signature d'une offre d'achat près de deux mois avant la date à laquelle l'assemblée générale des copropriétaires avait décidé la réalisation des travaux litigieux à un prix qui ne pouvait tenir compte desdits travaux ; que les travaux étaient ainsi à la charge des acquéreurs ;

- que le caractère fictif des actes n'a pas été invoqué ; que le Tribunal a mal fondé la reconnaissance de l'abus de droit en ne relevant que le but fiscal de l'opération sans préciser qu'il était exclusif de tout autre ; que la formule retenue a été imposée par le vendeur non dans un but fiscal mais afin de ne pas supporter la responsabilité de maître d'ouvrage desdits travaux qui ont d'ailleurs donné lieu à contentieux avec l'entreprise de rénovation ; que la SCI des Célestins est étrangère au « montage » ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2007, présenté pour l'Etat par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie tendant au rejet de la requête ;

Il soutient :

- qu'il appartient au contribuable de justifier de la réalité et de la consistance des charges de la propriété dont il se prévaut pour le calcul de son revenu foncier imposable ;

- que les redressements ont été valablement notifiés dans un premier temps selon la procédure contradictoire, dans un deuxième temps selon la procédure d'abus de droit sous réserve de respecter les garanties de procédure attachées au nouveau fondement légal, ce qui a été fait puisque la notification de redressement substitutive comportait le visa du supérieur hiérarchique du vérificateur et faisait état de la possibilité de saisir le comité consultatif de répression des abus de droit ; que la première notification ne remettait pas en cause la sincérité de l'acte de vente et ne faisait aucun commentaire sur le caractère intentionnel de l'opération d'acquisition réalisée par la SCI Les Célestins mais rejetait les déductions opérées compte tenu de l'absence de précision sur la date des paiements et sur la part de chaque propriétaire, ce qui constituait des motifs suffisants et considérait que ces travaux constituaient une charge augmentative du prix du bien ;

- que la procédure d'abus de droit doit être suivie avec le représentant de la société et non avec chacun des associés ; que la faculté de saisir le comité consultatif pour la répression des abus de droit a été indiquée à la société ; que M. et Mme X auxquels les redressements ont été notifiés selon la procédure contradictoire n'ont été privés d'aucune garantie ;

- que dès lors que la vérification de comptabilité s'est déroulée au siège de l'entreprise, il appartient au contribuable qui soutient avoir été privé de la possibilité d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur d'en apporter la preuve ; que cette preuve n'est pas rapportée ; que les rappels envisagés ont été clairement expliqués au cours des différents entretiens et lors de la réunion de synthèse au siège de la société et en présence de son conseil ;

- que les rappels qui ont été mis en recouvrement ont été fondés sur la seule proposition de rectification du 30 mars 2004 ; que si le contribuable a contesté ces rappels par courrier du
24 avril 2004, aucune demande de communication de documents n'a été formulée à cette occasion ; que, dès lors, et alors même qu'une demande de communication formulée après la première notification serait restée sans réponse, l'absence de renouvellement de cette demande après la notification rectificative ne permet pas au contribuable de se prévaloir d'une irrégularité sur ce point ;

- que l'administration reconnaît qu'il n'y a pas d'abus de droit ; qu'elle demande de substituer la procédure contradictoire à la procédure de répression des abus de droit, ce qui est possible dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente s'agissant de revenus fonciers et prononcera le dégrèvement des pénalités propres à cette procédure ; que les dépenses ne sont pas justifiées ; que seule la partie des charges relative aux parties classées des immeubles classés monuments historiques est déductible du revenu global ; qu'en l'espèce, seuls la façade, la toiture et le jardin de l'immeuble concerné sont inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; que, eu égard à la nature de ces dernières et au descriptif des travaux dans les devis produits, les dépenses envisagées ne concernent manifestement pas les parties classées ; que lesdites dépenses ne pouvaient être déduites du revenu global ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 avril 2007, présenté pour M. X tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et, en outre, par le moyen que l'administration entend revenir à la procédure contradictoire initialement mise en oeuvre ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de communication des documents réclamés dans le cadre de la première notification de redressement, qui n'ont pas été communiqués, est fondé ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 août 2007, présenté pour l'Etat, par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :

- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;


Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 3 avril 2007, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux du Pas-de-Calais a prononcé, au titre de l'année 2001, le dégrèvement, en pénalités, à concurrence d'une somme de 862 euros ; que les conclusions de la requête de M. X relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;


Sur la substitution de base légale :

Considérant que dans le dernier état de ses écritures, l'administration demande de substituer la procédure de redressement contradictoire à celle d'abus de droit sur laquelle étaient fondées les notifications de redressement du 30 mars 2004 ; qu'une telle substitution ne prive en l'espèce le requérant d'aucune garantie dès lors en particulier que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est pas compétente en matière de revenus fonciers ; qu'il y a, dès lors, lieu d'accueillir la demande de substitution présentée par l'administration ;


Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, d'une part, que les moyens tirés de ce que M. X aurait été privé de la possibilité de saisir le comité consultatif pour la répression des abus de droit et qu'il aurait été privé du débat oral et contradictoire sur la mise en oeuvre de la procédure d'abus de droit sont inopérants compte tenu de la substitution de base légale admise par le présent arrêt ;

Considérant, d'autre part, que, par les notifications de redressement du 30 mars 2004, l'administration a substitué la procédure d'abus de droit à la procédure contradictoire initialement menée ; que dans le cadre de cette procédure, il est constant qu'aucune demande de communication du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble dénommé « Chalet de l'impératrice Eugénie » à Vichy, recueillie par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, n'a été présentée ; que la circonstance qu'une telle demande a été présentée après les notifications initiales est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors qu'elle n'a pas été réitérée après l'intervention des notifications de redressement du 30 mars 2004 ; que si dans la présente instance, l'administration a demandé comme il a été dit ci-dessus une substitution de base légale, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur la prescription :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : « Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due.(…) » ;

Considérant que les notifications de redressement adressées à M. ou Mme X le 20 décembre 2002 pour l'année 1999 et le 15 avril 2003 pour l'année 2000 étaient suffisamment motivées pour permettre aux contribuables de contester ces redressements, comme ils l'ont d'ailleurs fait ; qu'ainsi, elles ont valablement interrompu le délai de reprise qui expirait, en vertu de l'article L. 169 du livre des procédure fiscales, le 31 décembre 2002 pour les impositions au titre de 1999 et le 31 décembre 2003 pour l'année 2000 ; que la circonstance que l'administration a adressé le 30 mars 2004 de nouvelles notifications de redressement informant les contribuables qu'elle entendait mettre en oeuvre la procédure d'abus de droit définie à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales n'a pu effacer l'effet interruptif de la prescription attaché aux premières notifications ; que la circonstance que les premières notifications de redressement n'aient pas comporté les garanties attachées à la procédure d'abus de droit, qu'elles ne mettaient pas en oeuvre, est inopérante ;


Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 156-I-3° du code général des impôts : « L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés (…) que possèdent les membres du foyer fiscal sous déduction : I. Du déficit constaté pour une année donnée dans une catégorie de revenus (…) / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (…) / ; 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires de monuments classés monuments historiques, inscrits à l'inventaire supplémentaire ou ayant fait l'objet d'un agrément ministériel (…) » ;

Considérant que la SCI des Célestins, constituée en 1999 par M. et Mme X, a acquis le 29 décembre 1999 des lots d'un immeuble dénommé « le chalet de l'impératrice Eugénie » à Vichy, inscrit à l'inventaire des monuments historiques pour sa façade, sa toiture et son jardin ; que M. X a déduit de son revenu global le déficit de cette opération, lié aux importants travaux réalisés ; que, cependant, il n'apporte aucun élément de nature à établir que lesdits travaux portaient sur les parties de l'immeuble protégées au titre des monuments historiques, seule circonstance de nature à permettre le bénéfice des dispositions précitées de l'article 156-I-3° ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :



Article 1er : A concurrence de la somme de 862 euros en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. Bruno X a été assujetti au titre de l'année 2001, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Bruno X.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. Bruno X est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bruno X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.

N°06DA01679 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06DA01679
Date de la décision : 16/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Brigitte Phémolant
Rapporteur public ?: M. Mesmin d'Estienne
Avocat(s) : MARINI FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2007-10-16;06da01679 ?
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