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26/06/2008 | FRANCE | N°06PA01063

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - formation a, 26 juin 2008, 06PA01063


Vu, enregistré au greffe de la cour le 17 mars 2006, l'arrêt du 10 mars 2006 par lequel le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance en date du 8 juillet 2004 de la cinquième chambre de la Cour administrative d'appel de Paris et renvoyé l'affaire devant ladite cour ;

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2004 et régularisée le 28 avril 2006, présentée par M. Mohammad X, demeurant ... par Me Locoh ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9709095/1, 9709096/1, 9709097/1, 9709098/1, 9714427/1, 9714433/1, 9714435/1 en date du 11 décembre 2003 par lequel

le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décha...

Vu, enregistré au greffe de la cour le 17 mars 2006, l'arrêt du 10 mars 2006 par lequel le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance en date du 8 juillet 2004 de la cinquième chambre de la Cour administrative d'appel de Paris et renvoyé l'affaire devant ladite cour ;

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2004 et régularisée le 28 avril 2006, présentée par M. Mohammad X, demeurant ... par Me Locoh ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9709095/1, 9709096/1, 9709097/1, 9709098/1, 9714427/1, 9714433/1, 9714435/1 en date du 11 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 à 1992 et à la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1993 à 1996 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 et entrée en vigueur le 6 septembre 1990 ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2008 :

- le rapport de Mme Lecourbe, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite du contrôle sur pièces de son dossier fiscal portant sur les années 1990 à 1992, le service a réintégré dans le revenu imposable de M. X des salaires non déclarés ; que l'intéressé a contesté les impositions supplémentaires résultant de ces redressements et a demandé à cette occasion la prise en compte, dans son quotient familial, des enfants de sa soeur devenue veuve en 1989 ; qu'il a par la suite demandé également cette prise en compte pour les années 1993 à 1996 ; qu'il relève appel du jugement en date du 11 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti pour les années 1990 à 1992 et à la réduction des cotisations à l'impôt sur le revenu au titre des années 1993 à 1996 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition au titre des années 1990 à 1992 :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : «Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l'article 667 du même code. Les commissions peuvent également être saisies à l'initiative de l'administration. » ; qu'aux termes de l'article L. 59 A du même livre dans sa rédaction applicable : « La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient: 1° Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du code général des impôts ; 2° Lorsqu'il s'agit de différends portant sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du code général des impôts relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du bénéfice des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code précité » ;

Considérant que le différend opposant M. X au service portait sur la qualification juridique des sommes que le contribuable avait perçues de son employeur ; qu'il résulte des dispositions combinées précitées des articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales qu'un tel litige n'entre pas dans la compétence de la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le service a pu, sans entacher la procédure d'imposition, s'abstenir de faire droit à la demande de saisine de ladite commission formulée par M. X, alors même que ce dernier avait été informé au cours de la procédure de ce qu'il aurait la possibilité de demander cette saisine ;

Considérant en deuxième lieu que le moyen tiré de l'absence de communication au contribuable des pièces de son dossier fiscal qu'il avait demandées est inopérant à l'encontre de la régularité de la procédure d'imposition ; que l'est de même le moyen tiré de la violation des dispositions des articles 34, 35 et 36 de la loi susvisée du 6 janvier 1978 qui ont pour objet de régler l'accès des personnes qui le demandent aux données les concernant dans des fichiers informatisés et non de modifier les règles particulières qui régissent la procédure d'imposition à l'impôt sur le revenu ;

Considérant, enfin, que si l'administration est tenue de communiquer au contribuable les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a obtenus d'un tiers et utilisés pour procéder aux redressements, c'est à la condition que l'intéressé en formule la demande ; qu'en réponse à la lettre du 14 mai 1993 par laquelle M. X demandait à ce que le service lui fasse connaître l'ensemble des éléments de son dossier fiscal portant sur les années 1990 et 1991, celui-ci a répondu que les éléments de son dossier étaient relatifs aux montants des salaires versés par son employeur lesquels correspondaient aux montants figurant sur les feuilles de paie des années 1990 et 1991 ; qu'une telle réponse était suffisante dès lors que le contribuable n'a pas expressément demandé à ce que lui soient communiquées les documents obtenus d'un tiers et qui avaient fondés les redressements relatifs auxdites années ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les redressements :

Considérant qu'il y a lieu de rejeter par adoption des motifs retenus par les premiers juges les moyens présentés par M. X à l'encontre des redressements relatifs aux traitements et indemnités ;

En ce qui concerne le quotient familial :

