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10/04/2008 | FRANCE | N°06NC01480

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 10 avril 2008, 06NC01480


Vu le recours enregistré le 21 novembre 2006, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301288 en date du 27 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à la société AM Finances représentée par son liquidateur la SCP Crozat-Barrault-Maigrot, la décharge d'un montant de 1 365 € de l'impôt sur les sociétés dû pour l'exercice clos en 1994, de 20 985,98 € de l'impôt sur les sociétés dû au t

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Vu le recours enregistré le 21 novembre 2006, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301288 en date du 27 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à la société AM Finances représentée par son liquidateur la SCP Crozat-Barrault-Maigrot, la décharge d'un montant de 1 365 € de l'impôt sur les sociétés dû pour l'exercice clos en 1994, de 20 985,98 € de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos en 1995 et de la contribution de 10 % additionnelle à cet impôt ;

2°) de rétablir la société AM Finances au rôle de l'impôt sur les sociétés et de la contribution supplémentaire de 10 % au titre des exercices clos en 1994 et 1995, à raison des droits et pénalités dont la décharge a été prononcée par le Tribunal administratif ;

Le ministre soutient que :

- le jugement qui accorde la décharge des rappels notifiés au titre de l'exercice clos en 1994 et des rappels notifiés au titre d'un redressement de 7 817 € comporte une erreur sur le quantum des sommes en litige ;

- le jugement a omis de statuer sur un moyen de défense tiré de la limitation de la rétroactivité des effets de l'apport partiel d'actif, assimilable à une fusion au sens de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966, à la date d'immatriculation de la société bénéficiaire de l'apport ;

- aucun élément n'atteste de la reprise effective par la SA Etablissements Maurice Agofroy des actes accomplis entre le 30 juin et le 21 novembre 1994 ni que cette société était en formation ;

- la SA Etablissements Maurice Agofroy étant nouvelle au sens de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966, l'apport ne pouvait prendre effet avant la date d'immatriculation au registre du commerce, soit le 21 novembre 1994 ; les opérations réalisées dans la branche d'activité apportée avant cette date ne pouvaient être comptabilisées que par la SA MD Finances, société apporteuse ;

- le jour d'ouverture de l'exercice de la SA Etablissements Maurice Agofroy a été fixé dans les statuts à la date d'immatriculation de la société, soit le 21 novembre 1994, ce qui interdit d'admettre une rétroactivité au 1er juillet 1994, comme l'a fait le jugement attaqué ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 4 juin 2007, présenté pour la SA AM Finances, ayant son siège 24 rue des Vannes à Aix en Othe (10160) représentée par son liquidateur judiciaire la SCP Cozat-Barrault-Maigrot, par Me Poupet ; la société conclut au rejet du recours du ministre et demande que l'Etat lui verse la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens invoqués par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ne sont pas fondés, que l'article L.236-4 du code de commerce ( ancien article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966) n'est applicable qu'aux fusions et non aux scissions, qu'à supposer que cet article s'applique, seul le 2ème paragraphe qui vise les sociétés préexistantes et non les sociétés nouvelles serait applicable, la société Textiles d'Aix ayant été créée antérieurement au contrat d'apport ; que faute de distribution, elle ne peut être imposée sur le fondement de l'article 109-1-1° du code général des impôts ;

Vu le mémoire enregistré le 17 mars 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code du commerce ;

Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ;

Vu la loi n° 88-17 du 5 janvier 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2008 :

- le rapport de Mme Richer, président,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966, désormais codifié à l'article L. 236-4 du code de commerce : La fusion ou la scission prend effet : 1° En cas de création d'une ou plusieurs sociétés nouvelles, à la date d'immatriculation, au registre du commerce et des sociétés, de la nouvelle société ou de la dernière d'entre elles ; 2° Dans les autres cas, à la date de la dernière assemblée générale ayant approuvé l'opération sauf si le contrat prévoit que l'opération prend effet à une autre date, laquelle ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l'exercice en cours de la ou des sociétés bénéficiaires ni antérieure à la date de clôture du dernier exercice clos de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine. ; que doit être regardée comme une société nouvelle au sens de ces dispositions toute société nouvellement constituée en vue de recevoir un apport d'actif dans le cadre d'une fusion ou d'une scission ; que, par suite, nonobstant la volonté des parties de donner un effet rétroactif à l'opération, dans le cas d'une fusion ou d'une scission avec création d'une société nouvellement constituée, les effets de cette fusion ou de cette scission ne peuvent être pris en compte pour la détermination des bénéfices imposables de chacune des sociétés qu'à compter de la date d'immatriculation, au registre du commerce et des sociétés, de la nouvelle société ou de la dernière d'entre elles ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Etablissements Maurice Agofroy successivement devenue société MD Finances , puis société AM Finances , a conclu, le 25 novembre 1994, avec sa filiale la société Textile d'Aix, créée le 9 novembre 1994, une convention d'apport partiel d'actif portant sur l'établissement textile d'Aix-en-Othe ; que cette opération a été placée sous le régime du droit des scissions régi par les articles 382 à 386 de la loi du 24 juillet 1966 ; que la convention stipule que la société bénéficiaire de l'apport, nouvellement dénommée SA Etablissements Maurice Agofroy , reprendra rétroactivement toutes les opérations de l'exploitation du fonds transmis du 30 juin 1994 à la date de la réalisation définitive de l'apport, comme l'y autorise l'article 5 de la loi de 1966 ;