Considérant qu'aux termes de l'article 193 du code général des impôts : « ... le revenu imposable est pour le calcul de l'impôt sur le revenu, divisé en un certain nombre de parts... d'après la situation et ses charges de famille du contribuable. » ;

Considérant, qu'aux termes de l'article 196 du même code : « Sont considérés comme étant à la charge du contribuable, à la condition de n'avoir pas de revenus distincts de ceux qui servent de base à l'imposition de ce dernier : 1° Ses enfants âgés de moins de 18 ans ou infirmes ; 2° sous les mêmes conditions, les enfants qu'il a recueillis à son propre foyer » ;

Considérant que M. X a demandé la prise en compte, pour la détermination du quotient familial applicable des cotisations d'impôt sur le revenu des trois enfants de sa soeur devenue veuve en 1989 et dont il assure l'entretien financier ;

Considérant, d'une part, qu'en se bornant à produire une décision du juge des tutelles pakistanais en date du 27 janvier 2004 déclarée exécutoire en France par un jugement du Tribunal de grande instance de Paris le 24 mai 2006 le nommant tuteur de ses trois neveux, une attestation de son conseil, avocat près la Haute Cour de Lahore, indiquant l'absence de procédure formelle d'adoption au Pakistan et en faisant référence à une cérémonie familiale d'adoption coutumière en 1989, le requérant n'établit pas que ces neveux puissent être regardés comme devenus ses propres enfants pour l'application de l'article 196-1° du code général des impôts ;

Considérant, d'autre part, que dès lors que les neveux de M. X, qui résidait en France au cours des années litigieuses, vivaient alors avec leur mère au Pakistan et qu'il n'est fait état d'aucune circonstance particulière imposant cette séparation, ils ne peuvent être regardés comme recueillis au foyer de leur oncle au sens des dispositions de l'article 196-2° du code général des impôts ;

Considérant, toutefois, que le requérant invoque les stipulations de la convention de New York relative aux droits de l'enfant ainsi que celles de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de l'application de la convention de New York :

Considérant, d'une part, que les stipulations des articles 2, 3-2 et 3-3, 5, 19, 20 et 27 de la convention de New York susvisée comportent seulement des obligations qui incombent aux Etats adhérents et ne peuvent par suite, être invoqués directement par les personnes ; qu'ainsi le moyen invoqué par M. X et tiré de ce que les impositions litigieuses auraient été établies en méconnaissance de ces articles de la Convention relative aux droits de l'enfant est, en tout état de cause, inopérant ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : « 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ;

Considérant que les dispositions de l'article 196 du code général des impôts, qui limitent les conditions dans lesquelles peuvent être regardés comme étant à charge du contribuable au regard de l'impôt sur le revenu les enfants dont ce dernier assure l'entretien ne méconnaissent pas, en tout état de cause, l'intérêt supérieur des enfants eux-mêmes ;

S'agissant de l'application de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de ladite convention : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement... par un tribunal... qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle » ; qu'aux termes de l'article 8 de ladite convention : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation » ; que selon les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. (...) ;

Considérant, en premier lieu, que les litiges relatifs à l'assiette des impôts et taxes ne sont pas visés par les stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en refusant de prendre en compte dans le calcul du quotient familial de M. X les trois enfants de sa soeur, l'administration des impôts n'a pas porté atteinte à la vie privée et familiale du requérant et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de ladite convention ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en interprétant les dispositions de l'article 196 du code général des impôts comme limitant leur bénéfice aux contribuables ayant à charge des enfants adoptés par une procédure opposable aux autorités françaises, le service n'a pas créé, en tout état de cause une discrimination fondée sur un motif religieux contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant en quatrième lieu que l'article 196 du code général des impôts qui se borne à exiger que, pour être considéré à charge d'un contribuable, l'enfant qu'il a recueilli réside au foyer de ce dernier à l'exclusion de tout autre lieu, ne crée, contrairement à ce que soutient le requérant, aucune discrimination, selon que les enfants concernés résident en France ou dans un pays étranger contraire aux stipulations combinées de l'article 14 de la convention et de l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention ;

Considérant, enfin, qu'en se bornant à invoquer le pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques sans préciser en quoi les dispositions de l'article 196 du code général des impôts méconnaîtraient une des stipulations de ce pacte, le requérant ne met pas la cour en mesure d'apprécier le bien fondé de ce moyen ; qu'il en est de même en ce qui concerne la méconnaissance du préambule de la Constitution de 1946 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il y ait lieu de faire application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

2

N° 06PA01063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 06PA01063
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Anne LECOURBE
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : LOCOH

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-06-26;06pa01063 ?
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