Considérant, en premier lieu, que si la société AM Finances soutient que la société Maurice Agofroy, aux droits de laquelle elle se présente, avait entendu soumettre son apport partiel d'actif aux dispositions des articles 382 à 386 de la loi du 24 juillet 1966, désormais codifiés aux articles L. 236-16 à L. 236-21 du code de commerce, relatives aux scissions de sociétés, ces dernières dispositions n'ont pas pour effet d'exclure l'application de l'article 372-2 précité de la loi du 24 juillet 1966, codifié sous l'article L. 236-4 du code de commerce, pour la détermination de la date d'effet de l'opération ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui est dit ci-dessus, que la société Textile d'Aix, qui n'a été créée que pour recevoir l'apport sus-mentionné résultant de la scission de la société Etablissements Maurice Agofroy, doit être regardée comme une société nouvelle au sens de l'article 372-2 précité ; que, dès lors, nonobstant les stipulations de la convention d'apport, la scission ne pouvait prendre effet, pour la détermination des bases imposables de cette société nouvellement constituée, qu'à compter de la date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, le 21 novembre 1994, conformément au 1° de l'article 372-2 ; que, par suite, c'est à tort que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a retenu comme point de départ du premier exercice imposable de la SA Textile d'Aix, nouvellement dénommée SA Etablissements Maurice Agofroy, la date du 1er juillet 1994 pour accorder à la SA AM Finances la décharge des suppléments d'imposition résultant de la réintégration dans ses résultats imposables des opérations réalisées entre le 1er juillet et le 20 novembre 1994 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par SA AM Finances, tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'aucun redressement n'a été notifié à la SA AM Finances du chef de revenus distribués ; que, par suite, la SA AM Finances ne peut utilement faire valoir qu'un redressement de cette nature n'est pas justifié, faute de distribution ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours, que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à la société AM Finances la décharge, à concurrence de 1 365 €, de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos en 1994, 20 985,98 € de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos en 1995 et de 1 956,38 € au titre de la contribution additionnelle de 10 % à cet impôt due au titre de l'exercice clos en 1995 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que la SA AM Finances demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du 27 juillet 2006 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Les compléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt dont la décharge a été accordée à la société AM Finances par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne au titre des exercices clos en 1994 et 1995 sont remis à la charge de la société AM Finances.

Article 3 : Les conclusions de la SA AM Finances tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et à la société AM Finances.

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N°06NC01480


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE. - ETABLISSEMENT DU BILAN - PRISE D'EFFET DES FUSIONS ET SCISSIONS, EN CAS DE CRÉATION D'UNE SOCIÉTÉ NOUVELLE, À LA DATE D'IMMATRICULATION DE CETTE SOCIÉTÉ (ART. L. 236-4, 1° DU CODE DE COMMERCE) - SOCIÉTÉ NOUVELLE - NOTION - SOCIÉTÉ CRÉÉE POUR BÉNÉFICIER D'UN APPORT PARTIEL D'ACTIF - INCLUSION - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - SOCIÉTÉ IMMATRICULÉE AVANT L'OPÉRATION D'APPORT.

z19-04-01-04-03z Doit être considérée comme une société nouvelle, au sens de l'article L. 236-4 du code de commerce, une société spécialement constituée en vue de recevoir d'une autre société un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions, alors même qu'elle a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés avant la signature du traité d'apport. Il en résulte que les effets de cette scission sont régis, non par les dispositions du 2° de cet article, mais par celles de son 1°. Par application de ces dernières dispositions, nonobstant la clause de rétroactivité contenue dans le traité d'apport, les effets de la scission en question ne peuvent être pris en compte pour la détermination des bénéfices imposables de chacune des sociétés qu'à compter de la date d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de la société nouvellement créée.


Références :

[RJ1]

Comp. CE, 1991-10-11, S.A. Union internationale immobilière, T.,, p. 857.


Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : POUPET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 10/04/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06NC01480
Numéro NOR : CETATEXT000021497043 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-04-10;06nc01480 ?
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